Page images
PDF
EPUB

importe que sa marche soit assurée par l'emploi d'une eau convenable; puis, avant d'être remises en service, toutes les machines locomotives réparées doivent être allumées et essayées. On commettrait une grande faute en exposant leurs tubes à être empâtés de sédiments, pour ainsi dire dès le premier jour.

Conditions morales. Nous réunissons sous ce nom de conditions morales l'ensemble des conditions qui ne tiennent ni à l'étendue du terrain disponible, ni au mode de fondation des outils ou à la nature de l'eau, en un mot à aucun des faits inhérents au sol lui-même ou aux bâtiments qui le recouvrent ; nous avons en vue l'ensemble des conditions qui font qu'un atelier recevra et conservera un personel nombreux. On n'aurait en effet qu'une œuvre bien imparfaite si, l'atelier une fois construit, il était impossible d'y attirer et surtout d'y fixer des ouvriers.

Il est donc indispensable de réunir à l'étude des conditions physiques que nous avons énumérées, l'étude de conditions dans lesquelles on pourra assurer le logement et la vie des ouvriers qui doivent travailler dans l'atelier projeté, et cette étude touche à de nombreux problèmes.

Il importe d'abord de noter la différence extrême qui existe entre les ouvriers qui exécutent les terrassements et les ouvrages d'art et les ouvriers des ateliers. Les premiers, véritables nomades, laissent, selon l'expression consacrée, leur famille au pays; ils vivent dans des cantines, dans des abris improvisés par des industriels qui suivent les grands chantiers et qui cumulent souvent le métier de tâcheron et celui de logeur. Les ouvriers des ateliers, au contraire, vivent en famille; il faut qu'ils puissent trouver un logement suffisant et à un prix en rapport avec le prix de leurs journées.

Placer un grand atelier dans un village sans ressources serait commettre une grande faute, et jamais on ne pourrait y retenir, nous ne dirons pas 5 à 600 ouvriers, mais peut-être même une

centaine. Dans une grande ville, on n'a pas à craindre cette difficulté, mais il s'en présente une autre d'un autre ordre : il ne s'établit aucune relation entre le patron et l'ouvrier; la journée faite et le salaire payé, ces deux hommes demeurent étrangers l'un à l'autre, et nous jugeons cette situation mauvaise pour les deux. Dans notre pensée, les ateliers de construction seront convenablement placés dans une petite ville : les ressources locales suffisent pour les débuts de l'atelier, et, quand celui-ci se développe, on a le temps et les moyens de réaliser en dehors de l'atelier les installations que réclament les ouvriers.

Les propriétaires des grands établissements métallurgiques, généralement éloignés des villes, connaissent les énormes difficultés qu'ils ont dû vaincre pour fixer les ouvriers autour de leurs usines. Nous ne pouvons que passer très-sommairement en revue les questions qui ont dû être successivement abordées et qui se présentent chaque fois qu'il s'agit d'une organisation industrielle.

Logement des ouvriers. Il faut qu'en quittant l'atelier l'ouvrier trouve à proximité un logement. Dans une ville, la chose est encore possible quoique souvent difficile et chère; dans un village, il n'y faut pas songer, et les chefs d'industrie ont dù pourvoir, par des constructions spéciales, à ce premier besoin des ouvriers. Deux systèmes ont été adoptés :

Les grands bâtiments, les cités ouvrières, véritables casernes qui présentent les plus grands inconvénients;

Les maisons isolées pour un, deux ou quatre ménages. Nous pensons que l'expérience a prononcé et qu'elle a condamné sans retour les casernes. Les chiffres ci-après indiquent les prix auxquels reviennent les divers types de maisons isolées construites sur divers points de la France :

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

Ces maisons une fois faites sont mises à la disposition des ouvriers, qui les occupent en payant un petit loyer. Nous sortirions des bornes de notre sujet en indiquant les mesures excellentes prises pour qu'au bout d'un certain nombre d'années l'ouvrier devienne propriétaire de la maison qu'il a louée; nous nous contenterons de dire qu'il n'y a pas de question sociale plus importante que celle de la transformation de l'ouvrier industriel en propriétaire d'une maison suffisante pour le recevoir, après le travail, lui, sa femme, ses enfants et les vieux parents. Ajoutons que, dans notre pensée, la femme ne doit accomplir d'autre travail que celui qu'il lui est possible de faire en restant dans cette maison à côté de ses jeunes enfants.

Hôpitaux, églises, écoles. - Le logement ne suffit pas : il faut prévoir les maladies, les accidents trop fréquents dans les industries; il faut que les ouvriers célibataires puissent recevoir des secours. Il faut assurer la prédication régulière de l'Évangile et de la loi morale; il faut que les enfants soient élevés et instruits avant l'âge où ils pourront entrer à l'atelier à côté de leurs parents; il faut donc construire des hôpitaux, des églises

ou des chapelles, des écoles pour les garçons et les filles, et partout où l'industrie est prospère, nous trouvons que la satisfaction la plus large a été donnée à ces besoins moraux.

Approvisionnement des denrées. Nous ne pensons pas que, dans les temps ordinaires, les chefs d'industrie aient à veiller directement à l'approvisionnement des denrées. C'est au chef de chaque famille qu'il appartient d'étudier les moyens de se procurer les choses nécessaires à son ménage, et nous signalons, à ce sujet, le succès d'un assez grand nombre de sociétés coopératives d'alimentation. Dans les années de cherté exceptionnelle, les chefs d'industrie peuvent, par leurs conseils et leur crédit, faciliter à leurs ouvriers les moyens de s'approvisionner; mais là encore l'action doit être indirecte.

Institutions en faveur des ouvriers.

Nous ne pouvons que

nommer les caisses de secours et de prévoyance pour les malades, les blessés, les veuves et les orphelins, les caisses de retraite pour les ouvriers âgés et infirmes.

L'ingénieur digne de ce nom doit faire de ces questions économiques le but de ses constantes préoccupations.

L'État, les grandes sociétés industrielles, les chefs d'industrie ont déjà fait beaucoup pour améliorer la situation affreuse des ouvriers que l'âge ou la maladie éloigne de l'atelier; mais il reste, il restera toujours beaucoup à faire, et, nous ne craignons pas de le dire, les ingénieurs placés à la tête d'un grand service ont charge d'âmes. Que celui qui est à la tête des autres, disait saint Paul il y a dix-huit cents ans, soit plein de sollicitude.

Divisions à réaliser dans un grand atelier. L'emplacement une fois choisi pour un atelier de réparation, il faut établir les grandes divisions qui répondent aux diverses tâches à accomplir, et ici encore on ne peut que s'en rapporter à l'expérience acquise.

Un grand atelier doit comprendre les ateliers spéciaux ci-après :

1° Atelier de forge, divisé lui-même en plusieurs groupes suivant l'importance du travail à exécuter, soufflerie, marteaupilon et martinet à vapeur.

2° Atelier de chaudronnerie. Construction des chaudières et des foyers. Machines à percer et à river, etc.

3o Atelier d'ajustage comprenant les machines-outils et le moteur à vapeur (la chaudière de ce dernier laissée en dehors, conformément aux ordonnances).

4o Bâtiment de montage, travail d'ensemble. Ce bâtiment doit être éloigné des forges à cause de la poussière.

5o Atelier spécial pour les roues. Opérations autres que le tournage.

6o Ateliers accessoires de charronnage, menuiserie, peinture, etc.

7° Magasin. Pièces de rechange et de consommation.

8° Bureaux. Logement du chef de l'atelier et des principaux agents.

Moyens de desservir un atelier, extérieurement et intérieurement. Les grandes divisions dont nous venons de parler étant arrêtées, les bâtiments qui leur sont affectés ne sauraient être jetés au hasard sur le terrain; leur position relative doit être étudiée avec soin, et il faut s'assurer les moyens de les desservir extérieurement et intérieurement, à l'aide d'un faisceau de voies raccordées aux voies principales du chemin de fer.

Une disposition assez habituellement suivie consiste à avoir un premier faisceau de voies parallèles sur lesquelles stationne le matériel réparé ou amené pour être réparé. Des voies transversales, reliées aux premières par des plaques tournantes, pénetrent dans les ateliers et conduisent, soit les machines, soit les voitures et wagons, aux grues et aux outils dont l'emploi est nécessaire.

Ces voies acccessoires se ramifient, et l'on ne doit pas perdre un instant de vue que tous les objets à travailler étant très

7

« PreviousContinue »