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être payés entièrement sur les biens de l'hérédité, ne peuvent prétendre aucun recours sur ceux de l'héritier, parcequ'ils se doivent imputer à eux-mêmes d'avoir préféré la séparation, quand les biens de l'héritier étaient suffi-. sans (1).

Quoique les principes généraux du droit confirment l'opinion émise par Papinien (2), que les créanciers du défunt qui ont obtenu la séparation ne laissent pas de conserver leurs droits sur les biens de l'héritier après que ses propres créanciers ont été satisfaits, cependant, comme cet avis n'est pas conçu en termes exprès et dispositifs, et que l'opinion contraire, soutenue par Paul et par Ulpien, est formellement et clairement exprimée, on doit, du moins dans la théorie du droit romain, préférer cette dernière opinion (3).

Mais d'après les principes de notre droit civil actuel, on doit décider le contraire; l'article 878 du Code, en effet, ne dit pas que les créanciers de la succession, en demandant la séparation des patrimoines, perdent les droits que l'acceptation de la succession, par l'héritier, leur avait acquis sur les biens personnels de celui-ci, et conséquemment ils les conservent en entier, comme si la séparation n'avait pas été demandée.

En usant d'un bénéfice que la loi leur accorde sans au

(1) L. 1, § pen.; L. 5, D. de separat. S

(2) L. 3, § ult., D. de separat.

(3) Cocceji, jus. civ. controv., L. 42, tit. 6. Lauterbach, Diss. de separat., et un grand nombre d'auteurs qu'il cite.

cune condition, les créanciers ne peuvent être privés du bénéfice des autres dispositions du Code, qui leur sont

favorables.

Lorsque, par l'effet du recours contre l'héritier dont nous venons de parler, les créanciers de la succession peuvent demander le payement de leurs créances, concurremment avec les créanciers personnels de l'héritier, et sur les biens de celui-ci, il faut distinguer si tous les créanciers sont chirographaires ou hypothécaires; dans le premier cas, ils sont payés tous également et par concurrence; dans le second, ils sont payés suivant l'ordre de leurs hypothèques, sans égard à ceux qui sont créanciers de la succession, ou qui le sont de l'héritier. Ces principes sont conformes à ceux que le Code Napoléon a établis, et il a pas été dérogé pour le cas particulier dont il s'agit (1).

n'y

SECTION III.

Des cas dans lesquels la séparation de patrimoines ne peut pas avoir lieu.

La séparation de patrimoines ne peut plus être demandée dans les cas suivans:

1o. Lorsque les biens du défunt sont déjà réellement confondus avec ceux de l'héritier : si cependant tous les biens ne sont pas encore confondus, on peut demander la séparation de ceux qui sont encore distincts (2).

(1) Chabot, Commen. sur la L. du 29 germinal an XI, à l'art. 878, § 10.

(2) L. 1 § 12, D. de separat. pragmat., decad. 2, err. 2, n. g.

Faber, de error.

2o. Lorsque l'héritier a vendu sans fraude les biens de la succession (1).

funt

3o. Lorsqu'il y a novation dans la créance contre le dé

par l'acceptation de l'héritier pour débiteur, faite soit expressément, soit tacitement (2).

Cependant, si de plusieurs créanciers il y en a qui ont fait novation, les autres n'en sont pas moins fondés à demander la séparation des patrimoines; de même que, si un créancier a fait novation à l'égard d'un ou de plusieurs héritiers, rien ne l'empêche de réclamer le bénéfice de la séparation contre les autres, mais seulement sur leurs portions héréditaires (3).

Selon le droit romain, la séparation ne pouvait plus être demandée après les cinq années qui suivaient le jour de l'adition de l'hérédité (4). En France, on n'a jamais observé cette disposition, car on y tenait pour maxime de n'admettre aucune des différentes espèces de prescriptions du droit romain, si elle n'était confirmée par l'ordonnance ou par la coutume, ce qui n'avait pas eu lieu pour le principe dont il s'agit (4).

Suivant le Code Nap., cette action, quant aux meubles,

(1) L. 2, D. des eparat.

(2) L. 1, § 10, 15, 16, D. de separat. Art. 879 du C. N.

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(5) Brodeau sur Louet, lett. h., nomb. 19; Antoine Mornac, sur la L. 1, § 13, D. de separat.

est prescrite par le laps de trois ans, à compter de l'acceptation de la succession. A l'égard des immeubles, elle peut être exercée tant qu'ils existent entre les mains de l'héritier (1); mais dans tous les cas, elle est prescrite par le laps de trente ans (2).

La séparation de patrimoines cesse par la perte totale des biens; elle cesse aussi lorsque les créanciers de la succession se font restituer contre leur demande en séparation, en se fondant sur les faits avérés d'une juste ignorance (3).

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Quel est l'effet de la disposition testamentaire par laquelle une femme mariée lègue tous ses biens à ses enfans, sous la condition le père survivant n'en aura pas l'usu

que

fruit?

Il faut distinguer entre les biens qui entrent dans la quotité disponible, et ceux qui forment la résérve légale.

(1) Art. 880 du C. N.

(2) Art. 2262 du C. N.

(3) L. 1, § 17, in fin., D. de separat.

:

Les premiers pouvaient être enlevés aux enfans en les leur donnant, la mère a donc pu apposer à sa libéralité toutes les conditions qui lui ont paru convenables. Elle a disposé que le père n'en aurait pas l'usufruit; elle n'a fait qu'user en cela du droit que l'article 387 accorde à tout testateur en général.

La légitime, au contraire, ne pouvait être enlevée aux enfans; les biens qui devaient la composer leur étaient acquis par la seule force de la loi; or, l'article 384 accorde au père l'usufruit de tous les biens qui appartiennent aux enfans, et l'effet de cette disposition ne peut être paralysé par une volonté particulière. Dans l'espèce, le père a donc l'usufruit des biens composant la légitime, malgré la disposition de la testatrice.

Emancipation. - Révocation. - Tutelle.

C. N., art. 486.

Lorsque l'émancipation d'un mineur a été révoquée, rentre-t-il sous la puissance de son premier tuteur, ou doit-il lui en étre donné un nouveau ?

L'émancipation a mis fin aux fonctions du premier tuteur; il a épuisé ses pouvoirs par la reddition de ses comptes; il ne peut donc les recouvrer qu'en vertu d'un nouvel acte qui les lui confère. D'ailleurs, remplacé par un curateur auprès de la personne du mineur, il n'a conservé aucun titre qui pût le rappeler de plein droit à la tutelle. Sa mission terminée, il ne suffit pas qu'il s'en présente

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