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Règle qu'on doit suivre.

§ 2826. En résumé, quels que soient l'esprit et le caractère de ces divers traités et de leurs stipulations, il faut reconnaître qu'en cas de doute sur leur portée véritable, les progrès réalisés par le droit des gens ne permettent pas d'en interpréter le texte autrement qu'en faveur de la liberté des personnes et des droits du pavillon des neutres *.

Hautefeuille, Questions, p. 282; Lawrence, Elem. by Wheaton, app. n° 3; Dana, Elem. by Wheaton, note 228; Bluntschli, § 817.

SECTION I.

LIVRE V

DES SIÈGES ET DES BLOCUS

DU BLOCUS EFFECTIF ET DE SES EFFETS

§ 2827. Les sièges et les blocus sont des opérations de guerre qui, par l'emploi de forces de terre ou de mer, sont destinées à empêcher l'accès et la sortie ou à amener la reddition d'une ville, d'une forteresse ou d'un port.

Le siège sc dit plus particulièrement de l'ensemble des opérations que fait une armée dans le but d'attaquer une place et de la prendre, à l'aide de travaux de terrassements combinés avec l'usage des armes.

Le blocus se limite à entourer la place de manière à couper entièrement, autant que peuvent le faire les forces humaines, les relations et la correspondance au dehors, afin que l'ennemi qui y est renfermé ne puisse recevoir de secours d'aucune sorte, soit en renforts d'hommes, soit en munitions, soit en vivres.

Le siège a généralement pour objectif les villes, les places fortes, les forteresses des frontières terrestres ou de l'intérieur, dont leur position rend praticable l'investissement de toutes parts, tandis que le blocus s'applique surtout aux ports, qui ne sont alors investis que du côté de la mer ou du fleuve qui y donnc

accès.

On conçoit aussi qu'une même place soit en même temps assiégée par terre et bloquée par mer.

En tout cas le siège et le blocus ont un objet commun, celui

Définition.

Garden.

Halleck.

Klüber.

Heffter.

Massé.

Twiss.

Phillimore.

d'amener l'ennemi à se rendre, en cédant, dans le premier cas, à la force; dans l'autre, aux privations, sinon à la famine.

Ces quelques développements résument, selon nous, les différentes définitions que les publicistes nous donnent du siège et du blocus.

« Une place, dit de Garden, est en état de siège quand elle est investie et que le canon ennemi peut l'atteindre. Elle est seulement bloquée quand l'ennemi se borne à cerner tellement les issues et les avenues qu'on ne peut y pénétrer ni en sortir. Ainsi le blocus sur mer comme sur terre n'a et ne peut avoir d'autre objet que de resserrer une place de manière qu'il ne puisse y entrer ni secours ni subsistance, et de forcer par là l'ennemi de se rendre pour se soustraire à la famine. »>

Halleck donne cette définition du siège et du blocus: « Un siège est l'investissement militaire d'une place de manière à intercepter ou à rendre dangereuse toute communication entre les occupants et les personnes en dehors de l'armée assiégeante ; la place est dite bloquée quand les communications par eau sont entièrement interceptées ou rendues dangereuses par la présence d'une escadre de blocus. D

Pour Klüber, <«< un lieu bloqué, que ce soit un port, une place forte, une ville, un camp, une côte, etc., est celui où il y a, en raison des dispositions prises par la puissance qui l'attaque avec des troupes ou avec des vaisseaux stationnés et suffisamment proches, danger évident à entrer sans le consentement de cette puissance. »

Selon Heffter, le blocus consiste dans « l'emploi de forces régulières suffisantes pour empêcher toute communication d'une côte, d'un ou de plusieurs ports avec le dehors. »

<< Dans le langage ordinaire et usuel, dit Massé, une place non maritime bloquée est une place tellement investie que personne ne puisse y entrer ni en sortir sans danger d'être pris: ce qui suppose que toutes les avenues en sont gardées par des forces permanentes. Par la même raison, une place maritime ou un port bloqué est celui dont toutes les entrées et les sorties sont occupées et fermées par des forces maritimes et permanentes. On bloque une place pour la réduire par la famine, quand on ne peut réussir à la prendre de vive force... »

Twiss se borne à dire que le but du blocus est de réduire. l'ennemi à se rendre en lui coupant ses approvisionnements de toute espèce; et Phillimore, que « l'objet du blocus est de couper

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toutes les communications de commerce avec la place bloquée.
« Le blocus, dit Hall, consiste dans l'interception, par un belli-
gérant, de l'accès d'un territoire ou d'une place en possession de
l'ennemi... Mais les conditions dans lesquelles les communication s
sont interrompues par terre et par mer diffèrent tellement qu'en
droit international le blocus consiste uniquement dans l'interruption
de l'accès par mer. »

Boeck définit ainsi le blocus et le siège: « Le blocus est une opération de guerre qui consiste à cerner un port ou une portion de côte, au moyen de forces navales permanentes, de façon à empêcher toute communication avec le dehors par la voie de la mer. Le blocus diffère du siège en ce qu'il a surtout pour objet d'entraver le commerce de l'ennemi et d'interrompre ses relations avec l'extérieur, sans s'attaquer nécessairement au port ou au point quelconque du littoral qui est le centre de ce commerce et le théâtre de ces relations, tandis que le siège est destiné à faire tomber par capitulation ou autrement, une place forte au pouvoir de l'assaillant. »

« On désigne sous le nom de blocus, dit Perels, la rupture de toute communication, opérée et maintenue par la force armée, entre les côtes et les ports de l'ennemi et le dehors. >>

Hall.

Boeck.

Perels.

« Le blocus, dit enfin Fauchille, est une mesure de guerre qui con- Fauchille. siste à cerner un port ou une portion de côte, au moyen de forces navales permanentes, de façon à empêcher toute communication, et principalement tout commerce avec le dehors par la voie de la mer *. »

En qui réside la faculté déclarer

de

les sièges et

§ 2828. La déclaration d'un siège ou d'un blocus étant un acte du pouvoir souverain, il est clair qu'elle doit émaner du gouvernement lui-même ou de l'autorité à laquelle cette faculté a été expressé- les blocus. ment déléguée. Le commandant d'un escadre ou le chef supérieur d'une armée n'ont pas, généralement parlant, le pouvoir d'établir un siège ou un blocus, ni d'étendre à une place voisine celui qui existe déjà contre une autre et a été régulièrement déclaré; mais s'il s'agit d'un général ou d'un chef d'escadre opérant dans des régions lointaines, il faut admettre qu'ils sont investis virtuellement

Garden, Traité, t. II, p. 397; ch. XXIII, § 3; Klüber, Droit, § 297; Heffter, § 154; Massé, t. I, § 286; Twiss, War, § 99; Phillimore, Com., v. III, § 285; Duer, v. I, lect. 7, § 24; Ortolan, Règles, t. II, pp. 327, 328; Fiore, t. II, p. 447; Riquelme, lib. I, tit. 2, cap. xvIII; Littré, Dictionnaire de la langue française; Hall, International law, p. 610; Perels, p. 291; Boeck, § 671; Fauchille, Blocus maritime, p. 1.

Jurisprudence suivie dans

vire le Rolla.

de tous les pouvoirs nécessaires pour la réussite de l'entreprise militaire dont ils sont chargés.

§ 2829. C'est en se fondant sur ces considérations que dans l'afl'affaire du na faire du navire le Rolla, l'amirauté britannique décida que le commandant en chef d'une station éloignée du siège du gouvernement ne subit d'autre restriction dans l'exercice de son autorité souveraine que celle qui découle de la mission spéciale qui lui est confiée.

Mandat spécial pour dé

ens.

§ 2830. Quelques auteurs contestent cette théorie de la force clarer le blo- majeure ou de l'éloignement, et soutiennent que, pour les sièges comme pour les blocus, la nécessité d'un mandat spécial émanant d'un pouvoir central est indispensable, et que le chef de forces armées de terre ou de mer peut être contraint d'exhiber ses instructions, s'il s'élève des doutes sur les pouvoirs en vertu desquels il a agi. C'est là, suivant nous, une prétention excessive; c'est investir les neutres d'un droit qui ne leur appartient pas.

Caractères qui distin

D'un autre côté, un chef de corps n'est responsable de ses actes qu'envers le gouvernement dont il est le délégué; et parfois, quand même il le voudrait, des circonstances de force majeure ou des raisons de haute convenance le mettraient dans l'impossibilité de révéler les ordres qui lui ont été donnés. Enfin il peut se faire aussi qu'une mesure prise d'urgence sans autorisation formelle reçoive après coup la sanction de l'autorité compétente. Par contre, lorsque l'Etat belligérant désapprouve les dispositions prises sans son assentiment, ou lorsqu'il est suffisamment prouvé qu'il y a eu abus de pouvoir, il est clair que ceux qui ont pu cn souffrir sont fondés à protester et à repousser les conséquences juridiques qu'on tenterait de faire peser sur eux. Tel serait, par exemple, le cas d'un capitaine qui, même après en avoir reçu l'avertissement écrit, chercherait à forcer la ligne d'un blocus arbitrairement étendu au delà des limites prescrites par l'Etat belligérant *.

§ 2831. La plupart des publicistes s'accordent à regarder le guent les blo- blocus, et notamment le blocus maritime, restreint dans de justes bornes, comme un progrès du droit international au point de vue de l'humanité, comme un moyen de guerre en quelque sorte

cus.

Gessner, p. 179; Bluntschli, § 831; Phillimore, Com., v. III, § 288; Duer, v. I, lect. 7, §§ 21 et seq.; Wildman, v. II, pp. 178, 179; Halleck, ch. XXI, §2; Bello, pte. 2, cap. VIII, § 5; Fauchille, Du blocus maritime, p. 73; Nys, La guerre maritime, p. 50; Brocher de la Fléchère, Les principes naturels du Droit de la guerre, Revue du Droit int. 1873, p. 575; Hall, International law, p. 616, Giacomo Macri, pp. 612 et seq.

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