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Première partie : Bonaparte premier consul. - État de l'Europe après le 18

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Reprise des hostilités. - Composition des armées.
Armée de Ligurie.

Armée d'Italie. - Cham-
Masséna. Armée du Rhin. - Moreau.

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· Défense de

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- Batailles d'Eugen et de Moeskirch.
Bataille d'Héliopolis.
Kléber.

Gênes. Marengo. Mort de Désaix.
d'Ulm.-Hohenlinden. Armée d'Égypte.

Kléber.

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Menou général en chef. - Journées d'Alexandrie. - Capitulation. -Saint-Domingue. -Général Leclerc. Paix de Lunéville. Camp de Boulogne. Deuxième partie : Organisation. - Infanterie, cavalerie, artillerie. Corps nouveaux créés pendant la période républicaine et consulaire. - Esprit de l'armée après le 18 brumaire. Esquisse historique. · Armes d'honneur, etc.

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La révolution du 18 brumaire est un des événements les plus inouïs de l'histoire. Elle n'a de précédent chez aucune nation. L'œuvre de régénération politique si lentement préparée en France depuis plusieurs siècles, si laborieusement accomplie depuis 1789, était arrêtée, anéantie d'un seul coup par

un officier de fortune, qui allait bientôt se faire un sceptre de son épée et couvrir du large manteau impérial son uniforme de soldat. Et trois années avaient suffi à cet homme pour s'élever à ce point de gloire et de puissance qu'il pût changer ainsi les destinées de la patrie et les diriger au gré de son ambition. Accouru des bords du Nil, après une campagne merveilleuse, seul à travers les croisières anglaises, sans autres forces que sa personne, sans autres ressources que son génie et l'éclat de son nom, il avait touché le sol de la France, et en moins de deux mois il avait changé, par un coup de main audacieux, l'état politique de la France et du continent. Les républiques anciennes et celles du moyen âge avaient succombé, quelques-unes du moins, sous les coups de citoyens ambitieux, mais après plusieurs siècles d'existence et de longs excès. La république française ne comptait que cinq ans de durée. La liberté, rêvée par nos pères en 1789, obtenue un moment sous la Constituante, voilée sous les sanglants excès de la Convention, mais qui avait brillé quelque temps sous le Directoire, venait d'être immolée par un des héros qu'elle avait vus sortir de son sein.

On a dit que la France, après avoir en dix ans essayé de la liberté sous les formes monarchique, républicaine et démocratique, après avoir fait triompher à l'intérieur le principe de la révolution, avait pris la forme militaire pour le faire triompher au dehors; et, partant de ce principe, les historiens, séduits par le prestige du génie de Bonaparte, éblouis par le sillage éclatant de l'astre impérial, ont justifié la révolution du 18 brumaire et l'avènement à l'empire. Certes, plus que tout autre, peut-être, nous avons admiré et nous admirons encore l'élévation prodigieuse du génie de Napoléon et la grandeur de son œuvre; mais nous n'avons pu nous empêcher de voir à travers le prisme de la gloire du héros l'ambition de l'homme, le despotisme du souverain. Devenu le premier citoyen de la république, Pourquoi du sceptre arma-t-il son orgueil (1)? Le rôle de Washington, dans une nation comme la France, n'étaitil pas suffisant pour l'ambition du général républicain, élève de Brienne, quelque haute, quelque fière que fût son âme? Sa page dans l'histoire eût-elle été moins brillante si, au lieu d'obéir à son ambition personnelle et de ressusciter en Europe l'empire de Charlemagne avec ses guerres incessantes et ses institutions féodales, il eût obéi à l'ambition plus noble de servir les intérêts de la patrie, et de continuer dans le monde la révolution française avec ses principes nouveaux et fécondants?

Mais, sans entrer plus avant dans ces déductions historiques, voyons quelle influence exerça la journée du 18 brumaire sur les rapports de la France avec les cabinets de l'Europe, et comment Bonaparte raffermit à l'intérieur, sous les pas du pouvoir consulaire, le sol mouvant et tourmenté du gouvernement.

Après les victoires de Zurich et Kastrikum, la république était encore une fois sauvée de l'invasion, mais la coalition n'était point dissoute; l'Autriche et l'Angleterre étaient toujours en armes ainsi que les petites puissances à leur

(1) Béranger.

suite. L'Italie était perdue pour nous et la frontière du Midi menacée par le Var. Il est vrai que la Russie faisait retirer ses soldats par journées d'étapes; que la Prusse, un moment ébranlée dans son alliance avec la république, et prête à jeter encore sur la France ses nombreux bataillons, était revenue à ses sentiments de neutralité; que l'Espagne, chancelante aussi dans son alliance, y avait été raffermie par la victoire de Zurich. Mais la faiblesse du gouvernement directorial en butte aux déchirements des partis, et l'état d'épuisement où il avait réduit la France, faisaient craindre à chaque instant le retour des excès de 1793 et la ruine prochaine de la république.

La révolution du 18 brumaire produisit en Europe une sensation extrême et changea complétement la face des choses. Cette révolution, en remettant aux mains d'un capitaine qui avait fait ses preuves d'habileté et de génie une dictature presque absolue, devait fixer l'attention des gouvernements. Pitt calcula rapidement la portée de cet événement; mais, fidèle à son système ou plutôt à sa haine contre la France, il redoubla d'efforts pour accabler ce pouvoir naissant avant qu'il fût raffermi. L'Autriche, qui avait fait déchoir la république des grandeurs de Campo-Formio, ne vit point sans terreur l'élévation au pouvoir de l'homme qui avait dicté les conditions de cet impérieux traité. Elle renforça aussitôt ses armées d'Italie et du Rhin; car elle prévoyait que le conquérant ne tarderait pas à lui disputer cette riche et belle conquête.

La Russie, qui n'avait aucun intérêt à intervenir dans cette lutte, mécontente d'ailleurs depuis l'échec de Zurich, qu'elle attribuait à l'Autriche, se retira de la coalition. Paul Ier, plein d'admiration pour le général Bonaparte, séduit par le merveilleux des campagnes d'Italie et d'Égypte, dont il aimait à se faire raconter les détails, et touché de la démarche délicate du premier consul, qui lui avait renvoyé sans échange les prisonniers faits à Zurich, Paul ler s'empressa de manifester, d'une manière éclatante, sa renonciation à la guerre engagée avec la France. Il congédia le corps de Condé et se rapprochades puissances du Nord qui avaient gardé la neutralité. Le roi de Prusse, séduit lui aussi par le prestige de la gloire du premier consul, persévéra plus que jamais dans ses dispositions de neutralité absolue. La Suède, la Saxe, le Danemark et l'Espagne elle-même suivirent le même système. La coalition se trouvait donc réduite aux seules forces de l'Angleterre et de l'Autriche. Toutefois, avant de mettre encore l'Europe en feu, Bonaparte écrivit au roi d'Angleterre en personne pour lui proposer la paix. Cette démarche extradiplomatique n'amena qu'une note du ministère anglais pleine de hauteur et de violence. Il fit une pareille démarche auprès de l'empereur d'Autriche, mais, ainsi qu'il s'y attendait, la réponse fut la même de la part du cabinet de Vienne. Bonaparte, profitant habilement de ces circonstances, adressa à la nation une proclamation énergique où il disait : «Français, vous désirez la paix, et je la désire avec plus d'ardeur encore. Mes premiers vœux, mes démarches constantes ont été pour elle. Le ministère anglais la repousse, le ministère anglais a trahi le secret de son horrible politique. Déchirer la France, détruire sa marine et ses ports, l'effacer du tableau de l'Europe ou l'abaisser au rang des puissances se

condaires; tenir toutes les nations du continent divisées pour s'emparer du commerce de toutes et s'enrichir de leurs dépouilles : c'est pour obtenir ces affreux succès que l'Angleterre répand l'or, prodigue les promesses et multiplie les intrigues.

« Mais ni l'or, ni les promesses, ni les intrigues de l'Angleterre n'enchaîneront à ses vues les puissances du continent. Elles ont entendu le vœu de la France; elles connaissent la modération des principes qui la dirigent; elles écouteront la voix de l'humanité et la voix puissante de leur intérêt.

<<< S'il en était autrement, le gouvernement, qui'n'a pas craint d'offrir et de solliciter la paix, se souviendra que c'est à vous de la commander. Pour la commander il faut de l'argent, du fer et des soldats ! »

C'est ainsi que Bonaparte annonçait aux Français ses intentions politiques. Il offrait la paix; mais il était disposé, si on refusait ses offres, à la conquérir par les armes.

Certes il avait fallu une audace peu commune pour s'emparer du pouvoir au milieu des circonstances critiques où l'avait placé le Directoire vis-à-vis de l'Europe; mais à l'intérieur les difficultés n'étaient pas moins grandes, et la tâche moins pénible. Il fallait rassurer les esprits, comprimer les factions, pacifier la Vendée, où la guerre civile s'était rallumée, il fallait donner de nouvelles lois constitutives à la France, rétablir la hiérarchie administrative, arrêter les progrès effrayants du déficit, réorganiser les armées, et faire face à la fois aux ennemis de l'intérieur et à ceux du dehors.

Bonaparte déploya dans cette double tâche l'activité, l'aptitude prodigieuse qui étaient le propre de son génie, et se montra aussi profond politique qu'il s'était montré général habile.

L'armée surtout appela son attention. La république avait alors quatre armées sur pied, celle qui venait de vaincre au Texel, celle d'Helvétie, celle du Rhin et celle d'Italie. Ces malheureuses armées se trouvaient dans le dénûment le plus absolu. Les soldats, couverts de haillons, mal nourris, mal payés, ressemblaient plutôt à des brigands qu'à des corps disciplinés. La victoire, qui leur avait ouvert les riches plaines de l'Italie et de l'Allemagne, où elles avaient vécu dans l'abondance, la victoire avait abandonné leurs drapeaux depuis un an, et depuis un an le découragement, la misère, les désertions les avaient sans cesse décimés et démoralisés. L'armée de Batavie était la moins malheureuse. Campée au milieu des riches marais de la Hollande et entretenue aux frais de cette nation, elle n'avait subi aucune des rudes épreuves auxquelles avaient été soumises les autres. Celle du Rhin, placée sur les frontières de la France ravagées depuis dix ans par la guerre, y vivaient difficilement au moyen des réquisitions forcées. Celle d'Helvétie, après avoir épuisé par des contributions de guerre les cantons suisses qu'elle occupait, en était réduite aux plus affreuses extrémités. Mais la plus malheureuse de toutes était l'armée d'Italie. Là les soldats avaient éprouvé toutes les rigueurs des privations, la faim et le froid. Placée sur les sommets arrides et incultes de l'Apennin, décimée par les fièvres et les maladies, cette armée présentait le tableau le

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