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qu'exhorter; le roi se sert de violence, et les autres de conseil; ceux-là se servent des armes materielles, ceux-ci de spirituelles. »

No 6. Opinion de Synesius, évêque de Ptolemaïs (traduction donnée par M. Villemain, dans le Tableau de l'éloquence chrétienne au IVe siècle. Paris, 1849, p. 233)'.

« Dans les temps antiques, les mêmes hommes étaient prêtres et juges. Les Egyptiens et les Hébreux furent longtemps gouvernés par des prêtres. Mais comme l'œuvre divine se faisait ainsi d'une manière tout humaine, Dieu sépara ces deux existences: l'une fut sacrée, l'autre toute politique. Il renvoya les uns à la matière; il rapprocha les autres de lui. Les uns furent attachés aux affaires, et nous à la prière; et l'œuvre que Dieu demande et d'eux et de nous est également belle.

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Pourquoi revenez-vous là-dessus, et essayez-vous de réunir ce que Dieu a divisé, en mettant dans les affaires non pas l'ordre mais le désordre? Rien ne saurait être plus funeste. Vous avez besoin d'une protection, allez au dépositaire des lois; vous avez besoin des choses de Dieu, allez au prêtre de la ville. La contemplation est le seul devoir du prêtre qui ne prend pas

faussement ce nom. »

1. M. Villemain, qui n'a pas consacré moins de 24 pages à l'étude de Synesius, que Bossuet appelait le grand Synesius, tire de ce passage la conséquence que l'évêque de Ptolémaïs ne prétendait attacher aucun pouvoir politique à l'épiscopat, et que ces deux choses lui semblaient inconciliables. »

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Quænam tibi major videtur et dignitas et potestas dimittendi peccata an prædia dividendi? Sed non est comparatio. Habent hæc infima et terrena judices suos, reges et principes terræ. Quid fines alienos invaditis? Quid falcem vestram in alienam messem extenditis? Non quia indigni vos, sed quia indignum vobis talibus insistere, quippe potioribus occupatis.» (Lib. I, cap. vi.)

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Si sapis, eris contentus mensura quam mensus est Deus tibi; nam quod amplius est a malo est. » (Lib. II, c. VI.) ".... Nam quid tibi aliud dimisit sanctus apostolus?— Quod habeo, inquit, hoc tibi do. Quid illud? Unum scio non est aurum neque argentum, cum ipse dicat: Argentum et aurum non est mihi.... Esto, ut alia quacunque ratione hæc tibi vindices; sed non apostolico jure'. Nec enim tibi ille dare quod non habuit potuit. Quod habuit hoc dedit, sollicitudinem, ut dixi, super ecclesias. Numquid dominationem? Audi ipsum: Non dominantes ait in clero, sed forma facti gregis1 Et ne dictum sola humilitate putes, non etiam veritate, vox Domini est in Evangelio: Reges gentium dominantur eorum, et qui potestatem habent super eos, benefici vocantur; et infert: Vos autem non sic'. Planum est: apostolis interdicitur dominatus.

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I ergo tu, et tibi usurpare aude aut dominans apo

1. Act. m, 6. — 2. I Petr. v, 3.

3. Luc. XXII,

25.

stolatum aut apostolicus dominatum. Plane ab alterutro prohiberis. Si utrumque simul habere voles, perdes utrumque. Alioquin non te exceptum illorum numero putes de quibus queritur Deus sic: Ipsi regnaverunt et non ex me; principes extiterunt et ego non cognovi. » (Lib. II, c. vi).

«Nam nullum tibi venenum, nullum gladium plus formido quam libidinem dominandi.» (Lib. III, c. I.)

« Petrus hic est qui nescitur processisse aliquando vel gemmis ornatus vel sericis; non tectus auro, non vectus equo albo, nec stipatus milite, nec circumstrepentibus septus ministris. Absque his tamen credidit satis posse impleri salutare mandatum: Si me amas pasce oves meas3. In his successisti non Petro sed Constantino. »

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Dracones, inquis, me mones pascere et scorpiones, non oves. Propter hoc, inquam, magis aggredere eos, sed verbo non ferro.

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Quid tu denuo usurpare gladium tentes, quem se« mel jussus es reponere in vaginam? Quem tamen qui tuum negat, non satis mihi videtur attendere <«< verbum Domini dicentis sic: Converte gladium tuum « in vaginam. Tuus ergo et ipse, tuo forsitan nutu «<etsi non tua manu evaginandus. Alioquin si nullo << modo ad te pertineret et is, dicentibus apostolis : ecce gladii duo hic; non respondisset Dominus: Satis est; sed, nimis est. Uterque ergo Ecclesiæ, et spiritualis scilicet gladius et materialis; sed is quidem pro Ecclesia, ille vero et ab ecclesia exserendus: ille sacerdotis, is militis manu, sed sane ad nutum sacerdotis et jussum

«

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1. Sur ce mot simul, voyez ci-après, S 2, observation II.

2. Osee VIII, 4. 3. Joan. xxi, 15.

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4. Ainsi qu'on l'a déjà fait remarquer (Discours, note 66), au temps de saint Bernard, personne ne doutait de l'authenticité de la prétendue donation de Constantin; c'est à cette croyance qu'il est fait allusion ici.

5. Joan, xviii, 2.

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imperatoris. Et de hoc alias. Nunc vero arripe qui tibi ad feriendum creditus est; et vulnera ad salu

« tem, si non omnes, si non vel multos, certe quos « possis.

« Unum est quod te absolvit, si egisti cum populo illo, ut possis dicere: Popule meus, quid tibi debui facere et non feci? Si sic fecisti nec profecisti; est demum quod facias et quod dicas: Exi de Hur Chaldæorum et dicito: quia oportet me et aliis civitatibus evangelizare. Puto nec pœnitebit exilii, orbe pro urbe commutato. (Lib. IV, c. I.)

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Dans la séance du 3 mars, Mgr le cardinal archevêque de Besançon, comprenant parfaitement l'importance que devait avoir aux yeux des catholiques l'opinion du grand abbé de Clairvaux, s'est efforcé d'en affaiblir la portée par diverses observations que je vais rapidement

examiner.

Sur le passage tiré du livre II, chap. vi, mon vénérable contradicteur a fait deux observations:

I. Il a fait remarquer que, dans une édition publiée à Paris par les libraires associés, au lieu du mot simul, il y avait similiter, ce qui changerait le sens.

C'est possible; mais j'ai suivi l'édition de Mabillon et celle des respectables frères Gaume, si connus par leur dévouement au saint-siége: or les deux éditions portent également simul. - Notre critique est trop savant luimême pour comparer les libraires ussociés à Mabillon, le plus grand paléographe et l'un des plus grands critiques que la France ait produits. Ce savant bénédictin avait indubitablement consulté tous les manuscrits que possédait la congrégation de Saint-Maur.

Au surplus, le sens du passage réclame évidemment simul et non pas similiter. Que dit, en effet, saint Bernard: Va et sois assez hardi pour joindre l'apostolat

à la domination, ou la domination à l'apostolat.... Le sens nécessaire de cette apostrophe est évidemment que les deux choses ne se peuvent unir; et que, par conséquent, si le pape veut avoir l'une et l'autre (utrumque) en même temps (simul), il s'expose à les perdre toutes deux. Le mot similiter qui voudrait dire sans doute que le pape ne peut avoir l'un et l'autre semblablement, au même titre (similiter), ne présenterait qu'un sens louche et indécis qui ne serait certainement pas en harmonie avec l'énergique netteté du reste du passage.

II. Le vénérable cardinal m'a aussi querellé sur la traduction des mots plane ab alterutro prohiberis, que j'ai rendus par il t'est défendu de cumuler ces deux choses, sur quoi il a remarqué malicieusement que alterutro ne veut pas dire les deux choses, ni prohiberis, cumuler. Cela est vrai, pour traduire mot à mot, comme on dit au collége, il faudrait dire: Certainement, tu es prohibé ou de l'une ou de l'autre; mais cela ne serait guère français. Voyons le sens : il s'agit de savoir si le pape peut joindre l'apostolat à la domination ou la domination à l'apostolat; saint Bernard se prononce pour la négative; certainement, dit-il, ou l'une ou l'autre t'est interdite; en d'autres termes, il faut que tu choisisses entre l'une et l'autre, ou plus simplement encore, comme je l'ai dit: tu ne peux cumuler les deux choses. Ma version rend donc le sens avec une exactitude absolue; or, quand le traducteur n'est pas absolument un écolier de septième, tenu de faire le mot-à-mot, quand d'ailleurs il joint le texte latin à sa traduction, est-il bien sérieux de lui adresser, en plein Sénat, une critique de cette nature?

Au surplus, que ma version soit littérale, je m'en inquiète peu; l'essentiel est de savoir si, oui ou non, saint Bernard jugeait incompatibles le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. Or c'est ce qui résulte du passage cité avec une force d'évidence que rien ne peut détruire ni même affaiblir.

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