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S139 1778 V.6

631249-128

HISTOIRE

DE

L'ORDRE

DU S. ESPRIT.

Tous les Auteurs qui jusqu'à présent ont parlé de l'Ordre du S. Esprit, ne se sont uniquement attachés qu'aux Généalogies. Les (1) Statuts de l'Ordre de S. Michel, de la Toifon d'Or, de la Jarretiere, & de tant d'autres inftitués en Europe, leur indi

(1) Henri V, Roi d'Angleterre, dans une Lettre datée du 13 Avril 1415, prefcrit au Chroniqueur de l'Ordre de la Jarretiere, d'écrire toujours à l'avenir en Anglois, les faits d'armes des Chevaliers. Philippe le Bon, Duc de Bourgogne, dans un Chapitre de la Toison d'Or qu'il tint à Dijon en 1433, nomma Benoît Colinet Chroniqueur de cet Ordre; & l'appointa à cent cinquante livres de gages.

Tome VI.

A

*

quoienr un objet plus intéreffant; ils portent que le Greffier, ou quelque Clerc idoine & prépofé à cet effet, rédigera & confervera par écrit les actions les plus remarquables des Chevaliers.

Je ne me fuis pas propofé de m'étendre en long détails fur ceux que nos Rois ont admis dans l'Ordre du S. Efprit; mais, en rappellant leurs noms, je rapporterai quelques anecdotes; & ces différens traits de fermeté, d'intrépidité, d'humanité, de bienfaifance, de défintéreffement & d'amour pour la Patrie, présenteront une fuite d'exemples honorables à la Nation & dignes d'un Ordre illuftre. D'ailleurs, on verra que j'ai tâché de découvrir l'origine de plufieurs ufages qu'on y a confervés ; que j'ai donné fur quelques Statuts des éclairciffemens abfolument néceffaires, & que j'ai relevé des erreurs considérables, & plufieurs fautes de nos Hiftoriens.

Homme lettré.

CHAPITRE PREMIER.

De l'ancienne Chevalerie.

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PERSONNE n'ignote que le Gouvernement féodal s'introduifit en France vers la fin du règne de Charles le Chauve; que Hugues Capet le confirma, & que par 'cette forme de Gouvernement tout Vaffal & arrière-Vaffal devoit être toujours prêt à fuivre fon Seigneur à la guerre. C'étoit un devoir qu'il falloit remplir, & qui ne conduifoit à aucunes diftinctions. On n'étoit jamais que fimple combattant fous la bannière de fon Seigneur. Il n'y avoit aucuns grades militaires; mais, à leur défaut, le génie guerrier de la Nation imagina un titre d'honneur, un titre éminent, qui feroit la marque & la récompenfe d'une valeur diftinguée, & qui, par conféquent, exciteroit l'émulation de toute la Nobleffe. Voilà l'origine de la Chevalerie & de fes prérogatives: je crois qu'on en doit fixer l'époque dans (1) l'onzième fiècle.

(1) M. de Sainte Palaye* remarque très-judicieusement, * Mémoires de Littérature, T. 10, p. 613.

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Il étoit naturel que cette nouvelle carrière qu'on ouvroit à l'ambition, augmentât dans les parens le défir de procurer à leurs enfans les avantages de l'éducation; & ils en trouvoient aifément les moyens les Cours des Princes, & les Châteaux des riches Seigneurs & des hauts Barons, offroient de tous côtés, dans les Provinces, des écoles où la jeune Nobleffe pouvoit s'exercer

qu'il feroit difficile de faire remonter l'origine de la Chevalerie au-delà de l'onzième fiècle, en la regardant comme elle étoit, c'est-à-dire, comme une dignité qui donnoit le premier rang dans l'Etat militaire, qu'on ne devoit obtenir qu'après s'être fignalé par des actions, & qui fe conféroit par une espèce d'inveftiture, accompagnée d'un ferment folemnel; mais, ajoute-t-il, fi on ne veut la confidérer que comme une cérémonie par laquelle les jeunes gens recevoient leurs premières armes, on peut la faire remonter jusqu'à des fiècles très-reculés. * Chez les Germains, nos ancêtres, le Prince, le père, ou le plus proche parent du jeune homme en état de porter les armes, l'introduifoit dans l'Affemblée générale de la Nation, & lui donnoit folemnellement le javelot & le bouclier. Charlemagne donna folemnellement l'épée & la ceinture militaire au Prince Louis fon fils; & l'on voit même des exemples de cette cérémonie fous la première race.

*Tacit. de Morib. German. c. 13.

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