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des hommes vertueux, depuis Pythagore, Socrate et Jésus-Christ, jusqu'à Francklin.

2o. Aux avantages de la méthode religieuse, nous joignons ceux de la méthode militaire. D'après celle-ci, les rapports journaliers, qui s'élèvent, de degrés en degrés, du sous-officier au lieutenant, au capitaine, puis au major, au colonel, au général, et les commandemens successifs donnés par le premier chef et transmis de grade en grade dans tous les rangs d'un corps, permettent de surveiller et de diriger tous les mouvemens d'une grande réunion d'hommes, aussi facilement que s'il s'agissait d'un seul individu : de même, par nos tableaux de répartition des heures, aucune d'elles n'échappe à l'inspection ni à l'examen. On les voit passer en revue, à certaines époques fixées, comme autant de soldats qu'on fait manoeuvrer; un œil exercé juge à la fois les détails et l'ensemble. La même précision rigoureuse, que la hierarchie militaire rend facile dans les évolutions d'une troupe armée, s'applique à notre manière de distribuer et de faire, pour ainsi dire, manoeuvrer les différentes heures de chaque jour.

3°. Le livret horaire est encore une application de la méthode commerciale, usitée par les maisons de banquequi ouvrent un compte particulier à chacun de leurs correspondans. Nos colonnes sont autant de comptes ouverts affectés aux divers emplois de la vie; chacun d'eux devient débiteur ou créancier, suivant qu'il a reçu un nombre d'heures plus ou moins considérable que celui qui paraît devoir lui être habituellement assigné. Si l'une des quatre divisions physique, morale, intellectuelle et sociale, ou l'une des branches particulières dont elles se composent, ont employé plus d'heures que nous ne voulons leur en accorder, la seule inspection de la dernière ligne tracée nous averțit de rétablir l'équilibre dans la ligne du jour suivant. Ainsi, nous sommes toujours tenus en état de surveillance, sans que notre vie habituelle soit en rien asservie ni dérangée, et nous arrêtons, chaque jour, en une minute, les comptes de chacun des élémens dont la vie humaine et sociale 'se compose.

L'homme, dont l'existence comprend les quatre gran

ROYA

des divisions établies dans notre Mémorial analytique, peut se trouver, sous ces quatre rapports, dans trois états différens de déviation, de stagnation ou de progression. S'il y a déviation, il importe de la remarquer à temps pour pouvoir l'arrêter; on empêche alors qu'elle n'arrive jusqu'au point où il deviendrait impossible d'en détruire les effets. S'il y a stagnation, il faut secouer la machine humaine, sujette quelquefois à une sorte d'assoupissement léthargique, qui paralyse et engourdit nos forces, et qui plonge l'homme dans un état honteux d'indolence et de nullité. S'il y a progression, il faut voir en quoi elle consiste, et la favoriser sans la précipiter. Mais, l'un de ces trois états peut appartenir exclusivement à une seule branche de la vie, ou bien à deux, à trois, et non pas à toutes les quatre, ou même à quelques colonnes particulières de chacune d'elles; en sorte que ce qui est progression pour l'une, produise une stagnation prolongée, ou une déviation insensible dans les autres. Il faut donc s'attacher à maintenir un parfait équilibre entre les quatre rapports dont la vie se compose, et s'assurer que la progression est à peu près égale dans tous, ou du moins que, dans chacun d'eux, les époques de stagnation ou de déviation sont passagères et momentanées.

Deux nouvelles comparaisons nous aideront à faire encore mieux apprécier la destination et l'utilité de notre instrument.

Les meilleurs esprits ne dédaignent point de se délasser quelquefois des occupations sérieuses par un jeu de combinaison qui les exerce et les récrée. Nous leur offrons une sorte de jeu analogue, également utile et agréable. Chaque tableau d'une quinzaine présente l'image d'un véritable échiquier. Les colonnes sont les cases, les chiffres indicateurs des heures sont les pièces du jeu. La manière dont ces chiffres ou ces pièces sont disposés, constitue, suivant l'appréciation que chacun fait de sa journée, la perte ou gain; et le signe mystérieux, inscrit dans la dernière colonne, à la fin de chaque ligne, indique si la partie est perdue ou gagnée.

Enfin, notre Biomètre peut être assimilé à une sorte de clavecin. Une connaissance parfaite de l'instrument et

des sons propres à chaque touche permet de parcourir toute l'étendue du clavier, sans trop s'arrêter ni passer trop légèrement sur chacune d'elles. Nos colonnes sont comme les touches qui rendent un son plus ou moins prolongé, suivant qu'elles reçoivent plus ou moins d'heures. Il s'agit de varier les tons et de les mettre en harmonie.

Nous pourrions suivre l'auteur dans les développemens que présente l'instruction sur la tenue de son MEMORIAL HORAIRE. On y voit avec intérêt comment la somme totale de 24 heures, dont le jour naturel se compose, peut réellement s'augmenter par une heureuse activité, qui réunit quelquefois, dans un même instant, plusieurs emplois de la vie. On voit aussi comment cette augmentation peut s'expliquer par une sorte de formule algébrique. Veut-on exprimer, par exemple, que sur vingt heures employées à voyager, dix ont été données au sommeil, trois à des travaux libres ou de choix, deux à la lecture, trois à la société, deux à la vie vague ou passive, on placera entre deux parenthèses un numéro de renvoi après le chiffre 20, inscrit dans la colonne M, Voyages, et l'on écrira au bas du tableau, à la suite du la numéro de renvoi correspondant, que je suppose 1, note qui suit: C, 10. J, 3. K, 2. N, 3. P, 2, en ajoutant la lettre indicative de chacune des colonnes qu'on veut rappeler, le chiffre indicatif du nombre d'heures qui lui appartient.

Il devient facile de suivre ainsi toutes les variations", et d'apprécier exactement tous les résultats de l'exis

tence.

pas une

invention

« Cet instrument mécanique, ajoute l'auteur, disposé pour faciliter le compte rendu des divers emplois de chaque intervalle de vingt-quatre heures, paraît mériter d'autant plus de confiance qu'il n'est purement théorique, un procédé plus ou moins ingé nieux, mais le résultat d'une expérience positive, d'une méthode pratiquée avec succès pendant plusieurs années par des jeunes gens recommandables, qui se sont félicités d'en avoir fait usage. Notre but est d'arrêter, de fixer

l'homme sur lui-même, de lui permettre d'augmenter, de multiplier sa vie, de le rendre habituellement mieux portant, meilleur, plus instruit, plus sage, plus heureux. >>

L'ORDRE agrandit l'espace et multiplie le temps.

Si quelques personnes pouvaient craindre que la pratique de cette méthode et l'usage du Biomètre fussent contraires au développement et aux libres élans de l'imagination, nous leur répondrions par ce mot d'une femme justement célèbre : Quoi de plus régulier que la nature? et cependant quoi de plus poétique?

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Réflexions politiques sur la constitution d'Angleterre et la charte royale, considérée dans ses rapports avec, l'ancienne constitution de la monarchie française.

Ce titre, un peu trop fastueux, est celui d'une petite brochure de cent soixante-sept pages, qui doit le jour aux circonstances malheureuses où nous nous trouvons, et plus encore à celles qui ont signalé les commencemens de notre révolution. La quantité innombrable d'ouvrages politiques dont nous sommes inondés deptis dix-huit mois, prouve peut-être, de la part de leurs auteurs, plus de vanité et de présomption que de véritable désir d'être utiles. Croit-on avoir à se plaindre des partisans de tel ou tel système, on fait une brochure. Désire-t-on obtenir un emploi et se faire bien venir d'un ministre, on fait une brochure. La qualité de membre de la chambre des députés chatouille-t-elle notre ambition, vous écrivez une brochure. Malheureusement, ou peutêtre fort heureusement, le ministre et les électeurs laissent là votre mémoire, et l'imprimeur, en vous présentant le sien, vous fait maudire leur dédain orgueilleux. Je suis loin de prêter de pareils sentimens à l'auteur

de l'ouvrage que j'annonce. Quoiqu'il paraisse tenir à une caste qui, à une époque désastreuse, échangea les jouissances du rang et de la fortune contre la proscription et la pauvreté, on ne trouve point dans son ouvrage cette aigreur de style, ces insipides récriminations, qui ne sont le partage que de la faiblesse et de la sottise lorsqu'elles obtiennent un triomphe passager. S'il laisse échapper quelques regrets sur la destruction de l'ancien système de gouvernement, on sent que ce sont les regrets d'un honnête homme, et qu'il est persuadé de l'uti lité réelle de ses principes pour la prospérité de la France.

Je ne ferai point de cet écrit une analyse détaillée ; quelques observations sufliront pour le faire connaître. Et d'abord, pour commencer par le commencement comme disait le Bélier au géant Moulineau, je blâmerai son premier titre. Sans parler des inconvéniens, de l'inconvenance peut-être qu'il y a de rappeler sans cesse un mot qui est devenu une sanglante injure, je lui deman→ derai si son jacobin est converti ou non. S'il l'est, pour quoi lui en donner le nom? S'il ne l'est pas, et qu'il con serve encore soigneusement les idées anti-libérales de 93, il plantera son bonnet rouge sur la tête de son Mentor, et le forcera de crier vivent les sans-culottes! Voilà donc toute sa morale en pure perte.

Passons à l'ouvrage même. Dans la première lettre, l'auteur, tout en avouant que, quant aux états populaires et démocratiques, la souveraineté du peuple ne fait pas de question, cherche à démontrer qu'elle ne peut pas être regardée comme un droit commun à tous les peuples, et pour tous également imprescriptible. Sans doute on doit déplorer les excès dans lesquels de grands scélérats ont précipité le peuple en l'abusant par de grands mots; mais on ne doit pas rejeter sur les principes les malheurs qui n'ont été causés que par la fausse applic tion de ces principes. On abuse de tout, même de ce qui est essentiellement bon, et l'auteur lui-même n'abuset-il pas aussi de la facilité qu'il a de raisonner seul, lorsque, d'inductions en inductions, il veut nous amener à regarder comme très-légitime le droit que donnent à un

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