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gagent en rien l'initiative du prince, et ne gênent en rien sa liberté; le roi est toujours maître de dire ou de penser qu'il avisera.

Mais il importe qu'il ait l'oreille frappée du vœu de ses peuples ; et je m'étonne d'autant plus que l'on prétende nous contester ce droit que les précédents nous attestent qu'en 1819, en 1821 et en 1824, la Chambre a usé de ce droit avec plus d'étendue que nous ne le faisons; car on demandait alors formellement une loi sur l'organisation du régime municipal, une loi sur l'instruction publique, une loi du sacrilège, une loi contre la presse, etc., etc. (M. Dupin lit les passages mêmes des adresses présentées en 1819, 1821 et 1824, qui renferment des propositions précises.)

Nous, au contraire, nous ne prononçons pas le nom de loi,; nous indiquons seulement à l'altention de Sa Majesté les parties de l'administration qui peuvent davantage exciter sa sollicitude et la nôtre; et encore en quels termes le faisonsnous? En enveloppant notre pensée sous les formes d'un remerciement de ce que déjà, et d'elle-même, Sa Majesté a daigné nommer des commissions pour s'occuper de ces divers objets.

Nous saisissons cette occasion de remonter aux temps anciens de la monarchie, et de faire honneur à la dynastie de l'affranchissement des communes, sans même faire remarquer que cette liberté nous fut, non pas donnée, vendue, et qu'elle nous appartient d'autant mieux aujourd'hui que nos pères l'ont plus chèrement payée!

Attendez, vous dit-on, puisqu'une commission est nommée; eh! quoi, toujours attendre! et depuis combien de temps n'attendons-nous pas? Nous répétons aujourd'hui les vœux de 1819! Combien d'années nous faudra-t-il attendre encore? et qui sait si l'on ne viendra pas nous dire, comme on l'a déjà fait tant de fois, que nous ne sommes pas mûrs pour obtenir les institutions que nous sollicitons avec le plus d'instance. Car, au dire de certaines gens, la nature française n'est mûre que pour le provisoire et pour l'arbitraire; et ils ne trouvent jamais qu'il soit temps pour eile de jouir de l'ordre légal et de la liberté ! Messieurs, en disant au roi lui-même ce qui nous manque et ce que nous désirons, nous sommes dans notre droit, ne nous en désistons point.

M. Dupin atné propose l'amendement suivant: Qui les rendit trop souvent illusoires.

Cet amendement étant appuyé, M. le Président le met aux voix; il est adopté.

Un membre reproduit l'amendement qui consiste à substituer au mot: rendit, ceux-ci : tendit à les rendre. Plusieurs autres membres appuient cet amendement; il est mis aux voix et rejeté.

L'amendement qui tend au retranchement du mot déplorable est mis aux voix ; deux épreuves ayant paru douteuses, on procède à l'appel nominal.

Le dépouillement du scrutin donne le résultat suivant:

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faite, qu'il est contraire aux droits de la Chambre de lui proposer de modifier une décision qu'elle vient de prendre.

M. le Président donne lecture du paragraphe tel qu'il a été amendé :

"

Sire, elles retentiront dans la postérité ces paroles mémorables; la France les recueille dans un profond attendrissement. Objet de vos pensées pourrait-elle douter de son avenir au milieu de tant d'amour que votre bonté lui révèle? Ses vœux ne demandent aux dépositaires de votre pouvoir que la vérité de vos bienfaits. Ses plaintes n'accusent que le système déplorable qui les rendit trop souvent illusoires. Grâces soient rendues à Votre Majesté ! L'esprit de discorde a fui pour toujours... Affranchie par son roi, la France voit au premier rang de ses garanties l'autorité forte et tutélaire qui appartient à votre couronne. Aucun sacrifice ne nous coûtera, Sire, pour seconder vos vues et procurer l'accord de tous les sentiments. »

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M. Fleury, député du Calvados, dépose sur le bureau du président de la Chambre une proposition de loi pour que les pièces de monnaies de 3 liv. et 6 liv. (2 fr. 75 et 5 fr. 80), et généralement toutes celles du système des livres tournois, soient finalement démonétisées le 1er janvier 1810; et même que, dès à présent, tout ce qui rentre dans les caisses publiques ne soit plus remis en circulation, mais envoyé aux hôtels des monnaies pour être aussitôt converti en pièces selon le système métrique décimal. La séance est levée.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. ROYER-COLLARD.

Comité secret du samedi 8 mars 1828 (1).

Le procès-verbal du comité secret du 7 mars est lu et adopté.

L'ordre du jour est la suite de la délibération sur le projet d'adresse.

M. le Président donne lecture du dernier paragraphe, ainsi conçu :

(1) Les comités secrets de la session de 1828 sont inédits.

Père de la grande famille, vous appelez tous les cœurs français à l'union: vos vœux seront exaucés. L'alliance généreuse du pouvoir légitime et des libertés désarmera les partis. Tout s'unira désormais dans l'amour du roi et l'esprit de la Charte. >>

M. Lamandé. Messieurs, j'ai voté contre deux des paragraphes précédents; mais je ne viens point demander la suppression du dernier paragraphe.

Le roi pourra l'entendre sans avoir la douleur de penser que ses bienfaits ont été rendus trop souvent illusoires (1).

Le peuple pourra le lire sans se croire atteint d'une plaie profonde (2).

En général, Messieurs, la rédaction de la seconde partie de l'adresse que nous discutons, et qui était, j'en conviens, la plus délicate et la plus difficile, me semble susceptible d'être modifiée.

Je n'attaque pas le fond des pensées; mais les expressions ne me paraissent ni assez mesurées, ni assez respectueuses.

Le discours de la couronne a laissé dans tous cœurs français de profondes impressions et de douces espérances que notre réponse, attendue avec impatience, peut ou détruire ou réaliser.

Il existe dans les esprits, non plus cette inquiétude vague dont on parlait naguère à cette tribune, mais une inquiétude bien réelle.

Cette inquiétude, que je ne qualifierai pas de plaie si profonde, est sans doute fondée sur ce que la marche du ministère actuel paraît encore incertaine. La France, quelle qu'ait été l'administration, que je ne prétends pas défendre, a toujours aimé son roi, et n'a cessé d'en recevoir des bienfaits,

La marche suivie par l'ancien ministère a de funestes conséquences. Peut-elle donner lieu à une accusation? La Charte nous a donné le droit de la porter; qu'on en fasse la proposition dans les formes légales prévues par la Charte, et nous l'examinerons.

Mais prenons-y garde, Messieurs, s'il suffisait d'avoir appartenu à la dernière administration pour être dépouillé de la confiance publique, où irions-nous? où irait la France? à une persécution, à une réforme totale. Or, une réforme totale ressemble beaucoup à un commencement de révolution.

Mais, me répondra-t-on, vous signalez un danger imaginaire. Ne sommes-nous pas tous pénétrés d'amour et de respect pour le roi et sa dynastie ?

Eh bien! Messieurs, c'est à ce sentiment profondément gravé dans nos cœurs, que j'en appelle; et vous n'avez pas oublié sans doute que le premier tort de l'Assemblée constituante a été d'avoir osé régenter son roi.

Messieurs, nous sommes sur un bon terrain, celui de la Charte à laquelle nous avons juré obéissance. Restons-y invariablement fixés; et n'allons ni en deçà ni au delà.

Le roi nous a dit, et nous le savions déjà, que le bonheur de la France est l'objet de tous ses vœux et de toutes ses pensées; que, pour l'assurer, il saura conserver l'autorité forte et tutélaire qui appartient à sa couronne. C'est le vœu una

(1) Expressions contenues dans un des paragraphes précédents. (2) Idem.

nime de la France; mais son bonheur dépend aussi de nous.

Chargés de coopérer à la confection des lois du royaume, que toutes nos pensées, comme celles du roi, soient dirigées vers les plus chers intérêts du pays. Pensons aussi, Messieurs, à l'auguste et digne héritier du trône, et portons encore plus loin nos regards dans l'avenir, à ce jeune prince destiné par la Providence à régner un jour sur nos enfants. Assurons-lui d'avance, et par la sagesse de nos votes, et par la stabilité de nos institutions, un règne exempt des calamités qui ont pesé sur nous.

Je vote pour la suppression d'un seul mot du dernier paragrapbe, celui : désormais. Cette expression me paraît fausse et inconvenante.

(Ce retranchement est mis aux voix et adopté.) (Le paragraphe ainsi amendé est adopté.)

M. le Président, sur la demande d'un grand nombre de députés, donne une lecture complète de l'adresse.

Après cette lecture, on passe au scrutin secret sur l'ensemble de l'adresse.

Le dépouillement donne le résultat suivant :
Nombre des votants.
Pour l'adoption...
Contre......
L'adresse est adoptée.

362

198 164

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nécessaire, vos sujets ont accepté d'avance la responsabilité de cette journée de Navarin, où le combat fut plus imprévu que la victoire. Ils ne renonceront jamais à l'héritage de l'honneur. Devenue libre par vos serments et par les lois de votre auguste frère, la France éprouve pour la Grèce la double sympathie de la gloire et de la liberté.

«Nous remercions humblement Votre Majesté d'avoir bien voutu nous apprendre que les sacrifices commandés par l'occupation de la Péninsule touchent à leur terme. Nous souhaitons que les grands exemples donnés par un digne petit-fils de saint Louis ne soient pas perdus; que l'or et le sang français n'aient pas été répandus pour renouer des chaînes et dresser les échafauds, qu'enfin les armes généreuses de M. le dauphin, en rendant l'indépendance au roi votre neveu, l'aient aussi rendue au noble peuple des Espagnes.

"

« Alger sera contenu et puni. Sire, Louis XIV, votre aïeul de glorieuse mémoire, châtia aussi cette régence, dont une politique jalouse et rétrécie a trop longtemps souffert et quelquefois favorisé les déprédatons.

« La sollicitude paternelle de Votre Majesté a protégé les intérêts de la France dans les parages lointains qui ont vu s'élever les gouvernements nouveaux. Le commerce et l'industrie trouveront dans les besoins de ces peuples, appelés à l'existence politique, une source abondante de prospérité.

« Vos regards, Sire, qui se sont portés avec sécurité au dehors de la France, n'ont pas moins été satisfaits de l'état de votre royaume. Votre auguste fils appelé à intervenir dans les promotions militaires; un ministère créé pour les besoins du commerce et de l'industrie; l'instruction publique séparée des affaires ecclésiastiques; de hautes questions d'administration qui, soumises à un examen sévère, amèneront la dissolution d'une société désormais incompatible avec nos mœurs et nos lois, voilà, Sire, les nouveaux bienfaits que nous vous devons.

Vous avez fait plus voulant, selon vos propres paroles, affermir dans vos Etats la Charte octroyée par votre frère et que vous avez juré de maintenir, vous avez prêté une oreille indulgente aux humbles doléances de l'opinion publique, Vous avez retiré votre confiance à des ministres qui ont produit cette différence entre les dépenses et les recettes, à laquelle il sera nécessaire de pouvoir, à ces ministres, dont nous aurions voulu passer la conduite sous silence. Mais la censure rétablie, la garde nationale de Paris licenciée, la représentation nationale corrompue jusque dans ses sources, la pairie attaquée dans son principe vital, nous font un devoir d'user de la vérité, premier besoin des peuples et des rois, et d'offrir à Votre Majesté le tribut de la plus profonde reconnaissance pour avoir éloigné de tels ministres de ses conseils.

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Sire, achevez votre noble ouvrage ! Ordonnez, comme il vous a plu d'en annoncer le dessein, que la législation soit mise en harmonie avec la Charte. La liberté de la presse, deux fois rendue par vous à la France, cessera alors d'être menacée de cette censure facultative pour laquelle la faiblesse et les passions trouveront toujours les circonstances graves. Les députés des départements seront mis à l'abri des fraudes électorales, et une loi communale détruisant la centralisation, fera disparaître cet arbitraire administratif que nous ont légué des temps de despotisme et de malheur.

Sire, le bonheur de la France est l'objet de

toutes vos affections et de toutes vos pensées; le vôtre est le plus ardent de nos désirs : Que Votre Majesté conserve comme le plus précieux de nos biens, l'autorité tutélaire qui appartient à la couronne. Si elle avait jamais besoin de nouveaux appuis, les députés des départements se feraient un devoir de concourir à les lui donner. La France, essentiellement monarchique, ne sépare point, ne séparera jamais le principe de l'ordre du principe de la liberté.

«Sire, l'union des hommes de bien a rempli le vou touchant de votre cœur c'est au pied du trône des Bourbons et devant la Charte constitutionnelle que cette union s'est accomplie, à la parole du plus royal et du plus révéré des monarques. »

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PROJET D'ADRESSE AU ROI

soumis à la Chambre par M. de Schonen, député de la Seine.

Sire, vos fidèles sujets, les membres de la Chambre des députés, portent au pied du trône l'hommage accoutumé de leur respect, de leur reconnaissance et de leur amour.

« C'est avec joie, avec orgueil, qu'ils ont vu le roi de France adopter la gloire nationale de Navarin, et ils se confient en sa haute sagesse pour concilier les intérêts de l'Etat, de l'Europe, et ceux si chers de l'humanité, dans la collision actuellement existante entre les trop malheureux Hellènes et la Porte ottomane.

« Votre Majesté annonce qu'elle va mettre un terme aux sacrifices que la France a faits pour la guerre de la Péninsule, et qu'elle fait chaque jour pour l'entretien de ses garnisons. Sire, notre respect nous interdit des regrets inutiles, et puisque l'avenir seul nous appartient, nous remercions Votre Majesté de ce qu'elle va délivrer la France d'un fardeau qui lui pesait depuis longtemps.

« Nous attendons avec confiance les explications que les ministres nous donnerons sur le blocus d'Alger, persuadés qu'il a fallu un motif grave pour porter la guerre dans des parages où notre pavillon a constamment flotté en paix.

"

« Oui, Sire, l'honneur du pavillon français est trop cher au cœur de Votre Majesté pour que nous ne nous reposions pas entièrement sur elle des mesures qu'elle croira devoir prendre dans l'intérêt et pour la gloire de la patrie.

« Députés des départements et, comme tels, mandataires du peuple, nous rechercherons avec soin, avec scrupule, les causes de la diminution des recettes et de l'augmentation des dépenses, pour arrêter les unes et favoriser les autres : nous irons en cela au devant des désirs de Votre Majesté, qui veut une économie sévère et bien entendue.

«L'armée sera fière d'avoir pour digne appréciateur de ses services votre auguste fils; cette faveur, qui ne modifiera en rien le principe tutélaire de la responsabilité ministérielle ne peut qu'accroître son amour et son dévouement.

« Au sein d'un grand et riche empire comme la France, et dans ce mouvement général de toutes choses vers un perfectionnement indéfini, l'industrie et le commerce ont créé des fortunes et des intérêts non moins respectables et tout aussi puissants que la propriété territoriale; Votre Majesté a entendu les voeux d'un grand nombre de ses sujets, en consacrant un ministère spécial

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à favoriser le développement de tous ces intérêts. Un bienfait non moins grand, c'est la séparation de l'instruction publique des affaires ecclésias tiques; il était temps, Sire, de réprimer certains envahissements. L'intérêt bien entendu de la religion doit rendre le prêtre, étranger des choses de la terre; le monde n'est pour lui qu'un lieu de passage qu'il doit édifier par ses exemples, mais qui ne lui appartient pas: sa patrie c'est lé ciel.

Votre Majesté sait mieux que personne que la loyauté est la vertu des rois, que l'hypocrisie ruine la religion comme la corruption ruine les empires, et elle les a frappées l'une et l'autre d'une égale réprobation en brisant un ministère malfaisant qui a trahi ses royales intentions. Gloire à vous, Sire, d'avoir si bien compris les besoins de vos peuples et d'avoir si généreusement exaucé leurs prières.

« Mais ce n'était pas assez:

« Votre Majesté a senti qu'il fallait donner une nouvelle impulsion à la marche de l'administration et de l'ensemble à une législation contradictoire.

« Et elle veut que l'administration ne soit désormais que l'exécution franche et complète des lois du royaume, et que cette législation soit mise en harmonie avec la Charte, ce palladium de toutes nos libertés comme de tout pouvoir.

« Ainsi, nous verrons et nous aurons le bonheur de concourir en partie à l'exécution de ces grands desseins; nous verrons :

« Les congrégations d'hommes, non autorisées, quitter le sol qui les repousse;

« Les appels comme d'abus restitués aux cours royales;

Les fraudes électorales rendues impossibles par un meilleur mode dans la formation des listes;

« La censure facultative abolie;

« Un système municipal et départemental qui crée des citoyens et les fasse préluder, par la défense des intérêts communs de la cité, à la défense des intérêts généraux du pays;

"

Système qui, rendant le contentieux à des corps indépendants et supprimant d'odieux conflits, affranchira la justice des odieux caprices d'une administration inamovible;

« Une garde nationale instituée et organisée d'après les principes constitutionnels monarchiques du royaume;

Et enfin, Sire, une loi qui soit le couronnement de toutes les autres, en définissant les cas de responsabilité des fonctionnaires publics et le mode de leur poursuite.

«Grâces soient rendues de tant de bienfaits à Votre Majesté !

« Quelles nobles voies elle ouvre à nos efforts! « Nous y marcherons dignes du peuple qui nous a nommés, et, osons le dire, digne de vous.

<< Tous les cœurs généreux, tous les hommes de bien ont entendu la parole de leur roi, et ils y répondront avec transport.

«Et la postérité, consacrant vos bienfaits et notre reconnaissance, en rendra à jamais le plus éclatant témoignage. »>

DISCOURS QUE M. DEGOUVE DE NUNCQUES, député du Pas-de-Calais, se proposait de prononcer dans la discussion de l'adresse.

Messieurs, à la première lecture du projet

d'adresse dont la dernière partie est aujourd'hui soumise à votre examen, je pensais qu'elle devait être accueillie sans contestation; je dirai mêine avec empressement et reconnaissance pour ses honorables rédacteurs.

Je trouvais cette adresse forte de pensées, d'expressions, de convenance et de sentiments; elle me paraissait de nature à satisfaire tous les esprits, à concilier tous les cœurs.

Je m'étais trompé, Messieurs, puisque nous combattons encore sur le dernier paragraphe de l'adresse, mais non moins sur le moins important pour le présent comme pour l'avenir.

D'honorables adversaires, et nous eussions désiré de ne pas en rencontrer dans cette circonstance solennelle « car la parole du roi, appelant l'union des hommes de bien, n'aurait dû trouver ici que des cœurs disposés à lui répondre. » Cependant d'honorables adversaires pré

tendent que le discours de la couronne n'ayant point parlé des actes de l'ancien ministère, nous devons garder un silence absolu sur le système suivi pendant toute son administration.

Je pense, Messieurs, que c'est une grave erreur. Je puis, sans doute, me tromper dans mon opinion, mais je dois la faire connaître, et, en peu de mots, pour ne point abuser des moments de la Chambre, qui doit être empressée de porter au roi son hommage et ses vœux.

Un point incontestable, et qui me paraît de la dernière évidence, c'est que depuis 1824, pour ne pas remonter plus haut, la presque généralité des actes de l'ancien ministère a été biâmée par toute la France royaliste constitutionnelle.

Nos commettants nous ont donné le mandat exprès de le proclamer à cette tribune mais avant tout, et surtout de déposer nos doléances dans le sein d'un roi juste et bon, « qui veut connaître la vérité tout entière, parce qu'il la regarde comme le premier besoin des princes et des peuples. »

Il faut donc la lui dire, cette vérité, tout entière, mais avec cette fermeté respectueuse que nous devons à la majesté royale.

Eh! ne craignons-nous pas de lui déplaire.

Le descendant du bon, du grand Henri, veut recueillir toutes nos pensées, veut connaître tous nos vœux, veut réaliser toutes nos espé

rances.

Pourrait-il compter sur notre fidélité si nous ne lui donnions des preuves de notre amour?

Messieurs, pour parler au roi avec respect, avec utilité pour nos commettants, comine pour la France entière, expliquons-nous d'abord ici en bon et loyal député: parlons avec franchise.

Est-il done possible de ne pas reconnaître avec la majorité des Français, que le système de l'ancien ministère a été si déplorable, que le roi luimême l'a flétri pour toujours en punissant ses auteurs par la privation de cette auguste confiance dont ils ont si étrangement et si longtemps abusé. Ils en ont abusé, oui, Messieurs; les hommes de bien, à quelque couleur qu'ils appartiennent, sont obligés d'en convenir.

Des faits trop nombreux, trop patents, trop prouvés, attestent cette funeste vérité.

Je n'entrerai pas dans leur longue et affligeante énumération. Ils recevront leur développement dans des moments plus opportuns.

Il me suffit, quant à présent, que ces méfaits politiques aient encouru la censure de tout honBête homme ami du roi et des libertés légales.

Il me suffit que le blâme public, que le blâme de la Chambre doivent indispensablement frapper

leurs auteurs pour que nous portions au pied du trône l'expression douloureuse de notre improbation.

Je vote pour le dernier paragraphe de l'adresse.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Du dimanche 9 mars 1828.

PRÉSENTATION DE L'ADRESSE AU ROI.

Aujourd'hui dimanche 9 mars, à huit heures du soir, la grande députation de la Chambre des députés a été admise, avec le cérémonial accoutumé, à présenter au roi l'adresse votée par la Chambre, en réponse au discours de Sa Majesté.

M. Royer-Collard, président, a lu au roi l'adresse conçue en ces termes :

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Sire, vos fidèles sujets, les députés des départements, sont heureux d'environner de leur amour et des hommages de la reconnaissance publique, ce trône de tant de siècles où Votre Majesté règne pour le bonheur de ses peuples.

L'esprit qui anime les puissances chrétiennes et le traité qui appuie les desseins de Votre Majesté, assurent la pacification de la Grèce. Si, malgré nos vœux, l'espoir d'une généreuse médiation venait à s'évanouir; si la défense des droits les plus sacrés exigeait l'emploi de la force, Votré Majesté verrait son peuple répondre à sa voix. Les palmes de Navarin ont prouvé que la gloire était fidèle à votre Maison. La France se confie aux promesses de la victoire pour le triomphe d'une cause si chère à l'humanité.

«Sire, nous appelons de tous nos vœux le jour où la Péninsule, libre de ses discordes, doit rouvrir à vos soldats le chemin de leur patrie, mettre un terme à des sacrifices onéreux pour vos sujets et à l'accroissement d'une dette qui pèserait sur la loyauté espagnole. Puisse l'Espagne, que tant de liens attachent à la France, trouver comme elle son repos dans l'ordre et la justice qui fondent le bonheur des peuples.

«Des sujets de plaintes légitimes ont armé contre Alger les forces de Votre Majesté. Quelques agressions dans des parages lointains ont troublé notre navigation. Nous nous reposons sur la vigueur des mesures que Votre Majesté a prescrites pour protéger efficacement notre commerce et venger le pavillon français, toujours uni dans son honneur à la fortune de nos rois.

« Nous nous félicitons, Sire, des motifs de sécurité et d'espérance que l'état intérieur du royaume fait concevoir à Votre Majesté.

Si les produits de nos contributions diverses ont souffert quelque diminution; si les sources de la richesse publique ont éprouvé une altération passagère; si enfin des dépenses inattendues ont excédé les prévisions législatives, nous en rechercherons les causes; et, jaloux de seconder les intentions bienfaisantes de Votre Majesté, nous entrerons avec elle dans les voies d'une économie éclairée et sévère.

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qu'à un prince placé si haut dans l'esprit des peuples.

«Attentive aux progrès du commerce et de l'industrie, Votre Majesté désire en favoriser le développement par la création d'un nouveau ministère. Elle veut entendre de plus près des besoins si étroitement unis à ceux de l'agriculture. Leur premier besoin, Sire, est la liberté. Tout ce qui gêne sans nécessité la facilité de nos relations, porte au commerce un préjudice dont le contre-coup se fait sentir aux intérêts les plus éloignés.

«Votre Majesté a voulu, dans sa sagesse, que l'instruction publique reçût à l'avenir une direction séparée de celle des affaires ecclésiastiques. Cette disposition ne saurait altérer les rapports nécessaires de la religion avec l'éducation de la jeunesse.

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Sire, la Charte est dans vos mains le testament d'un roi pacificateur. Héritier de ses pensées, vous affermirez son ouvrage, vous réconcilierez tout ce que la malignité des temps a désuni, Vous ferez régner l'harmonie constitutionnelle dans les esprits comme dans les lois.

« Les hautes questions signalées à votre sollicitude se résoudront par l'ordre légal qui repousse également l'oppression et la faiblesse. Quelques parties de l'administration publique ont soulevé de graves ressentiments. Nous le voyons avec douleur; et pour fermer une plaie si profonde, Votre Majesté, dans sa prévoyance, a devancé l'expression de nos voux: les commissions formées par ses ordres se hâteront d'en préparer l'accomplissement; nous aimons à le penser.

« Depuis longtemps, Sire, l'instruction publique attend une organisation définitive qui embrasse tous les degrés et les divers modes de l'enseignement, qui concilie dans leurs rapports l'exercice de l'autorité civile et celui du pouvoir spirituel, qui maintienne enfin la bonne intelligence de leur concours selon les maximes héréditaires de l'Eglise gallicane, à l'égale protection assurée aux autres cultes.

« Une nécessité d'un autre ordre réclame le complément de nos lois électorales; et pour asseoir sur sa véritable base l'édifice de nos libertés, votre cœur paternel, Sire, nous rendra ces institutions municipales, monument de nos anciennes franchises, qui rappelle à la mémoire de nos peuples tout ce qu'ils doivent à vos ancêtres.

"

Digne fils d'Henri IV et de Saint-Louis, nous avons foi dans vos promesses; vous invoquez les lois comme le plus ferme appui des trônes, après Dieu dont ils relèvent; vous appelez du fond des cœurs la vérité; vous la proclamez hautement le premier besoin des princes et des peuples.

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Sire, elles retentiront dans la prospérité, ces paroles mémorables. La France les recueille dans un profond attendrissement. Objet de vos pensées, pourrait-elle douter de son avenir, au milieu de tant d'amour que votre bonté lui révèle? Ses vœux ne demandent aux dépositaires de votre pouvoir que la vérité de vos bienfaits. Ses plaintes n'accusent que le système déplorable qui les rendit trop souvent illusoires. Grâces soient rendues à Votre Majesté, l'esprit de discorde a fui pour toujours... Affranchic par son roi, la France voit au premier rang de ses garanties l'autorité forte et tutélaire qui appartient à votre couronne. Aucun sacrifice ne nous coûtera, Sire, pour seconder vos vues et procurer l'accord de tous les sentiments.

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