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quelle on n'aurait pu construire l'édifice de la loi, sans entrer préalablement dans la discussion des controverses théoriques.

Passons à l'examen du système de Domat et de Despeisses. - Ces deux auteurs, après avoir mis dans un livre préliminaire les notions nécessaires sur les personnes et sur les choses, ont divisé toutes les lois civiles en deux parties, les contrats et les successions (1). Le système du Code nous paraît avoir trois avantages évidens sur cette division :

1o. En ce qu'il traite, dans leur place naturelle et avec l'étendue convenable, les rapports purement personnels, les plus importans de tous ceux qui sont l'objet de la législation civile;

2o. En ce qu'il considère les choses en état de repos, et détermine l'étendue des droits que l'on peut avoir sur elles, avant de s'occuper des contrats et des successions, qui ne sont que des manières différentes d'acquérir ces mêmes droits;

3o. En ce qu'il ne met pas le législateur dans la nécessité d'assigner à tous les moyens d'acqué

(1) Comme la succession transfère à l'héritier non-seulement les droits de propriété du défunt, mais aussi ses obligations actives et passives, nous sommes loin de faire un reproche au système de Domat, de ce qu'il traite des successions après les contrats, mais nous regardons comme le principal défaut de ce système, d'assigner aux rapports de famille une place trop subalterne.

rir, quels qu'ils soient, une place dans l'une de ces divisions principales. C'est ainsi que Domat, ne sachant dans quel lieu exposer les règles relatives à la possession et à l'usucapion, en traite dans le livre III, des suites qui ajoutent aux engagemens, ou les affermissent. (Sect. 7, pag. 258-276 de l'édition de 1713).

TROISIÈME SECTION.

Remarques sur la place qui a été assignée à quelques matières et à quelques dispositions particulières du Code.

Après avoir défendu le système du Code contre les principales objections par lesquelles nous l'avons entendu combattre, l'impartialité nous oblige à dire que la belle idée qui sert de base à ce système, a été quelquefois perdue de vue dans l'exécution, et, qu'à notre avis, on s'est écarté plus d'une fois, sans aucun motif plausible, de l'ordre qu'elle assignait à chaque matière de la législation civile. Quelques-unes des observations suivantes pourront paraître minutieuses; mais nous prions nos lecteurs de remarquer, qu'en matière de législation, rien n'est sans importance.

Nous avons déjà exprimé plus haut le désir, que le Code eût été précédé d'un livre préliminaire, ou d'une partie générale, contenant, non des maximes de morale et de doctrine, comme celui qui se trouve à la tête du projet de Code publié par la commission, mais des

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notions générales sur les personnes et leurs différens états, sur les choses et leur division, sur les rapports qui peuvent exister entre les hommes en société, et sur les droits qui naissent de ces rapports relativement aux choses. Ce livre préliminaire aurait offert une place convenable pour énoncer différens principes généraux, que l'on cherche en vain dans le Code, ou qu'on y trouve inopinément à une place où l'on ne pouvait pas les chercher. On n'aurait pas été obligé alors de traiter du conseil de famille dans le titre de la tutelle, tandis que le titre du mariage en suppose déjà l'existence (1); on n'aurait certainement pas renvoyé la définition de la possession au titre de la prescription, tandis que le titre de la propriété règle déjà (2) l'un des effets principaux de la possession; on n'aurait pas traité pour la première fois de la parenté dans le titre des successions, tandis que le titre du mariage en établit déjà des effets (3); on aurait probablement réuni dans ce livre la plupart des dispositions générales intercalées entre le deuxième et le troisième livre, ainsi que celles qui sont dispersées dans d'autres titres, comme les art. 543, 530; on y trouverait sans doute aussi une disposition sur la na

(1) Dans tous les cas, il nous paraît que c'est mal à propos que les dispositions relatives à la composition de ce conseil se trouvent intercalées dans la section, de la tutelle dative, tandis que les attributions de ce conseil s'étendent sur toutes

les fonctions du tuteur.

(2) Art. 549 et 550.

(3) Art. 205.

ture des droits accordés aux enfans naturels, que l'on ne peut classer ni parmi les droits de succession, ni parmi les créances; enfin, on n'aurait certainement pas renvoyé à la fin du Code la règle qu'à l'égard des choses mobilières, possesion vaut titre ( 1 ).

Mais en abandonnant même cette idée d'un livre préliminaire ou d'une partie générale, il nous semble encore que plusieurs matières auraient dù obtenir une autre place dans la distribution adoptée par le Code. C'est ainsi que dans le titre de l'absence, nous distinguons trois espèces de dispositions:

1o. Celles qui ont pour objet les mesures à prendre pour la conservation des biens de l'absent, jusqu'au moment de l'envoi en possession;

2o. Celles relatives à l'envoi en possession provisoire et définitif;

30. Celles relatives à la tutelle des enfans de l'absent.

Il nous semble que les dispositions relatives à l'envoi en possession, qui n'est qu'une succession anticipée et conditionnelle, auraient trouvé plus naturellement leur place au titre des successions; que celles relatives aux mesures à prendre pour la conservation des biens de l'absent, auraient pu être mises à la suite de la, section du titre de l'interdiction qui traite du conseil judiciaire du prodigue; qu'enfin celles relatives à la tutelle des enfans de l'absent auraient dû être insérées au titre de la tutelle, surtout si

(1) Art. 2297,

la définition légale de l'absence, qui renferme un vériritable précepte législatif, avait trouvé sa place dans le livre préliminaire.

Nous avouons cependant, que si l'on voulait régler dans un même titre toutes les suites de l'absence, ce titre devait nécessairement trouver sa place dans le livre Ier, l'absence étant un état purement personnel.

Il serait bien plus difficile de justifier le mélange des règles relatives à l'usucapion (ou la presciption acquisitive), avec les règles relatives à la prescription (extinctive) et celui des règles relatives à la prescription régulière, avec celles concernant les prescriptions irrégulières établies par les articles 2272 et suivans. C'est ainsi que le seul ordre numérique des articles nous indique que le serment ne peut pas être déféré dans le cas des prescriptions établies par les articles 2276 et 2277, tandis qu'il peut l'être dans le cas de celles établies par les articles immédiatement précédens.

Parmi les dispositions renfermées dans le chapitre 6 du titre du mariage, il en est plusieurs qui auraient dû être renvoyées, à notre avis, au titre du contrat de mariage.

Il n'est question des droits des enfans légalement reconnus, qu'au titre des successions. Le Code ne consacre donc ni le droit de ces enfans à une éducation convenable, ni leurs droits à des alimens du vivant de leurs père et mère, droit qui leur compète cependant si incontestablement, qu'il leur est accordé par la jurisprudence, nonobstant le silence de la loi.

L'article 815, qui établit la règle générale et applica

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