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Testa.

Perels.

Boeck.

Hall.

saires à la vie des hommes et qui sont, en tout temps, destinés à satisfaire les mêmes besoins, comme le blé, la farine et les autres substances alimentaires. Il y range par contre, conformément au traité d'Utrecht en 1713 et à d'autres, les matières nécessaires à la fabrication des armes et les munitions navales (bois de construction, fer brut, cuivre en feuilles, poix, résine, etc.) (1).

Testa fait observer que la difficulté de définir la contrebande vient moins de la classification positive des articles qui la constituent, que de la classification négative à laquelle ils donnent lieu. Elle est principalement due à ce que beaucoup d'objets sont de nature pour ainsi dire mixte, pouvant constituer des matières applicables aussi bien à la guerre qu'aux industries pacifiques. En étendant trop loin la notion de contrebande, on entraverait la liberté du commerce et léserait les intérêts des neutres; en la restreignant trop, on compromet les droits des belligérants. Pour résoudre ces difficultés, il faut s'inspirer non sculement du droit primitif, mais aussi du droit secondaire, c'est-à-dire du droit conventionnel. Perels entend par contrebande de guerre dans le sens étendu de ce terme, l'entrée ou la sortie de marchandises. prohibécs ou bien les marchandises elles-mêmes, importées ou exportées malgré une défense formblle. La notion de contrebande de guerre se déduit des principes du droit des gens. Dans le sens restreint, la contrebande embrasse les objets qu'il est défendu d'apporter à l'ennemi. Or ces objets varient beaucoup. Donc on ne peut donner de définition de la contrebande qui comprenne toutes les applications qu'on en a faites.

Suivant Boeck, le transport de contrebande, qu'il émane d'un neutre ou d'un ennemi est un acte d'immixtion que le belligérant peut interdire. Mais on ne saurait prohiber que le commerce qui a trait directement à la guerre, c'est-à-dire le commerce d'objets fabriqués en vue de la guerre. C'est donc à la nature des objets qu'il faut s'attacher. Il n'y a qu'une contrebande relative et pas de contrebande absolue.

Hall enfin admet qu'on ne saurait dénier aux belligérants le droit de prohiber le commerce d'objets pouvant être utilisés pour la poursuite des hostilités; mais pour ce qui est de la liste des objets prohibés, on n'a pu s'entendre jusqu'ici que sur un très petit

(1) Heffter, § 160; A. Desjardins, Droit comm. marit., t. I, pp. 55 et seq.

nombre d'articles. Mais en tout cas, la contrebande ne saurait être limitée aux munitions de guerre

La contrebande

de

le droit con

Pyrénées.

1659.

§ 2710. En étudiant les uns après les autres, comme nous venons de le faire, les auteurs anciens et les auteurs modernes qui ont guerre selon traité ce sujet, on trouve une telle divergence d'opinion qu'il faut ventionnel. renoncer à dégager de leurs théories et de leurs systèmes des principes fixes et certains. Examinons si l'accord ne se rencontrerait pas en transportant la question dans la sphère du droit conventionnel. § 2711. Le traité des Pyrénées, conclu le 7 novembre 1659 (1) Traité des entre la France et l'Espagne, stipule par son article 12 l'interdiction de << toutes sortes d'armes à feu et autres assortiments d'icelles, comme canons, mousquets, mortiers, pétards, bombes, grenades, saucisses, cercles poissés, affùts, fourchettes, bandoulières, poudres, mèches, salpêtre, balles, piques, épées, morions, casques, cuirasses, hallebardes, javelines, chevaux, selles de cheval, fourreaux de pistolet, baudriers et autres assortiments servant à l'usage de la guerre »; tandis que l'article 13 déclare de libre commerce « toutes les autres denrées, même tout ce qui appartient à la nourriture et sustentation de la vie ».

Avant ce traité, un grand nombre d'autres avaient déjà adopté le principe de la limitation de la contrebande de guerre aux armes et aux munitions; nous citerons entre autres ceux du 18 avril 1646 (2) entre la France et les Provinces-Unies des Pays-Bas; du 1er scptembre 1647 (3) entre l'Espagne et les Villes Hanséatiques; du 17 décembre 1650 (4) entre l'Espagne et les Provinces-Unies; du 5 avril 1654 (5) entre l'Angleterre et la Hollande; du 11 avril 1654 (6) entre l'Angleterre et la Suède; du 10 mai 1655 (7) entre la France et les Villes Hanséatiques; et du 3 novembre 1655 entre la France et la Grande-Bretagne.

Nous trouvons également le même principe inscrit dans plusieurs traités postérieurs à celui des Pyrénées, notamment dans les traités de 1661 entre l'Angleterre et la Suède (article 11); du 27 avril 1662 entre la France et les Provinces-Unies (articles 27 et 28); du

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Testa, Droit maritime, pp. 201 et seq.; Perels, Droit maritime, pp. 271 et seq.; Hall, International law, pp. 564 et seq.

(1) Dumont, t. VI, pte. 2, p. 264; Savoie, t. II, p. 1; Léonard, t. IV. (2) Dumont, t. VI, pte. 1, p. 342.

(3) Dumont, t. VI, pte. 1, p. 403.

(4) Dumont, t. VI, pte. 1, p. 570.

(5) Dumont, t. VI, pte. 2, p. 74.

(6) Hertslet, v. II, p. 310; Dumont, t. VI, pte. 2, p. 80.

(7) Dumont, t. VI, pte. 2, p. 103; Léonard, t. III.

Traités d'Utrecht.

1713.

Différents autres traités. 1716-1766.

17 février 1668 (1), du 1er décembre 1674 (2) et du 8 mars 1675 (3) entre l'Angleterre et les Provinces-Unies; du 24 février 1677 (4) entre la France et l'Angleterre; et le traité de Nimègue, conclu le 24 septembre 1678 (5) entre la France et les ProvincesUnies.

§ 2712. La convention commerciale signée à Utrecht le même jour que les traités politiques, 11 avril 1713 (6), par la France, l'Espagne, l'Angleterre et la Hollande, et à laquelle Venise et la Prusse accédèrent, reproduit presque littéralement le premier de ces articles et classe ensuite (article 20) parmi les objets d'un usage commun à la paix et à la guerre les métaux précieux monnayés ou en lingots, les substances alimentaires, les tissus, les métaux ordinaires, le charbon et toutes les matières premières propres à la construction, au radoub ou à l'armement des navires. Il n'y a que très peu de traités qui donnent une plus grande extension à la notion de contrebande de guerre.

§ 2713. Pour le point particulier qui nous occupe, les traités d'Utrecht ont servi de base et en quelque sorte de type aux traités conclus en 1716 (7) entre la France et les Villes Hanséatiques, en 1720 (8) entre l'Angleterre et la Suède, et en 1766 (9) entre l'Angleterre et la Russie, dont les clauses relatives à la contrebande de guerre sont calquées sur celles adoptées en 1713. La plupart des traités postérieurs, à l'exception de ceux auxquels la Grande-Brctagne a pris part et qui gardent à cet égard le silence le plus absolu, consacrent les mêmes règles (10). Mais si ces anciens traités

(1) Dumont, t. VII, pte. 1, p. 74.
(2) Dumont, t. VII. pte. 1, p. 282.
(3) Dumont, t. VII, pte. 1, p.
288.

(4) Dumont, t. VII, pte. 1, p. 327; Léonard, t. V.

(5) Dumont, t. VII, pte. 1, p. 357; Léonard, t. V.

(6) Dumont, t. VIII, pte. 1, pp. 345, 362, 377, 409; Hertslet, v. II, p. 204; Savoie, t. II, p. 281; Cantillo, p. 127.

(7) Dumont, t. VIII, pte. 1, p. 478.

(8) Dumont, t. VIII, pte. 2, p. 18.

(9) Martens, 1re édit., t. I, p. 141; 2e édit., t. I, p. 390; Wenck, t. III, p. 572.

(10) Voyez les traités de 1782 (Martens, 1re édit., t. II, p. 242; 2o édit., t. III, p. 426; Elliot, v. I, p. 134) entre la Hollande et les Etats-Unis ; de la même année entre la Russie et le Danemark (Martens, 1re édit., t. II, p. 284; 2e édit., t. III, p. 468); de 1783 entre la Suède et les EtatsUnis (Elliot, v. I, p. 168; Martens, 1re édit., t. II, p. 328; t. VII, p. 52; 2e édit., t. III, p. 565); de 1787 entre la France et la Russie (De Clercq, t. I, p. 171; Martens, 1re édit., t. III, p. 1; 2° édit., t. IV, p. 196); de 1795 entre l'Espagne et les Etats-Unis (Calvo, t. IV, p. 113; Elliot, v. I, p. 390; Cantillo, p. 665; State papers, v. VIII, p. 540; Martens, 1re édit.,

limitent généralement la prohibition aux armes et aux munitions de guerre, dans les temps plus rapprochés de nous on en trouve un grand nombre qui ont démesurément étendu la liste des prohibitions (1).

Hautefeuille, y faisant allusion, croit pouvoir soutenir que ces

t. VI, p. 561; 2o édit., t. VI, p. 143); de 1797 entre l'Angleterre et la Russie (Martens, 1re édit., t. VI, p. 722; 2° édit., t. VI, p. 537); de 1800 entre la Russie, la Suède, le Danemark et la Prusse (Martens, 1re édit., t. VII, p. 516; Suppl., t. II, pp. 389, 399, 406; 2e édit., t. VII, pp. 172, 181, 188; State papers, v. I, p. 327); de 1801 entre la Russie et la Suède (Martens, 1e édit., Suppl., t. II, p. 307; 2e édit., t. VII, p. 315; State papers, v. I, p. 313). Le traité de 1801 (Hertslet, v. I, pp. 204, 208; Martens, 1re édit., Suppl., t. II, p. 476; 2o édit., t. VII, pp. 260, 269, 273; State papers, v. I, p. 416) imposé par l'Angleterre à la Russie, à la Suède et au Danemark après le bombardement de Copenhague, établit les mêmes règles dans son article. Après la paix de Vienne, quelques traités ont respecté les règles établies: celui de 1824 (Elliot, v. II, p. 18; Martens, Nouv. recueil, t. VI, p. 984; Nouv. suppl., t. II, p. 412; Elliot, v. II, p. 18; Lesur, 1824, app., p. 690 entre les Etats-Unis et la république de Colombie; de 1827 (Martens, Nouv. recueil, t. VII, p. 470; State papers, v. XVI, p. 1201) entre le Brésil et la Prusse; de 1827 (State papers, v. XIV, p. 715; Martens, Nouv. recueil, t. VII, p. 340; Elliot, v. II, p. 247) entre le Brésil et les villes libres; de 1827 (Martens, Nouv. recueil, t. X, p. 4; State papers, v. XIX, p. 1056) entre le Danemark et le Mexique ; de 1828 (Martens, Nouv. recueil, t. VII, p. 608; State papers, 1827-1828, p. 717) entre le Brésil et le Danemark; de 1831 (Martens, Nouv. recueil, t. XII, p. 534) entre le Mexique et la Prusse ; de 1832 (Slate papers, v. XXII, p. 1353; Martens, Nouv. recueil, t. VI, p. 438) entre les Etats-Unis et le Chili; de 1844 (De Clercq, t. IV, p. 284; Lesur, 1837, app., p. 36; Bulletins des lois, 1837, no 528) entre la France et la Bolivie; de 1839 (De Clercq, t. IV, p. 502; Martens, Nouv. recueil, t. XVI, p. 987; State papers, v. XXX, p. 1228; Lesur, 1840, app., p. 24; Bulletin des lois, 1840, n° 740) entre la France et le Texas; de 1840 (Martens-Murhard, t. I, p. 374; State papers, v. XXIX, p. 1164); et de 1834 (De Clercq, t. V, p. 428; Martens-Murhard, t. VII, p. 613; Bulletin des lois, 1846, no 1333) entre la France et la Nouvelle-Grenade; Hautefeuille, Des droits, t. II, pp. 89, 90.

(1) Voyez les traités du 19 août 1604 entre l'Espagne et l'Angleterre ; du 5 avril 1614 entre la Suède et les Provinces-Unies (Dumont, t. V, pte. 2, p. 247); du 15 novembre 1630 entre la France et l'Espagne; de 1630 entre l'Espagne et l'Angleterre ; du 5 avril 1654 entre l'Angleterre et la Hollande (Dumont, t. VI, pte. 2, p. 74); du 11 avril 1654 entre l'Angleterre et la Suède (Hertslet, v. II, p. 310; Dumont, t. VI, pte. 2. p. 80); du 15 septembre 1654 entre l'Angleterre et le Danemark (Dumont, t. VI, pte. 2, p. 92); du 23 août 1742 entre la France et le Danemark (De Clercq, t. I, p. 46; Wenck, t. I, p. 591; State papers, v. XXXV, p. 1263); du 19 novembre 1794 entre l'Angleterre et les Etats-Unis (Elliot, v. I, p. 242; Martens, Ire édit., t. VI, p. 336; 2° édit., t. V, p. 641; State papers, v. I, p. 784); et du 25 juillet 1803 entre l'Angleterre et la Suède (Martens, 1re édit., Suppl., t. III, p. 525; 2o édit., t. VIII, p. 91; Hautefeuille, Des droits, t. II, p. 90.

nouvelles.

traités n'ont qu'une valeur relative comme monument de jurisprudence internationale, tous ou presque tous étant le résultat de circonstances exceptionnelles, qui expliquent la prohibition prononcée.

Conventions § 2714. Et comme si toutes les contradictions que nous avons 1642-1799. signalées ne suffisaient pas à introduire dans cette question une confusion regrettable, on peut citer certaines conventions qui ont stipulé une entière liberté de commerce: de ce nombre sont celles du 29 janvier 1642 (1) entre l'Angleterre et le Portugal; celle du 1° septembre 1647 (2) entre l'Espagne et les Villes Hanséatiqnes; celle du 6 août 1661 (3) entre le Portugal et les Provinces-Unies; enfin celles du 10 septembre 1785 (4) et du 11 juillet 1799 (5) entre la Prusse et les Etats-Unis.

Entre l'Angleterre et les Etats-Unis. 1794-1796.

Ordre de capture expé

seil anglais.

1795.

§ 2715. Les traités que l'Angleterre conclut en 1794 (6) et en 1796 (7) avec la République nord-américaine portaient qu'en raison de la difficulté qu'il y avait de préciser les cas dans lesquels les provisions de bouche et autres articles analogues constituaient réellement la contrebande de guerre, il était convenu que chaque fois que ces articles seraient capturés, il ne serait pas permis de les confisquer, et que l'on indemniserait immédiatement et complètement leurs propriétaires.

§ 2716. Avant la ratification de cette convention, c'est-à-dire au die par le Con- mois d'avril 1795, le gouvernement anglais expédia un ordre en conseil qui enjoignait aux croiseurs d'avoir à s'emparer de tous les navires qu'ils rencontreraient chargés de vivres à destination. des ports de France.

Cet ordre, qui fut révoqué peu de temps après, donna lieu à la nomination d'une commission mixte chargée de prononcer sur un certain nombre de réclamations formulées par divers citoyens des Etats-Unis. L'Angleterre, pour justifier son ordre en conseil, alléguait qu'il avait été publié alors qu'on espérait réduire l'ennemi par

(1) Hertslet, v. II, p. 1; Dumont, t. VI, pte. 1, p. 238.
(2) Dumont, t. VI, pte. 1, p. 403.

(3) Calvo, t. I, p. 114; Castro, t. I, p. 261; Dumont, t. VI, pte. 2, p. 366.

(4) Elliot, t. II, p. 334; State papers, v. XV, p. 885; Martens, 1re édit., t. II, p. 566; 2o édit., t. IV, p. 37.

(5) Elliot, v. I, p. 356; Martens, 1re édit., Suppl., t. II, p. 227; 2° édit., t. VI, p. 668.

(6) Elliot, v. I, p. 242; State papers, v. I, p. 784; Martens, 1re édit., t. VI, p. 336; 2e édit., t. I, p. 641.

(7) Elliot, v. I, p. 253; State papers, v. I, p. 804; Martens, Ire édit., t. VI, p. 601 ; 2e édit., t. V, p. 697.

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