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On a conclu de ces expressions que les frais de voyage devaient ne se calculer qu'à partir de ces deux myriamètres, c'est-à-dire que si l'expert avait trois myriamètres à parcourir, on ne devrait lui en allouer qu'un seul. Mais cette interprétation est erronée, ainsi que l'ont reconnu tous les commentateurs du tarif; c'est à partir du domicile de l'expert et non après deux myriamètres de ce domicile qu'il faut compter la distance (1).

C'est également le même domicile qui est pris pour point de départ, quand il s'agit du transport des experts pour aller prêter serment (2).

Enfin les deux myriamètres après lesquels les frais de voyage sont dus se comptent en allant et en revenant. Ainsi un expert domicilié à 18 kilomètres a droit à une indemnité de voyage, parce qu'il a 3 myriamètres 6 kilomètres à parcourir (3).

260. Quand les frais d'expertise ont été taxés, l'homme de l'art en réclame le montant à l'avoué qui lui a fait signifier le jugement et qui a requis la prestation de serment. Si cet avoué ne le paie pas, il se fait délivrer par le greffier du tribunal, au la taxe, un exécutoire pour le montant de la somme qui lui a été allouée.

vu de

Si la partie refuse de payer, l'exécutoire est un titre en vertu duquel l'expert peut faire pratiquer une saisie au préjudice de son débiteur ou prendre une inscription hypothécaire sur ses immeubles.

C'est contre la partie qui a requis l'expertise ou qui l'a poursuivie que l'exécutoire doit être délivré, quand bien même elle aurait gagné son procès. Elle doit payer les frais de cette expertise, sauf son recours contre la partie condamnée aux dépens (4).

Mais la personne contre laquelle l'exécutoire est délivré peut être insolvable. Dans ce cas, l'expert a-t-il un recours solidaire contre les autres parties au procès ?

Si l'expertise avait été sollicitée par toutes les personnes qui ont figuré au procès, ou si elle avait eu lieu dans un intérêt commun, la solidarité ne pourrait faire aucun doute; mais si cette

(1) Chauveau et Godoffre, Commentaire du tarif, n° 1717. Carré de Tours, De la taxe en matière civile, p. 125. Boucher d'Argis, Dictionn. de la taxe

en matière civile, 2o édit., p. 264, no 7.

(2) Dalloz, vo Frais et dépens, no 444.

(3) Nancy, 4 décembre 1879. Bulletin de la taxe des frais et dépens, par G. Dutruc, 1881, p. 9.

(4) Bourges, 9 janv. 1832. Dalloz, Rép., v° Expert, no 263.

expertise n'a été demandée que par l'un des plaideurs ou si elle n'a été faite que dans son intérêt,c'est lui seul qui est obligé visà-vis de l'expert. Et encore le contraire a-t-il été jugé pour le cas où les experts ont été nommés d'office par les tribunaux (1). Prenons encore des exemples: Un médecin réclame en justice une somme de 5,000 francs à titre d'honoraires à un client qui offre seulement 2,000 francs. Le tribunal saisi du litige désigne un ou trois experts à l'effet de donner leurs avis sur la nature et l'importance des soins donnés par le médecin au défendeur et sur le chiffre des honoraires qui peuvent lui être dus, eu égard à la situation des deux parties. Il est clair que l'expertise, quand même elle aurait été sollicitée par l'une d'elles seulement, et que l'autre l'aurait repoussée, est pourtant ordonnée dans leur intérêt commun, puisque, selon les conclusions du rapport, les tribunaux pourront déclarer ou que la demande est justifiée ou que les offres du défendeur sont suffisantes. Dans ce cas, les experts ont une action contre les deux plaideurs pour le paiement de leurs droits et honoraires.

Une personne a été blessée volontairement ou par imprudence, et elle demande, devant les tribunaux civils, réparation du préjudice qui lui a été causé. Il est nécessaire de désigner des experts à l'effet de rechercher quelle a pu être la durée de l'incapacité de travail ou de vérifier s'il existe une infirmité permanente, conséquence du fait imputé au défendeur, et, par suite, quelle est l'indemnité qui doit être allouée. On peut dire encore que l'expertise ordonnée est faite dans l'intérêt des deux parties, les conclusions des hommes de l'art devant avoir pour effet de faire accueillir ou rejeter la demande ou d'en modifier les conséquences.

Il arrivera fort rarement que l'expertise confiée à des médecins ou pharmaciens ne créera pas contre les parties une dette indivisible. La jurisprudence incline dans ce sens (2). On peut dire, en effet, que les experts sont les mandataires directs des juges, qu'ils sont même les mandataires indirects des parties, non seulement quand elles ont requis ou poursuivi l'expertise, mais encore quand elles y ont consenti, ou qu'elle a eu lieu dans leur intérêt. C'est donc seulement au cas où l'expertise, inutile à l'une des parties, aurait été repoussée par elle, que cette partie pourrait refuser d'en payer les frais.

(1) Montpellier, 30 janv. 1840. P. 1840. 1. 573. Rennes, 25 janv. 1844. (2) Cassation, 11 août 1813. - Montpellier, arrêt cité. Douai, 30 mars 1846. P. 1849. 1. 90 Dijon, 11 décembre 1847. P. 1848. 2. 208. Paris, 22 juin 1848. P. 1848. 2. 287. - Grenoble, 13 décembre 1848. P. 1850. 2. 52. 30 avril. 1850. P. 1851. 1. 545.

-Riom,

261. L'ordonnance du président ou du juge délégué qui taxe les honoraires des experts est susceptible d'opposition. Si donc ils estiment qu'ils ne sont pas suffisamment rémunérés et que leur demande d'honoraires a été réduite à tort, ils peuvent constituer un avoué qui instruit leur demande en opposition, et le tribunal statue en chambre du conseil.

262. En matière administrative, les honoraires des médecins doivent être payés d'après le tarif civil. On comprend en effet qu'il faut une règle quelconque pour servir de base à la taxe et qu'autrement on tomberait bien vite dans l'arbitraire.

Il a pourtant été jugé que le tarif du 16 février 1807 n'est pas applicable aux frais devant le conseil de préfecture; que, notamment, les frais et honoraires dus à des experts dans une instance suivie devant le conseil de préfecture, ne doivent pas être taxés d'après ce tarif, mais seulement en prenant pour base l'importance du travail exécuté et les dépenses faites par les experts dans l'étendue de leur mission (1).

263. Quant aux expertises faites dans l'intérêt des particuliers, elles donnent lieu à des honoraires qui ne sont point tarifés et que l'on peut débattre, mais que les tribunaux réduiraient, s'ils paraissaient excessifs.

1) Conseil de préfect. de la Seine, 30 juin 1880. Bulletin de la taxe, 1881, p. 45, et la note.

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§ 1er.

-Fixation des honoraires et du prix des médicaments.

264. Nous avons examiné, dans le chapitre précédent, ce qui concerne les honoraires des médecins et des chimistes ou pharmaciens quand ils sont appelés par la justice ou par l'administration; nous avons maintenant à nous occuper de la rétribution qui leur est due par leurs clients.

L'exercice de la profession médicale n'est point gratuit, et si, dans bien des cas, les médecins, mus par d'honorables scrupules, refusent d'accepter aucune rémunération pour les soins qu'ils ont donnés, c'est pour eux une simple question de conscience abandonnée exclusivement à leur appréciation.

Les études de médecine sont longues et fort coûteuses, il est donc de toute justice qu'elles procurent des moyens d'existence à ceux qui s'y sont livrés. En principe, les médecins ont droit à des honoraires et ils ont une action pour en obtenir le paiement.

265. La loi a tarifé, ainsi que nous l'avons vu, les salaires auxquels ont droit les experts désignés par les autorités, tant en matière civile qu'en matière criminelle; mais les honoraires dus par les malades aux médecins, chirurgiens, officiers de santé et sages-femmes, ne pouvaient, sans arbitraire, être l'objet d'une semblable réglementation.

Dans certaines localités, les médecins ont arrêté entre eux un tarif auquel ils ont pris l'engagement d'honneur de se conformer. Mais ils ne sont point obligés légalement de s'y soumettre, et un pareil tarif, si modéré qu'il soit, ne lie ni les médecins, ni les malades, ni surtout les tribunaux.

266. La loi s'en rapporte, à cet égard, en cas de contestation, à la sagesse du juge, qui prend en considération la gravité de la maladie, la fortune du malade, la situation que le médecin a pu se faire dans le corps médical, les relations antérieures qu'il a eues, soit avec le même malade, soit avec sa famille, pour la fixation d'autres honoraires (1).

Si les médecins doivent se baser, pour fixer le chiffre de leurs honoraires, sur la situation de fortune du malade, ce n'est point par la raison qu'en donnent MM. Briand et Chaudé. D'après ces auteurs, « il est évident que les malades qui appartiennent à une haute classe de la société exigeant plus de soins, de visites, d'as

(1) Paris, 3 germin. an XI. P. chron. Coffinières, Encyclopédie du droit, ve Art de guérir, no 99. — Ortila, Leçons de méd lég., p. 36 et s.

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