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Loës pour coucher ce soir là, le 2o régiment à Cossonay, le 3o à Vufflens-la-Ville et Aclens.

De Cossonay, le 4 octobre, le 2o régiment se porte sur Thierrens où il arriva entre 11 heures et midi.

Un peu avant ce moment y arrivaient, de Moudon, l'escadron de dragons no 2; d'Yverdon, de Pomy et de Cronay les trois bataillons 4 5 et 6 du 2o régiment d'infanterie, précédés du 1er bataillon de carabiniers.

Avant midi la concentration du corps du nord à Thierrens était parfaitement opérée, malgré une pluie diluvienne et très froide. Après une distribution exceptionnelle de vin et de fromage, qui remit bientôt tout le monde de bonne humeur, le corps fut rassemblé sur le plateau de Marponcet. Il y manquait toutefois le bataillon de carabiniers qui, chargé d'une importante et mystérieuse mission. stratégique pour les jours suivants, s'en alla cantonner à Moudon. Disons tout de suite qu'il y arriva sous des ondées qui changaient en fontaine ruisselante chaque pan de capote. Mais la patriotique population moudonnoise eut bientôt mis ordre à ce contre-temps. Tous les fours de boulangerie, tous les fourneaux, toutes les grandes cheminées se transformèrent subitement en séchoirs, si bien que dans la soirée déjà nos carabiniers, choyés et dorlotés à qui mieux mieux, bravaient superbement tous les assauts de l'humidité..., de celle de la pluie, bien entendu.

A Moudon arrivaient aussi cette après-midi M. le conseiller fédéral Hertenstein, accompagné de M. le colonel Rudolf, instructeur-chef d'infanterie et de M. le lieutenant-colonel Pfyffer comme adjudant. M. le colonel-divisionnaire Ceresole se rencontra également à Moudon ainsi que M. le commandant Seever, attaché militaire à l'ambassade française à Berne, accompagné de M. lieutenant du génie français Ziegler comme officier d'ordonnance.

Pendant ce temps, le gros du corps du nord s'avançait prudemment du plateau de Marponcet dans la direction de Chapelle et de Peney, pour tâcher de découvrir si l'ennemi, qui devait arriver dans ces parages à ce moment-là, avait réussi à passer aussi entre les gouttes.

Le 2o escadron de dragons se porte en trois reconnaissances d'avant-garde à droite sur Peyres-Possens, par St-Cierges; au centre sur Chapelle et Villars-Mendraz par le bois Savary; à gauche sur Allierens, Martherenges et Sottens, par St-Cierges et Cor

rançon.

Derrière les dragons marche le 5 bataillon sur la route de StCierges à Chapelle. Il est suivi du 4e bataillon, puis de l'artillerie, puis du 6 bataillon, qui forme la réserve et l'arrière-garde.

Vers 12 3/4 heures la cavalerie signale des dragons ennemis aux

environs de Sottens. Quelques coups de mousqueton sont tirés. L'action va s'ouvrir.

Le corps du sud, en exécution des ordres supérieurs, s'est en effet trouvé au point voulu, malgré d'affreux chemins détrempés par les pluies.

Le 3 octobre, en rentrant d'une laborieuse et fort intéressante manœuvre régimentaire de la Pontaise à Cheseaux, le 3o régiment avait reçu, pour la journée du lendemain, l'ordre ci-après de M. le lieutenant-colonel Muret :

« Réunion du régiment à 8 1/2 h. du matin au Chalet-à-Gobet, en formation de rendez-vous de marche et sur l'emplacement fixé par M. l'adjudant.

Les bataillons auront pris la soupe et conservé la ration de viande dans la gamelle pour être consommée vers midi pendant la grande halte. On aura préparé du café la veille, dont les gourdes auront été remplies.

Chaque bataillon est autorisé à se faire suivre de son cantinier et de deux chars pour le transport des couvertures, de la réserve des cartouches et des bagages. Ces chars porteront les numéros du bataillon et des compagnies auxquels ils sont attachés.

Le matériel de cuisine sera acheminé par les soins des quartiermaîtres dans les cantonnements prévus pour le soir et par la route de Cugy.

La troupe sera en capote, MM. les officiers en vareuse avec le

sac.

Les bataillons arriveront au Chalet-à-Gobet sans service de sûreté et avec leur seule garde de colonne.

Après un repos de 1/2 heure, le régiment se met en marche pour Peney, dans l'ordre suivant: le bataillon no 7 fournissant la garde de colonne d'avant; le bataillon no 8; le bataillon no 9; les voitures et la garde de colonne d'arrière, détachée du bataillon no 9.

Les médecins viendront derrière leur unité.

Chaque bataillon fournira à la garde des voitures, 1 sous-officier plus un soldat par voiture.

Les bataillons garderont entr'eux une distance de 40 mètres et les compagnies entr'elles de 10 mètres.

MM. les officiers veilleront à une discipline correcte de la marche; les capitaines se tiendront à la tête de leur compagnie; les autres officiers avec leur subdivision. On laissera libre le côté gauche de la route.

Le commandant du régiment se trouvera à la tête de la colonne. Il sera délivré à chaque homme portant fusil et pour la manoeuvre du jour: aux bataillons no 7 et 8, huit cartouches par homme, et au bataillon no 9 un paquet par file qui ne sera ouvert que sur ordre spécial.

A 11 1/2 h., arrivée aux environs de Peney; grande halte, distribution de demi-litre de vin et d'une ration de fromage par homme. Cette distribution a été ordonnée par le Département militaire fédéral en considération de la marche exceptionnelle fournie dans la journée par le régiment.

Les voitures seront dirigées depuis là sur les cantonnements, accompagnées des fourriers et des hommes de garde ainsi que du sous-officier d'armement.

A partir de Pency, le 3me régiment d'infanterie prend place dans le corps du sud pour les manoeuvres combinées des 4, 5 et 6 octobre.

Officiers, sous-officiers et soldats,

Nous avons terminé nos cours préparatoires. Les diverses formations que nous avons apprises et repassées dans nos exercices, seront mises en pratique dans les manoeuvres de campagne qui commenceront demain.

Je vous renouvelle mes recommandations au sujet des égards que vous devez aux populations qui vous recevront.

Vous rendrez strictement les honneurs prescrits à tous les officiers, à ceux même qui n'appartiennent pas à votre arme.

Vous observerez enfin, dans tous les détails du service, à la manœuvre comme aux cantonnements, la discipline qui a régné jusqu'à ce jour dans le régiment.

Des fatigues vous attendent bien certainement, malgré tous les soins que prendront vos chefs pour vous les rendre moins pénibles. Vous saurez les surmonter par votre bon esprit militaire et par votre amour du devoir.»>

Conformément à cet ordre le 3o régiment était à Peney avant 11 h. du matin ; il ne tardait pas à être rejoint en avant de ce village, à droite par le 3o escadron de dragons venant de Moudon par Hermenches, à gauche par le 3o régiment d'artillerie qui avait cantonné la veille à Vufflens-la-Ville et environs.

Un peu après midi tout le corps du sud se trouvait ainsi réuni entre Villars-Mendraz et Sottens; vers une heure le feu s'ouvre d'abord par les dragons, puis par les bataillons d'avant-garde, enfin par l'artillerie qui est malheureusement obligée de rester sur les routes.

Malgré cela une action intéressante s'engage et se soutient pendant plus d'une heure sur les hauteurs des environs de Sottens et entre Sottens et St-Cierges. Le corps du sud se déploie contre Chapelle à gauche de son bataillon no 8, major Bourgeois, qui a ouvert le feu le premier, étant d'avant-garde; le lieutenant-colonel Muret, qui s'est établi sur le mamelon de la cote 777, stimule l'attaque, et le corps du sud finit par gagner du terrain ; ainsi le veut son programme, qui s'exécute fort bien d'ailleurs, quoique un peu plus lentement que si la troupe avait pu cheminer sur des terrains secs et à travers champs.

Le corps du Nord, qui n'est que la gauche d'une armée obligée de se replier, doit abandonner, par nécessité supérieure, des positions très fortes par elles-mêmes. Il se retire sur St-Cierges, après avoir fait occuper, par le 6e bataillon et la 3o batterie, une solide position de repli, au mamelon dit « le Montar», à la lisière septentrionale du village de Chapelle.

A 3 heures, M. le colonel-brigadier de Guimps, qui fonctionnait comme directeur des manoeuvres, fit cesser le feu. Les troupes du corps du Nord allèrent cantonner: l'état-major, les dragons et le bataillon no 4, à St-Cierges, le 5 bataillon à Boulens, le 6o à Thierrens et Correvon; l'artillerie à Thierrens.

Le corps du Sud fut cantonné : l'état-major à Chapelle, le 7o bataillon à Chapelle et Martherenges, le 8° à Sottens, le 9 à Peyreset-Possens, Montaubion, Chardonnay; le 3 escadron de dragons à Villars-Mendraz; l'artillerie, état-major et 5o batterie à Chapelle, 6o batterie à Peney.

Vu le mauvais temps les avant-postes de nuit furent supprimés. Les corps d'avant-postes ne prendraient le service qu'à 7 heures du matin.

Le vendredi 5 octobre, entre 7 et 8 heures du matin, le combat recommença par des incidents d'avant-postes, car il ne devait s'ouvrir réellement qu'à 9 heures.

Le corps du Nord s'était réuni à 7 1/2 heures, sur le plateau au nord du bois Savary. Il était couvert par le 4 bataillon, en avantpostes entre le mamelon du Moulin de l'Augine et le cimetière de Chapelle, au nord du village; il devait recevoir une nouvelle attaque du corps du Sud, en se maintenant d'abord dans ses positions, puis il finirait par prendre l'offensive pour rejeter le corps du Sud au-delà de la Menthue.

Le 2o escadron de dragons fait les mêmes reconnaissances que la veille, sans être obligé d'aller aussi loin, car il rencontre bientôt la troupe d'avant-postes du corps du sud, bataillon no 7, major Pingoud, allant prendre son terrain devant Chapelle. Une fusillade s'engage à cette occasion.

Le 4e bataillon, ainsi attaqué vers 8 heures, se replie, en ripostant, sur la partie occidentale du bois Savary, sa droite appuyée à la route de St-Cierges à Chapelle. Le 6o bataillon se place à la gauche du 4 et tient la portion orientale du même bois; il détache en outre une compagnie à l'artillerie, qui prend position « aux Trones ».

Le 5o bataillon restera en réserve à la cote 798, près de l'ancien chemin de St-Cierges à Chapelle.

Ce front d'environ un kilomètre forme une forte position, où le corps du Nord fournira une résistance facile à prolonger. Pendant ce temps, le bataillon de carabiniers fera des siennes. Il donnera le coup d'assommoir. Ces braves gens du corps du Sud, le sachant venir

d'Yverdon, l'attendront sans doute sur leur gauche, par la Menthue et Boulens. Pas si gracieux que ça ! C'est sur leur droite, peut-être même sur leurs revers de droite, qu'il tombera à l'improviste. Ce n'est pas pour rien qu'il a été coucher à Moudon. Il partira de cette bonne ville le 5 octobre au matin, de manière à déboucher à 9 heures sur le moulin de Peney, puis de là sur Villars-Mendraz, sur Montaubion et environs, pour dominer les hauteurs du passage de la Menthue sur Dommartin et ce village même, dont il prendrait enfin possession.

A 8 1/2 heures, l'artillerie tire son premier coup. C'est plutôt un signal ou un essai de déchirer le brouillard qui, mêlé de pluie et de neige, recouvre d'un voile épais tous les combattants. Mais on sait ceux-ci à leurs postes. La 1ra ligne de l'infanterie du corps du Sud est massée en partie à l'est du village de Chapelle; son artillerie l'appuie en se plaçant à la croisée des routes de St-Cierges à Chapelle et de Chapelle à Martherenges. On se canonne gentiment.

Le feu s'anime peu à peu, sans autre incident qu'un accroissement correspondant des froides averses qui transpercent hommes, chevaux et terrain.

M. le conseiller fédéral Hertenstein, chef du Département militaire suisse, qui assiste vaillamment à ce déluge, prend un peu pitié de ses victimes, et par son ordre le combat est suspendu à 9 1/2 heures. On le reprendra en se bornant à la défense et à l'attaque du passage de la Menthue, essentiellement par les grandes routes de Naz et de Dommartin.

Le corps du Sud, qui était déjà très menacé à droite et à revers par les carabiniers, va occuper les hauteurs de Naz, nouvelle et ancienne route; celles de Dommartin sur la droite restent tenues par un peloton de dragons et le 8o bataillon.

Pour attaquer ces positions qui sont naturellement très fortes, le corps du Nord se répartit en trois subdivisions:

A gauche les carabiniers, qui n'ont qu'à suivre, avec quelques légères modifications, leur premier programme, se portent sur Montaubion et Dommartin.

Au centre, le lieutenant-colonel David, avec deux pelotons de dragons, les 4o et 6o bataillons, et la batterie no 3, se relie aux carabiniers pour marcher aussi sur Montaubion et Dommartin.

A droite, le major L. Favre, avec son 5 bataillon, un peloton de dragons et la batterie no 4, marche sur Naz par Peyres-Possens et la grande route d'Echallens.

Bien que fort gênée par la pluie et par l'état des terres, cette manœuvre s'exécute convenablement. Une canonnade nourrie s'échange entre les deux berges de la Menthue. Une partie du corps du Sud, serrée de près aux environs de Chardonnay et de Montaubion, se replie successivement avec ordre et méthode, un peu plus

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