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roles union et oubli, à l'art. 11 tout entier de la Charte, par des appels à la méfiance, à la haine, je l'avoue à regret, je dois craindre de m'être étrangement mépris sur l'opportunité de ma proposition et de l'avoir ainsi maladroitement compromise.

Cependant, Messieurs, il nous faut un milliard d'impôts chaque année... Quels sont vos moyens pour ce gigantesque effort? l'agriculture, le commerce et l'industrie; eh bien! rien de tout cela ne peut prospérer sans de bonnes routes... que le roi soit donc supplié sans retard de vouloir bien s'en occuper; et n'oublions pas que le problème tout entier est, ainsi que la dit l'honorable M. Laffitte, dans ces deux puissants résultats production et transport.

Je persiste dans ma proposition.

M. Charles Dupin combat le préopinant, en ce qui regarde les maires, faisant observer que ceux-ci ne décidant rien par eux-mêmes, mais bien en conseil municipal, ce serait un reproche mal fondé que de les accuser d'appliquer la prestation selon leur bon plaisir, et sur la route qui serait la plus à leur convenance. Ce mode d'imposition lui paraît juste, car il lui semble naturel que dans une même communauté chacun des membres concoure dans une égale proportion, au bien général.

Assurément il croit que l'état des chemins vicinaux réclame une attention particulière; mais après avoir relaté les nombreux travaux auxquels la Chambre sera obligée de se livrer avant la fin d'une session déjà bien avancée, il demande l'ajournement de la proposition jusqu'au moment où l'on pourra la discuter.

M. de Lorgeril rappelle que les chemins vicinaux autrefois appartenant aux seigneurs qui les réparaient, furent abandonnés aux communes en 1791, à la charge par elles de les entretenir, mais que l'insuffisance de leurs revenus nécessita la prestation en nature qui lui paraît la plus juste des impositions.

Peut-être l'on pourrait obtenir une meilleure loi que celle existante mais il croit que la plus grande difficulté repose dans la classification des chemins vicinaux, et dans les empiètements que les riverains ont fait sur ces mêmes chemins. Pour une grande partie, il pourrait y avoir prescription et alors où trouver les fonds nécessaires aux indemnités?

Dans beaucoup de pays les bordures de ces chemins relevées continuellement par les boues que l'on y amoncèle, sont plantées de haies, et comment les faire disparaître, pour rétablir ces chemins dans leurs largeurs primitives?

Il approuve toujours la proposition, quoiqu'il pense que l'on ne doive rien précipiter.

M. Méchin croit que les difficultés de détail que l'on présente prouvent d'une manière absolue la nécessité de s'occuper sérieusement des routes vicinales, qui, aux portes de Paris même sont impraticables. Convaincu par l'exemple des provinces chargées jadis de se régir, que l'administration locale peut principalement concourir à l'entretien de ses chemins, il fait voir Lobligation de la loi sur les communes où certainement il sera question des routes.

Il appuie la proposition en demandant qu'elle soit rapportée au projet de loi communale.

M. de Conny s'élève contre la prestation, qu'il

regarde comme inégale dans sa répartition et illusoire pour le bénéfice; par l'insouciance des gens qui y sont appelés, et le mauvais travail qu'elle produit.

Il voudrait que cette prestation n'existat qu'en journée d'argent, et convaincu de l'utilité d'une loi régulière, il appuie la proposition.

M. Boscal de Réals combat le préopinant. Il envisage la prestation en nature comme obligatoire, car les communes étant chargées de l'entretien de leurs routes vicinales, elles ne peuvent employer que ce genre d'imposition, quand leurs revenus sont insuffisants. Quoiqu'il pense que l'on pourrait, par quelques changements, rendre plus complète la loi dont il s'agit, il ne croit pas que le moment soit opportun et il demande l'ajournement.

M. Bacot de Romand, de l'avis du préopinant, croit la prestation en nature, sage dans son principe et régulière dans son application: sage, parce qu'il est raisonnable et juste que tous les habitants d'une commune contribuent d'une manière égale, à des réparations dont ils jouissent également et dont aucun ne peut se soustraire, car c'est la personne elle-même qui est taxée.

Il la trouve régulière dans son application par le soin qu'apporte l'administration à s'imposer aux époques où les travaux de la campagne sont presque nuls, ce qui donne aux agriculteurs les moyens de fournir leur contingent sans aucun dérangement.

Il regarde la loi comme bonne, quoique susceptible d'amélioration, et dans ce cas il demande l'ajournement, pour que la proposition puisse être représentée au moment où l'on s'occupera de la loi sur les communes.

M. le Président donne lecture de la proposition:

« Le roi sera très humblement supplié de présenter une loi qui modifie les articles 2 et « 4 de la loi du 28 juillet 1824, sur les chemins vicinaux, de telle manière que la prestation en « nature soit, à l'avenir, l'auxiliaire des 5 centi«mes, dont l'impôt est autorisé par l'article 4 « de ladite loi. >>

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M. Méchin, rapporteur. Messieurs, M. de Chasteignier de Turnay (Charente), vieillard âgé de 82 ans, a droit, comme usufruitier, à la jouissance de la successión de feu dame Rénée-FrançoiseNicolas de Vautron, son épouse.

En cette qualité, il a reçu les inscriptions des deux premiers cinquièmes de l'indemnité qui était due à cette dame, en vertu de la loi du 25 avril 1825. Au moment de recevoir les inscriptions du troisième semestre, elles se sont trouvées frappées d'opposition par des créanciers des nus-propriétaires.

Il prie la Chambre d'observer qu'il a vainement réclamé auprès de M. le ministre des finances, qu'on lui a constamment objecté cette opposition qui, dit-il, ne peut frapper les fruits qui lui sont dévolus. Il paraît qu'il a prié le ministre d'ordonner que les inscriptions fussent déposées à la Caisse des dépôts et consignations qui lui en payerait les arrérages, et ne se dessaisirait des titres que quand les oppositions auraient été jugées et levées.

M. de Chasteignier ajoute qu'à son âge les moindres délais ont leur gravité.

Votre commission vous propose le renvoi au ministre des finances. (Adopté.)

Le sieur Doux, militaire à Laragne (HautesAlpes), demande une récompense militaire qu'il croit lui être due pour ses services.

Le sieur Doux, conscrit de 1811, chasseur au 1er régiment d'infanterie légère, a fait en Espagne les campagnes de 1811, 1812 et 1813. Il fut blessé à cette époque et conduit prisonnier en Angleterre, d'où il n'est revenu qu'à la Restauration. Il affirme que les inspecteurs généraux ont reconnu qu'il avait droit à la retraite, et néanmoins il n'a pu obtenir qu'une gratification de 40 francs.

Votre commission vous propose le renvoi au ministre de la guerre. (Adopté.)

Le sieur Richerand, à Paris, demande que l'on rende au jury la connaissance des délits de la presse.

M. Richerand déplore les dispositions des lois qui ont conféré à la magistrature judiciaire des attributions politiques; il craint que les cours royales ne deviennent ce qu'étaient les parlements, et demande que la connaissance des délits de la presse soit rendue au jury, comine elle lui appartenait avant la loi du 17 mars 1822. Votre commission vous propose le renvoi au ministre de la justice. (Adopté.)

Le sieur Lanusse, à Bordeaux, demande une augmentation à sa pension ecclésiastique.

M. Lanusse, ancien curé de la Gironde, âgé de 75 ans révolus, demande une augmentation à la pension de 267 francs dont il jouit et qui, primitivement, a été fixée à 800 francs. Il ajoute qu'à l'époque où l'on ferma les églises, il se voua à l'éducation de la jeunesse et rapporte les certificats les plus honorables, l'un de M. Renelerot, curé de Saint-Louis de Bordeaux, et visé par M. l'archevêque; l'autre d'un chef d'institution, visé par le recteur. Les circonstances commandent l'économie la plus sévère; et, déterminée par cette grande considération, votre commission vous propose de passer à l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Charpentier, à Paris, représente la pétition qu'il a adressée à la Chambre en 1827, et qui avait pour objet de dénoncer des abus commis dans l'achat des papiers destinés au service de l'Imprimerie royale. Il se plaint en même temps de la perte qu'il a faite de la place de

garde-magasin des papiers blancs; il joint plusieurs attestations pour justifier de sa moralité.

Cette pétition, dont la rédaction est fort confuse, ne contient rien de précis, et est plutôt une récrimination contre la perte de la place qu'occupait le pétitionnaire. Votre commission vous propose de passer à l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Bouvet de Cressé, à Paris, demande la décoration de la Légion d'honneur pour une action d'éclat dont tous les journeaux ont rendu compte dans le temps.

M. Bouvet de Cressé, se disant membre de l'Université de France, réitère la pétition qu'il a plusieurs fois adressée à la Chambre, à l'effet d'obtenir, par son intervention, la décoration de la Légion d'honneur, comme prix d'une action d'éclat. Il aurait, en 1794, servaut sur la flotte de l'amiral Villaret-Joyeuse, comme chef de l'imprimerie navale, sauvé les débris glorieux du vaisseau amiral la Montagne, en bravant le feu ennemi et en dirigeant sur son pont une caronade de 36, qui le balaya. Ce n'est point à la Chambre qu'il appartient de décerner les récompenses dues aux actions généreuses. M. Bouvet de Cressé doit recourir à l'autorité royale. Nous vous proposons de passer à l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Jeanbert, légionnaire à Paris, réclame le payement de son traitement de légionnaire depuis 1813, époque où il a été nommé par Napoléon.

Le sieur Jeanbert prétend avoir été nommé membre de la Légion d'honneur le 11 septembre 1813. Il paraît, en effet, par un certificat de M. le lieutenant-général comté Belliard, que ce militaire fut nommé en sa présence pour récompense d'avis très importants, et que M. le major général de l'armée fut instruit de cette décision afin qu'il délivrât le brevet provisoire. Cependant, jusqu'à ce jour, le brevet n'a pas été expédié. Ces faits demandent un examen sérieux, et votre commission vous propose le renvoi à M. le ministre de la guerre. (Adopté.)

Le sieur Legué, à Paris, demande l'établissement d'un Hotel des invalides de la marine.

M. Legué exprime le vœu qu'il soit construit un Hôtel des invalides de la marine, et que la France ait aussi son Greenwich. Il indique comme le lieu le plus propre à ce grand établissement l'emplacement de l'ancien séminaire de la ville de Saint-Servan, en face de la rade de Saint-Malo. Là, nos marins pourraient contempler l'élément, où ils combattirent pour défendre et enrichir la patrie, se nourrir de souvenirs glorieux, et terminer leurs jours au milieu des trophées de la France.

L'idée de M. Legué est grande et noble; il désire que sa réalisation illustre le règne de Charles X. La commission, en applaudissant à ces sentiments patriotiques, vous propose le renvoi de la pétition à M. le ministre de la marine. (Adopté.)

Un grand nombre de porteurs de bons des divers emprunts d'Espagne contractés en 1820. 1821 et 1822, vous adressent leurs réclamations, et vous prient d'appuyer par un témoignage d'intérêt les démarches que sans doute les ministres du roi sont disposés à réitérer auprès du gouvernement de Sa Majesté Catholique.

Les signatures de la pétition dont je suis chargé de vous faire le rapport attestent que ces souscripteurs appartiennent généralement à la classe intéressante qui vit de son travail, et qui avait cru, en profitant des avantages offerts, accroître le produit annuel de ses pénibles économies.

Il serait difficile de penser qu'une réclamation de cette nature excitât parmi vous, Messieurs, d'autres sentiments que ceux de la commisération et de la bienveillance.

En effet, si l'on considère que la confiance des réclamants a été déterminée par les actes les plus solennels, et qui, au delà et en deçà des Pyrénées, ont été accueillis comme émanés de la puissance légitime, on ne peut leur imputer à témérité des placements qui devaient leur sembler garantis par la sanction royale.

Nous n'avons pas à nous expliquer sur les événements de 1820, et sur les causes qui avaient amené Sa Majesté Catholique à jurer la Constitution reproduite à cette époque, et qui, dans des années antérieures, avait été reconnue par l'alliance des souverains ligués contre l'Empire français.

Ferdinand VII régnait entouré des ministres de toutes les puissances de l'Europe. Son auguste parent, Louis XVIII, l'avait félicité par une lettre rendue officiellement publique, sur les grands changements survenus dans la Péninsule; l'ambassadeur de France jouissait à Madrid de toutes la faveur et de toute l'influence qui appartient naturellement aux ambassadeurs de famille. Les emprunts publiés en France, en Angleterre et dans toutes les capitales, avaient été cotés à la Bourse de Paris en vertu d'une autorisation ministérielle; ils se négociaient comme les valeurs du crédit national : les arrérages ont commencé par être payés avec exactitude; comment les peuples de tous les pays auxquels les cédules royales étaient connues, pouvaient-ils croire qu'ils compromettraient leur fortune, qu'un jour on pourrait les traiter comme des fauteurs et complices de la révolte, et les punir de confiscation, parce qu'ils auraient eu, pour des actes authentiques et parvenus d'une source si haute et si auguste, le respect qu'ils commandaient par leur nature!

Le produit de ces emprunts avait été appliqué aux besoins personnels de Sa Majesté Catholique et à ceux de sa famille, à la réparation des routes, des canaux et des édifices publics, à l'extinction de la majeure partie des dettes de Charles III, à l'amortissement d'une dette de 14 millions de réaux contractée envers la Hollande, par une convention signée à Madrid, avant qu'il fût question de la réunion des Cortès.

Et ce qu'il y a de remarquable, c'est que ces mêmes emprunts, désignés sous le nom d'emprunts des Cortès, n'ont été admis par elles qu'avec les plus grandes difficultés, ainsi que l'attestent les débats qui ont eu lieu dans les séances des 18 mai et 3 juin 1822.

Les emprunts dits des Cortès ont été provoqués, sollicités par les ministres du roi, pressés par le roi lui-même, et conclus sous sa signature royale restée entre les mains des contractants. Les ministres n'ont agi qu'en vertu de pouvoirs spéciaux qu'on peut représenter.

Mais bien plus, le roi, de son propre mouvement, et considérant cet emprunt, dont les circonstances justifiaient l'urgence et la nécessité, comme un service rendu à sa personne et à son État, conféra aux contractants l'ordre de Charles III, et l'ambassadeur de France sollicita et obtint, pour ceux d'entr'eux qui l'acceptèrent, la permission du roi de France, indispensable pour qu'ils pussent le porter.

Quand les prêteurs français intervinrent dans cet emprunt, devaient-ils savoir que tous ces faits

n'étaient que de vaines apparences, et que le gouvernement français, qui leur accordait une faveur marquée, était dupe lui-même de sa bonne foi?

L'argent, et on n'élève pas de doute à cet égard, a été versé dans les caisses de Madrid: il a été appliqué aux besoins du royaume ; il lui a profité, il lui profite encore, et tandis que les prêteurs ont fidèlement rempli leurs engagements, quels motifs pourraient porter le gouvernement espagnol à ne pas remplir les siens ?

Ne faut-il pas plutôt déplorer l'erreur qui prolonge un état de choses si funeste au crédit d'un allié, que nous avons nous-mêmes intérêt à voir puissant et environné de la confiance due à la majesté suprême ?

Les emprunts dont il s'agit se sont élevés, savoir celui du 7 novembre 1820, à 15,000,000 de piastres fortes, capital, et ceux du 22 novembre 1821 et 1er novembre 1822, à 3,485,490 piastres fortes, de rentes.

Le gouvernement britannique s'est plusieurs fois occupé de cette importante affaire, et, dans ce moment, il lui donné des soins actifs.

Au mois d'octobre dernier, les contractants de ces emprunts se sont adressés à M. le président du conseil des ministres, et l'ont informé que M. Lamb avait fait présenter au monarque espagnol, une note pressante à l'effet de faire payer les arrérages échus des emprunts consentis en 1820, 1821 et 1822. Ils supplièrent le ministre d'unir ses démarches à celles du cabinet anglais; la réponse fut conforme à leurs vœux, et M. le comte de Villèle leur donna l'assurance que le gouvernement du roi ne négligerait rien de ce qui pourrait être utile à la conservation des intérêts des sujets de Sa Majesté.

Il est bon de remarquer, Messieurs, qu'il n'y a aucune mesure spéciale qui réprouve ces emprunts. On leur applique les termes généraux et vagues du décret royal de Sainte-Marie, qui annule les actes des Cortès; et il est très prouvé, comme je l'ai déjà dit, que, les Cortès n'ont consenti à ces emprunts conclus sous la signature propre de Sa Majesté, restée au pouvoir des contractants, et sans leur concours préalable, qu'après beaucoup d'obstacles et nullement en considération de la situation grave des affaires. Dans cet état de choses, et, sans vouloir entrer dans tous les développements dont la matière serait susceptible, votre commission vous propose le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères.

M. de Laborde. Je viens appuyer le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères, avec le regret de ne pas pouvoir demander ce même renvoi à M. le ministre des finances. Je dis avec le regret, parce que je conviendrai que ce serait une sorte d'infraction au principe de liberté en matière de crédit public. Je me bornerai donc à joindre au rapport quelques observations dans l'intérêt des habitants de la ville de Paris.

Les fonds publics de l'Espagne sont, depuis cent ans, un objet continuel d'agiotage et d'inquiétudes funestes en Europe, et cela depuis les créances de Philippe V jusqu'à l'emprunt des Cortès, et même à l'emprunt Guebhard. Avec un peu de défiance on pourrait étendre ces inquiétudes à notre créance de 86 millions sur l'Espagne, à moins que le gouvernement ne prenne les moyens d'en assurer le recouvrement. Les dettes de l'Espagne se montent à environ 16 millions de réaux. Si on les réduisait au quart, c'est-à-dire à

25 0/0, on aurait une somme dont l'intérêt serait supérieur à la totalité des revenus actuels de ce pays. Si cet état de choses n'intéressait que les capitalistes, les banquiers de la capitale, on pourrait ne pas s'en inquiéter, car les fonds publics sont des marchandises comme toutes les autres étalées sur la place; aux fonds publics s'adresse aussi celte maxime: Caveat emptor. Mais il n'en est pas ainsi comme l'a dit le rapporteur, le bas prix de ces valeurs et la manière dont elles sont colportées ont engagé des pères de famille, de pauvres ouvriers, à y consacrer le produit de leurs épargnes. Ce qui s'est passé pour l'emprunt des Cortès, se passe aujourd'hui pour l'emprunt Guebhard, qui ne présente pas plus de garanties. Il en présente si peu, qu'aujourd'hui le gouvernement, pour faire face aux intérêts de cet emprunt et au remboursement de vingtièmes, a créé des rentes à 5 0/0 qui perdent 56 0/0, et présentent ainsi l'appât d'un intérêt de 14 0/0; par lequel des malheureux se laissent entraîner à y placer leurs fonds, ce qui fait ainsi de nouvelles dupes.

Je ne prétends pas pourtant demander à M. le ministre des finances des mesures répressives; mais je lui demande une surveillance qui prévienne les inconvénients que ces emprunts peuvent avoir.

On a parlé de la loyauté espagnole je ne la mets pas en doute; je la connais même. Mais la loyauté n'est pas tout dans les contrats; il faut encore avoir les moyens de satisfaire à cette loyauté pour les particuliers, c'est de l'argent; pour les Etats, ce sont des revenus. Or, les revenus de l'Espagne suffisent à peine à ses dépenses les plus onéreuses, et par conséquent à payer les intérêts de sa dette. Ce pays ne pourra acquérir des ressources que lorsqu'il aura des institutions ou une administration sage qui en tienne lieu.

La France a établi son crédit à une époque où, s'il avait été créé, on aurait pu craindre qu'il fût anéanti. Pourquoi? parce qu'elle a rempli tous ses engagements, payé toutes ses dettes. La France a honoré ses malheurs par sa probité, mais elle les a réparés par la sagesse de ses princes qui lui ont donné des institutions à l'aide desquelles s'est développée la prospérité publique. Ils ont compris que le bonheur des nations est la meilleure garantie de leur obéissance.

Dans cet état de choses, nous, députés de la France qui remplit ses engagements, nous ne devons voir qu'avec peine la conduite contraire des autres gouvernements, quand cette conduite porte préjudice à une partie de nos concitoyens et surtout à une classe dont nous sommes les protecteurs naturels.

Je demande donc que la pétition soit renvoyée au ministre des affaires étrangères, et que le ministre des finances, que je regrette de ne pas voir ici, prenne en considération les observations qu'elle renferme, s'il le juge convenable.

(Aux voix! aux voix ! L'ordre du jour!)

M. le Président. L'ordre du jour est-il appuyé? (Oui, oui !)

Voix à gauche: Motivez-le !

(L'ordre du jour est mis aux voix et rejeté. La Chambre ordonne le renvoi au ministre des affaires étrangères.)

M. le comte de Sesmaisons, rapporteur. Messieurs, plusieurs pétitions vous avaient été adressées par MM. les officiers qui, n'ayant pu entrer dans l'organisation de l'armée en 1814 ou 1815, s'étaient vus successivement placés dans différentes positions de non-activité, de disponibilité, enfin de réforme en 1824.

Toutes ces pétitions ayant le même objet, votre commission avait jugé à propos de les réunir pour vous présenter ensemble les vœux qu'elles expriment; ceux qui ne pouvaient manquer de vous intéresser, comme elles excitaient déjà le plus auguste intérêt, et nous le savions, une sollicitude à la fois paternelle et loyale.

Les différentes positions de ces officiers se distinguent par une différence très marquée : 1° Antérieurement à 1824.

Ils étaient soumis à tous les appels sous les drapeaux; même un certain nombre de vacances leur étaient destinées dans les corps. Par conséquent ils étaient encore assujettis à plusieurs règles militaires, relativement à des revues, à leur domicile, à leur mariage.

2° Postérieurement à 1824.

Par l'ordonnance de ladite annnée, ils ont été libérés de tout assujettissement militaire, et entièrement rendus à la vie civile. Ils ont pu cumuler toute espèce de traitement civil avec leur solde.

Dans la première position, ils avaient tous constamment joui d'un traitement égal à leur demisolde.

Cette disposition était toute de faveur et due à la bienveillance du roi pour des officiers qui, dans des circonstances si extraordinaires, avaient porté partout la gloire des armes de la France.

D'après les anciens règlements et le décret de 1812, ils auraient pu être mis à la réforme dès 1814, et quelle que fut la durée de leurs services, ils n'avaient droit qu'à un traitement de réforme égal au minimum de la retraite, et qui ne pouvait excéder cinq ans.

Tous au contraire, par la bienveillance royale, jouirent de leur demi-solde jusqu'en 1818. Alors, c'est-à-dire quatre ans après 1814, sous le ministère du maréchal Saint-Cyr, intervint une ordonnance qui régla que tous ceux qui avaient alors quinze ans de service auraient leur demisolde pendant quinze autres années, jusqu'à ce qu'ils eussent atteint l'époque de la retraite, trente

ans;

Que tous ceux qui auraient moins de quinze ans et plus de dix, recevraient dix ans de ce même traitement, ce qui le portait jusqu'en 1828;

Enfin, que ceux qui avaient moins de dix ans et plus de six recevraient le même traitement pendant un nombre d'années égal à celui de leurs services.

Et il est bien à remarquer, Messieurs, que, dans ces services, l'ordonnance comptait comme actives les quatre années qui venaient de s'écouler en demi-solde, depuis 1814 à 1818.

Vous voyez que, d'après cette ordonnance, aucun traitement ne finissait avant juillet 1824, et que d'autres étaient prolongés jusqu'en 1828.'

En mai 1824, intervint une ordonnance qui rencontra dans cette position environ 1,600 officiers; les autres avaient été placés, ou avaient préféré un traitement spécial de réforme qui était une somme une fois payée.

L'ordonnance de 1824 régla que ces officiers seraient rendus à la vie civile. Elle établit ainsi pour eux la seconde position dont je vous ai

M. de Sesmaisons, deuxième rapporteur de la parlé. commission des pétitions, a la parole.

Elle régla que, dès lors, ils n'étaient plus offi

ciers disponibles; mais assimilés aux officiers en réforme; pouvant se marier, changer de domicile à leur gré, libérés de l'obligation de rejoindre les drapeaux, et pouvant enfin remplir tous les emplois civils, en conservant leur traitement.

Et, cependant, comme le traitement dit de réforme est beaucoup moins fort que celui dont ils jouissaient, et qui était la demi-solde, on les laissa jouir de ce meilleur traitement à titre de traitement de réforme.

Du reste, rien ne fut changé aux dispositions de l'ordonnance de 1818, sur le nombre d'années pendant lesquelles ils devaient jouir de ces traitements, qui devaient expirer successivement, les premiers en 1824, et les derniers en 1828.

Nous avons vu que tous les autres officiers ayant plus de service que ceux-ci, étaient conduits par traitement jusqu'à la retraite.

plus

Messieurs, l'année 1828 est celle qui voit s'éteindre les derniers traitements, nous y entrons; le 1er juillet est le terme fatal, et les officiers, en parcourant le budget qui a été arrêté pour l'exercice de 1828, ont pu voir que les allocations pour leurs traitements en avaient disparu à compter dudit jour; comme les années précédentes avaient vu successivement disparaître les provisions pour eux, dont le terme était arrivé.

C'est alors qu'ils sont devenus pleins d'inquiétude pour leur sort, rendu plus effrayant encore, par l'exempledes misères de leurs camarades pour qui le traitement avait déjà cessé. Ils se sont adressés à vous, comme aux régulateurs de la fortune publique, et en même temps au roi, comme au dispensateur de toutes les justices et de tous les bienfaits.

C'est ici le lieu de vous entretenir d'une ordonnance que le roi, dans sa bienveillance pour son armée, rendit en 1823, au sujet des réformes. Cette ordonnance n'avait aucunement pour objet les officiers réformés en 1814 ou 1815, et dont le sort avait été réglé ainsi que nous l'avons vu, par l'ordonnance de 1818, toute exceptionnelle en leur faveur. Elle ne regardait que les officiers faisant à sa date partie de l'armée active, et qui pourraient être ultérieurement placés en réforme. Mais je dois vous en entretenir, parce que vous verrez bientôt comment elle va se trouver liée au sort des officiers qui font l'objet de ce rapport. L'ordonnance de 1826 a pour but d'améliorer le sort des officiers qui viendront à être réformés vous vous rappellerez que, par les règles antérieures dont la plus récente était le décret de 1812, ils ne pouvaient, dans aucun cas, obtenir plus de cinq ans de traitement de réforme.

Le roi a voulu que le traitement de réforme fût toujours d'un nombre d'années égal à la moitié du nombre des années de service.

Ainsi celui quia vingt ans de service reçoit dix ans, et ces dix années comptant pour sa retraite, elles complètent trente ans, et la retraite est acquise.

Les autres officiers reçoivent neuf ans ou moins d'années de traitement, mais toujours en rapport de moitié avec leurs services.

Messieurs, se sont les dispositions de cette ordonnance que l'on vient d'appliquer aux officiers pétitionnaires; il est, en outre, décidé que les années de service leur compteront non plus seulement jusqu'en 1818, comme il avait été réglé; mais jusqu'en 1824, époque où ces officiers ont été rendus à la vie civile.

Il serait inutile, je pense, que je m'étendisse beaucoup sur les effets de cette ordonnance. Il suffira de dire comme renseignements pour ceux

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à qui ces matières ne seraient pas familières, que l'on doit pour l'entendre se reporter en esprit à 1824. Ceux des officiers qui, le 1er juillet 1824, et en comptant dix ans passés en demi-solde (mais à la disposition du ministre), compteraient vingt ans de service, auront, à partir de 1824, dix autres années, et atteindront la retraite. Tous ceux qui ne comptent pas vingt ans de service en 1824, auront, à compter de cette époque, un traitement de neuf, huit, sept ou six ans.

L'ordonnance nouvelle rappelle même à des droits les trois cent-soixante officiers qui avaient vu leur traitement s'éteindre de 1824 à 1828.

Les désirs de ces officiers, Messieurs, ne sont pas entièrement remplis, et ils demanderaient que le traitement de demi-solde, tel qu'ils l'ont reçu jusqu'à présent, conduisit chacun à l'âge de la retraite.

Ils ont produit les arguments suivants en leur faveur « Nous sommes, ont-ils dit, les débris d'une armée qui a porté par toute l'Europe la gloire de notre patrie. Il est vrai que les règlements existants se sont opposés à nos réclamations; il est vrai aussi que les bontés du roi ont déjà souvent suspendu leur rigueur. Nous n'avons donc rien à exiger; mais nous ne pouvons nous empêcher de nous écrier: Plusieurs de nous comptaient, en 1814, dix ans de service sous ces drapeaux qui ont flotté sur tant de capitales; nous avons vaincu à Austerlitz, à léna, sur les rives de l'Ebre, en cent lieux qui ont donné aux chefs de nos phalanges ces titres illustres qui, après tant de revers, font encore retentir dans notre patrie les noms de nos victoires. Les chaleurs brùlantes du Midi nous ont épargnés et les glaces du Nord nous ont laissé la vie. Etions-nous donc cependant dès lors dévoués à la misère? La faim fera-t-elle ce que n'ont pu faire ni le fer des ennemis ni les fléaux des saisons? Et cependant cette maison toute française qui règne sur nous a adopté notre renommée, pour accroître son antique et si long patrimoine de gloire. Ce n'est pas de notre faute si nous ne sommes plus dans les rangs de l'armée, et on nous a tenus attachés au service non seulement par les espérances que l'on nous a données, mais par les lois militaires auxquelles nous sommes restés assujettis. >>

Le législateur, quelque touché qu'il soit de ces discours, répond: Tous ceux qui avaient dix ans de service en 1814 auront reçu depuis cette époque quatorze ans de demi-solde. Beaucoup avaient moins que ces dix ans de service, et aucun d'eux cependant n'aura reçu moins de dix ans de demi-solde, Que peut-on faire de plus ? et n'y aurait-il pas d'injustice envers le reste de l'armée, dont les traitements de réforme sont invariablement fixés d'une manière bien inférieure ? L'officier actuellement sous les drapeaux pour lequel il manquera un seul jour sur vingt ans de service, n'aura que neuf ans de traitement de réforme et n'obtiendra jamais la retraite. Vou. drait-on y faire parvenir des officiers dont aucun n'avait plus de dix ans de service en 1814? Par cette excessive faveur, toute la législation actuelle ne serait-elle pas frappée d'injustice?

Ici, Messieurs, les pétitionnaires, par des notes qu'ils out produites depuis l'ordonnance dernière, font un argument plus difficile à combattre que ceux précédemment fournis. Ils disent: Plusieurs officiers pris parmi nous avaient été antérieurement à 1824, mis en congé illimité ou appelés au cadre de remplacement, mesure qui n'a jamais été entièrement exécutée. La plupart de ces ofti

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