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Son fils Ibrahim-Pacha a eu de nouveau le titre de Cheikh-at-Harem de la Mecque et le district de Djidda; j'ai en outre acquiescé à la demande qu'il m'a faite du département d'Adana, régi par le trésor des fermes à titre de mohassil. D'après l'équité, l'humanité et la clémence dont Dieu m'a doué, j'ordonne, à qui de droit, dans les diverses parties de l'Anatolie, de ne jamais rechercher pour le passé les habitans et les notables, et d'oublier les événemens antérieurs (1).

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Cette concession c'était la paix, objet désiré par toute la diplomatie, car les complications d'intérêts devenaient fort grandes. Mehemet-Ali arrêta tout-àfait son mouvement; la retraite des Égyptiens fut ordonnée, et le baron de Lieven chargé par le comte Orloff d'assister au mouvement rétrograde d'IbrahimPacha, put annoncer que les Égyptiens abandonnaient les provinces conquises. Les légations de Péra furent officiellement prévenues que l'armée d'Ibrahim-Pacha cessait de menacer Constantinople. Dès-lors nul obstacle ne s'opposait plus au départ des Russes (3).

(') Ce firman est daté du 6 mai 1833; le hatti-schériff du sultan Mahmoud qui accordait à Mehemet-Ali les pachalicks de Syrie et le territoire contesté en confirmant Ibrahim dans la possession du district de Djidda, avec le gouvernement d'Adana, fut donné le 5 mai 1833.

(2) La retraite des Russes fut l'objet d'un échange de pièces diplomatiques :

Note adressée à la Sublime Porte, en date de Boujoukdéré le 26 juin (7 juillet) 1833.

« Le soussigné, ambassadeur

extraordinaire de S. M. l'empereur de toutes les Russies, commandant en chef des forces de terre et de mer auxiliaires appelées par Sa Hautesse le sultan, et stationnées dans le Bosphore, vient d'être informé par le capitaine d'état-major de la garde impériale, baron de Lieven, dont l'envoi dans l'Asie mineure avait été concerté avec la Sublime Porte, que l'armée égyptienne ayant effectué sa retraite au-delà du mont Taurus, est rentrée dans les limites des provinces désignées par la volonté de Sa Hautesse pour former les nouveaux

Afin que leur courte apparition ne pût produire un effet durable sur l'esprit mobile des Musulmans, il fallait hâter leur départ, et le comte Orloff déclara que l'empereur son maître avait donné des ordres loyaux et sincères sur ce point. Toutefois cette condescendance tenait à une négociation particulière cachée à l'Europe, et qui devait susciter bientôt d'unanimes et profondes réclamations.

Les relations de la Porte et de la Russie, il faut le remarquer, reposaient depuis un an sur ce qu'on appelle en diplomatie une alliance intime. De là, résultait l'engagement tacite ou formel de se prêter mutuel secours au cas où l'une des puissances contractantes serait attaquée. C'est en vertu de cette stipulation des traités que les Russes avaient prêté l'aide de leur flotte et même de leurs divisions de terre pour la protection de la Porte Ottomane. Maintenant ils allaient quitter Constantinople; mais ne serait-il pris aucune précaution contre le retour des mêmes dangers? Le comte Orloff et M. de Boutenieff firent observer au divan

gouvernemens conférés à Mehemet-Ali, pacha d'Égypte et à son fils Ibrahim-Pacha.

<< En conséquence de ces informations, le soussigné a l'honneur de prier S. E. le reiss-effendi de vouloir bien lui faire connaître par une communication officielle les avis directs que la Sublime Porte doit avoir reçus à cet égard. Il prie en même temps le reisseffendi de vouloir bien solliciter l'assentiment de Sa Hautesse pour pouvoir procéder à l'exécution des ordres éventuels de l'empereur, son auguste maître touchant le

retour immédiat en Russie de ses forces de terre et de mer, dont la présence devait avoir pour terme l'évacuation de l'Asie mineure et le rétablissement de la paix avec l'Egypte aux conditions fixées par S. H. le sultan.

« Signé ORLOFF. »

Note officielle de la Sublime Porte à S. E. le comte Orloff, en date du 26 juin 1833.

«... Conformément aux déclarations antérieures qui ont été faites à la mission, et particulièrement à S. E. le comte Orloff, l'amitié et la bienveillance que S. M. l'em

qu'en l'état d'effervescence des provinces, avec les affections intimes de la France et de l'Angleterre pour le pacha, il n'était pas impossible que la nécessité d'un secours se fit promptement sentir, et que dès-lors il fallait convenir d'avance des bases d'une intervention nouvelle et des précautions à prendre: la première de toutes, c'était la fermeture des Dardanelles. Par l'alliance intime de la Porte et de la Russie, la mer Noire était une possession exclusivement dévolue aux deux puissances amies; rien de plus simple alors que d'en fermer les abords aux navires de guerre des autres nations, tout en laissant la liberté absolue de commerce. Telle fut la pensée du traité, signé à Constantinople le 26 juin (8 juillet) 1833, par le comte Alexis Orloff, M. de Boutenieff, le seraskier-pacha et le reiss-effendi. Ce traité renouvelait, en termes plus précis, la convention d'alliance entre l'empereur de Russie et le divan. En tant que de besoin, il ratifiait les traités d'Andrinople, de Pétersbourg et de Constantinople; en échange la Russie promettait de fournir à la Sublime Porte, au cas où elle serait attaquée, tous les secours de terre et de mer qu'elle pourrait récla

pereur a témoignées à l'égard de l'empire ottoman ne sont pas de nature à être jamais oubliées par la Sublime Porte, et elles ont eu pour résultat la consolidation, tant pour le présent que pour l'avenir de l'union et de la sincérité qui existent et qui se raffermissent de plus en plus entre les deux empires. De même, l'ordre, la discipline et la bonne volonté dont les troupes impériales ont fait preuve dans la capitale de Sa Hau

tesse, et la bonne intelligence qui a régné entre elles et les troupes turques et particulièrement les qualités distinguées et la conduite digne de louanges sous tous les rapports de S. E. le comte Orloff, ont pénétré de reconnaissance la Sublime Porte. Le passage des troupes égyptiennes au-delà des défilés du mont Taurus a été en effet constaté par les préposés qui ont été envoyés sur les lieux, et par conséquentla Sublime Portes'empresse

mer. La durée de cette alliance était fixée à huit ans, quoique dans son principe elle dût être éternelle. Mais ce qu'il y a de plus grave, c'était l'article secret joint à ce traité d'alliance, et dont la clause principale était celle-ci : « En vertu d'une des clauses de l'art. 1er du traité patent d'alliance défensive conclu entre la cour impériale de Russie et la Sublime Porte, les deux hautes parties contractantes sont tenues de se prêter mutuellement des secours matériels et l'assistance la plus efficace pour la sûreté de leurs Etats respectifs. Néanmoins, comme S. M. l'empereur de toutes les Russies, voulant épargner à la Sublime Porte ottomane la charge et les embarras qui résulteraient pour elle de la prestation d'un secours matériel, ne demandera pas ce secours, si les circonstances mettaient la Sublime Porte dans l'obligation de le fournir; la Sublime Porte ottomane, à la place du secours qu'elle doit prêter au besoin d'après le principe de réciprocité du traité patent, devra borner son action en faveur de la cour impériale de Russie à fermer le détroit des Dardanelles, c'est-à-dire à ne permettre à aucun båtiment de guerre étranger d'y entrer sous un prétexte quelconque. Le présent article séparé et secret aura la même force et valeur que s'il était inséré mot à mot dans le traité d'alliance de ce jour (').

de communiquer à Son Excellence que, conformément à sa demande, Sa Hautesse consent au retour des troupes de terre et de la mer de la Russie. A cet effet, et afin de répéter encore une fois l'expression de sa reconnaissance pour l'amitié et la bienveillance de S. M.l'empereur, la Sublime Porte a donné la

présente note officielle, en réitérant à S. E. le comte Orloff la haute estime et la parfaite considération qu'elle a pour sa personne. »

(') Le texte du traité d'UnkiarSkelessi, est mal connu; le voici dans sa plus grande exactitude:

« Art. 4. Il y aura à jamais

Cette clause immense allait donner un nouvel aspect à la question d'Orient, car par le simple fait d'un article secret du traité d'Unkiar-Skelessi, toutes les puissances maritimes de l'Europe se voyaient chassées des Dardanelles; la Turquie et la Russie de concert fermaient les portes de la mer Noire à toutes les navigations, en vertu de ce seul motif qu'elles étaient exclusivement riveraines. Cet article que le comte Orloff voulait tenir secret pour les éventualités de l'avenir fut bientôt révélé, car une petite corvette de guerre s'étant présentée à l'embouchure des Dardanelles, le passage lui fut interdit. Des explications furent sur-le-champ demandées à la Porte par les deux ambassades de France et d'Angleterre; la Porte avoua le traité offensif et défensif. Dès-lors il était impossible que la France et l'Angleterre pussent souffrir la fermeture des Dardanelles; il était facile à chacun de voir par les travaux des ingénieurs russes, que ce qui était inséré comme clause de traité, serait ensuite accompli comme un fait. Dès ce moment, la question d'Orient changeant de forme cessait d'être égyptienne pour devenir européenne, et c'est sous cet as

paix, amitié et alliance entre S. M. l'empereur de toutes les Russies et S. H. l'empereur des Ottomans, leurs empires et leurs sujets, tant sur terre que sur mer. Cette alliance ayant uniquement pour but la défense commune de leurs États contre tout empiétement, Leurs Majestés promettent de s'entendre sans réserve sur tous les objets qui concernent leurs tranquillité et sûreté respectives, et de se prêter mutuellement, à cet

effet, des secours matériels et l'assistance la plus efficace.

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« Art. 2. Le traité de paix conclu à Andrinople le 2 septembre 1829, ainsi que tous les autres traités qui y sont compris, de même aussi la convention signée à SaintPétersbourg, le 14 avril 1830, et l'arrangement conclu à Constantinople, le 9 juillet (21) 1832, relatif à la Grèce, sont confirmés dans toute leur teneur par le présent traité d'alliance défensive comme

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