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par le conseil des évêques réunis, d'après nos ordres, dans notre bonne ville de Paris;

Désirant donner une preuve de notre satisfaction aux évêques et aux églises de notre Empire, et ne rien laisser dans lesdites lois organiques qui puisse être contraire au bien du clergé,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

ART. 1. Les brefs de la pénitencerie, pour le for intérieur seulement, pourront être exécutés sans aucune autorisation.

ART. 2. La disposition de l'article 26 des lois organiques, portant que « les évêques ne pourront ordonner aucun ecclésiastique, s'il ne justifie d'une propriété produisant au moins un revenu annuel de 300 fr., » est rapportée.

ART. 3. La disposition du même article 26 des lois organiques, portant que « les évêques ne pourront ordonner aucun ecclésiastique s'il n'a atteint l'âge de vingtcinq ans, » est également rapportée.

ART. 4. En conséquence les évêques pourront ordonner tout ecclésiastique âgé de vingt-deux ans accomplis; mais aucun ecclésiastique ayant plus de vingt-deux ans et moins de vingt-cinq ne pourra être admis dans les ordres sacrés qu'après avoir justifié du consentement de ses parents; ainsi que cela se prescrit pour le mariage des fils âgés de moins de vingt-cinq ans.

ART. 5. La disposition de l'article 36 des lois organiques, portant que « les vicaires généraux des diocèses vacants continueront leurs fonctions, même après la mort de l'évêque, jusqu'à son remplacement, » est rapportée.

ART. 6. En conséquence, pendant les vacances des siéges, il sera pourvu, conformément aux lois canoniques, aux gouvernements des diocèses. Les chapitres présenteront à notre Ministre des cultes, les vicaires généraux qu'ils auront élus, pour leur nomination être reconnue par nous.

ART. 7. Notre Ministre des cultes est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera inséré au Bulletin des lois.

XXVII

Documents et explications sur la politique des Rois de France envers la Cour de Rome.

par

Dans les discussions qui ont eu lieu depuis deux ans, il a été bien souvent affirmé les défenseurs du pouvoir temporel que nos Rois, en leur qualité de Rois très-chrétiens, fils ainés de l'Église, avaient toujours considéré comme leur premier devoir de protéger et de défendre la Papauté. C'est là, en effet, un beau texte à l'éloquence; et les orateurs y trouvent l'occasion de jeter dans la balance la grande épée de la France, image assurément fort belle, mais dont peut-être on abuse un peu de nos jours.

Je n'ai aucun intérêt à combattre cette proposition; il me semble cependant que ses auteurs ont un peu surfait; et qu'en tout cas il convient d'établir une distinction.

S Ler.

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Nos Rois ont toujours énergiquement maintenu, contre les Papes, les droits de leur couronne et l'indépendance de l'Eglise de France. Saint Louis, sa pragmatique, sa lettre au Pape. Philippe le Bel et Boniface VIII. Jean II. Charles VI. — Charles VII et la pragmatique de Bourges. Louis XI. François Ier et le Concordat. -Louis XIV et la Déclaration de 1682.

Que la France ait toujours eu le premier rang parmi les nations chrétiennes; qu'elle ait plus que toute autre

conservé le véritable sentiment chrétien; que, dans le domaine de la foi, elle soit restée invariablement attachée à l'unité de l'Église; qu'elle ait, plus que toute autre nation, défendu ou propagé la foi chrétienne, autrefois par les croisades, de nos jours par les expéditions lointaines de Syrie, de Chine et de Cochinchine, c'est là une vérité incontestable dont nous sommes justement fiers.

Mais ce qui n'est pas moins certain, ce qui ne nous fait pas moins d'honneur, c'est qu'aucune nation catholique n'a su résister aussi énergiquement que la France aux envahissements abusifs de la Cour de Rome, ni maintenir avec autant de fermeté les droits du pouvoir civil et l'indépendance de l'Église nationale.

N'est-ce pas précisément parce que, grâce à cette sage et patriotique conduite, les abus de l'ultramontanisme se firent moins sentir en France; parce que la religion y conserva un caractère plus spiritualiste, plus dégagé des vaines pratiques1, que nos pères eurent aussi moins d'occasions que les Allemands et les Italiens de perdre le respect des choses religieuses; qu'ils furent, en un mot, moins dévots, mais plus religieux que les Italiens et les Espagnols? N'est-ce pas aussi par suite des mêmes causes que la Réforme du seizième siècle ne put prendre pied en France comme en Allemagne, sans qu'il fût d'ailleurs besoin, comme en Italie, de la combattre par l'inquisition? C'est aussi parce qu'ils furent bons citoyens en même temps que chrétiens pieux, parce qu'ils surent concilier les devoirs de sujets loyaux et fidèles du Souverain, dans l'ordre temporel, avec la légitime soumission due

1. Voir, dans le troisième discours de Fleury, ce qui est dit des abus des reliques, pèlerinages, faux miracles, et autres croyances ou pratiques, qui dégénèrent trop souvent en superstition et en idolâtrie. Nulle part, autant qu'en Italie, on n'a substitué à la sublime doctrine du Christ, les vaines formules et les pratiques, qui tendent à dénaturer, à matérialiser en quelque sorte le christianisme, qui est cependant le spiritualisme par excellence.

au Saint-Siége, dans l'ordre de la foi, que nos évêques et notre clergé acquirent sur les peuples un ascendant bien supérieur à celui de tous les autres clergés de l'Europe 1.

I. Que nos Rois aient su, mieux que les autres, maintenir, contre les prétentions envahissantes de la Cour de Rome, les droits de leur couronne et ceux de l'Église nationale, c'est une vérité dont la démonstration échappe par l'abondance même des preuves. Il n'est pas, pour ainsi dire, une seule page de l'histoire de France qui n'en présente quelqu'une fournie, tantôt par les Rois, les états généraux et les parlements, tantôt par les assemblées du clergé, l'Université de Paris et la Sorbonne, le plus souvent par toutes ces autorités réunies, comme il arriva notamment lorsque, sous Philippe le Bel, Boniface VIII ayant osé attenter à l'indépendance de la couronne, la nation tout entière, tiers état, noblesse, clergé, Université et théologiens, se leva pour protester contre une si révoltante prétention.

Ne fût-ce qu'à cause du fait brutal d'Anagni, Philippe le Bel est sans doute, par lui-même, une assez pauvre autorité, mais, pour cela précisément, l'exemple n'en est que plus frappant. (Voir cependant ci-après le n° III.)

1. Quand, en 1791, nos prêtres émigrèrent, ils devinrent aussitôt par leur savoir, la gravité de leurs mœurs, l'élévation de leur piété, l'objet du respect et de l'admiration des peuples étrangers chez lesquels ils trouvèrent un asile.-Aujourd'hui encore, il n'est personne, ayant un peu voyagé en Espagne, en Italie, à Rome surtout, qui ne reconnaisse tout ce que vaut le clergé français. C'est que bien que, depuis quelques années, une partie de ce clergé paraisse avoir abandonné ce que Bossuet appelait les fortes maximes de nos pères, il en subit encore, à son insu, la salutaire influence ; c'est que si, au mépris des lois, ces maximes ne sont plus enseignées dans nos séminaires, elles se conservent, plus qu'on ne le pense, à l'état de traditions passées dans les mœurs. Et Dieu veuille qu'il en soit ainsi bien longtemps encore!

II. Un Roi tout différent et dont aucun catholique ne peut songer à contester l'autorité, saint Louis, sut défendre, avec plus de fermeté même que d'autres Rois moins pieux, les droits de sa couronne et de l'Église de France, et aussi parler aux Papes avec une fermeté que n'oseraient probablement pas imiter les Souverains de notre temps.

En 1267, il défendit une levée d'argent que le Pape voulait faire en son royaume'.

Plus tard il eut avec le Pape Clément IV, qui était d'ailleurs son ami, des démêlés très-vifs au sujet des bénéfices vacants en régale dans les Églises de Reims et de Sens; le Roi maintint énergiquement les droits de sa couronne. Ce fut même peut-être pour prévenir, pendant son absence, de pareilles difficultés, qu'en mars 1269, au moment d'entreprendre sa seconde croisade,

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1. En rapportant ce fait sous l'article 14 des Libertés gallicanes, M. Dupin y joint les réflexions qui suivent. - Joannes Galli, quæst. 60, dit que toute tentative de lever un impôt en France sans le consentement du Roi (qui omnium est superior in suo regno), est un crime de lèse-majesté. Charles le Bel, en 1326, s'opposa à une contribution que le Pape prétendait lever en son royaume sur son clergé. Car oncques, dit l'ancienne chronique, n'avoit été fait en son royaume. Mais le Pape lui récrivit. Après, le Roi considérant, donne m'en, je t'en donray, lui octroya de lever, dont le Pape lui donna la dime des églises jusqu'à deux ans : ainsi, sainte Église, quand l'un lui tolt, l'autre l'escorche! (Chronique de Saint-Denis, vie de Charles le Bel, chap. xxvII.) Ce passage explique beaucoup de conventions réciproques, inusitées, affligeantes, qui contrastent avec les principes, mais sans avoir pu prévaloir sur leur imprescriptible autorité.

Inutile de dire qu'aujourd'hui l'Empereur lui-même ne pourrait autoriser la Cour de Rome à faire des levées d'argent en France; car tout impôt doit être voté par le Corps législatif.

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Les quétes elles-mêmes, malgré leur caractère volontaire, doivent être permises et réglées par l'autorité temporelle. (Durand de Maillane, I, 245; Vuillefroy, v° Quétes.) · J'ignore si on s'est conformé à ces prescriptions pour la quête qui a eu lieu, en ces derniers temps, au profit de la Cour de Rome sous le titre de Denier de Saint-Pierre, vieille formule empruntée au moyen âge.

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