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Gamin, par M. de Gourcy, invité, ne dit rien. Je vous la Souhaite, de M. Desprez, est un peu mieux. Les deux chansons de M. Adolphe sont amusantes; mais elles sont effacées par la muse caustique et spirituelle de M. Félix. Son Homme dégoûté de tout, le Roi de la Fève, sont extrê mement agréables, et les productions de MM. Henri Simon, du chevalier de la Salle, Justin-Gensoul, Pailly de Warcy, ne déparent point le recueil. Le chevalier Lablée est dans les vétérans; l'habitude de rimer le fait rimer encore. Je m'empresse de venir à M. Étienne Jourdan, connu par la rondeur de sa verve et par la tournure originale qu'il donne à tous les sujets qu'il traite. Indépen damment du mérite de la chanson intitulée la Barque à Caron, ou Passez, payez, M. Lélu a fait un air charmant qui lui fera sans doute obtenir les honneurs du genre; c'est-à-dire qu'elle doit devenir populaire. Je porterai le même jugement sur les productions de M. Ledoux, auquel je reprocherai de n'avoir donné, à l'exemple de son confrère Jourdan, que quatre chansons. Lorsque l'on fait aussi bien que ces messieurs, il me semble qu'on devrait être moins avare. M. Lélu, compositeur distingué, a fait de très jolis couplets, et les a enrichis d'une musique gracieuse, et parfaitement adaptée aux paroles. Je passe aux chansons très-bien faites, mais un peu froides de M.Léopold; cette froideur ne viendrait-elle pas de ce que M. Léopold compose souvent d'après un mot donné? J'ai cru du moins m'apercevoir de cela en lisant ses couplets, lesquels m'ont fait plaisir. Les trois chansons de M. de Saint-Laurent présentent du comique et de l'originalité. Je n'aime pas la Vanité des Vanités, par M. Léger; son Gateau des Rois me semble beaucoup mieux. On doit à MM. Ourry et Montperlier deux chansons fort drôles; mais M. Mayeur, pour avoir long-temps demeuré en province, a donné des couplets qui ne font point sentir la longue absence de l'auteur. Je me résume, et dis que le recueil de Momus, pour 1816, est digne de ses deux aînés; qu'il peut soutenir la confrontation : j'ajouterai que, si les prêtres du grand temple n'y mettent ordre, les desservans de la petite chapelle pourraient les surpasser, les vaincre, et......

DE L'IMPRIMERIE DU MERCURE, RUE DE RACINE,

MERCURE

DE FRANCE.

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Les personnes dont l'abonnement est expiré, sont invitées à le renouveler, si elles ne veulent point éprouver d'interruption dans l'envoi des numéros.

Le prix de l'abonnement est de 14 fr. pour trois mois, 27 fr. pour six mois, et 50 fr. pour l'année. On ne peut souscrire que du 1. de chaque mois. On est prié d'indiquer le numéro de la dernière quittance, et de donner l'adresse bien exactement, et surtout très-lisible. Les lettres, livres, gravures, etc., doivent être adressés, francs de port, à l'administration du MERCURE, rue Mazarine, n°. 3o.

POÉSIE.

TRADUCTION DE PROPERCE (1).
ÉLÉGIE VII.

AU POÊTE PONTICUS.

LIVRE 1.

Tes vers, cher Ponticus, dans la cité thebaine,
De deax frères rivaux ressuscitent la haine :
Puissent, selon mes voeux, les destins indulgens
Te placer près d'Homère et sourire à tes chants!

(1) Ces trois élégies sont inédites.

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Pour moi, des seuls amours je célèbre l'empire ;
C'est sur mes propres maux que ma muse soupire;
Tout mon génie, hélas! est né de mes douleurs ;
Je le dois à Cinthie, à ses tristes rigueurs ;
J'ai trouvé dans ses yeux toute ma renommée :
Voilà l'ambition dont mon âme est charmée;
Content si l'avenir sait que ces mêmes jeux,
Si doux et si cruels, me rendent seul heureux,
Et si l'amant trahi, méditant mes ouvrages,
Apprend d'eux à braver l'amour et ses outrages.
Si le fils de Vénus te lance un de ses traits
(Paissent les justes dieux t'en garder à jamais!)
Tu gémiras en vain et ta bouche muette
Ne fera plus sonner l'héroïque trompette;
Les sept chefs désarmés languiront dans leurs camps,
Et le livide oubli s'étendra sur tes chants.
Vainement des Amours essaîras-tu la lyre,
Les Amours sans pitié riront de ton délire.
Alors sous tes regards, jaloux de mes destins,
J'irai me mettre au rang de ces chantres divins.
Chaque amant doit graver sur ma tombe future:
Salut, peintre immortel des tourmens que j'endure!
Crains d'accueillir mes vers d'un souris dédaigneux;
Lent à frapper, l'amour ne se venge que mieux.

ÉLÉGIE XXIIe.

A TULLUS.

LIVRE II.

Au nom d'ane amitié dont souvent tu te flattes,
Tu veux savoir, Tullus, d'où viennent mes pénates,
Qui je suis, à quel sang ton ami doit le jour.

Si tu connais Pérouse et les champs d'alentour (1),

(1) L'Étrurie.

Tombe affreuse, où naguère on vit Rome sanglante,
Par le bras d'Erynnis plonger Rome expirante :

Eh bien! apprends-le donc, aux confins de ces champs,
De mes pleurs éternels, éternels monumens,

Où d'un père chéri l'ombre encor misérable

Sur ses membres épars demande un pen de sable,

Dans la fertile Ombrie, à la clarté des cieux,

Pour la première fois Properce ouvrit les yeux.

ÉLÉGIE XVIII.

A UNE NOUVELLE MAITRESSE.

LIVRE III.

Crois-tu donc que l'amant qui, les yeux aux étoiles,
Loin de ton lit désert s'enfuit à pleines voiles,
De tes charmes encor garde le souvenir?
Barbare qui, flatté d'un douteux avenir,
Insensible aux adieux de sa jeune maîtresse,

Court du gain sur les mers suivre la voix traîtresse :
L'Afrique et ses trésors paîront-ils tous tes pleurs?
Pourquoi lasser les dieux d'inutiles clamears?
Prodigue en ce moment de sa flamme légère,
Peut-être presse-t-il le sein d'une étrangère !
O toi qui de Vénus possèdes les appas,
Et les arts variés de la chaste Pallas,
Toi, chez qui sans effort, par tes soins ranimée,
Brille d'un docte aïeul la haute renommée,
Si tu n'as fait le choix d'un plus constant ami,
De tes prospérités c'est jouir à demi :

Je te serai fidèle! accours, fille charmante,

Viens sur mon sein brûlant t'avouer mon amante!

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Le vieux berger Lycas reposait sous un hêtre;
Le fidèle Médor, couché près de son maître,
Le caressait, et se faisait donner

Les débris d'un bon déjeuner.

De l'homme voyez l'injustice!

S'écrie une brebis. Ah! c'est avec raison
Que je me plains de son caprice!
Je donne à cet ingrat tous les ans ma toison;
Ma laine habille son ménage,

Il s'engraisse de mon laitage,
Sans me récompenser en aucune façon :
Jamais de graine ni de son ;

Il faut, pour me nourrir, bravant fatigue, orage,
Arracher brins à brins l'herbe d'un pâturage,
Où je viens après la moisson.

Cependant, mon maître partage

Son pain, sa soupe et son fromage Avec son favori, ce Médor, ce beau chien, Qui le flatte toujours et ne lui donne rien. Dame brebis faisait ainsi la raisonneuse, Quand tout à coup

Paraît un loup,

Qui veut étrangler la prêcheuse!

Le valeureux Médor sur lui fond à l'instant,
Le terrasse et le fait expirer sous sa dent.

Vous le voyez, belle parleuse,

Dit-il alors à l'envieuse :

Les beaux troupeaux sont de grands biens;

Mais qui veut les garder doit avoir de bons chiens.

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