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Du reste, si le cisaillement d'un ouvrage en questions est de nature à arrêter celui qui voudrait le lire tout d'un trait, il est au contraire avantageux à celui qui ne veut que le consulter sur les difficultés particulières qu'il rencontre dans sa marche. Sous ce rapport, si le commentaire de M. Chauveau ne peut être classé parmi les livres en si petit nombre qu'on aime à lire et à relire à ses heures de loisir, il doit au moins être de la plus grande utilité à tous les légistes qui concourent de près ou de loin à l'application de la loi sur les ventes judiciaires, principalement aux avoués; et, à ce titre, il ne peut qu'obtenir un grand succès et étendre la réputation que les nombreux travaux de M. Chauveau lui ont déjà si justement acquise.

DU RÉGIME HYPOTHÉCAIRE et vues d'amélioration de ce système, par M. BURETEY, notaire à Beaune. — Paris, Videcoq, place du Panthéon, no 6.1 vol. in-8° de 12 feuilles.

Tout est dit sur les vices de notre régime hypothécaire; mais on est peu d'accord sur le système nouveau qu'il convient de substituer à l'ancien. Le mal est connu, le remède est encore à trouver. Ce n'est pas que les projets aient manqué; bien des idées ont été lancées dans le vaste champ des discussions; bien des propositions ont été formulées, depuis le système radical de M. Decourdemanche jusqu'au système impraticable des cédules hypothécaires; mais toutes ces théories ont obtenu peu de faveur. Le public redoute avec raison ces prétendues améliorations, ces essais aventureux, dont le résultat le plus certain serait de jeter le bouleversement dans notre législation civile, et peut-être d'anéantir, au lieu de raviver, le crédit foncier.

Nous n'avons pas besoin de dire que l'auteur du livre que nous annonçons n'est pas de ces téméraires qui portent, sans examen et sans précaution, une main hardie sur notre Code civil; M. Buretey est notaire, c'est-à-dire un homme d'expérience, et, à ce titre, il ne propose que des réformes praticables : c'est beaucoup. Nous ne croyons pas cependant que cet estimable écrivain ait assez approfondi le sujet si difficile qu'il a traité; on voit trop à la forme de l'ouvrage, et au peu de développements qu'il renferme, que ce n'était primitivement qu'un travail rapide destinė, sous forme de pétition, à appeler l'attention du législateur sur la nécessité, sur l'opportunité d'une réforme du régime hypothécaire. Déjà les vœux de M. Buretey ont été en partie réalisés par la loi du 2 juin 1841 sur les ventes judiciaires de biens immeubles, Il est probable que le gouvernement ne tardera pas à lui donner satisfaction complète. Un projet est à l'étude, et, selon toute apparence, il sera présenté aux chambres dans la prochaine session; que les réformistes prennent donc patience; si, comme chacun le dit, il y a décidément quelque chose à faire, on le fera.

TRAÍTE DES FAILLITÉS ET BANQUEROUTES; par Augustin-Charles RENOUARD, Conseiller à la Cour de cassation. - Paris, chez Guillaumin, galerie de la Bourse, n° 5, 2 vol in-8. Prix: 15 fr.

Bien des ouvrages ont déjà été publiés sur la matière des faillites et banqueroutes, depuis la loi du 28 mai 1838; mais si celui-ci est le der. nier par la date de sa publication, il est certainement en première ligne par sa valeur scientifique. Il faut convenir aussi que M. Renouard était mieux placé que personne pour faire un travail intéressant, et pour nous initier à la pensée intime de la loi. C'est lui qui, comme secrétaire général au ministère de la justice, a puissamment contribué à la préparation et à la rédaction du premier projet (1); c'est lui qui, en qualité de rapporteur, en 1835, puis, comme membre de la commission de révision, en 1836, prit une part active à la discussion et à la confection de la loi. Ces antécédents si précieux ajoutent certes une grande autorité aux opinions et aux doctrines développées par M. Renouard, qui, du reste, commande déjà suffisamment la confiance par la haute position qu'il occupe dans la magistrature et par l'importance de ses travaux juridiques, et le succès des livres qu'il a antérieurement publiés.

Le Traité de M. Renouard se divise en deux parties. La première est consacrée à l'histoire du droit sur les faillites et banqueroutes, et se divise en plusieurs époques qui embrassent les principaux monuments législatifs depuis Moïse jusqu'à nos jours. Elle est suivie, comme cela se pratique en Allemagne, d'une bibliographie raisonnée et fort exacte : l'auteur ne s'est interdit la critique que lorsqu'il s'est agi des auteurs modernes.

La seconde, et celle-là est beaucoup plus développée que la première, comprend le commentaire approfondi de la loi du 28 mai 1838. On peut s'étonner qu'un esprit aussi philosophique que M. Renouard ait choisi cette forme de préférence à celle du traité que semble annoncer son titre; il s'en excuse en faisant remarquer: 1° que le commentaire, plus commode pour l'usage, n'exclut pas la classification méthodique; 2o qu'il s'agit d'une matière où la loi, ne se bornant pas à poser les principes généraux, s'est attachée, au contraire, à résoudre toutes celles des questions de détail qu'elle a pu prévoir, et à gouverner chacune des phases, chacun des incidents de la procédure. Quoi qu'il en soit, la doctrine n'y perdra rien, bien que la méthode ait eu à en souffrir; car M. Renouard a eu soin de placer à la tête des chapitres et des sections

(1) Dès 1827, les réclamations unanimes du commerce avaient appelé l'attention du gouvernement vers la réforme du titre des faillites; les Cours royales, les chambres de commerce et les Tribunaux avaient été consultés, des documents précieux avaient été recueillis au ministère de la justice; mais il n'avait été fait aucun usage de ces matériaux lorsque la révolution de 1830 éclata.

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les observations générales, les développements théoriques que la ma tière comportait.

Il est une lacune néanmoins que nous regrettons d'avoir à signaler dans cet excellent traité, c'est l'examen comparé des législations étrangères avec la nôtre. Nous ne pensons pas, avec l'auteur, qu'un tel travail eût excédé ses forces; nous croyons, au contraire, qu'il était de tous nos jurisconsultes celui qui pouvait le mieux l'accomplir. L'essai tenté par lui dans l'ouvrage si remarquable des droits d'auteur, a été un service réel pour la science; une nouvelle tentative sur une matière aussi importante et aussi usuelle que les faillites eût obtenu encore plus de succès.

Au mérite doctrinal et à l'utilité pratique le Traité des faillites joint un avantage de plus, et bien rare aujourd'hui parmi les ouvrages de droit, celui d'une exécution typographique à peu près irréprochable. On voit que M. Renouard aime à conserver les traditions de famille : les amateurs de bons livres en seront reconnaissants.

DE L'EFFET ORDINAIRE DE L'INSCRIPTION en matière de privi lége sur les immeubles; avec un appendice contenant l'exposé et l'examen de plusieurs opinions et projets présentés dans ce dernier temps sur la même matière ; par M. VALETTE, professeur à la Faculté de droit de Paris. — Parls, Joubert, rue des Grès, 14. - Broch. in-8° de 9 feuilles. (2o éd.)

Dans la circulaire adressée par M, le garde des sceaux aux Cours et Tribunaux et aux Facultés de droit sur la réforme du régime hypothécaire, entre autres questions dignes d'examen, on signale celle-ci : « Si << le principe de la publicité doit s'appliquer même aux priviléges, ou « s'il est des cas où leur efficacité dépend de l'inscription? » (V. J. A., t. 61, p. 487.)- Quoique la brochure de M. Valette n'ait pas été écrite pour servir de réponse à la question posée par le ministre, elle s'y réfère cependant de la manière la plus directe, puisqu'elle a pour objet de déterminer le sens précis de l'art. 2106 C. Civ. Ce travail vraiment remarquable avait déjà paru dans la Revue étrangère et française de législation (année 1840-1841); il était digne de l'attention du jurisconsulte par son originalité, par la nouveauté des aperçus sur une matière qui n'avait pas encore été l'objet d'un examen spécial et approfondi. Aussi l'annonce d'une seconde édition a-t-elle été accueillie avec la plus grande faveur.

Dans cette dissertation, dont le plan a été remanié, et qui a reçu de nombreuses corrections, M. Valette cherche à démontrer que le caractère essentiel des priviléges spéciaux sur les immeubles consiste dans une rétention ou distraction opérée, au profit du créancier, au moment même de l'acquisition du nouveau propriétaire. Sa théorie, développée avec une grande conviction, trouve sa base dans la loi du 11 brumaire an 7, à laquelle, suivant l'auteur, les rédacteurs du Code civil n'ont voulu apporter aucune modification, du moins en ce qui concerne le

point qui nous occupe. Il est juste de convenir que le rapprochement et la comparaison des divers textes et les inductions de M. Valette donnent à son système une grande vraisemblance. On refusera peut-être d'aller aussi loin que lui et d'admettre l'interprétation hardie qu'il propose de donner à l'art. 2108, en imposant, par analogie, au vendeur, l'obligation de prendre inscription dans les soixante jours (argum. 2109 C. C.); luimême n'insiste pas beaucoup sur cette partie de ses observations; mais il n'est personne qui puisse méconnaître la force, la solidité des critiques de l'auteur, lorsqu'il s'efforce de combattre les opinions des principaux commentateurs du Code, à partir de M. Tarrible jusqu'à M. Troplong: il relève avec une netteté admirable et une logique ferme quoique subtile, les erreurs et les contradictions de ses devanciers. Son travail, à l'adresse des légistes, doit être l'objet des méditations du législateur: il mérite à tous gards le succès qu'il a obtenu.

RÉPERTOIRE DE L'ADMINISTRATION ET DE LA COMPTABILITÉ DES ÉTABLISSEMENTS DE BIENFAISANCE, hospices, hôpitaux, bureaux de bienfaisance, asiles d'aliénés, monts-de-piété, dépôts de mendicité, caisses d'épargne, congrégations hospitalières, associations de bienfaisance et autres établissements publics et privés; présentant, par ordre alphabétique, le texte des lois, règlements, instructions ministérielles, décisions du conseil d'État, des Cours et Tribunaux, concernant la gestion des biens, l'administration et la comptabilité de ces établissements; accompagné d'explications dé. taillées sur chacune des parties de l'administration charitable; par E. DURIEU, chef de la section des établissements de bienfaisance au ministère de l'intérieur, et GERMAIN ROCHE, avocat à la Cour royale de Paris. 2 vol. in-8°; au bureau du Mémorial des percepteurs, rue Martignac, no 8. Prix: 16 fr.

Il n'est pas de pays où, plus constamment qu'en France, les esprits se soient préoccupés du sort des classes pauvres et des moyens de soulager leurs misères. On peut s'en faire une idée par le résumé des dernières statistiques; leurs chiffres ont une éloquence qui dispense de toute observation. Il résulte des états que nous avons consultés que la France possède 1,329 hôpitaux disposant d'un revenu de 52 millions et secourant 153,000 indigents ;-6,275 bureaux de bienfaisance disposant d'un revenu de plus de 10 millions et secourant près de 700,000 individus; 42 monts-de-piété possédant 35 millions environ de capitaux qui se prétent sur 5 millions d'articles à peu près ;-127,500 enfants trouvés, âgés de moins de douze ans, et pour lesquels l'État dépense annuellement 10 millions;-et 80 établissements spéciaux d'aliénés, dans lesquels sont traités environ 12,000 malades, dont la dépense est évaluée à 400 fr. par individu.- Qu'on joigne à tous ces frais ceux qu'occasionnent l'instruction primaire, les salles d'asile, les caisses d'épargne, les dépôts de mendicité, les maisons de refuge, les colonies agricoles, les sociétés de pa

tronage, etc., et l'on aura le budget du pauvre, le bilan approximatif des misères sociales et l'état des ressources qui sont destinées à y pourvoir.

On comprend que lorsque la bienfaisance publique s'exerce sur une si grande échelle, met en mouvement un si grand nombre de fonctionnaires et d'employés, et dispose de capitaux aussi considérables, il faut, pour maintenir l'ordre, l'économie et la régularité, que la législation descende dans une foule de détails, et qu'elle soit chaque jour complétée par des règlements et des instructions administratives bien appropriés aux besoins du moment. Mais comment se reconnaître dans ce dédale de lois, d'ordonnances, d'arrêtés, de circulaires, d'avis du conseil d'État,' de jugements et d'arrêts qui forment, épars dans une foule de recueils ou enfouis dans les cartons de ministères, le code de l'administration charitable? Pour ne pas s'égarer dans des recherches infructueuses, il faut un guide éclairé et sûr; il faut un livre bien fait, bien complet surtout, qui joigne le mérite de la netteté à celui de l'exactitude. Sous tous ces rapports, on ne peut en trouver aucun qui vaille à beaucoup près celui de MM. Roche et Durieu. Fruit de la collaboration commune de deux auteurs très-versés dans la matière dont ils s'occupent, l'un employé supérieur au ministère de l'intérieur,l'autre jurisconsulte instruit et judicieux, le Répertoire possède le double avantage de s'adresser et de convenir aussi bien à l'administrateur qu'au légiste. Ce n'est point un ouvrage fait à un seul point de vue, et destiné exclusivement ou aux hommes de lois ou aux employés de l'administration, c'est un livre complet dans lequel les notions pratiques trouvent place à côté des principes de la législation et des enseignements de la jurisprudence. Ainsi l'association de MM. Roche et Durieu est pour le public une excellente garantie de la bonne exécution du travail; l'avocat et le chef de bureau, en se réunissant, ont doublé leurs chances de succès; l'un complète l'autre.

Le Répertoire donne: 1° le texte de toutes les lois et de tous les règlements relatifs à l'administration, au contentieux et à la comptabilité des établissements de bienfaisance; 2° l'analyse et souvent même le texte des instructions, circulaires et décisions ministérielles, les avis et arrêts du conseil d'État, la jurisprudence des Cours et Tribunaux, et les opinions des jurisconsultes qui, dans les temps anciens et modernes, ont éclairé la législation des secours publics; 3° enfin d'amples explications sur chaque partie du service et la discussion approfondie des questions de droit et d'administration qui peuvent s'élever. Pour la facilité des recherches, les auteurs ont adopté l'ordre alphabétique; ce n'est pas celui que nous approuvons en général, mais ici la préférence s'explique par la nature même du sujet : ce Répertoire embrasse tant de matières diverses et détachées les unes des autres, qu'il serait téméraire de chercher à les réunir par un lien commun. Pour bien se rendre compte de la manière dont MM. Roche et Durieu ont accompli leur œuvre, on peut con. sulter notamment les mots Aliénés, Bureau de bienfaisance, Caisse d'é pargne, Comptabilité, Enfants trouvés, Fournitures, Libéralités.

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