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souffrir; mais il est à désirer qu'on cesse de faire de l'extranéité, c'est-à-dire de l'ignorance des besoins du département, la qualité la plus essentielle d'un préfet. Il est à désirer que les préfectures cessent d'être des étapes placées sur la route des ambitieux, qui exploitent les fonctions publiques dans une sorte de course au clocher1.

Les conseils généraux sont essentiellement électifs; mais d'après quel mode?

Les anciens monuments de notre droit administratif nous donnent peu de renseignements sur le système d'élection aux assemblées provinciales; les édits de nos rois sont muets à cet égard. Il paraît que l'ordre du clergé et celui de la noblesse choisissaient dans leur sein des délégués chargés de les représenter; quant aux députés des communes, ils étaient ordinairement élus par le conseil de ville et quelquefois par les con

1 On peut appliquer aux préfets ce que disait Necker des intendants dans son Mémoire sur les administrations provinciales.

« L'intendant le plus rempli de zèle et de connaissances est bientôt suivi par un autre qui dérange ou abandonne les projets de son prédécesseur. Dans l'espace de dix ou douze ans, on les voit aller de Limoges en Roussillon, du Roussillon en Hainaut et du Hainaut en Lorraine: et, à chaque variation, ils perdent le fruit de toutes les connaissances locales qu'ils peuvent avoir acquises. On dirait, à voir ces changements continuels, que l'administration des provinces est une école établie pour les maîtres des requêtes, et que, destinés à gouverner un autre hémisphère, ils viennent en France s'essayer sur différents sols et sur divers caractères, tandis que le plus grand avantage de chaque province devrait toujours être le but, et l'homme le moyen.»>

suls. Des documents de diverses dates rapportés par D. Vaissette, Ménard et autres historiens, prouvent qu'il n'y avait rien de fixe dans ce système. Telle était même la diversité des abus qui avaient altéré les principes primitifs que, dans la plupart des pays d'Etats et particulièrement en Languedoc, le bienfait des administrations locales était affaibli par les vices de la représentation.

Le célèbre édit de 1779, après avoir posé les bases du système provincial, réserva de statuer plus tard sur le mode d'élection; mais la révolution survint avant l'accomplissement de cette promesse.

La loi du 1er janvier 1790 substitua aux assemblées bailliagères et provinciales, des administrations de département, composées de trente-six membres nommés pour quatre ans par les électeurs chargés de choisir les députés à la législature. Elles se divisaient en deux sections l'une, composée de vingt-huit membres, formait le conseil général du département; l'autre, composée de huit membres élus par leurs pairs en assemblée générale, formait le directoire du dépar

tement.

L'administration active appartenait au directoire; le conseil général n'était convoqué qu'une fois l'an pour entendre ses comptes.

L'administration de district ou, pour parler la langue nouvelle, d'arrondissement, était composée de douze membres, dont huit formaient le directoire per

manent.

1 Preuves, t. IV, p. 132.

2 Ibid., t, II, p. 219; t. III, p. 5.

A chacune de ces administrations était attaché un procureur syndic qui n'avait pas voix délibérative, mais qui devait être entendu dans toutes les affaires administratives.

Les conseils d'arrondissement et de département, substitués à leur tour aux administrations de département et de district, furent soumis par la loi du 28 pluviôse an VIII, non-seulement au contrôle, mais à la direction suprême du gouvernement, à qui fut réservé le droit d'en nommer les membres (art. 2, 18 et 19).

La loi du 28 juin 1833 rétablit le principe de l'élection et composa l'assemblée électorale des électeurs et des citoyens portés sur la liste du jury. « Si le nombre est au-dessous de cinquante, dit l'article 3, le complément sera formé par l'appel des citoyens les plus imposés.

« Nul ne sera éligible au conseil général, ajoute l'article 4, s'il ne jouit des droits civils et politiques; si, au jour de son élection, il n'est âgé de vingt-cinq ans, et s'il ne paye, depuis un an au moins, 200 francs de contributions directes dans le département. »

Le cens électoral et le cens d'éligibilité ont été abolis dans les élections générales; doivent-ils l'être également dans les élections départementales? Oui, sans doute; mais à la condition d'être remplacés par des garanties de moralité et de domicile.

Le mode d'élection aux assemblées provinciales varie dans les législations contemporaines de l'Europe. En Allemagne, les conseils provinciaux sont élus par les conseils des cercles; en Belgique, en Hollande, en Espagne, ils sont élus par les colléges électoraux poli

tiques. Le dernier système est plus en harmonie que le premier avec l'esprit démocratique de la France, et plus favorable peut-être aux intérêts généraux; c'est celui que nous adopterons. L'élection sera donc faite au chef-lieu de chaque canton par tous les électeurs politiques domiciliés dans le département; de sorte qu'il y ait autant de membres dans le conseil général que de cantons.

Il y a incompatibilité entre les fonctions de membre du conseil général et celles de préfet et conseiller de préfecture, d'ingénieur, de receveur général et particulier des finances, de directeur des contributions directes et indirectes, des domaines et de l'enregistrement, des douanes, de conservateur et inspecteur des forêts, et en général de tous fonctionnaires et agents appelés à défendre les droits du trésor contre les administrés.

Nul ne peut être membre de plusieurs conseils géné

raux.

Les membres des conseils généraux doivent être élus pour neuf ans; ils sont réélus par tiers tous les trois. ans et indéfiniment rééligibles.

Les fonctions des conseillers généraux sont essentiellement gratuites; leurs pouvoirs doivent être vérifiés par le conseil,

Le nombre des sessions ordinaires des conseils généraux doit être au moins, de deux par an; chacune d'elles peut durer quinze jours.

Toute affaire remise au secrétaire général de la préfecture dix jours avant l'ouverture d'une des sessions

ne peut-être renvoyée à la session suivante, sauf des cas extraordinaires.

Le conseil doit pouvoir se réunir plus souvent. Un décret du chef de l'État est-il nécessaire pour autoriser cette réunion? Nous ne le pensons pas. La convocation du préfet doit suffire. C'est sur les lieux que les questions d'urgence doivent être jugées; l'intérêt de l'État ne saurait être compromis par une réunion extraordinaire du conseil général; s'il sortait de ses attributions administratives, sa résolution serait annulée par le gou

vernement..

Au commencement de la première session, le conseil général doit nommer pour l'année, au scrutin secret et à la majorité absolue des suffrages, son président et son secrétaire.

Le préfet doit, à l'exemple des gouverneurs des provinces belges, des chefs politiques espagnols, des présidents, chefs et conseillers de régence de l'Allemagne, assister à toutes les séances du conseil général, excepté celles où il s'agit de l'examen de ses comptes. Il doit être entendu quand il le demande, mais il n'a pas voix délibérative.

Les séances des conseils généraux sont publiques. Cette garantie introduite dans presque tous les États de l'Europe ne doit cesser que lorsque l'Assemblée juge nécessaire de se former en comité secret.

Les procès-verbaux des séances, signés par le président et par le secrétaire, sont imprimés; un exemplaire est déposé aux archives de la préfecture et dans celles de chaque canton.

La présence de la moitié des membres est nécessaire

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