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ne serait plus employée qu'à porter autour du trêne des Bourbons les expressions de l'amour des Français, et les créations d'un génie ami de l'ordre social. Ferdinand VII, peut-être, a trop fait de mal aux Cortès et aux hommes éclairés de sa nation pour jamais les aimer ; mais si sous son règne l'Espagne ne peut pas être sans inquisition, l'inquisition à coup sûr serait toujours sans bûchers; et dès qu'on aura bien vu que les bûchers ne peuvent jamais être rallumés, il n'y aura de l'inquisition que le nom de redoutable. Le congrès de Vienne s'honorerait aux yeux de la raison humaine, s'il demandait que le nom même de l'inquisition fût aboli à Madrid et à Rome. Le Pape avouerait alors qu'il ne faut pas entreprendre d'épurer ce qui est monstrueux et abhorré.

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J'ai l'honneur d'être, etc.

XXVII. NOUVEAUX DOCUMENS SUR LE 20 MARS.

Tandis que Napoléon défendait dans les plaines de la Champagne la couronne que le peuple français lui avait décernée et que vingt rois alliés cherchaient à lui arracher, le duc d'Otrante accourait d'Italie pour chercher à profiter des événemens dout Paris paraissait devoir être le théâtre. Il arriva trop tard: Naz

poléon venait d'abdiquer, et il ne put être com pris parmi les membres du gouvernement pro visoire, ainsi que ses amis s'en étaient flattés.

Dans les premiers mois de la restauration, les ministres du roi consultèrent le duc d'Otrante sur plusieurs questions importantes, et eurent la sagesse de se conformer à quelquesuns de ses avis. Quelques exclusifs, cependant, et surtout les émigrés, affectaient un grand dédain pour ses lumières: un mot dit dans un salon était la cause de cette disposition. Fouché avait dit que les hommes formés par Bonaparte savaient seuls gouverner. Joignez à cela qu'il émettait hautement l'opinion qu'il n'avait jamais été convaincu de la nécessité de changer les bannières tricolores.

Ce sage conseilleur s'apercevant enfin avec chagrin qu'on commençait à ne plus écouter ses avis, se retira à sa terre de Ferrières. On assure que ce fut à cette époque que deux personnes connues et incapables de lui tendre aucun piége, vinrent lui proposer de prendre part à un projet de changement et l'inviter à les accompagner en un lieu sûr, où s'assemblait un comité secret. Il répondit : « Je ne travaille >> point en serre chaude, et je ne ferai jamais » rien qui ne puisse paraître au grand air. » Nous croyons que la conduite de l'ex-ministre de

la police était à cette époque d'accord avec ses paroles; mais cette maxime ne lui parut plus. bonne à pratiquer quelques mois plus tard ; c'est ce que nous aurons l'occasion de développer.

Quand Napoléon débarqua, le duc d'Otrante se trouvait à Paris. Sa surprise fut extrême; mais il ne douta pas un instant de son succès. Dans une entrevue avec un personnage auguste chez la princesse de Vaudemont, il dit qu'il était trop tard pour qu'il pût servir le Roi. Cette phrase, qui prouvait le jugement sain d'un homme habitué de juger le résultat par l'examen des causes, fit penser aux ministres du roi que Fouché avait des intelligences avec Napoléon; sur cette fausse interprétation d'une phrase qui était le résultat de ses connaissances dans l'art de gouverner, on le jugea coupable et on voulut se saisir de sa personne; mais il échappa aux émissaires qui l'entouraient, et ne reparut que le 20 mars au soir, dans le salon de Napoléon, au palais des Tuileries.

Nous croyons devoir citer ici, à l'appui de ce que nous venons de dire, un fragment extrait d'un Mémoire que l'opinion publique semble avoir distingué comme étant rédigé avec véracité.

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« Comme le duc d'Otrante avait plusieurs fois répété que la marche suivie alors prépa

*

>>rait à la France une agitation nouvelle, une » inévitable secousse et le retour de Bonaparte, >> ses ennemis en conclurent d'abord, lorsque >> celui-ci débarqua, que c'était lui qui favori»sait ce retour. Il eut à ce sujet deux conférences; la première à son hôtel même, avec » M. Dambray, garde-des-sceaux, en présence » d'un pair, le comte d'Orvilliers. Je conseille » au roi, lui dit-il, de se retirer à Lille avec ses plus fidèles serviteurs et de laisser les » événemens se développer. Bonaparte n'a rien » préparé pour se maintenir; s'il n'a aucun » point d'appui en Europe, son nouveau règne » ne peut durer trois mois. Dans la deuxième » conférence de l'ex-ministre avec Monsieur, » le premier s'excusa, dit-on, de ne pouvoir » servir le Roi, attendu qu'il n'était plus temps.

Cette nocturne entrevue avait duré deux qu > trois heures. Le lendemain, des agens de police » et des gendarmes se présentent chez lui pour >> l'arrêter et le conduire à la citadelle de Lille en » qualité d'otage; mais tel est l'ascendant de la » probité courageuse, qu'aucun des sbires n'osa

porter la main sur sa personne. Il se retira cependant chez la duchesse de Saint-Leu >> ci-devant reine d'Hollande. On avait craint » qu'il ne prêtât ses moyens à un nouvel ordre » de choses; mais on ne pouvait croire, sans

» déraison, qu'il eût contribué à l'exécution du » projet imprévu tenté par Bonaparte. Il est à » remarquer, pour la vérité de l'histoire, que » le nom de Fouché ne se trouve mêlé à aucune »des mille intrigues qui ont eu lieu sous les » différens ministères; s'il a servi plusieurs » gouvernemens, comme ministre, avec autant »de zèle que de fidélité, jamais il n'a été leur >> confident. >>>

Comme nous l'avons dit précédemment, le duc d'Otrante se trouva aux Tuileries le 20 mars au soir. Quoi! lui cria Napoléon en l'appercevant, on a voulu vous enlever pour vous empêcher d'être utile à votre pays? Eh bien ! je vous offre l'occasion de lui rendre de nouveaux services: le moment est difficile, mais votre courage, ainsi que le mien, sont supérieurs à la crise acceptez encore une fois le ministère de la police.

M. Fouché accepta. Quelle fut sa conduite pendant son ministère, voilà une question qui n'a pas encore rencontré de solution incontestée, et sur laquelle il est encore impossible de donner une réponse satisfaisante. Dans l'impossibilité d'indiquer la vérité, nous insérons ici les versions les plus remarquables, et nous laisserons à la sagacité de nos lecteurs à démêler la vérité.

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