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restitution au propriétaire, moyennant le paiement, à titre de droit de sauvetage, du huitième de la valeur du navire dans le cas où la reprise est due à un bâtiment de la marine royale, et du cinquième lorsqu'elle a été faite par un corsaire. C'est cette circonstance qui, dans l'espèce du Santa-Cruz, obligea Sir William Scott à établir une distinction entre les captures antérieures et les captures postérieures à l'ordonnance de 1797; les premières furent condamnées toutes les fois que le navire était demeuré plus de vingt-quatre heures au pouvoir de l'ennemi, et les secondes furent traitées d'après les règles consacrées par le Portugal lui-même,*.

hollandaise.

§ 3193. La Hollande a reconnu les mêmes principes que la Législation France et l'Espagne relativement aux reprises effectuées dans le délai de vingt-quatre heures. L'édit des Etats-Généraux du 6 juin 1702, concernant la rémunération des croiseurs, article 8; celui de 1747, article 7; celui de 1781, article 7, et celui de 1793, article 7, sont unanimes à déclarer que si un navire ou des marchandises appartenant à des habitants de ces Etats sont pris par l'ennemi et repris par un corsaire, un navire ou autre bâtiment armé aux frais particuliers des habitants de ces Etats, le recapteur aura droit à un cinquième de la valeur, si la reprise a eu lieu dans les quarante-huit heures; à un tiers, si elle s'opère dans les quatre-vingtseize heures, et après un temps plus long, à la moitié. Les vaisseaux de guerre ont droit à la même prime de recousse que les

armateurs.

Les lois que nous venons de citer n'ont trait qu'à la reprise de navires appartenant aux sujets hollandais; elles ne renferment aucune règle relative à celle de propriétés neutres; à cet égard, un autre édit du 28 juillet 1705, article 18, porte qu'en cas de reprise de navires alliés ou neutres, les corsaires doivent se contenter de la rémunération fixée par les conventions internationales **

danoise.

§ 3194. L'ancienne législation danoise se basait sur des principes Législation identiques. Elle allouait au recapteur la moitié pour une reprisc faite avant l'expiration d'une journée, et la totalité lorsque ce terme

Wheaton, Elém., pte. 4, ch. 11, § 12; Twiss, War, § 175; Halleck, cli. xxxv, § 17.

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Bynkershoek, Quæst., lib. I, cap. v; Azuni, t. II, p. 385; Martens, Essai, §§ 66, 68; Hautefeuille, Des droits, t. III, p. 381; Gessner, p. 350; Wheaton, Elém., pte. 4, ch. 1, § 12; Phillimore, Com., v. III, § 413; Twiss, War, § 175; Halleck, ch. xxxv, § 17; Manning, p. 142; Massé, t. I, § 413; Dana, Elem. by Wheaton, note 180.

Législation prussienne.

Législation suédoise.

Législation nord-améri caine.

était dépassé. Une ordonnance du 28 mars 1810 prescrit la restitution de la propriété nationale ou alliée du Danemark reprise, moyennant paiement du tiers de la valeur, sans égard à la durée de possession par l'ennemi *.

§ 3195. Les dispositions du Code général prussien sont basées sur celles du Consulat de la mer. « On considère, y est-il dit, comme perdus les biens et les navires capturés par des corsaires, lorsqu'ils ont été conduits dans un port ennemi ou neutre; mais si, avant que cela ait lieu, la reprise en est opérée par un bâtiment armé en course, la restitution en sera faite, sauf déduction du tiers de la valeur à titre de droit de recousse au bénéfice des recapteurs **.

§ 3196. La jurisprudence suédoise repousse toute distinction de temps. Une ordonnance de Charles IX (1667) portait que lorsqu'un navire appartenant à des sujets suédois serait repris sur l'ennemi, le recapteur recevrait les deux tiers de sa valeur, et le propriétaire le tiers restant, abstraction faite du temps pendant lequel le navire serait demeuré entre les mains de l'ennemi.

En 1788 est intervenue une nouvelle ordonnance qui a modifié la proportion du droit de recousse, en allouant une moitié sculement au recapteur et l'autre au propriétaire ***.

§ 3197. Les Etats-Unis ont pris pour règle de restituer le navire recous, toutes les fois qu'au moment de la reprise une sentence. judiciaire ne l'a pas condamné et adjugé comme de bonne prise. Si le navire repris appartient à des personnes qui résident sur le territoire de l'Union ou se trouvent sous sa protection, la restitution a lieu contre paiement des frais judiciaires et d'une somme arbitrée par une Cour de justice à titre de dommages et intérêts. La même chose a lieu lorsque le bâtiment repris est la propriété de sujets d'une nation en paix avec la République. Les EtatsUnis appliquent la règle de réciprocité dans sa portée la plus étendue ****

****.

Martens, Essai, § 68; Phillimore, Com., v. III, § 414; Wheaton, Elėm., pte. 4, ch. II, § 12; Twiss, War, § 175; Gessner, p. 351; Halleck, ch. xxxv, § 17; Hautefeuille, Des droits, t. III, p. 381; Manning, p. 142.

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Wheaton, Elem., pte. 4, ch. II, § 12; Phillimore, Com., v. III § 415; Twiss, War, § 175; Gessner, p. 351; Hautefeuille, Des droits. t. III, p. 381; Martens, Essai, §§ 68, 70; Halleck, ch. xxxv, § 17; Manning, p. 142; Perels, p. 227.

Kent, Com., v. 1, pp. 117, 118; Wheaton, Elém., pte. 4, ch. 1, § 12;

§ 3198. Comme on le voit d'après cet examen succinct de la législation des principales nations maritimes, on peut regarder comme généralement admis les principes suivants :

:

La reprise n'est possible que si la prise n'a pas encore été adjugée; jusqu'à ce qu'un tribunal ait prononcé, le sort de la prise est incertain ni le capteur ni le gouvernement duquel il dépend n'ont de droits sur le navire ou sur son chargement; et comme la prise ne repose que sur le droit du plus fort, elle peut être annulée par la force; la reprise peut donc, par application spéciale du droit de postliminie, annuler la capture primitive.

Mais, une fois qu'un jugement a été prononcé, la prise devient légalement la propriété de celui auquel elle est attribuée; et si le navire est repris plus tard par l'ennemi, c'est absolument comme s'il s'agissait d'une nouvelle prise. Toutefois la reprise ne confère pas au recapteur les droits du capteur : elle a des effets essentiellement négatifs. Le recapteur est tenu de respecter les biens qu'il a sauvés des mains de l'ennemi, sauf à réclamer pour ses peines et ses sacrifices une rémunération, dont le chiffre varie selon la législation particulière des différents pays en cette matière.

Règles généralement admises.

Condition nécessaire

prise.

§ 3199. Une condition essentielle pour qu'il y ait lieu à reprise et par suite à l'exercice du droit de recousse, c'est que la prise soit pour la réellement au pouvoir de l'ennemi ou qu'elle soit dans une condition tellement précaire que la capture en soit considérée comme inévitable.

re

Sir W. Scott.

§ 3200. Dans l'affaire du Franklin, Sir William Scott déclara Opinion de qu'il n'avait connaissance d'aucun cas dans lequel on aurait accordé le droit de recousse alors que la propriété n'était pas en la possession de l'ennemi ou sur le point de tomber infailliblement en son pouvoir, comme quand un navire a amené pavillon ou se trouve à une trop courte distance de l'ennemi pour que la fuite soit possible*.

§ 3201. Lorsque le capteur d'un navire ennemi abandonne sa prise, il est entendu qu'il renonce aux droits qu'il pouvait avoir sur elle. Celui qui s'empare ultérieurement du navire abandonné ne saurait invoquer le bénéfice du droit de recousse, attendu que ce droit ne s'applique légitimement qu'au cas où la propriété a été réellement délivrée des mains d'un capteur. En effet, s'il y a lieu de

Phillimore, Com., v. III, § 419; Twiss, War, § 174; Halleck, ch. xxxv, § 15; Dana, Elem. by Wheaton, notes 175, 177; Gessner, p. 351; Manning, p. 142.

Abandon

de la prise.

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Bello, pte. 2, cap. v, § 6.

Législation française.

Législation espagnole.

Distinction

entre la re⚫onsse

taire et la re

récompenser celui qui arrache un navire à l'ennemi, il n'y a aucun motif plausible d'accorder pareille récompense à celui que le hasard place en face d'un navire abandonné.

§ 3202. Conformément à ce principe, la jurisprudence française (ordonnance de 1681, article 9, et arrêté du 2 prairial an XI, art. 55), établit que si le navire capturé est, sans être recous, abandonné par l'ennemi motu proprio, ou si par tempête ou autre cas fortuit il revient en la possession d'un Français avant d'avoir été conduit dans un port ennemi, il doit être rendu au propriétaire qui le réclamera dans le délai d'un an et un jour, alors même qu'il serait demeuré plus de vingt-quatre heures au pouvoir de l'ennemi; mais si le navire capturé a été conduit dans un port ennemi, quoiqu'il en soit ensuite chassé par la tempête et poussé sur les côtes de France, alors le propriétaire sur lequel il avait été pris ne sera plus en droit de le réclamer comme sien. Ce navire sera nécessairement jugé un vaisseau ennemi, sujet par conséquent à confiscation. Il est bon de faire remarquer que cette loi exige, pour que le propriétaire puisse produire sa réclamation, que le navire n'ait pas été conduit intra præsidia hostis, et qu'elle ne tient nul compte de la durée de la possession par l'ennemi, le seul fait du séjour sur territoire ennemi étant censé imprimer au navire un caractère hostile.

§ 3203. La législation espagnole est encore sur ce point conforme à celle de la France *.

§ 3204. Quelque différence que nous ayons à signaler dans l'apmili- plication du droit de recousse chez les diverses nations dont nous Cousse civile. avons examiné la législation, toutes sont cependant d'accord pour établir une distinction entre la recousse militaire et la recousse civile la première concerne la reprise de navires ou d'objets tombés au pouvoir de l'ennemi; la seconde, qui mérite plutôt la qualification de sauvetage et tient du droit de refuge, se produit en cas de reprise d'un navire en détresse qui avait été forcé de relâcher dans un port ennemi pour échapper au naufrage.

Il peut arriver que les deux cas se présentent simultanément, et qu'un tribunal décide que les recapteurs aient pour exercer

Wheaton, Elém., pte. 4, ch. 11, §12; Pistoye et Duverdy, t. II, p. 119; Massé, t. I, § 434; Bynkershoek, Quæst., lib. I, cap. v; Phillimore, Com., v. III, §§ 422 et seq.; Halleck, ch. xxxv, § 22; Azuni, pte. 2, ch. IV, §§ 8, 9; Valin, Com., t. II, pp. 257 et seq.; Valin, Traité, ch. VI, § 1; Emirigon, t. I, pp. 504, 505; Pothier, De la propriété, no 99; Dalloz, Réper toire, v. Prises marit., sect. 1, art. 3.

leur droit le choix de l'un ou de l'autre des deux modes de re

cousse.

§ 3205. En droit, on ne saurait admettre qu'un bâtiment convoyeur qui reprend à l'ennemi un des navires qu'il escorte ait droit à l'indemnité de la recousse militaire. C'est ce que jugea le conseil des prises français le 17 germinal an IX, à l'occasion du navire le Désiré, qui, capturé par les Anglais pendant qu'il naviguait sous la protection de la corvette la Tapageuse, chargée de l'escorter, avait été repris par cette dernière. Le conseil décida « qu'en reprenant le Désiré la Tapageuse n'avait fait que remplir un devoir sacré, dont l'inobservation lui eût attiré des reproches mérités, s'il eût été constaté qu'elle n'avait pas fait tout ce qui était en son pouvoir; que ce n'était point à proprement parler une recousse, mais un acte de protection qui avait été exercé en faveur du navire par la corvette; que les prétentions du commandant et de l'équipage de celuici à une indemnité quelconque étaient donc pour le moins indiscrètes, et que la restitution devait être faite entière au propriétaire réclamant *. »

Reprise du Désiré.

Coopération des forces de

§ 3206. Des troupes de terre peuvent participer au bénéfice du droit de recousse pour la reprise opérée par elles, avec ou sans le terre. concours de forces maritimes, de navires mouillés dans un port de mer, lorsque la reprise est le résultat nécessaire et immédiat d'opérations militaires dirigées contre la ville dans le port de laquelle se trouvent les navires.

§ 3207. La réoccupation d'Oporto en 1809 par l'armée alliée sous les ordres de Wellington nous fournit un exemple de reprise opérée par l'intervention des forces de terre. La place ne céda que par suite de l'action combinée de l'escadre anglaise et des troupes alliées, qui durent livrer bataille aux portes de la ville. La Cour d'amirauté, saisie de l'affaire, considéra que ces troupes avaient autant de droit que les forces maritimes aux indemnités à recevoir pour la recousse des navires détenus dans le port et qui se trouvèrent recous par le fait de la réoccupation d'Oporto par les alliés. Toutefois, on fit une exception en faveur des navires portugais repris en même temps, pour lesquels on décida qu'aucun droit de recousse n'était dû, en se fondant sur ce que si une armée nationale n'est pas admise au bénéfice de la recousse pour avoir délivré de

Wheaton, Elem., pte. 4, ch. II, § 12; Pistoye et Duverdy, t. II, pp. 110, 111; Hautefeuille, Des droits, t. II, tit. 13, ch. III; Wildman, v. II, ch. ш; Halleck, ch. xxxv, § 18; Dunlop, Digest. of law of U. S., pp. 271-173.

Réoccupation les troupes

d'Oporto par

anglaises en

1869.

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