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porte de remarquer que la prohibition ne concerne que les personnes qui ont fait réellement le service d'une session, et non celles qui, ayant été désignées pour ce service, s'en seraient fait dispenser.

On doit considérer comme ayant fait le service de la session tous les jurés, même supplémentaires, qui se sont présentés pour remplir leur mission, lors même que, dans le cours de la session, ils n'auraient été appelés à statuer sur aucune des affaires soumises au jury. Ils ont rempli leur mission autant qu'il dépendait d'eux.

Pour que la prohibition de l'art. 47 puisse recevoir son exécution, les magistrats directeurs du jury doivent faire connaître aux préfets, pour chaque session, quels sont les jurés qui ont fait le service de la session, et les préfets doivent mettre ces renseignements sous les yeux du conseil général, lorsque l'on y procède à la formation de la liste annuelle. Si le magistrat directeur n'a pas transmis cette liste, le préfet pourra demander ces renseignements au procureur impérial.

La disposition de l'art. 47 a évidemment pour but d'empêcher de porter sur la liste générale les mêmes jurés pendant plusieurs années de suite. Ainsi, le juré qui était porté sur la liste de 1841, et a fait cette année-là le service d'une session, ne peut être porté sur la liste faite en 1842; mais rien ne s'oppose à ce qu'il soit compris sur la liste de 1843. Cependant on a prétendu que, si le jury spécial ne s'était pas réuni en 1842, les jurés qui avaient fait le service en 1841 ne pouvaient être portés sur les listes de 1843. Mais la Cour de cassation a déclaré qu'il ne résultait d'aucune disposition de la loi que, si une année s'était écoulée sans réunion du jury, l'incapacité de siéger dût se reporter sur les personnes qui avaient fait le service pendant l'année antécédente (Arrêt du 28 nov. 1843) (1).

La Cour de cassation a même jugée: « Que la violation de « l'art. 47, non compris en l'énumération de l'art. 42, ne peut « être considérée comme ouverture à cassation » (2).

451. Les art. 32 et 33 de la loi du 3 mai parlent d'incompatibilités qui empêcheraient certaines personnes de faire partie du jury spécial, ce qui s'applique d'abord aux personnes énoncées dans le § 2 de l'art. 30 de la même loi. Mais l'art. 384 (3), C.

(1) S.44.1.247.

(2) 17 août 1847 (S.48.4.318.

TOME I.

1848, art. 4, remplacé aujourd'hui par la loi du 4 juin 1853, art. 3].

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instr. crim., porte: « Les fonctions de juré sont incompatibl « avec celles de ministre, de préfet, de sous-préfet, de juge, de « procureur général, de procureur impérial et de leurs subst<< tuts. Elles sont également incompatibles avec celles de minist « d'un culte quelconque. » Quoique les motifs qui ont fait d clarer l'incompatibilité de ces fonctions avec celle de juré e matière criminelle ne s'appliquent pas tous au jury d'indemnite. il paraît convenable, par d'autres motifs, d'exclure égalemen de ce dernier jury tous les individus désignés dans l'art. 384 (1. On a donc admis implicitement ces incompatibilités, sans les sp cifier, comme, dans plusieurs autres circonstances, l'on s'en es référé tacitement aux usages suivis pour le jury criminel.

L'art. 392 du même Code porte que nul ne peut être jus dans la même affaire où il a été officier de police judiciaire, temoin, interprète, expert ou partie, à peine de nullité. Cette p hibition ne parait guère pouvoir s'appliquer, en matière derpropriation, qu'aux personnes qui auraient eu intérêt dans la faire, ou auraient rempli les fonctions d'expert. Nous ne pouvons partager l'opinion de M. Herson, qui croit qu'on ne peut mettre pour juré l'officier de police judiciaire qui serait intervenu, lors de l'opposition par voie de fait, à la levée du plan. La levée du plan et l'évaluation de l'indemnité sont deux opérations tout à fait distinctes.

La circulaire du directeur général des ponts et chaussées da 17 juill. 1833 porte : « Il n'est peut-être pas inutile de rema « quer que ce serait en réalité restreindre le nombre des jurės « spéciaux que de porter sur la liste des personnes sur lesquell «< la Cour où le tribunal ne pourrait faire porter son chos: « ainsi, quoique la prohibition énoncée en l'art. 384 (2), C «< instr. crim., n'ait pas été reproduite dans la loi qui nous « cupe, les préfets, sous-préfets, présidents, conseillers, juges, << procureurs généraux, procureurs du roi et leurs substitats, « ayant déjà, en vertu de différents articles de la loi, des foc « tions à exercer relativement à l'expropriation, il serait presque << toujours impossible de les appeler à faire partie des jurys « spéciaux, et leur inscription sur la liste formée par le conse « général serait à peu près sans effet. »>

452. Les listes dressées par le conseil général sont déposées dans les archives de la préfecture, et une expédition en est im

(1-2) V. page précédente, note 3.

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médiatement adressée au procureur général près la Cour impériale, si cette Cour siége dans le département, sinon, au procureur impérial du chef-lieu judiciaire. La liste relative à chacun des autres arrondissements est en outre transmise au procureur impérial de cet arrondissement, et ces magistrats font déposer ces pièces au greffe de la Cour ou du tribunal auquel ils sont attachés, afin que l'on puisse y avoir recours pour les désigna*tions prescrites par les art. 30 et 33 de la loi. (Même circulaire.)

453. Les listes sont faites par les conseils généraux dans leur session annuelle, dit l'art. 29, et servent jusqu'à la session suivante ordinaire de ces conseils. Ainsi, les listes ne sont ni renouvelées, ni modifiées dans les sessions extraordinaires, qui peuvent avoir lieu en vertu de l'art. 12 de la loi du 22 juin 1833.

Les préfets ne doivent pas perdre de vue que les pouvoirs des jurés qui ont été désignés par les Cours et tribunaux cessent avec la session du conseil général, de manière que, quand cette :session approche, il faut se hâter de réunir le jury. Il ne suffit pas de les convoquer : car, si leurs opérations ne sont pas commencées avant la clôture de la session du conseil général, la convocation devient sans effet. Il faut donc que le jour de la réunion du jury précède celui de la clôture de la session du conseil général; sans cela, les pouvoirs des jurés étant expirés, il faudrait faire nommer un nouveau jury (1).

454. Les listes électorales font foi pour le conseil général, qui, d'ailleurs, n'a pas le droit de les rectifier. En conséquence, il suffit, pour que le jury d'expropriation soit régulièrement composé, qu'il ait été formé sur la liste arrêtée par le conseil général, d'après les listes qui lui ont été soumises; peu importe qu'un des jurés ayant cessé d'être électeur n'ait pas dû être porté sur cette liste (2).

455. De même, la liste dressée par le conseil général fait foi pour la Cour impériale ou le tribunal qui, d'ailleurs, n'ont pas davantage le droit de la réformer: en conséquence, lorsque le conseil général a compris dans sa liste un individu qui n'aurait pas dû y figurer, la participation de cet individu aux opérations du jury n'est pas une cause de nullité de la décision (3)—(A).

̧(4) V. infrà, no 476.

(2) Cass., 18 août 1854 (S.54.1.784). (3) Cass., 24 nov. 1846, 17 août 1847 (S.47.1.378; 48.4.318).

Additions.

(A) Lorsqu'un ou plusieurs des jurés désignés sur la liste dressée par le conseil

456. Une simple erreur dans les prénoms d'une personne qui a siégé parmi les jurés ne vicie pas la décision du jury, lorsque, malgré cette erreur, il n'a pu y avoir aucun doute sur l'identité de la personne qui a siégé avec celle que le conseil général avait entendu porter sur la liste (1).

457. La même erreur commise, à l'égard du prénom d'un juré, sur la liste dressée par le conseil général du département, et par suite sur la liste arrêtée par la Cour impériale, peut être rectifiée par le magistrat directeur du jury, à l'aide des autres énonciations contenues dans les deux listes (2).

458. L'erreur dans les noms, âge et domicile d'un juré, com. mise sur la liste dressée par le conseil général, ne suffit pas pour invalider la décision à laquelle ce juré a pris part, lorsqu'il ne peut pas y avoir de doute sur l'identité de son nom patronymique. Dans tous les cas, la nullité qui pourrait résulter de ces irrégularités ne saurait être opposée par la partie qui, sur l'observation qu'en a faite le juré, et sur l'interpellation formelle du magistrat directeur, n'a élevé aucune réclamation à l'égard de l'identité du juré siégeant (3).

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SECTION V. De la désignation des jurys spéciaux.

Chaque jury se compose de seize jurés titulaires et de quatre jurés supplémentaires. Le choix en est fait par l'autorité judiciaire.

460 à 463.

464. 465.

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Erreurs dans les désignations détails de jurisprudence. Moins de solennité que sous la loi de 1833.

En cas d'empêchement du tribunal du chef-lieu judiciaire, le choix est déféré à la Cour.

466. De la demande en désignation du jury.

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Indication des affaires dont le jury devra connaître.

Nature de la mission de la Cour ou du tribunal du chef-lieu judiciaire.

général n'ont pu être trouvés il est légalement pourvu à leur remplacement lors de la formation du jury; le tribunal ni le magistrat directeur du jury n'ayant le droit de reviser la liste générale. Cass. civ., 46 mai 1859 (S.59 4.864).

(4) Cass., 2 avril 1855 (Gaz. trib., 4 avril 55).

(2) Cass., 7 mars 1855 (Droit, 2 juin 55).

(3) Cass., 8 mai 1855 (Droit, 9 mai 55); et 22 août 55 (Gaz, trib., 23 août 55).

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La désignation a lieu en chambre du conseil.
Personnes qui ne peuvent être désignées.
Comment elles sont connues.

La violation du § 2 de l'art. 30 ne donne pas ouverture à cassation. Jurisprudence.

Régularité de la délibération.

Transmission de la liste des jurés au sous-préfet.

Le renouvellement de la liste générale enlève qualité et pouvoir aux jurés portés sur la liste précédente, et même à ceux déjà choisis sur cette liste, à moins que les opérations du jury ne soient commencées. Jurisprudence.

Du recours en cassation.

459. Toutes les fois qu'il y a lieu de recourir à un jury spécial, la Cour impériale, dans les départements qui sont le siége d'une Cour impériale, et dans les autres départements le tribunal du chef-lieu judiciaire choisit, sur la liste dressée par le conseil général, seize personnes pour former le jury spécial chargé de fixer définitivement le montant de l'indemnité. La Cour ou le tribunal choisit en outre et en même temps quatre jurés supplémentaires (art. 30, § 1er). « Ainsi, a dit M. le ministre des travaux publics, la composition du jury est une émanation même de la justice, et de la justice prise à un degré où elle doit réunir plus de lumières, et inspirer, s'il est possible, plus de confiance. » (Monit., 13 déc. 1832, p. 2136.)

« Nous avions d'abord songé à faire désigner le jury par la voie du sort, ajoutait le ministre, mais nous avons cru devoir y renoncer. Le sort est aveugle; il peut ne pas désigner les personnes qui, pour tel cas donné, auraient des connaissances spéciales; enfin son choix peut tomber sur des personnes éloignées du lieu des travaux, et qu'une absence prolongée pourrait vivement contrarier dans leurs affaires et dans leurs occupations habituelles. » (Ibid.) Le sort peut enfin désigner des personnes décédées ou qui ont intérêt dans la contestation, et il faudrait, par cette dernière considération, accorder aux parties un plus grand nombre de récusations, et augmenter par suite le nombre des jurés appelés à participer aux opérations de la session.

« Indépendamment des seize jurés titulaires, ajoutait le ministre, le tribunal choisit quatre jurés supplémentaires, afin que, par l'effet des empêchements, des exclusions et des incompatibilités prévus par la loi, la liste spéciale des jurés ne descende pas, s'il est possible, au-dessous du nombre de seize, sur lequel

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