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comme on disait alors, parce qu'en les saisissant on amenait presque toujours le Pape à composition.

Deux fois, dans le même siècle, en 1734 et 1752, l'État pontifical est ravagé, jusqu'aux portes de Rome, par les Autrichiens et les Espagnols. En 1797, traité de Tolentino.

En 1798, Pie VI est arrêté par ordre du Directoire et va mourir prisonnier à Valence.

Voilà, voilà comment la souveraineté temporelle a garanti l'indépendance du Saint-Siége!

Voici maintenant les profits qu'en a retirés le catholicisme, au point de vue religieux : le compte en est encore plus triste.

C'est de 1503 à 1513 que Jules II complète, par a conquête de Bologne, de Pérouse et des villes vers le Pô, le territoire qui, de ce fleuve à Terracine, a formé depuis l'État ecclésiastique.

Eh bien, c'est quatre ans après que Luther lève en Allemagne l'étendard de la Réforme. Et, remarquez-le bien, dans le principe, ce n'est ce n'est pas au dogme qu'il s'attaque; c'est bien plutôt aux richesses, à la puissance mondaine de l'Église.

« Vois, s'écriait-il, vois cette Église triomphante, ces princes-évêques qui passent devant toi comme un tourbillon de pourpre et d'or, courant à la

39. Tels sont en effet les principaux griefs que nous retrouvons toujours allégués, non-seulement dans les premiers écrits de Luther, mais dans une foule d'actes officiels, émanés des Empereurs et des Diètes d'Allemagne. - Voir l'APPENDICE XXV.

guerre, à la chasse, aux plaisirs... Reconnais-tu les successeurs des apôtres?

Ainsi, sous Jules II, la Papauté temporelle a gagné quelques villes; sous Léon X, la Papauté spirituelle perd la moitié de l'Allemagne et de la Suisse, le Danemark, la Suède, les Pays-Bas; sous Clément VII, l'Angleterre.

Sujets des Empereurs, les Papes avaient conquis le monde; à peine Rois, les Papes en perdent la moitié".

Au dix-septième siècle, la Réforme consolide son œuvre et s'étend même dans les pays restés catholiques en majorité; l'action religieuse, la direction morale des intelligences passe des Pontifes romains aux grands évêques français Bossuet, Fénelon".

Au dix-huitième, les croyances religieuses viennent sombrer dans le scepticisme philosophique. Voltaire envoie son Mahomet à Benoît XIV, qui l'en remercie; les Papes, et depuis longtemps il

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40. Depuis, par suite du développement colonial de l'Angleterre et de la Hollande, le protestantisme a fait dans l'Amérique du Nord, les Indes orientales, l'Australie, etc., des progrès auxquels on ne saurait comparer l'action si restreinte de nos missionnaires catholiques.

41. On m'a demandé pourquoi je n'avais pas cité ici la Déclaration de 1682.... La raison en est que, dans ma profonde conviction, cette déclaration ne peut être considérée comme un échec aux droits légitimes du Saint-Siége, mais bien comme la simple consecration des anciens principes, posés par les Conciles de Bâle et de Constance, et formulés dans la Pragmatique sanction de Bourges, principes toujours maintenus avec fermeté, malgré les défaillances des Rois, par nos Parlements et nos États généraux.

n'y en avait eu d'aussi éclairés, d'aussi humains, les Papes proscrivent les jésuites et correspondent avec les philosophes.

En 1781 et années suivantes, les réformes ecclésiastiques de Joseph II, en Autriche".

En France, en 1790, la constitution civile du clergé, puis le schisme, enfin la proscription pendant dix ans du culte catholique.

O mon Dieu, que le principat temporel a donc bien servi la cause de la catholicité!

Faut-il maintenant, Messieurs, pour compléter le tableau, dire un mot du temps présent?

Des quinze premières années du siècle, il y a peu à dire au point de vue qui nous occupe, sinon que Rome était devenue le chef-lieu d'un département français.

En 1815, les grands restaurateurs du congrès de Vienne voulurent restaurer aussi la puissance temporelle du Saint-Siége.... et, de fait, les Papes ont régné depuis 1815........ en Romagne, au moyen

42. Les réformes ecclésiastiques de Joseph II avaient le double but d'affranchir les États de la maison d'Autriche de la suprématie romaine et de diminuer, au profit de l'Etat, la richesse et l'influence du clergé allemand. Mais ces réformes ne furent pas conduites avec la prudence qui aurait pu en assurer le succès (Paganel, Hist. de Joseph II, Paris, 1843). A la même époque, Léopold, en Toscane, le comte Firmiani, à Milan, Tannucci, à Naples, entraient dans la voie ouverte par Joseph II.

43. La constitution civile du clergé fut, en grande partie, le résultat du mouvement général des esprits, signalé dans la note qui précède.

d'une armée autrichienne; à Rome, d'abord avec cinq mille mercenaires suisses, puis à l'abri de notre glorieux drapeau et des baïonnettes françaises.

Est-ce bien là une souveraineté temporelle? Si cela vous fait plaisir, je le veux bien; et pourtant il me semble bien que ce n'en est que l'ombre; et je crois que Jules II serait de mon avis.

Eh bien, voyez encore se reproduire ici, sous vos yeux, cette loi providentielle que nous venons de suivre à travers dix-huit siècles.

La souveraineté temporelle en est réduite à n'être que l'ombre d'une ombre; et voilà que tout aussitôt le sentiment religieux se réveille, avec une vivacité que le dix-huitième siècle n'eût certes jamais crue possible.

Depuis trente ans, la Papauté a obtenu ce qui semblait hors de toute probabilité. Elle a fait admettre le culte et la hiérarchie catholiques daus des pays où ils étaient proscrits depuis si longtemps, en Angleterre, en Hollande, en Danemark"; en Suède même, la tolérance succède à une proscription implacable ".

En Autriche, le concordat de 1855 a étouffé les derniers vestiges du joséphisme".

44. Annuaire de la Revue des Deux-Mondes, années 185152, p. 256; 1852-53, p. 209.

45. La Liberté de conscience, par M. d'Adelsward, frère de l'ambassadeur de Suède à Paris. La Suède libérale, par l'abbé Cognat. Cf. Revue des Deux-Mondes, 1862, tome XIII, p. 470 et M. Zeller, Année historique, 1860, p. 409. 46. Bade, Bavière et Wurtemberg avaient conclu des con

En France (et je ne le dis pas sans un amer regret), nos vieilles libertés gallicanes, la gloire de notre vieille Église de France, le Palladium, qui si longtemps maintint le bon accord entre l'Église et l'État, semblent tombées en désuétude". Le bréviaire romain, que nos Parlements et nos anciens prélats avaient proscrit, s'est introduit dans tous nos diocèses, sans aucune réclamation *.

Les Bulgares enfin, depuis si longtemps séparés de l'Église, paraissent disposés à rentrer dans son sein.

Le catholicisme renaît aussi jeune, aussi ardent que jamais.... Nos débats en sont une preuve nou

velle.

Oh! qu'il pensait profondément ce collègue, que je ne nommerai pas, et qui me disait, il y a quelques jours à peine :

cordats analogues, qui ont été repoussés par les Chambres de ces divers pays.

47. Voir à l'APPENDICE XXVI, la déclaration du clergé de France de 1682. Le Gouvernement, sans doute, commence à reconnaître combien il a été imprudent de se relâcher de règles qui avaient pour elles l'autorité de l'expérience, et que la Restauration elle-mème, avec des ministresévêques (Frayssinous et Feutrier), avait compris la nécessité de remettre en vigueur.

48. Parlements de Paris, Metz, Rennes et Bordeaux, évêques de Montpellier, Troyes, Metz, Verdun, Auxerre. Cette prohibition fut fondée sur les maximes pernicieuses répandues dans cette liturgie, et principalement dans la légende placée à l'office de saint Hildebrand, canonisé plus de cinq cents ans après sa mort. Que Grégoire VII soit exalté comme un grand homme, un puissant génie, cela se comprend; mais un saint!

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