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aux Chambres, que le législateur n'a jamais eu l'intention d'en faire une disposition restrictive..

Dans le premier projet du Gouvernement (page 205), l'art. 22, qui portait alors les n° 20 et 21, accordait la foi jusqu'à inscription de faux, aux procès-verbaux écrits en entier et signés par un maire, un adjoint, un commissaire de police, un officier ou maréchal des logis de gendarmerie ou un agent forestier, et par deux gendarmes ou deux gardes forestiers.-Les procès-verbaux des gardes champêtres ou particuliers, ou d'un seul gendarme, ou garde forestier ne faisaient foi que jusqu'à preuve contraire.

Ces articles, adoptés par la Chambre des Pairs, furent remplacés, à celle des Députés, par la disposition qui forme l'art. 22 actuel, moins les gardes forestiers et les gardes-pêche, qui furent, un peu plus tard (page 208), introduits dans l'article, à la Chambre des Pairs.i

On voit comment cette nomenclature s'est formée. Elle a pris naissance dans l'idée primitive d'accorder à la plupart des procès-verbaux de chasse, la foi jusqu'à inscription de faux. Ce desşein, obligeait forcément d'inscrire dans l'article les noms des fonctionnaires dont les procès-verbaux auraient eu cette autorité exceptionnelle; si l'on eût maintenu le droit commun, c'est-à-dire la foi seulement jusqu'à preuve contraire, il eût suffi d'indiquer les rédacteurs des procès-verbaux d'une manière générale comme dans l'article de la Commission des Pairs (page 205). La Commission des Députés n'a pas adopté cette dernière rédaction; elle s'est contentée de retirer de l'article la foi jusqu'à inscription de faux, et elle y a laissé une nomenclature en partie inutile, puisqu'à l'exception des verbaux des gardes forestiers ou de pêche, ceux des autres agents ou gardes n'ont jamais fait foi que jusqu'à preuve contraire.

JnJe crois donc être fondé à soutenir que les procès-verbaux des fonctionnaires non compris dans l'art. 22, mais chargés de la police judiciaire par les art. 9 et 10 du Code d'instruction criminelle continueront de faire foi jusqu'à preuve contraire en matière de chasse.

Avec l'opinión ópposée on arriverait à une conséquence assez étranges, c'est que les procès-verbaux du juge d'instruction luimême, ne vaudraient que comme simples renseignements.

-Ha été déclaré, avec toute l'autorité possible dans la discussion (page 145), que le délit de détention, à domicile, de filets ou en

gins prohibés, ne pourrait, hors le cas de flagrant délit, être constaté que par le juge d'instruction ou en vertu d'une délégation de sa part.

Mais le nom de ce magistrat ne se trouve pas dans l'art. 22. Donc, suivant M. Petit, il se trouve exclus en ce qui concerne la constatation des délits de chasse. Cependant son procès-verbal constatant une saisie de filets importante est dressé : le juge d'instruction et son greffier, ou les gendarmes d'escorte, seront-ils entendus comme témoins à l'appui de ce procès-verbal inopérant? Ou faudra-t-il que le juge se munisse de témoins ad hoc? Et je dois encore, dans le même cas, faire remarquer une bizarrerie non moins choquante. Lorsque le procès-verbal du juge d'instruction constatant une saisie de filets, etc., ne vaudrait que comme renseignement, le garde champêtre de la commune, qui aurait poursuivi jusqu'en sa demeure un braconnier trouvé muni d'un filet, constaterait cette détention par un procès-verbal faisant foi jusqu'à preuve contraire.

Après ces fonctionnaires, qui ont un pouvoir de constatation général, viennent quelques autres agents spéciaux qui me paraissent aussi pouvoir constater les délits de chasse (ceux toutefois exceptés qui concernent le colportage du gibier, art. 4):- Les agents forestiers, c'est-à-dire les conservateurs, inspecteurs, sous-inspecteurs des forêts, les arpenteurs forestiers (1), les ingénieurs forestiers (2), dans les forêts et bois soumis au régime forestier (3).

Les simples agents de police, appariteurs, sergents de ville, inspecteurs de police, veilleurs de nuit, n'ayant qualité que pour” faire de simples rapports, ne peuvent constater un délit de chasse (4).

Gendarmerie. L'art. 22 ne fait mention nominativement que des officiers et sous-officiers de gendarmerie, brigadiers et gendarmes, et ne parle pas des militaires de la Garde municipale de Paris, non plus que de la gendarmerie spécialement instituée pour la Corse, sous le nom de Voltigeurs Corses. Cette omission n'empê

(1) Dit Journ. crim., p. 289, 291.

(2) Ordonnance du 12 fév. 1840. (3) Code forestier, art. 1er.

(4) 7 août 1829, Dz.P.29.1.330; 13 mai 1831, Dz.P.31.1.270; 14 juill. 1838, et 30 mars 1839, Journ. crim., no 2335 et 2365; 18 oct. 1839, Dz.P.40.1.380.

che pas, suivant moi, ces militaires d'avoir qualité pour constater les délits de chasse reconnus dans l'étendue de leur service. Je crois avoir démontré (1) que, sous le rapport de la police judiciaire, la Garde municipale de Paris devait être complétement assimilée à la gendarmerie royale, et qu'elle en avait tous les pouvoirs. Ainsi, les gardes municipaux verbaliseront légalement, des délits qu'ils auront pu reconnaître, c'est-à-dire de la vente, du colportage, etc., du gibier, leur service étant renfermé dans la ville de Paris proprement dite. Pour les Voltigeurs Corses, dont le service, dans le département de ce nom, est le même (2) que celui de la gendarmerie, ils ont qualité pour constater tous les délits prévus par la présente loi.

En accordant la foi jusqu'à preuve contraire aux procès-verbaux de la gendarmerie en matière de chasse, l'art. 22 met fin à toute controverse sur ce point, déjà réglé, cependant, dans le même sens, par la jurisprudence (3).

Quoique l'article, après avoir parlé des officiers, sous-officiers et brigadiers de gendarmerie, au singulier, fasse mention des gendarmes au pluriel, un gendarme seul n'en a pas moins qualité pour constater un délit de chasse, et son procès-verbal n'en fait pas moins foi jusqu'à preuve contraire. Les termes de la loi sont purement énonciatifs et ne peuvent, à cet égard, déroger aux principes antérieurs confirmés par une jurisprudence constante (4). D'ailleurs, l'article dit également les gardes champêtres, les gardes particuliers, et l'on ne contestera pas à un garde seul le droit de verbaliser en matière de chasse.

Outre les gardes champêtres titulaires des communes, il existe, temporairement, dans certaines localités, des gardes adjoints, sous le nom de gardes messiers, gardes vignes. Ce sont des citoyens nommés (5) et assermentés pour aider les gardes ordinaires en

(4) Journ. crim., loc. cit., p. 298. Voir aussi un arrêt de Cass. du 12 juill. 1838 (Bull. no 205), qui assimile un garde municipal à un gendarme, pour la compétence, relativement aux délits non militaires qui lui étaient imputés. (2) Journ. criminel, p. 313; Ordonnance du 6 nov. 1822, art. 6.

(3) 11 mars et 30 juill. 1825, Dz.P.25.1.264 et 429; 30 nov. 1827, Dz.P.28.1. 8 nov. 1838, Journ. crim., no 2402.

39;

(4) 24 mai 1821, Dz.A., t. 11, p. 398; 30 nov. 1827, déjà cité; 10 mai 1839 (3 arrêts), Dz.P.39.1.384.

(5) Code rural, tit. 1er, sect. 7, art. 2; Loi du 18 juillet 1837, art. 13.

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temps de moisson ou de vendange. Leurs pouvoirs sont les mêmes, mais finissent avec l'enlèvement des récoltes qu'ils sont chargés de protéger.

La compétence de ces divers magistrats, fonctionnaires, agents, est bornée, quant au territoire, par le département, l'arrondissement, le canton, la commune, etc., sur lesquels s'étend leur autorité ou leur surveillance.

L'autorité des commissaires de police est, le plus généralement, resserrée dans les limites de la commune pour laquelle ils sont nommés, cependant, dans certaines localités, leur surveillance s'étend aussi sur quelques communes limitrophes, désignées par une ordonnance royale (1).

Les officiers de gendarmerie sont compétents dans l'étendue de leurs commandements, suivant leurs grades (2). Les maréchaux des logis, brigadiers et gendarmes, le sont dans les circonscriptions ordinaires de leurs brigades établies par les commandants des compagnies, indépendamment des lieux où les appelle leur service (3). La gendarmerie, quelle que soit la destination de son mouvement, est dans un état permanent de répression, de surveillance et d'action de police (4).

Gardes forestiers. L'art. 22 réduit l'autorité des procès-verbaux des gardes forestiers à la simple foi jusqu'à preuve contraire. Cette disposition d'un effet peut-être trop restreint, met un terme aux difficultés qui s'étaient élevées sur l'autorité de ces actes. La jurisprudence de la Cour suprême n'avait pas été bien constante sur ce point. Elle avait d'abord décidé (5) que la loi de 1790 était applicable à tous les délits de chasse, sous la seule exception des délits commis dans les bois de la couronne et comme tels soumis à l'ordonnance forestière de 1669; d'où l'on tirait la conséquence que les procès-verbaux en cette matière ne faisaient foi que jusqu'à preuve contraire, aux termes de l'art. 10 de la loi de 1790 (6).

(1) Avis du Conseil d'Etat du 20 août 1828, non inséré au Bulletin. (2) Ordonnance du 29 oct. 1820, art. 124, 132, 138, 147, 148, etc.

(3) Idem 1820, art. 179, 188, 208, etc.

(4) 4 mars 1808, Bullet. no 44.

(5) 30 et 31 mai et 30 août 1822, Dz.A., t. 2, p. 445, 447, 448.

(6) Mangin est de cet avis; des Procès-verbaux, p. 79; Idem, M. Petit, t. 1er, p. 327.

Mais bientôt après la Cour avait proclamé un principe tout opposé (1), qu'elle avait reconnu de nouveau tout récemment (2) ; désormais, il ne pourra plus y avoir de doute à cet égard.

Les gardes forestiers, garde-pêches, gardes particuliers n'ont qualité que dans les localités pour lesquelles ils sont assermentés (3). Ainsi, il a été jugé que le procès-verbal d'un garde forestier constatant un délit de chasse commis en plaine, était nul (4). Cependant, si le champ, lieu du délit, était enclavé dans une forêt, le garde forestier aurait qualité (5).

Du reste, c'est un principe constant que pour les délits communs, et spécialement ceux de chasse, l'irrégularité des procèsverbaux ne produit aucune fin de non-recevoir contre les poursuites, soit du ministère public, soit de la partie civile (6).

L'art. 26 de la loi donnant le droit au ministère public de poursuivre tous les délits qu'elle prévoit, à l'exception d'une partie des délits de chasse commis sur le terrain d'autrui en temps permis, les procès-verbaux dressés en exécution de la loi y compris ceux des employés des contributions indirectes et des octrois (art. 23), doivent être adressés au Procureur du roi de l'arrondissement, aux termes des art. 20, 22, 29 dú Code d'instruction criminelle. -- Les procès-verbaux dressés par les gardes particuliers seront aussi adressés à ce magistrat, lorsque ces actes constateront un délit de chasse dans un enclos habité ou sur des terres non dépouillées de leurs fruits (art. 26).

(1) 17 juill. 1823, Dz.A., t. 2, p. 435.-- V. aussi 4 fév. 1820, Bull. p. 42. (2) 19 sept. 1840, Dz.P.40.1.342; Nancy, 12 fév. 1843, Dz.P.2.57.

(3) 6 août 1812, Dz.A., t. 11, p. 403.

(4) 18

oct. 1827, Dz.P.28.1.6; 9 mai 1828, Bull. crim., no 141.

(5) Grenoble, 13 sept. 1834, Dz.P.35.2.32.

(6) 11 août 1831, Dz.P.31.1.301; Mangin, des Procès-verbaux, p. 5 à 12.

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