Page images
PDF
EPUB

m'Yeare-
4-12-26
12751

2v.

AU LECTEUR.

[ocr errors][merged small]

La révolution du 20 Mars formera, sans doute, l'épisode le plus remarquable de la vie de Napoléon, déjà si féconde en événemens surnaturels. Mon intention n'a point été d'en écrire l'histoire: cette noble tâche est au-dessus de mes forces; j'ai voulu seulement mettre Napoléon en scène, et opposer ses paroles, ses actions, et la vérité, aux assertions erronées de quelques historiens, aux mensonges de l'esprit de parti, et aux outrages de ces écrivains de circonstance habitués à insulter dans le malheur ceux qu'ils ont honorés dans la postérité.

Jusqu'alors on n'avait pu s'accorder sur les motifs et les circonstances qui avaient déterminé l'Empereur à quitter l'île d'Elbe.

a 3

Quelques

737

personnes supposaient qu'il avait agi de son propre mouvement; d'autres, qu'il avait conspiré avec ses partisans la perte des Bourbons. Ces deux suppositions étaient également fausses. On apprendra avec surprise, avec admiration peutêtre, que cette étonnante révolution fut l'ouvrage inoui de deux hommes et de quelques mots.

[ocr errors]

La relation du Colonel Z** déjà si précieuse par les révélations qu'elle renferme, nous paraît devoir fixer sous d'autres rapports l'attention du lecteur. En l'étudiant soigneusement on y découvre le type des défauts, des qualités, des passions, qui, confondus ensemble, forment le caractère, si plein de contrastes, de l'incompréhensible Napoléon. On l'apperçoit tour à tour défiant et expansif, ardent et réservé, entreprenant et irrésolu, vindicatif et généreux, libéral et monarchique. Mais on voit dominer par-dessus tout cette activité, cette force, cette chaleur d'ame, ces inspirations brillantes, et ces déterminations soudaines, qui n'appartiennent qu'aux hommes extraordinaires, qu'aux hommes de génie.

Les conférences que j'eus à Bâle avec l'agent mystérieux du Prince de Metternich, étaient restées ensevelies jusqu'à ce jour dans un profond secret. Les historiens qui m'ont précédé ont raconté, sans autre explication, que le Duc d'Otrante avait mis sous les yeux de l'Empereur, au moment de l'abdication, une lettre de M. de Metternich, et que cette lettre, artificieusement conçue, avait déterminé Napoléon à abdiquer, dans l'espoir que la couronne passerait à son fils. Les détails donnés dans ces Mémoires changeront entièrement les idées qu'on s'était formées de cette lettre et de son influence. Ils confirmeront aussi l'opinion assez généralement répandue que les Souverains Alliés attachaient peu d'importance au rétablissement des Bourbons, et qu'ils auraient volontiers consenti à placer sur le trône le jeune prince Napoléon.

On avait pensé que le fameux décret qui traduisait devant les tribunaux le Prince de Talleyrand et ses illustres complices, avait été rendu à Lyon dans un premier accès de vengeance. On verra qu'il fut le résultat d'une

simple combinaison politique; et la noble résistance que le Général Bertrand (aujourd'hui condamné à mort) crut devoir opposer à cette mesure ajoutera, s'il est possible, à la haute estime que mérite, à tant de titres, ce fidèle ami du. malheur.

Les écrits publiés avant cet ouvrage ne contenaient, non plus, sur l'abdication de Napoléon, que des rapports inexacts ou fabuleux. Certains historiens s'étaient plu à représenter Napoléon dans un état d'accablement pitoyable; d'autres l'avaient dépeint comme le jouet des menaces de M. Regnault St. Jean d'Angely, et des artifices du Duc d'Otrante. Ces Mémoires apprendront que Napoléon, loin d'être tombé dans un état de faiblesse qui ne lui permettait plus de soutenir son sceptre, aspirait au contraire à se faire investir d'une dictature temporaire, et que s'il consentit à abdiquer, ce fut parce que l'attitude énergique des représentans le déconcerta, et qu'il céda à la crainte d'ajouter aux malheurs de l'invasion étrangère, les calamités de la guerre civile.

« PreviousContinue »