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les principaux bureaux de péage du XIIIe siècle, dans le savant ouvrage de MM. MERTENS et TORFS, Geschiedenis van Antwerpen, au tome II.

Depuis la plus haute antiquité, des péages ont été établis sur tout le cours de l'Escaut à Tournai, d'un côté ; à Anvers et au-delà, de l'autre. Nous n'examinerons que ceux qui furent de la juridiction des anciens ducs de Brabant et des comtes de Hollande, c'est-à-dire ceux qui étaient perçus depuis Voortvurenmuiden à Saeftingen et de là à la mer; ce sont ceux qui nous intéressent spécialement au point de vue de l'histoire du péage établi sur le bas Escaut et dont les vicissitudes furent assurément d'un intérêt majeur pour l'ancien commerce d'Anvers. Les péages sur navires et marchandises et ceux de conduite ou pilotage sont fréquemment confondus dans les tarifs ; nous les examinerons les uns et les autres, en rappelant spécialement ceux qui ont rapport aux tonlieux perçus sur l'Escaut.

Le péage tel qu'il a existé depuis 1839 est différent de ceux que nous croyons devoir étudier d'abord, pour traiter complétement cette question; celui-là créait pour l'Escaut un système mixte inconnu jusque là. Il laissait libre l'accès du fleuve, mais soumettait l'usage de cette liberté à un droit; il rendait impossible le retour de la clause funeste

de l'art. 14 du traité de Munster, mais rétablissait, sous une autre forme, un droit de tonlieu pour la nation qui garde les bouches du fleuve. Nous passerons ainsi en revue les divers péages établis sur la navigation de l'Escaut jusqu'à l'affranchissement définitif de notre beau fleuve, le 1er août 1863, et examinerons les questions qui se rapportent aux tonlieux, considérés d'une manière générale.

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Le tonlieu était un droit payé au souverain pour la faculté concédée aux marchands de traverser en sécurité son territoire. Tout pays était fermé et la faveur accordée de transporter des marchandises de l'un à l'autre, ou d'une partie du pays à une autre, semblait autoriser le propriétaire ou simple usufruitier à prélever certaine redevance. Dans l'origine celle-ci n'était perçue que sur les étrangers: c'était une sauvegarde; plus tard, les habitants mêmes du pays y furent soumis.

Il y avait ainsi des péages pour les transports par ea et par terre; ces derniers, perçus sur les routes ou dans les villes, portent spécialement le nom de tonlieu, mais ce mot est également générique pour désigner toute espèce de péage; c'est ainsi que nous le trouvons dans les chartes et ordonnances et que nous le considérerons dans la suite.

Quelle fut l'origine de ces péages? Depuis les temps les plus reculés, on trouve des vestiges de tonlieux; dans les législations des peuples barbares il en est souvent parlé, et dans le Code Théodosien, code qui dans nos provinces

s'est perpétué dans les populations primitives, même après la conquête des Franks, nous trouvons mentionnés les tonlieux ou péages. Avant donc que d'examiner ce que furent ces péages dans les siècles primitifs de notre histoire, voyons rapidement ce qu'ils furent chez ce peuple qui laissa des traces si persistantes de son influence dans les mœurs, les coutumes et la législation de notre pays.

Ces péages remontent sinon aux premiers rois de Rome, du moins à leurs successeurs et furent bientôt odieux au peuple. Tite-Live nous apprend que Valerius Publicus les abolit dès la chûte des rois Portoriis quoque et tributo plebe liberata, ut divites conferrent qui oneri ferendo essent. Mais à mesure que les besoins de la république allèrent croissant, il devint nécessaire de les remettre en vigueur. La loi Cecilia en suspendit de nouveau l'exécution et, selon Dion, Quia vectigalia Urbem et reliquam Italiam vehementer affligebant, lex quæ ea tollebat, omnibus gratissima erat (lib. 37).

Les empereurs renouvelèrent les anciens impôts et péages ou en créèrent de nouveaux, selon le témoignage du même historien: Augustus vectigalia partim priùs abrogata renovavit, partim nova excogitata instituit. Chez les Romains, l'uniformité ne paraît pas avoir existé dans les portoria ou tonlieux ', et les lois particulières de chaque ville ou la volonté du censeur qui les imposait y apportait fréquemment des modifications. L'empereur Pertinax, enfin, supprima les péages « établis, dit Hérodien, par les tyrans, sur les routes et chemins, pour se créer des ressources, » et rendit la liberté à la circulation des produits.

' V. Dictionnaire de la conversation, art. PÉAGE.

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L'histoire romaine constate ainsi, à diverses époques l'existence des péages. Lorsque nos provinces furent soumises à la domination romaine, le lourd cortège d'impôts qui ruinait les pays conquis, les accabla également, et l'on ne sait que trop, par le système du fermage des impôts aux publicani, de quels maux ceux-ci pressurèrent les provinces de l'empire romain en extorquant des sommes beaucoup plus considérables.

Les empereurs Sévère et Antonin prescrivirent qu'aucun impôt nouveau ne pouvait être levé sans autorisation de l'empereur, ni décrété par les cités vectigalia nova nec decreto civitatum institui possunt, et Valérien, dans l'une de ses ordonnances, reconnaît que cette règle n'était pas enfreinte; mais, pour prévenir la fraude dans la perception, il ordonna que celle-ci fût établie par un tableau des droits que l'on ne pourrait plus dépasser et, en outre, que ce qui serait prélevé illégalement serait restitué 1. Constantin porta même contre les fermiers des édits plus sévères, punissant de l'exil ceux qui se rendraient coupables du crime d'établir dans les provinces des charges plus élevées que les vieilles coutumes ou les lois du fisc le permettaient 2.

Mais si les empereurs poursuivaient les exactions, ils voulaient aussi que tous contribuassent aux impôts et aux péages, témoin Valentinien et Valens qui, dans leur rescrit ad Florentum, prescrivaient que « nul ne doit être exempté des péages, parmi ceux qui font le commerce ou qui trans

1 Ergo et exigi aliquid quod illicite poscatur competens index vetabit et id quod exactum videtur, si contra rationem Juris extortum est, restitui jubebit.

C. IV. 62. Si provincialium nostrorum querela de conductorum aviditate constiterit, et probatnm fuerit ultra vetustam consuetudinem et nostræ terminos jussionis aliquíd cos profligasse, rei tanti criminis exilio perpetuo puniantur.

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