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mon Formulaire de procédure, t. I, p. 271, note 1.

Il faut, pour que la décision soit réputée contradictoire, que, lors du jugement, le tribunal soit composé des mêmes juges que lors de la pose des qualités. Il est difficile de comprendre comment la cour de Nîmes a pu méconnaître cette règle par son arrêt du 13 février 1848 (J. Av., t. LXXIII, p. 461, art. 506); il est d'ailleurs évident que, lorsque les qualités d'un jugement ou d'un arrêt constatent que dans l'instance les qualités ont été posées et les conclusions contradictoirement prises, le tribunal ou la cour ne peut pas, parce qu'au jour fixé pour les plaidoiries l'avoué du demandeur ne se présente pas, se dispenser d'examiner les conclusions de ce demandeur, et rendre contre lui un jugement ou un arrêt par défaut; cass., 30 novembre 1853 (t. LXXIX, p. 205, art. 1762). Lorsqu'une demande en réduction de droits d'enregistrement est formée, et que le directeur, dans le mémoire qu'il fait signifier, conclut à ce que l'exploit introductif d'instance soit déclaré nul et l'adversaire débouté de sa demande, ajoutant qu'il ne discutera le fond qu'autant que cette exception ne sera pas admise; que, de son côté, le défendeur, dans le mémoire en réponse, discute l'exception et le fond et que la régie ne répond pas à ce mémoire, le jugement, qui statue à la fois sur l'exception et le fond du procès, est contradictoire; cass., 2 février 1857 (J. Av., t. LXXII, p. 284, art. 130) (1).

614. - Add. La décision doit être considérée comme étant par défaut, quand l'avoué présent à l'audience refuse de plaider en demandant acte de ce que son client lui a retiré les pièces. C'est par un oubli des principes que la cour de Nîmes a jugé le contraire par l'arrêt, cité sous la question précédente, du 13 février 1848. Il en serait autrement si déjà la cause avait été conclue. La décision serait aussi par défaut quand même l'avoué qui refuse de conclure n'aurait pas reçu d'avenir; il ne saurait exciper du défaut d'avenir pour faire annuler la procédure; cass., 1er février 1848 (J. Av., t. LXXVI, p. 510, art. 1081 bis).— Mais si l'avoué constitué n'a pas reçu d'avenir, le jugement rendu contre son client doit être annulé; Paris, 21 avril 1849 (J. Av., t. LXXIV, p. 539, art. 760).

(1) Est par défaut, l'arrêt qui, après qu'il a été statué sur diverses fins de non-recevoir et exceptions, a été rendu sans que l'une des parties ait conclu au fond. Liége, 7 février 1863 (Pas. 1863. 147).

- Lorsque à une première audience les parties ont contradictoirement pris leurs conclusions, le jugement rendu à une seconde audience, sur le défaut de plaider de l'une des parties, est contradictoire, quand même les juges qui prononcent le jugement n'auraient pas assisté à la prise des conclusions. Bruxelles, 7 avril 1862 (Pas. 1862. 162).

- Le jugement qui intervient après que des conclusions au fond ont été prises à l'audience, n'est contradictoire que si ces conclusions ont été prises devant les mêmes magistrats qui rendent ce jugement. Bruxelles, 14 juillet 1862 (Pas. 1863. 201).

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Lorsque dans une instance en validité de saisiearrêt, les conclusions du demandeur ne tendent qu'à une communication de pièces et à un sursis, alors que le défendeur conclut à ce que la saisie soit déclarée non recevable et mal fondée, ces dernières conclusions impliquant le rejet de toutes exceptions préjudicielles, le tribunal est autorisé à prononcer au fond par défaut; le jugement rendu dans ces circonstances est susceptible d'opposition et d'appel; Lyon, 19 décembre 1851 (Journal des arrêts, 1852, p. 11).

Mais il n'y a qu'un dépôt régulier de conclusions qui puisse avoir pour effet de rendre la décision contradictoire; par conséquent, un jugement rendu sans que les conclusions des parties aient été respectivement prises sur la barre, à l'audience, et lorsque l'avoué de l'une d'elles s'est borné à remettre les conclusions au président, en dehors de l'audience, après que la cause avait été mise en délibéré, est un jugement par défaut, faute de conclure; Orléans, 2 mars 1847 (J. Av., t. LXXIII, p. 73, art. 348).

614 bis. Add. La cour de Paris a donné raison au système que j'ai développé au texte, en jugeant, le 24 juillet 1849 (J. Av., t. LXXIV, p. 578, art. 778), que dans une instance intéressant le domaine de l'Etat, le jugement rendu sur la production d'un mémoire, au nom du préfet qui n'a pas constitué avoué, et sur avenir donné par le ministère public, est un jugement contradictoire; et que le jugement qui intervient, par suite de la continuation de la cause en l'état, sans qu'aucunes conclusions aient été prises par le préfet ou en son nom, est un jugement par dé faut, faute de conclure, qui ne peut être atteint par la péremption, faute d'exécution dans les six mois.

-

615 Add. Conformément à la doctrine de M. BONCENNE, la cour de Rouen a décidé, le 23 octobre 1854 (Journal de cette cour, 1855, p. 99), qu'un jugement définitif doit être réputé par défaut, et, par conséquent, susceptible d'opposition, quand, après un premier jugement interlocutoire, lors duquel les parties avaient conclu au fond, il n'a pas été pris de conclusions par l'une d'elles. La cour de Douai avait déjà adopté la même solution par un arrêt du 6 mai 1844 (J. Av., t. LXVII, p. 447); mais dans l'espèce

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- Lors même que des conclusions ont été contradictoirement prises à l'audience, le jugement qui intervient sur avenir aux fins de poser de nouveau qualités est par défaut, si le défendeur ne comparaît pas, et alors notamment que les magistrats qui ont rendu ce jugement ne sont pas ceux devant lesquels les conclusions avaient précédémment été prises. Liége, 5 février 1862 (Pas. 1863. 205).

- Lorsqu'un tribunal, en conséquence des conclusions qu'il déclare avoir été échangées au fond, statue contradictoirement, il ne lui appartient pas de rétracter sa décision et de la considérer comme rendue par défaut. — Ce serait méconnaître l'autorité de la chose jugée et non rectifier simplement une erreur de qualification. Bruxelles, 28 décembre 1863, 12 janvier et 10 février 1864 (Pas. 1864. 283). [ÉD. B.]

jugée par la cour de Douai, le demandeur avait changé et même augmenté ses conclusions primitives, de sorte que les conclusions antérieurement prises sur le fond par le défendeur ne répondaient plus à la nouvelle physionomie donnée au litige par le demandeur. Le tribunal civil de Toulouse, jugement du 16 mars 1844 (t. LXXII, p. 43, art. 13), a décidé que si lors d'une liquidation pour laquelle un juge a été commis, il y a renvoi à l'audience, le jugement par défaut rendu sur le rapport du juge-commissaire est susceptible d'opposition. J'ai adhéré à cette solution, qui doit être rapprochée de celles des cours de Toulouse et d'Orléans citées au texte.

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616 ter. Add. Jugé, contrairement à l'avis indiqué au texte, que lorsque le défendeur fait défaut, le jugement ne peut suppléer les nullités qui existeraient dans l'exploit, alors même qu'elles porteraient sur les énonciations qui servent à établir la notification réelle, et qu'elles seraient proposées par le ministère public; Bourges, 30 décembre 1843 (J. Av., t. LXVII, p. 423). 616 quater. Add. La qualification erronée donnée à un jugement ne saurait en modifier la nature. Ainsi, un jugement contradictoire conserve son caractère, quoiqu'il soit qualifié par défaut ; trib. civ. de Mâcon, 11 février 1848 (J. Av., t. LXXIII, p. 440, art. 493); l'opposition ne serait pas recevable, et la partie dont les conclusions ont été adjugées par ce jugement serait admise à soutenir l'opposition non recevable, quoiqu'elle ne se fût pas pourvue par appel contre cette fausse qualification, et quoiqu'elle eût défendu au fond dans l'instance en débouté d'opposition; Paris, 27 novembre 1847 (ibid., p. 204, art. 403).

617. Add. Plusieurs décisions ont éclairé d'un jour nouveau l'importante question examinée au texte et ont, en général, confirmé le système que j'ai développé (1).

D'abord, en ce qui touche le cas où c'est en appel que le défendeur fait défaut, la cour de cassation a jugé, le 31 mars 1845 (J. Av., t. LXIX, p. 561), que la cour, saisie de l'appel, peut confirmer le jugement de première instance sans vérifier les conclusions de l'intimé, et que ce principe est applicable même en matière de séparation de biens. La cour de Douai a rendu une décision semblable le 21 avril 1847 (J. Av., t. LXXIII, p. 29, art. 332). Elle a dit que la cour ne doit pas entrer dans l'examen de la sentence des premiers juges; cela est vrai, mais elle a appuyé sa décision sur ce motif, que la vérification de la demande n'est exigée que dans le cas où c'est le défendeur qui ne se présente pas. Ce principe, posé d'une manière absolue, n'est pas exact; car, d'après moi, il est facultatif au défendeur de demander congé purement et simplement ou de conclure à la vérification de ses

(1) Voy. Quest. 1686 septies.

moyens tendant au rejet de la demande. La cour de Toulouse a jugé, avec raison, le 18 décembre 1855 (J. Av., t. L, p. 22), que, sur l'opposition de l'appelant, l'intimé peut soutenir que le jugement est rendu en dernier ressort. Dès là que la position de l'intimé qui demande défaut-congé contre l'appelant n'est point celle d'un demandeur ordinaire, que ces conclusions ne sont pas censées concerner le fond du procès, mais tendre simplement à faire déclarer, par fin de nonrecevoir, l'appel déserté, et que la cour de cassation rejette en ce cas les pourvois comme non recevables eux-mêmes, quand il n'est pas contesté que l'appelant n'avait pas comparu, on doit en tirer la conséquence forcée, sans se préoccuper du jugement par défaut, en général, et des effets des oppositions ordinaires, qu'en ce cas, tout spécial, l'intimé, quoiqu'il n'ait fait aucune réserve, peut, sur l'opposition, conclure avec autant de liberté que s'il n'y avait point eu d'arrêt de défaut; et que, dans l'hypothèse où il a requis défaut contre l'appelant, en demandant le rejet de l'appel comme tardif, et, au fond, par les motifs des premiers juges, il peut, sur l'opposition de l'appelant, reproduire sa fiu de nonrecevoir, quoiqu'il ait signifié l'arrêt par lequel la cour avait donné défaut, en se bornant à adopter les motifs du jugement; Bastia, 18 novembre 1846 (J. Av., t. LXXII, p. 153, art. 70).

Ce qui a jeté quelques doutes sur cette position de l'appelant et de l'intimé, c'est l'usage, dans certaines cours, de ne pas requérir, au nom de l'intimé, le rejet pur et simple de l'appel, mais de conclure à la confirmation du jugement, en demandant à la cour d'adopter les motifs des premiers juges. Lorsqu'un arrêt accueille ces conclusions, il ne renferme plus un simple rejet d'appel par fin de non-recevoir, résultant du défaut de comparution; il juge le fond; et si, sur le fond, le jugement de première instance a violé une loi, l'arrêt qui s'est approprié les motifs donnés par le premier juge peut être attaqué devant la cour de cassation par l'appelant, quoiqu'il ait fait défaut. Il en est de même du cas où l'intimé a fait rejeter l'appel pour nullité d'exploit, ou pour défaut de qualité de l'appelant, ou pour cause de dernier ressort. Dans ces divers cas, la cour de cassation ne peut plus rejeterle pourvoi, sur le motif qu'aucune loi n'est violée, puisque l'intimé et la cour ne se sont pas arrêtés à l'absence du demandeur, ils ne se sont pas appuyés uniquement sur la fin de non-recevoir qui en résulte invinciblement. Ce mode de procéder offre donc le grave inconvénient d'ouvrir à l'appelant qui a fait défaut, la voie du recours en cassation, qui lui est interdite, si l'on procède comme j'ai dit plus haut.

Dans les affaires où les motifs du tribunal de première instance sont fort longs, l'arrêt par défaut entraîne des frais considérables. S'il adopte ces motifs, ils doivent être transcrits dans l'expédition et signifiés. On peut éviter ces frais, qui sont de nature à empêcher beaucoup de parties de tenter la voie d'appel.

Relativement au cas où c'est en première instance que le demandeur fait défaut, la cour

d'Orléans a jugé, le 22 mai 1847 (J. Av., t. LXXII, p. 644, art. 298), que le jugement de défautcongé termine l'instance introduite par le demandeur, produit contre lui la chose jugée et ouvre à son profit la voie de l'opposition. La cour de Toulouse a rendu une décision semblable en matière commerciale, les 21 août et 27 novembre 1847 (J. Av., t. LXXII, p. 671, art. 304, et t. LXXIII, p. 428, art. 425, § 155); l'opposition a été déclarée recevable par les cours de cassation, 30 novembre 1852 (J. Av., t. LXXX, p. 35, article 2002), et de Bordeaux, 11 février 1853 (J. Av., t. LXXVIII, p.526, art. ́1621). Les cours de Douai, 20 janvier 1855 (Jour. de cette cour, 1855, p. 114), et de Metz, 10 août 1855 (J. Av., t. LXXXI, p. 313, art. 2377), se sont prononcées en faveur de la chose jugée, comme celle d'Orléans. Cette dernière cour a pensé que la question était digne de son examen particulier, et son arrêt est motivé d'une manière très-complète.

La jurisprudence n'est pas unanime. On peut opposer un arrêt de la cour de Metz du 24 décembre 1844 (J. Av., t. LXIX, p. 576). Quoique cet arrêt soit rendu sur la position du défautjoint, néanmoins il s'est prononcé sur le principe. Je me suis occupé de cette question spéciale, Quest. 632.

Les recueils ont rapporté deux arrêts formellement contraires à la décision de la cour d'Orléans. Le premier, du 31 janvier 1844, rendu par la cour de Besançon (J. Av., t. LXXII, p. 644, art. 298), a rejeté l'appel du demandeur sans donner d'autres motifs qu'aucunes conclusions n'avaient été prises en première instance, et que l'affaire n'ayant pas été examinée, les appelants étaient non recevables. C'est donner la thèse pour raison, car dans tout jugement le dispositif fait la loi des parties. Un jugement sans motifs peut acquérir la force de chose jugée, et le tribunal avait ainsi prouoncé Donné congé-défaut

contre le demandeur, faute par son avoué con«stitué de plaider, et pour le profit, le déboute purement et simplement de ses fins et conclu«sions, et le condamne aux dépens. » Ce dispositif, placé en regard de la demande, ne venait-il pas relaxer le défendeur? Qu'importe qu'il apparût au juge d'appel que les conclusions de la défense ou la demande n'eussent pas été examinées? Le juge avait statué sur le fond. Qui ne sait au Palais que sur cinquante défauts pris par des demandeurs, il y en a quarante-neuf qui sont accordés sans la moindre vérification? Une cour pourrait-elle repousser l'appel d'un défendeur en disant qu'il résulte clairement des termes mêmes du jugement que la demande n'a pas été vérifiée? Tout au plus cela pourrait-il former un grief d'appel.

Je répète ici ce quej'ai dit au texte : tout dépend de la volonté du défendeur; si, en l'absence du demandeur, il conclut à l'annulation pure et simple de la demande, le dispositif du jugement accueillera ses conclusions, et ce dispositif ne pourra pas être opposé comme chose jugeant le fond du litige. Si, au contraire, il conclut à ce que la demande soit rejetée, le dispositif sera rédigé comme celui qui était déféré à la cour de

Besançon, et il produira tous les effets de la chose jugée. Conf. BIOCHE (Journ. 1837, p. 481, art. 962). M. Gilbert, sur les deux arrêts de la cour de Poitiers, dont l'un, du 6 avril 1837, a été cité au texte, p. 23, note 1 (Devill. et Carette, 1837,2, p. 417), examine avec soin la doctrineet la jurisprudence, et conclut ainsi : «Nous croyons que l'opposition ou l'appel est une nécessité quand le jugement de défaut prononce sur la demande elle-même, au lieu de se borner à donner congé au demandeur; et que, quand le jugement porte un simple défaut-congé, il y a, pour le demandeur, faculté d'agir, à son choix, ou par l'une de ces deux voies ou par demande nouvelle. Telle est aussi l'opinion exprimée par M. GAUTHIER, l'un des rédacteurs du Journal du Palais (1857, p. 225), à l'occasion des arrêts de la cour suprême des 17 juin 1856 et 24 février 1857. Le premier de ces arrêts porte que le défaut-congé est fondé sur le refus que fait le demandeur de comparaître devant la justice pour soutenir la demande; qu'il suffit donc, pour la régularité de la décision qui le prononce, qu'elle ait été rendue après la constitution d'avoué de la part du défendeur, et faute par le demandeur de comparaître, quoique dûment sommé; qu'à la différence du jugement par défaut entre le défendeur, qui ne peut être rendu qu'autant que les conclusions ont été reconnues justes et bien vérifiées, les art. 154 et 434 n'exigent pas cette vérification pour le défaut-congé ; qu'ainsi il n'est pas nécessaire que cette décision soit motivée pour qu'elle soit régulière; que la partie du jugement de défaut-congé qui déclare le demandeur non recevable dans sa demande, l'en déboute et le condamne aux dépens, n'est qu'une conséquence qui est renfermée dans le défaut-congé. - Cet arrêt a rejeté le pourvoi dirigé contre une décision de la cour de Douai et confirmative d'un jugement ainsi conçu : Considérant que le demandeur ne comparaissant pas, ni son avoué, il y a lieu, aux termes de l'art. 154, de prononcer le défaut requis à sa charge, le tribunal donne défaut-congé contre le demandeur et contre son avoué, et, pour le profit, le déclare non recevable de sa demande, l'en déboute et le condamne aux dépens. » Le second arrêt de la cour suprême déclare que le défaut-congé n'est rendu au profit du défendeur que, lorsque aux termes des articles 454, 150 et 154, le demandeur désertant la demande, le défendeur doit être renvoyé, par cela seul que le demandeur n'a pas comparu sans qu'il y ait lieu à vérification des conclusions et nécessité de donner d'autres motifs. Dans l'espèce de ce dernier arrêt, il s'agissait d'un jugement rendu par défaut contre le défendeur sur l'opposition de celui-ci; le tribunal avait rendu, après que les conclusions avaient été contradictoirement prises, un jugement par défaut, faute de plaider. La cour a décidé qu'en pareil cas ce n'est plus un simple défaut-congé, mais qu'il faut vérifier les conclusions prises et donner des motifs à l'appui, alors surtout que les juges prononcent des dommages-intérês contre le demandeur défaillant; la solution, sous ce rapport, ne pouvait pas être douteuse. M. GAUTHIER se livre à une

étude approfondie de la doctrine et de la juris prudence sur le caractère du défaut-congé, et il adopte la distinction posée ci-dessus.

J'ajoute que les deux arrêts précités disent que les conclusions du défendeur ne seront pas vérifiées quand il conclura à son relaxe pur et simple motivé uniquement sur le défaut du demandeur, mais qu'ils ne décident pas qu'il n'y aura pas lieu à vérification quand le mérite de l'action sera discuté. H en résulte seulement que débouter le demandeur de sa demande, et le condamner aux dépens est la conséquence du défaut-congé. La cour ne s'est pas exprimée sur l'étendue et les effets d'un tel dispositif. Faut-il admettre qu'il n'entraîne pas chose jugée et ne met pas obstacle à ce que le demandeur agisse de nouveau? Dans l'état actuel de la jurisprudence, il est prudent de ne pas laisser acquérir la chose jugée à un jugement de défaut-congé, même lorsque les conclusions n'ont pas été vérifiées.

Dans un arrêt du 8 mai 1844 (J. Av., t. LXXII, p. 644, art. 298), la cour de Dijon a rejeté l'appel sans donner aucun motif juridique, et en se fondant uniquement sur ce qu'un défaut-congé n'est susceptible ni d'opposition ni d'appel. C'était là la proposition à démontrer.

Je pense avec M. BIOCHE (Journ., 1837, p. 271, art. 790), et contrairement à l'opinion de M. THOMINE-DESMAZURES, t. I, p. 283, que l'obligation de vérifier les conclusions des demandeurs s'applique au défaut faute de conclure, comme à celui faute de comparaître. Conf., cass., 24 février 1857 (J. P., 1857, p. 225).

619.- Add. La vérification à laquelle doivent procéder les juges ne comporte pas, en général, d'expertise ni d'enquête, du moins dans les matières à raison dequelles la loi permet de transiger. Il est évident, en effet, queles juges ne pourraient pas, sans une enquête, tenir pour constants les faits articulés à l'appui d'une demande en séparation de corps; mais, pour les matières ordinaires, les juges peuvent parfaitement condamner le défaillant, quand même la demande serait supérieure à 150 fr., et que le demandeur ne produirait ni titre ni commencement de preuve par écrit. Ils pourraient se fonder uniquement sur les documents de la cause; cass., 10 juin 1856 (J. Av., t. LXXXII, p. 177, art. 2635). Le tribunal qui tient pour reconnu un titre sous seing privé peut, même dans un jugement par défaut, le déclarer exécutoire sur les biens de celui qui l'asouscrit; Paris, 3 août 1844 (DALL., 1852, 2, p.10). Voy. aussi supra, Quest. 150 et Quest. 1147. 620. Add. La cour de Caen a jugé, les 26 décembre 1855 et 9 décembre 1856 (J. Av., t. LXXXII, p. 464, art. 2766), que toute demande

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qui n'a pas été comprise dans l'assignation ou préalablement signifiée à la partie défaillante est non recevable lors d'un jugement ou arrêt par défaut; la même solution résulte d'un arrêt de la cour de Paris du 9 août 1855 (t. LXXX, p. 489, art. 2175). Voy. supra, Quest. 615.

Art. 152.

621 ter.- Add. Si un deuxième ou troisième jugement par défaut avait été occasionné par la mise en cause tardive de certaines parties, il n'y aurait pas lieu de déclarer nul un semblable jugement seulement, les frais seraient frustratoires; tribunal civil de Condom, 25 mai 1848 (J. Av., t. LXXV, p. 527, art. 939); d'après la cour de Bordeaux, arrêt du 4 janvier 1858 (Journal de cette cour, 1858, p. 1), la disposition de l'art. 151 n'est pas obligatoire devant les tribunaux de Art. 153 (1).

commerce.

621 quinquies. Add. Il y a lieu de procéder par la voie du défaut-joint toutes les fois que de plusieurs parties assignées, les unes comparaissent et les autres font défaut, quand même le demandeur serait lui-même opposant envers un précédent jugement par défaut; par suite, lorsqu'une partie contre laquelle a été obtenu un jugement par défaut se rend opposante à ce jugement, et que toutes les parties assignées ne comparaissent pas sur l'instance d'opposition, il y a lieu de rendre un jugement de défaut profit-joint et d'ordonner la réassignation des défaillants; Caen, 30 juin 1853 (Jour. de cette cour, 1853, p. 252). De ce que le jugement rendu à la suite de défaut-joint est contradictoire, il suit que l'opposition au jugement qui adjuge le profit d'un défaut-joint n'est pas recevable, quoique celui des deux défendeurs originaires qui avait comparu soit mis hors d'instance par ce jugement;-la péremption de l'art. 156 ne lui est pas applicable; cass., 12 mai 1847 (J. Av., t. LXXIII, p, 112, art. 370).

La même cour a jugé avec raison, le 26 février 1846 (J. Av., t. LXX, p. 312), que l'art. 153 doit s'appliquer en matière d'enregistrement. Dans les instances dirigées contre les femmes mariées, on ne demande jamais un jugement de jonction de défaut contre le mari et la femme, lorsque le mari, assigné conjointement, mais pour autorisation seulement, ne comparaît pas. La justice autorise d'office, et l'on conçoit qu'en pareille circonstance, il soit parfaitement inutile d'appliquer l'art. 153; cass., 29 juin 1853 (J. Av., t. LXXIX, p. 78, art. 1717). Mais sauf cette exception, lorsque certaines parties ne comparaissent pas, il est impossible d'éviter le défaut-joint, et le deman

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deur ne pourrait se désister à l'audience vis-àvis des parties défaillantes et conclure à ce qu'il fût passé outre aux débats. Un pareil désistement serait nul comme n'ayant pas été signifié aux défaillants à personne ou domicile, afin qu'ils fussent mis en demeure de l'accepter ou de le refuser, et une décision de défaut-joint pourrait seule régulariser la procédure; Rennes, 18 août 1853 (J. Av., t. LXXIX, p. 394, art. 1841).

Un jugement du tribunal d'Anvers (Belgique jud., 1854, p. 984) a jugé, le 14 août 1852, contrairement à la doctrine exposée au texte, que l'article 153 n'est pas applicable au tiers saisi appelé en intervention par le saisi défendeur.

Enfin, relativement aux tribunaux de commerce, la question est toujours controversée en jurisprudence. La cour de Paris, par arrêt du 21 juillet 1846 (J. Av., t. LXXII, p. 495, art. 233), et le tribunal de commerce de la Seine, par jugement du 15 juin 1857 (Gazette des Trib., 1857, no 9429), ont déclaré l'art. 153 applicable, tandis que la cour de Rouen a décidé le contraire par deux arrêts, l'un du 24 avril 1845 (J. Av., t: LXIX, p. 566) et l'autre du 18 janv. 1855 (J. Av., t. LXXX, p. 442, art. 2148). Voy. Quest. 1542.

Voy. en ce qui concerne la reprise d'instance, Quest. 1292.

621 sexies (1).—Add. Conf. Toulouse, 10 août 1842 (J. Av., t. LXXII, p. 682, art. 311); Rouen, 25 janvier 1855 (Journ. de cette cour, 1855, p. 139); contra, Limoges, 16 février 1842 (J. P., t. İl de 1852, p. 723); Rennes, 9 juillet 1852 (DALL., 1852, 2, 191). Dès là que je décide, avec la graude majorité des arrêts et des auteurs, qu'en matière de garantie la procédure de défaut-joint ne doit pas être suivie, je suis forcé d'admettre, avec la cour de Lyon, que le défaut-joint prononcé contre le garant ne l'oblige pas et ne lui enlève point le droit d'opposition; 14 mai 1851 (J. Av., t. LXXVI, p. 545, art. 1161). Mais il y a encore controverse pour le cas où la demande en garantie est faite après l'expiration des délais accordés à cet égard par la loi au demandeur originaire. Cette controverse s'est ravivée dans une espèce sur laquelle la cour de Toulouse a jugé, le 19 juillet 1848 (J. Av., t. LXXIII, p. 572, art. 556) :

1° Que le demandeur qui n'a point interjeté appel contre le garant partie en première instance, ne doit pas faire prononcer un défautjoint, lorsque le garanti, qui avait gagné son procès en première instance, assigne de nouveau en garantie son vendeur. et que ce vendeur fait défaut;

2° Que dans le cas où l'appelé en garantie fait défaut, le garanti peut immédiatement prendre défaut contre lui et obtenir sa garantie pour la condamnation contradictoire, rendue au profit du demandeur principal.

Ce qui faisait difficulté, c'était cette double circonstance: la première, que les parties présentes devant la cour avaient toutes été contradictoirement entendues en première instance, d'où il semblait résulter que la cause était liée entre elles, et qu'il importait peu que l'une d'elles

(1) Voy. aussi Quest. 1273 ter.

eût été assignée par l'intimé ou par l'appelant ; la seconde, que la position de l'intimé était bizarre, par rapport à son garant, car il ne pouvait rien obtenir contre lui avant d'avoir été condamné: il devait donc tenir en cause ce garant jusqu'à l'arrêt définitif; il ne pouvait donc pas prendre un arrêt de défaut à l'échéance de l'assignation; il devait attendre que l'instruction de l'appel principal fût complète. Cette position, on ne peut pas se le dissimuler, présente une espèce de procédure fort anormale. Quoiqu'on ne puisse disconvenir que le jugement de l'action en garantie se rattache intimement à la décision sur l'appel principal, et qu'elle en soit même une conséquence virtuelle et immédiate, néanmoins je persiste à penser qu'à raison même de la nature d'une action en garantie, l'art. 153 ne peut être appliqué, et que si le garant fait défaut, soit en première instance, soit en appel, la procédure suivie contre lui doit être de lui à celui qui l'appelle à sa garantie, mais ne remonte pas nécessairement au demandeur principal.

Il en serait autrement, si, en première instance, un garant formel avait pris le fait et cause du défendeur, et que celui-ci fût resté en cause. Le demandeur principal aurait dû interjeter appel vis-à-vis de ce garant. Il y aurait lieu alors à défaut-joint. Même solution, si le demandeur avait cru devoir intimer sur l'appel et le garanti et le garant; lui-même alors eût assigné deux parties, et l'une ne comparaissant pas, il eût dû faire rendre un arrêt défaut-joint. Sur cette dernière position, conf. Rennes, 9 juill. 1851 (J. P., t. I de 1852, p. 236).

Quand une demande en garantie reste jointe à la demande principale, si le défendeur en garantie fait défaut, le tribunal doit-il ordonner la réassignation pour statuer conjointement sur les deux demandes? La cour de Colmar ajugé l'affirmative, le 21 juin 1845 (J. Av., t. LXX, p. 50); je pense que, même dans ce cas, il n'y a pas lieu à l'application de l'art. 153. Du reste, le même arrêt décide avec raison que le défendeur en garantie faisant défaut, il n'est pas indispensable, pour prononcer la disjonction et statuer sur la demande principale, si elle est en état, qu'un jugement de défaut profit-joint soit préalablement rendu, et qu'il soit ordonné que le défendeur en garantie, non comparant, sera réassigné. La cour de Caen a déclaré, le 21 février 1851 (J. Av., t. LXXV, p. 481, art. 916), qu'il n'y a pas lieu à défaut-joint lorsque celle des parties qui fait défaut est un débiteur au nom duquel le demandeur, son créancier, agit sans requérir contre lui aucune condamnation, et que ceux qui pourraient craindre une action en garantie de la part du défaillant demandent qu'il soit statué au fond. Dans l'état de la cause, les circonstances ramenées dans cet arrêt sont de nature à justifier cette décision, mais il eût été plus régulier de suivre la procédure prescrite par l'art. 153. Faut-il décider avec le tribunal de Bordeaux, jugement du 25 août 1851 (Journ. des arrêts, 1852, p. 268), que lorsqu'une instance comprend à la fois une action en partage entre cohéritiers et une action en délaissement contre un tiers, si l'un des co

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