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pire de cette considération que nous allons examiner la question, au point de vue légal.

Nous reconnaissons que la loi du 26 juillet 1790 et celle du 17 septembre 1793 désignent parmi les officiers publics chargés de procéder aux prisées et ventes mobilières les greffiers, en général, sans distinguer les greffiers des Tribunaux de districts de ceux des justices de paix. Cependant, dans la pratique, ces derniers seuls ont usé de l'attribution dont il s'agit. Cette circonstance peut-elle suffire pour la solution de notre question? Evidentment non, mais elle est importante en ce qu'esle révèle la pensée de la législation postérieure à 1793: c'est sous ce rapport seulement que nous entendons nous en étayer.

Une décision du ministre de la justice, du 8 janvier 1812, a décidé que les greffiers des Tribunaux de simple police, institués par l'art. 168 C. I. C., ne sont pas rangés dans la catégorie des officiers qui peuvent procéder aux ventes mobilières et aux prisées.

En 1840, le projet présenté par le garde des sceaux sur les ventes mobilières ne faisait mention que des greffiers de justice de paix.

Le 24 avril 1840, M. Hébert, rapporteur de la commission, s'exprimait ainsi : « L'art. 2 du projet, en désignant les officiers ministériels qui seuls peuvent procéder aux ventes de meubles aux enchères, indique, en quatrième ordre, les greffiers de justice de paix; il écarte ainsi les prétentions quelquefois élevées par les greffiers des autres Tribunaux : il est évident en effet leur intervention en pareille matière n'est ni requise par les besoins des populations ni légitimée par la nature de leurs attributions ordinaires. »

que

Le projet ayant été retiré par le ministre de la justice et remplacé par un autre, qui est devenu, depuis, la loi du 25 juin 1841, il s'agit de savoir si la pensée du gouvernement et de la commission a trouvé place dans l'une de ses dispositions: or, on ne peut en douter lorsqu'on se reporte à l'art. 10 de la loi. En effet, dans ce texte, il n'est question que des greffiers de justice de paix; il faut donc en conclure qu'il y a abrogation des lois de 1790 et 1793, en tant qu'elles attribuaient à tous les greffiers indistinctement le droit de procéder aux prisées et ventes mobilières. Aujourd'hui ce droit n'appartient plus qu'aux greffiers de justice de paix, concurremment avec les notaires, huissiers et commissaires-priseurs.

DISSERTATION.

Degrés de juridiction. · Ressort.

Des jugements et décisions susceptibles ou non susceptibles d'appel ou du premier et du dernier ressort (1).

Dans le langage des lois, le mot ressort a trois acceptions différentes quelquefois on l'emploie pour désigner l'étendue superficielle de terrain qui forme l'arrondissement d'un Tribunal; d'autres fois, pour indiquer sa juridiction sur les Tribunaux inférieurs qui lui sont subordonnés; souvent enfin pour déterminer sa compétence sur les affaires qui lui sont soumises, et exprimer s'il prononce souverainement ou à charge d'appel. Dans le premier sens, on dit que le ressort d'un Tribunal a les mêmes limites que l'arrondissement dans lequel il est établi.

En prenant le not ressort dans sa seconde acception, on peut dire que plusieurs justices de paix sont du ressort du même Tribunal ou ressortissent au (et non du) même Tribunal; qu'une Cour royale comprend dans son ressort un certain nombre de Tribunaux de première instance.

Eufin, pour exprimer que des juges statuent souverainement sur le fond d'une contestation, on dit qu'ils prononcent en dernier ressort; au contraire, si leur jugement est soumis à l'appel, on dit qu'ils ne jugent qu'en premier ressort.

C'est dans ce dernier sens que le mot ressort peut donner lieu à un grand nombre de questions importantes; car les lois qui déterminent l'ordre des juridictions se bornent à poser des principes généraux, et la jurisprudence peut seule en rendre l'application facile dans les diverses circonstances qui peuvent se présenter. - COFFINIÈRES, J. A., t. 19, p. 5 et 6.

On nomme appel le recours au juge supérieur pour faire réformer la sentence ou le jugement du juge ou d'un Tribunal inférieur. L'acte par lequel on exerce ce recours est nommé acte d'appel; il est signifié à la partie qui a obtenu gain de cause en première instance.

(1) Cette dissertation est extraite de l'ouvrage que va incessamment publier M. SOUQUET, avoué à Saint-Girons. L'impression en est assez avancée pour qu'on puisse dès à présent fixer l'époque de la mise en vente : ce sera dans le courant de juin que paraîtra cet important ouvrage.

LXII.

9

§ I. Des jugements rendus par les juges de paix : comme juges en matière civile.

(D'après la loi du 25 mai 1838 sur les justices de paix, promulguée le 6 juin suivant.)

Sont en dernier ressort et par conséquent non susceptibles d'appel les jugements rendus jusqu'à la valeur de 100 fr.

10 Sur toutes actions purement personnelles ou mobilières. (Art. 1er.)

2o Sur les contestations entre les hôteliers, aubergistes ou logeurs, et les voyageurs ou locataires en garni, pour dépenses d'hôtellerie et perte ou avarie d'effets déposés dans l'auberge ou dans l'hôtel ;

Entre les voyageurs et les voituriers ou bateliers, pour retards, frais de route et perte ou avarie d'effets accompagnant les voyageurs;

Entre les voyageurs et les carrossiers ou autres ouvriers, pour fournitures, salaires et réparations faites aux voitures de voyage. (Art. 2.)

3° Sur les demandes relatives :

Au payement des loyers ou fermages, aux congés, aux demandes en résiliation de baux, fondées sur le seul défaut de payement de loyers ou fermages; aux expulsions de lieux et aux demandes en validité de saisie-gagerie; le tout lorsque les locations verbales ou par écrit n'excèdent pas annuellement, Paris 400 fr., et 200 fr. partout ailleurs.

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Si le prix principal du bail consiste en denrées ou prestations en nature appréciables d'après les mercuriales, l'évaluation doit être faite sur celles du jour de l'échéance, lorsqu'il s'agira du payement des fermages; dans tous les autres cas, elle doit avoir lieu suivant les mercuriales du mois qui aura précédé la demande. Si le prix principal du bail consiste en prestations non appréciables d'après les mercuriales, ou s'il s'agit de baux à colons partiaires, le juge de paix détermine la compétence, en prenant pour base du revenu de la propriété le principal de la contribution foncière de l'année courante, multiplié par cinq. (Art. 3.)

Aux dommages faits aux champs, fruits et récoltes, soit par l'homme, soit par les animaux ;

A l'étalage des arbres ou baies, et au curage soit des fossés, soit des canaux servant à l'irrigation des propriétés ou au mouvement des usines, lorsque les droits de propriété ou de servitude ne sont pas contestés ;

Aux réparations locatives de maisons ou fermes, mises par la loi à la charge du locataire;

Aux engagements respectifs des gens de travail au jour, au mois et à l'année, et de ceux qui les emploient, des maîtres et des domestiques ou gens de service à gages; des maîtres et de leurs ouvriers ou apprentis, sans néanmoins qu'il soit dérogé aux lois et règlements relatifs à la juridiction des prud'hommes;

Au payement des nourrices, sauf ce qui est prescrit par les lois et règlements d'administration publique à l'égard des bureaux de nourrices de la ville de Paris et de toutes les autres villes ;

Aux réparations civiles pour diffamation verbale et pour injures publiques ou non publiques, verbales ou par écrit, autrement que par la voie de la presse; pour rixes ou voies de fait; le tout lorsque les parties ne se sont pas pourvues par la voie criminelle. (Art. 5.)

4° S'il s'agit des indemnités réclamées par le locataire ou fermier pour non-jouissance provenant du fait du propriétaire, lorsque le droit à une indemnité n'est pas contesté;

Des dégradations et pertes dans les cas prévus par les articles 1722 et 1735 C. C.

par

Néanmoins le juge de paix ne connaît des pertes causées incendie ou inondation que dans les limites posées par l'art. 1er de la loi (c'est-à-dire jusqu'à 100 fr. en dernier ressort et de plus de 100 fr. jusqu'à 200 fr. en premier ressort). (Art. 4.)

5° Sur des demandes reconventionnelles ou en compensation qui par leur nature ou leur valeur sont dans les limites de la compétence des juges de paix, alors même que, dans les cas prévus par l'art. 1, ces demandes réunies à la demande principale s'élèveraient au-dessus de 200 fr. ;

Sur les demandes reconventionnelles en dommages-intérêts fondées exclusivement sur la demande principale elle-même. (Art. 7.)

Lorsque chacune des demandes principales, reconventionnelles ou en compensation est dans les limites de la compétence du juge de paix en dernier ressort, il prononce sans qu'il y ait lieu à appel. (Art. 8.)

Dans les cas où la saisie-gagerie ne peut avoir lieu qu'en vertu de permission de justice, cette permission est accordée par le juge de paix du lieu où la saisie devra être faite, toutes les fois que les causes rentreront dans sa compétence. — S'il y a opposition de la part des tiers, pour des causes et pour des sommes qui, réunies, excéderaient cette compétence, le jugement doit en être déféré aux Tribunaux de première instance. (Art. 10.)

Sont en premier ressort et par conséquent susceptibles d'appel devant le Tribunal civil de première instance auquel ressortit la justice de paix, les jugements rendus :

1o Sur toutes actions purement personnelles ou mobilières

au-dessus de 100 fr. jusqu'à 200 fr., taux actuel de la compétence des justices de paix. (Art. 1er);

2° Quand il s'agit d'une valeur au-dessus de 100 fr. jusqu'à la valeur de 1,500 fr. de principal, taux de la compétence en dernier ressort des Tribunaux de première instance, sur les contestations énumérées suprà, p. 130, 2o (Art. 2);

3o Sur les demandes excédant 100 fr. et à quelque valeur qu'elles s'élèvent, relatives,

1° A ce qui fait l'objet du § 3. (V. suprà, p. 130, 3°);

2° Aux demandes reconventionnelles en dommages-intérêts fondées exclusivement sur la demande principale elle-même (Art. 7).

Et si l'une des demandes principales, reconventionnelles ou en compensation, n'est susceptible d'être jugée qu'à charge d'appel, le juge de paix ne prononce sur toutes qu'en premier

ressort.

Si la demande reconventionnelle ou en compensation excède les limites de sa compétence, il peut, soit retenir le jugement de la demande principale, soit renvoyer, sur le tout, ies parties à se pourvoir devant le Tribunal de première instance, sans préliminaire de conciliation. (Art. 8);

4 Quand il s'agit d'une valeur au-dessus de 100 fr. jusqu'à 1,500 fr. de principal (taux de la compétence du dernier ressort des Tribunaux de première instance), relativement à ce qui fait l'objet du § 4, suprà, p. 131;

5° Sur les entreprises commises, dans l'année, sur les cours d'eau servant à l'irrigation des propriétés et au mouvement des usines et moulins sans préjudice des attributions de l'autorité administrative dans les cas déterminés par les lois et par les règlements; sur les dénonciations de nouvel ordre, complaintes, actions en réintégrande et autres actions possessoires fondées sur des faits également commis dans l'année;

Sur les actions en bornage et sur celles relatives à la distance prescrite par la loi, les règlements particuliers et l'usage des lieux, pour les plantations d'arbres ou de haies, lorsque la propriété ou les titres qui l'établissent ne sont pas contestés;

Sur les actions relatives aux constructions et travaux énoncés dans l'art. 674 C. C., lorsque la propriété ou la mitoyenneté du mur ne sont pas contestées ;

Sur les demandes en pension alimentaire n'excédant pas 150 fr. par an, et seulement lorsqu'elles sont formées en vertu des art. 205, 206 et 207 C. C. (Entre père, mère et enfants.) (Art. 6.)

Lorsque plusieurs demandes formées par la même partie sont réunies dans une même instance, le juge de paix ne prononce qu'en premier ressort, si leur valeur totale s'élève au-dessus de 100 fr., lors même que quelqu'une de ces demandes serait infé

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