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l'intégrité de l'Empire ottoman. Ils sont dans l'obligation de considérer l'Islamisme éclairé comme un des plus puissants ressorts de la politique en Orient.

Et les intérêts de huit millions de nos compatriotes nonmusulmans? objectera-t-on peut-être. Nulle part je ne les ai séparés de ceux des autres. C'est aussi dans leur intérêt que je demande le maintien du Khalifat régénéré.

Au temps où l'élément chrétien de l'Empire demandait l'intervention du corps des Ulémas en sa faveur, il obtenait certes de meilleurs résultats que depuis qu'il s'adresse au corps diplomatique européen. Que de fois une simple observation des Ulémas n'a-t-elle pas calmé le courroux des Sultans contre leurs sujets chrétiens! Les chrétiens ottomans ont tort aujourd'hui de ne pas invoquer cette puissance morale contre les abus du pouvoir temporel et de ne pas exiger d'elle l'accomplissement du devoir justicier que l'Islamisme impose au Khalife à l'égard des chrétiens. Le Sultan peut, et doit à la rigueur, refuser les exigences du corps diplomatique ; mais il est tenu d'exécuter les sentences du corps des Ulémas basées sur le Koran.

Quelle force admirable il y a là pour celui qui sait s'en servir! Les Puissances chrétiennes qui se cabrent devant l'autorité spirituelle du Khalife et qui cherchent à la diminuer auraient été si heureuses de posséder une force pareille! La France s'en aperçoit en Tunisie : elle a réussi à y introduire, grâce à l'appui moral du Bey, des réformes qu'elle n'a pu appliquer en Algérie avec l'appui des canons.

(A suivre).

AHMED RIZA.

BULLETIN D'ANGLETRRE

Londres, le 12 Descartes (Diderot) 118

19 octobre 1906.

POLITIQUE EXTÉRIEURE

Les Chambres sont toujours en vacance et une trève semble régner en ce moment; on a dit très peu de choses sur la politique extérieure.

On avait rédigé une adresse à la Douma lui exprimant des souhaits de bienvenue, et cette adresse avait été signée non seulement par des Membres du Parlement, mais par un grand nombre de citoyens parmi lesquels on trouve les noms de MM. F. Harrison et Beesly. Il avait été décidé qu'une députation irait présenter cette adresse à l'ancien Président de la Douma à Saint-Pétersbourg, mais on a abandonné ce projet, pour ne pas provoquer de désordres. Le gouvernement du «petit père » a, paraît-il, des gens (sinon à sa solde, du moins sont-ils dans ses bonnes grâces), qui sont très heureux de faire du « boucan »>. Seulement en Russie cela se traduit par des massacres de juifs, etc., et il paraît que ces apaches conservateurs avaient résolu de s'en prendre à cette députation. On a donc agi sagement en renonçant à aller à Saint-Pétersbourg.

Vous avez reçu à Paris le Lord Maire de la Cité et on l'a beaucoup fêté. Cependant, il ne faudrait pas attacher trop d'importance à cette visite, car il n'est nullement le président de notre Conseil municipal qui s'appelle le County Council. La Cité a relativement très peu d'importance et son Conseil n'est plus qu'un anachronisme qui amuse les badauds, heureux de voir ces honnêtes gens habillés avec des habits de carnaval. Historiquement la Cité a joué un rôle très important dans le passé, mais actuellement elle n'a plus d'importance; ses Conseillers sont presque tous des conservateurs et une de leurs fonctions les plus importantes est de banqueter, ce dont ils s'acquittent, d'ailleurs, très bien.

POLITIQUE COLONIALE

Au Transvaal on se prépare pour l'élection de la nouvelle Assemblée et les prophètes des deux côtés nous annoncent, soit une ère de grande prospérité, soit une ère de malheurs épouvantables. L'avenir montrera qui des deux a raison.

Aux Indes l'agitation continue toujours et les habitants du Bengale semblent résolus de continuer à protester contre la mesure qui a divisé cette province en deux gouvernements. L'opium qu'on exporte en Chine forme une partie très importante des revenus de l'Inde, et tout dernièrement le gouvernement Chinois a décidé qu'après un certain nombre d'années il interdirait l'entrée de cette drogue en Chine. On avait déjà une très grande difficulté à joindre les deux bouts aux Indes mais à l'avenir cela sera encore plus difficile. Si le Japon n'était pas là on aurait pu peut-être, comme déjà, fait du reste forcer les Chinois à prendre ce poison en se basant sur les principes sacro-saints du libre-échange, mais à présent cela est tout à fait impossible. Il faudra donc tâcher de trouver quelque nouvel impôt, ce qui ne sera pas facile. Il est vrai qu'on pourrait (et on le devrait) faire des économies, mais on ne le fera sûrement pas, car il faudrait lèser trop d'intérêts en Angleterre.

POLITIQUE INTÉRIEURE

on l'a

La rentrée des Chambres aura lieu le 23 octobre. La Chambre des Lords va avoir à discuter la loi sur l'Éducation primaire, loi qui ne propose pas la seule solution vraiment logique de l'enseignement laïque mais qui préconise une espèce d'enseignement religieux bâtard. Il est évident que les Conservateurs peuvent faire ce qu'ils veulent dans la Haute Chambre, mais jusqu'à présent leur plan a plutôt été celui d'obtenir des compensations que d'entrer en hostilité directe avec une Chambre des Communes où il se trouve une grande majorité de libéraux. On aurait tort, je crois, de penser que la Chambre des Lords n'a plus d'attaches profondes dans le pays et espérer qu'il serait facile de l'abolir. Tout au plus parviendra-t-on à y introduire quelques réformes. On peut remarquer que ce problème se pose toujours lorsqu'il y a un gouvernement libéral et c'est là une des grandes difficultés des Libéraux. Il y a en outre d'autres projets de lois très importants mais dont je pourrais parler plus utilement dans mon prochain bulletin.

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La tension entre une certaine fraction des libéraux et les députés ouvriers continue. Et elle s'est en somme aggravée parce que, pour une élection à Cockermouth, les socialistes avaient un candidat en même temps que les libéraux et il en est résulté que le candidat conservateur a été élu. De là grande colère chez les Libéraux qui parlent de pourfendre ces maudits socialistes. Maintenant on parle d'introduire le scrutin de ballottage pour empêcher de semblables évènenements. Je ne suis pas si sûr que cela réussirait toujours parce que les socialistes pourraient s'abstenir de voter, au second tour, pour le libéral. Il est très probable que les discussions entre les libéraux et les socialistes deviendront plus aigres à l'avenir, car l'ouvrier finira par perdre patience s'il voit que le nouveau Gouvernement ne fait que marcher dans la même voie que les anciens ministres. Il est grand temps de former un parti qui s'occupera des affaires du pays et qui condamnera l'Impérialisme. M. Lloyd George, un ministre, tout en louant le parti libéral a reconnu que la position des prolétaires était très pénible, il a cité un sociologue qui a dit que nous avions une population de dix millions d'hommes qui ne gagnaient pas assez pour vivre. Il n'est donc pas étonnant qu'il y ait du mécontentement et qu'on commence à trouver que les anciens programmes de réformes ne sont pas sérieux.

Je vous avais parlé dernièrement des scandales se rapportant aux marchés dans le Sud de l'Afrique. Le ministre de la Guerre a fait connaître sa décision, on a puni quelques pauvres diables soldats et sous-officiers mais on a pris des mesures très anodines pour les officiers. La Fontaine savait bien ce qu'il disait lorsqu'il écrivait :

Selon que vous serez puissant ou misérable

Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.

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La Société d'Enseignement populaire positiviste a repris ses travaux au commencement du mois de novembre.

Le 6 novembre, elle a tenu, 2, rue Antoine-Dubois, sa première réunion mensuelle.

M. Corra a signalé à l'attention de ses confrères et analysé un certain nombre de publications émanant de positivistes et intéressant le Positivisme, savoir :

« Montesquieu, sa famille, ses amis, ses correspondants », brochure par M. Avezac-Lavigne ;

«Les idées-mères de l'Anarchie », étude publiée par M. Ajam dans la Revue Parlementaire d'octobre 1906;

« L'Antimilitarisme et les Syndicats », par M. Keufer, article paru dans la Revue syndicaliste d'octobre 1906.

« Le Syndicalisme anglais, résumé historique (1799-1905) », brochure publiée par M. Fagnot dans la Bibliothèque socialiste;

Une série d'articles sur la réforme de l'Enseignement, publiés par M. Rigolage, dans l'Écho de Vincennes ;

Un article ayant pour titre Auguste Comte d'après de nouvelles correspondances, paru dans le journal Les Débats du 22 octobre 1906;

Enfin la traduction française de l'« Histoire de la Philosophie moderne » de Harwed Hoffding, qui contient une importante appréciation du Positivisme.

M. Faguot a ensuite entretenu l'assistance :

1° De la convention internationale qui vient d'être signée à Berne relativement à l'interdiction du travail de nuit des femmes, et à l'emploi du phosphore blanc dans la fabrication des allumettes;

2o De l'assemblée générale, tenue à Genève, par « l'Asso

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