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résultant du tort que vous m'avez causé

pour m'avoir induit en erreur. Car, en achetant votre maison, je comptais avoir une maison sûre, libre, telle que je l'apercevais et telle qu'il me la fallait pour mon commerce, et non pas une maison chargée de servitudes et notamment d'un passage. »

76.

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Il en serait de même si vous m'aviez vendu cette maison dans sa totalité, tandis que vous n'étiez propriétaire que d'une partie. C'était la maison entière que je voulais acheter et non simplement ce qui vous en appartenait.' »

Évidemment, dans ces deux espèces, le dol est accidentel par son objet, mais sa gravité est telle, qu'il est certain que la partie, quelle que fût d'ailleurs son intention, n'aurait pas donné suite à son projet, si elle avait connu la vérité. Il est donc juste de lui permettre de revenir contre son engagement et de briser un acte qui n'est plus en relation avec ses intentions.

77. Dans la vente des choses mobilières, le dol sur la qualité équivaut au dol substantiel et en produit les effets. Dans les affaires commerciales surtout, c'est la qualité de la denrée qui forme le plus ordinairement la matière de la vente, dès-lors le dol, portant sur la matière même du contrat, aurait pour conséquence son annulation.

Si la chose achetée était un objet certain, accepté

1 Merlin, Rép., vo dol, no 5.

après avoir été examiné et choisi, l'infériorité de la qualité, déguisée à l'aide de manoeuvres ou artifices, ne constituerait plus qu'un dol accidentel.

Il résulte, de ce qui précède, qu'il n'y a véritablement dol accidentel qu'aux deux conditions suivantes : 1o que l'erreur créée par les manœuvres frauduleuses ait porté sur une des qualités de la chose ou sur le prix; 2° que la qualité dissimulée ne soit pas d'une nature telle que sa connaissance eût infailliblement empêché le contrat. La première de ces conditions est facilement appréciable; la seconde est abandonnée à l'arbitrage des tribunaux.

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78. Le dol direct est celui imputable à la partie elle-même. 79. Dans quelle catégorie doit-on placer le dol du manda

taire ?

80. Doctrine du droit romain sur le mandataire institué

ou légal.

81. Sous l'empire du Code, le mandant répond même des dommages-intérêts dus au plaignant.

82. Il n'en est pas de même du mineur et autres incapables, pour eux tout se borne à la restitution du béné fice illégitime.

83. Arrêt de la Cour de Grenoble contre un mineur.

84. Caractères du dol indirect. Exemples.

85. La parenté entre l'auteur du dol et la partie en profitant

ne change pas la nature du dol. Mais elle peut influer sur la question de complicité par connaissance.

86. Effets de la complicité, quelle qu'elle soit.

87. Arrêt notable de la Cour d'Agen.

88. Caractère juridique de cet arrêt.

78. - Le dol est direct toutes les fois qu'il est imputable à la partie contractante, c'est celui que prévoit l'article 1116 du Code civil. C'est ce dol que les Romains appelaient personnel, qualification depuis consacrée par une doctrine constante.

Mais le dol, quoique non imputable à la partie personnellement, est quelquefois susceptible de produire les effets du dol direct. C'est ce qui se réalise lorsque cette partie, non présente à l'acte, y a stipulé par le ministère d'un tiers.

79. - On connaît la maxime qui mandat ipse fecisse videtur; de là cette conséquence que le dol consommé par le mandataire est présumé l'œuvre du mandant, avec d'autant plus de raison que ce dernier profitera seul des avantages en provenant. Admettre qu'il pût, dans un cas quelconque, retenir ces avantages, serait encourager la fraude et donner naissance aux plus graves abus. La décision contraire, plus conforme d'ailleurs à la morale et à la justice, doit être accueillie sans hésitation.

80. C'est ce qu'avait fait la législation romaine : Si is procurator sit, cui omnium bonorum administratio concessa de omni dolo ejus excipi posse. Ainsi le dol du représentant rejaillissait contre le représenté. Il en était

de même de celui de l'esclave contre son maître, de celui des personnes placées sous sa dépendance contre celui dont elles dépendaient. '

La rigueur du principe atteignait même le mineur qu'on déclarait responsable du dol de son tuteur: Dicendum sive quis emerit à tutore rem pupilli, sive contractum sit cum eo in rem pupilli, sive dolo quid tutor fecerit, et ex eo pupillus locupletior factus est, pupillo nocere debet.2

81.

Nos lois actuelles ne pouvaient déroger à de tels principes. Aussi doit-on encore admettre que le dol, non-seulement du mandataire général, mais encore du mandataire particulier, dans ce qui a fait l'objet du mandat, ne saurait profiter au mandant. Dès-lors on sera recevable à poursuivre contre celui-ci la réparation due à celui qui a été trompé.

Cette réparation comprend, outre la nullité de l'acte, les dommages-intérêts couvrant le préjudice souffert. On arrive à cette décision, non pas seulement par les principes relatifs à la responsabilité du mandant, mais encore par application de l'article 1382. Le dol est ici la conséquence directe du mandat, or, il y a faute de la part de celui qui a donné ses pouvoirs à quelqu'un capable de recourir au dol, et cette faute ayant occasioné un préjudice, l'auteur en doit la réparation, sauf son recours contre le mandataire.

1 L. 4, SS 17 et 18, Dig. de doli mali et metus except. * Ibid., § 23.

82.

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Quant aux mineurs, aux interdits, aux femmes mariées, ils ne peuvent non plus profiter du dol commis par leur représentant légal. Mais, par rapport à eux, tout doit se réduire à la restitution du bénéfice acquis illégitimement, sans qu'ils puissent être jamais passibles d'aucuns dommages-intérêts. La raison en est que, par rapport à eux, il s'agit d'un mandat purement légal dont ils doivent subir les effets, et qu'ils ne peuvent ni rétracter ni empêcher. Or, s'il est juste de leur prohiber de s'enrichir par la mauvaise foi de leur représentant, il ne le serait à aucun titre de permettre que leur patrimoine personnel eût à souffrir des conséquences de cette mauvaise foi.

83. La Cour d'appel de Grenoble a eu à faire l'application au mineur des principes ci-dessus, dans l'espèce que voici :

Un sieur Perrin avait donné un immeuble à son petitfils. La donation avait été acceptée, pour celui-ci, par son père, fils du donateur.

Plus de dix ans après la transcription, le donataire poursuit la radiation des inscriptions grevant l'immeuble donné du chef de son aïeul. Cette demande était fondée sur l'article 2265 du Code civil.

Le créancier contesté soutient que la donation a été faite en fraude de ses droits, il en demande en conséquence la nullité. Le mineur répond qu'il était, lui, incapable de mauvaise foi au moment de la donation, et que conséquemment rien ne s'est opposé à la prescription décennale.

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