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La troisième ligne suivait formée en régiments à 400 ou 450 pas de la première, et autant que possible débordant le flanc qui n'était pas couvert par la seconde. Ainsi tandis que la première ligne avait ses flancs couverts par les lignes suivantes, celles-ci devaient se couvrir elles-mêmes, en conservant quelques escadrons en colonne pour former des flancs défensifs; cela était surtout nécessaire lorsqu'elles se portaient en avant pour opérer des attaques de flanc contre l'ennemi.

On envoyait en outre des patrouilles de combat qui avaient pour mission d'éclairer les flancs à une certaine distance et de prévenir les surprises. Les troupes en marche avaient toujours quelques éclaireurs en avant de leur front.

Le mode d'attaquer sur les différentes armes était parfaitement défini. Pour attaquer la cavalerie, la 1re ligne se formait en bataille de façon å aborder l'adversaire autant que possible simultanément de front et sur les flancs, la seconde ligne sortait par les côtés, soit pour tomber sur les flancs ou les derrières de l'ennemi, soit pour repousser une attaque sur le flanc de la 1re ligne.

La 3e ligne débordait aussi par les flancs des lignes qu'elle avait pour mission de renforcer ou de dégager. De cette façon en cas d'échec les hommes débandés n'entravent pas le front des troupes de renfort, et l'on peut tomber sur le flanc de l'ennemi qui poursuit son avantage.

Pour figurer la mêlée qui suit une attaque heureuse, les cavaliers rompant leurs rangs se mélangeaient et se portaient des coups simulés, puis on ralliait la troupe soit sur place, soit en avant, soit en arrière.

Une troupe repoussée devait au signal d'Appel, » que le commandant en chef avait seul le droit de faire sonner, se porter en arrière au galop et sans garder ses rangs, puis se reformer derrière la réserve. On faisait toujours dépendre la réussite de l'attaque d'une vigoureuse offensive sur les flancs ou les derrières de l'ennemi.

Pour attaquer l'infanterie, la cavalerie se formait en trois échelons, chacun à trois escadrons se suivant à peu de distance.

On part de ce principe qu'avec le perfectionnement des armes à feu on ne doit jamais attaquer de front une infanterie encore intacte; ce n'est qu'une nécessité absolue ou des circonstances tout à fait spéciales qui peuvent justifier une exception à cette règle. Le premier échelon, s'il réussit, éprouvera des pertes considérables et ne pourra en tous cas faire autre chose que rompre les rangs ennemis. Il est donc nécessaire que le second et au besoin le troisième échelon suive à courte distance pour détruire ce que le premier n'a fait que rompre et disperser. Parfois cependant on indiquait à la seconde et à la troisième ligne un objectif spécial, et à cet effet elles débordaient le premier échelon sur l'un des flancs.

Pour l'attaque on manœuvrait toujours dans le but de prendre l'ennemi en flanc, à cet effet on employa très-fréquemment les demi-colonnes. Cette formation ainsi que les marches obliques, qui conduisent plus rapidement au but, étaient toujours employées par les seconde et troisième lignes pour se porter du lieu de rendez-vous ou de la formation en marche sur les flancs de la première ligne et envelopper l'ennemi.

Nous remarquerons en terminant que pendant les derniers jours. des manœuvres on prit les mesures suivantes : les commandants supérieurs jusques et y compris les commandants de régiments avaient seuls le droit de donner des commandements à la voix ou au moyen de signaux. Les commandants d'escadrons et les chefs de section devaient se contenter de signes ou d'indications faites avec le sabre; ce n'était qu'exceptionnellement et lorsqu'il y avait à craindre du désordre qu'ils pouvaient donner quelques commandements à haute voix.

NOUVELLES ET CHRONIQUE.

Monsieur le capitaine Couvreu, membre de la commission chargée d'étudier les questions qui se rattachent à l'organisation de la cavalerie, nous adresse la réclamation suivante au sujet du compte-rendu que nous avons publié dans notre dernier numéro. :

Permettez-moi de rectifier la composition du futur escadron de dragons comme suit 1 capitaine, 3 lieutenants, 1 vétérinaire, 1 maréchal-des-logis-chef, 1 fourrier, 3 maréchaux-des-logis, 12 brigadiers, 2 maréchaux-ferrants, sellier, 4 trompettes et 90 cavaliers, total 119 hommes, sans compter le personnel sanitaire et peut-être un armurier.

Voici quelques nouveaux détails fournis par la Gazette de l'Allemagne du Nord, à propos des canonnières fluviales allemandes.

Les monitors du Rhin que la compagnie le Weser a construits à Bremerhafen, n'ont plus qu'à recevoir leurs machines pour être achevés. Il est probable qu'ils seront amenés ce mois-ci à Coblentz, où ils seront stationnés. Leur équipage, d'une force de soixante matelots, commandés par six officiers, est déjà désigné. Il sera placé sous les ordres directs de la place de Coblentz. En cas de guerre, chacun de ces monitors recevra en outre cinquante hommes d'infanterie. Ces bâtiments sont munis chacun de deux pièces de marine de douze centimètres, disposées dans une tour tournante cuirassée d'une épaisseur de sept centimètres. La cuirasse des monitors a la même épaisseur. Ils seront employés principalement à assurer le passage de la garnison entre Coblentz et Ehrenbreitste n, à défendre le pont de Rheinhausen, à empêcher un passage du Rhin de la part de l'ennemi et à protéger les places du Rhin entre Mayence et Wesel Leur tirant d'eau ne leur permettrait pas de concourir à la défense des places en amont de Mayence, Germersheim, Strasbourg et Neufbrisach. En outre, l'ordre vient d'être donné de remettre en état et d'armer les deux canonnières prises sur la Loire en 1871, et qui sont restées depuis cette époque déposées à l'arsenal de Mayence, dans l'état où elles avaient été amenées par chemin de fer depuis Orléans, c'est-à-dire démontées et en partie fort endommagées.

L'organisation du grand état-major français est aujourd'hui arrêtée. Voici comment les divers services y seront répartis :

Chef d'état-major général, M. le général de division Borel, chef de l'état-major général et chef du cabinet.

1er service. Général de brigade Blot.

1re section. Correspondance générale, mouvements de troupes, décorations, décrets collectifs. Chef M. Jeanson.

2o section. Organisation, opérations militaires; chef M. le lieutenant-colonel Haillot.

3 section. Chemins de fer et mouvement; chef M. le colonel de Cools. 2 service Général de brigade Gresley.

4 section. Statistique militaire; étude des armées étrangères, réunion des documents relatifs à la statistique des différentes puissances, correspondance et relations avec les puissances étrangères, examen et publication des travaux concernant les armées étrangères et la statistique; chef, M. le chef d'escadron Vanson. 5e section. Travaux historiques, rédaction des opérations militaires, rédaction de la partie militaire du Mémorial du dépôt de la guerre, examen et publication des travaux historiques; chef, non encore nommé.

6 section. Dépôt de la guerre, géodésie, topographie, dessin et gravure, archives historiques, bibliothèque, collection des cartes et plans, comptabilité du dépôt de la guerre ; chef M. le colonel Sayet.

Danemark. La conscription militaire à l'ile d'Alsen n'a pas été bien favorable pour le gouvernement prussien, presque tous les jeunes gens émigrant en Danemark, où le service militaire n'est pas si onéreux. Les autorités ne peuvent pas directement interdire cette émigration; les essais tentés quelquefois dans ce but n'ont pas réussi, les conscrits ayant alors émigré sans permission, préférant l'exil au service militaire prussien. Cette fois, la grande majorité des gens qui se présentaient était composée d'estropiés ou d'individus n'ayant pas la taille prescrite. Le nombre des émigrés, seulement pour le district de Soenderborg, a été évalué, par les journaux prussiens du duché, à près de deux cents.

L'Invalide russe donne des détails sur l'expédition du colonel Iwanow, chef militaire de la province de l'Amou-Daria. contre les Turcmènes, qui, profitant de l'hiver, s'étaient levés en masse pour piller le territoire russe et celui du khan de Khiva; 6,000 Turcmènes à pied et à cheval étaient réunis près du bras de l'Amou, dit le Laudan, jusqu'à Kiptchak; une autre bande de 1,000 hommes avait traversé sur la glace l'Amou, près de Kiptchak, pour se rendre sur le territoire des Kirghizes-Daou-Kara.

Le colonel Iwanow, à la tête d'un détachement peu considérable, passa, sur la glace, sur la rive gauche de l'Amou, en informant par une lettre le khan qu'il devait empêcher les Ouzbeks de faire cause commune avec les Turcmènes. Ces derniers avaient comme chef Kazy-Mourad, de la tribu des Kara-Ilialla. Lorsque les troupes russes s'approchèrent des habitations de cette tribu, elles les trouvèrent désertes. Le colonel russe poussa sa reconnaissance jusqu'aux monts de KoubaTan; mais les Turcmènes avaient inondé le pays, en coupant les digues des canaux, et les Russes durent se retirer vers la ville de Mongyt, située au midi, où ils arrivèrent le 14 (26) janvier. De là, le colonel se rendit sur le territoire des Turcmènes Koultchares dont il brûla les habitations.

Les Youmodes et les Schaudoures, voyant l'énergie des Russes, demandèrent pardon et prièrent d'épargner leurs villages, en payant en même temps une partie de la contribution de guerre que le général de Kaufman leur avait imposée. Les Imraly aussi firent leur soumission, et le colonel se transporta à Vieux-Porssou, où, du temps de Pierre-le-Grand, le prince Békowitch-Teherkassky avait péri, traitreusement assassiné avec les troupes qu'il commandait.

Le colonel Iwanow fit honorer la mémoire de ces braves par une triple salve et se transporta, le 18 janvier, au lac Tehagat, puis de là, à Kiptchak. Comme la glace sur l'Amou s'était fondue, le fleuve ne put être traversé que le 23 et le 24 janvier. La prompte apparition des troupes russes répandit partout la terreur parmi les Turcmènes; ils rendirent à la liberté les Kirghizes de la tribu Daou-Kara, dont ils venaient de s'emparer, et d'autres prisonniers. Le bey de Kiptchak, dont l'attitude a été peu loyale, fut destitué par le khan, sur la demande du colonel Iwanow. Les Turcmènes et Ougleks, pris par les Russes, furent remis au khan pour les faire punir.

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REVUE MILITAIRE SUISSE

No 9.

Lausanne, le 6 Mai 1874.

XIXe Année.

SOMMAIRE.-Siége de Strasbourg en 1870. (Fin.) — La neutralisation de la Savoie. Etude politique, géographique et stratégique, par le lieut.-colonel fédéral G. de Charrière. (Suite.) - Hygiène militaire, par L. Rouge, médecin de division. (Suite.) Nouvelles et chronique SUPPLÉMENT.

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Rapport de gestion du Département militaire fédéral pour 1873.

SIEGE DE STRASBOURG EN 1870
(Fin.)

Le choix du point d'attaque pourrait en servir d'exemple, tout en prêtant à quelque discussion. Sans doute, le front ouest se désignait naturellement, puisque les autres étaient couverts par l'inondation. Mais l'angle sud-ouest, le bastion 7, eût été peut-être préférable au front 11-12, ce dernier étant beaucoup plus fort par ses compléments récents et par les lunettes 53 et 52. Les Allemands s'estimèrent assez supérieurs en forces pour prendre le taureau par les cornes.

C'était d'ailleurs beaucoup plus commode. L'angle nord-ouest était le plus rapproché de leur ligne de communication, de la base de Wendenheim, où se trouvait un vaste parc, avec des ateliers et laboratoires considérables. L'économie de temps et de peines réalisée par des charrois plus faciles, question importante il est vrai, avec la munition actuelle, pouvait compenser les difficultés tactiques plus grandes.

Déjà dans ces conditions, l'établissement du grand parc à Wendenheim, et des dépôts supplémentaires à l'est de Schiltigheim pour la gauche, au carrefour du Couvent pour le centre, à Kronebourg pour la droite, ne s'effectua pas sans peine. Ces débuts d'installation et les premières constructions de batteries et de tranchées accusèrent parfois des lenteurs et des croisements contrastant avec le service ordinairement rapide et précis des corps d'opérations; en revanche les travaux de sape, une fois régulièrement entrepris, les transferts de batteries, leur tir bien ajusté et mesuré à volonté, les constructions improvisées d'abris, d'abords, de ponts, de digues, puis le bon ordre qui s'établit promptement au milieu du dédale des tranchées, montrèrent que les troupes techniques allemandes ne le cédaient en rien aux autres armes. Dans le cours du siége, 69 batteries furent construites du côté de l'attaque principale. Les nos 2, 3, 5-13, 17, 26, 29, 34, 36, 39, 47. 17a, 19a, 21a ayant été abandonnés au fur et à mesure des progrès du siége, il restait, au moment de la reddition, 40 batteries; elles comprenaient vingt-deux canons de 24 longs, dix canons de 24 courts, soixante-quatre pièces de 12, et vingt-trois

de 6; plus deux mortiers rayés de 21 cent., vingt mortiers lisses de 28 cent. (50 livres), et environ cinquante de 23 et de 15 cent. (25 et 7 livres). Toutes ces batteries, isolées ou par groupes, et reliées par des tranchées les unes aux autres, et avec les parallèles et leurs approches, étaient les unes indépendantes, les autres établies sur le front des parallèles; toutes étaient enfoncées à 110, et construites avec les dimensions réglementaires. Le champ d'attaque, parfaitement plat, avait permis de les faire planes, régulières et correctes; peu d'entre elles s'écartaient de la règle nous citerons, par exemple, la batterie no 33, qui était disposée en étages. Le sol, argileux à une grande profondeur, se prêtait à la construction; en revanche, les revêtements de ces magasins n'ont pas toujours résisté convenablement, et plusieurs fois ils furent traversés par les lourdes bombes françaises. Le système uniforme d'affûts élevés des canons de divers calibres permit de construire exactement de la même manière toutes les batteries: les embrasures étaient très peu profondes et allaient en diminuant du côté de l'ennemi; seules les contre-batteries présentaient, dans l'épaulement plus élevé du couronnement du chemin couvert, des embrasures un peu plus profondes; elles étaient en partie munies d'une espèce de portière. Le nombre des traverses et des abris couverts, établis dans les batteries, variait avec les dangers qu'elles pouvaient courir, leur disposition avec les matériaux qu'on avait sous la main. Dans celles qui étaient particulièrement exposées au feu des mortiers, les abris étaient blindés avec des rails de chemin de fer; mais ce blindage n'offrait guère plus de sécurité contre la pénétration. Construits à la hâte pendant la nuit et sous le feu de l'ennemi, les profils ne pouvaient prétendre à une grande netteté de contours; on n'en négligeait que moins possible ce qu'il y avait de réellement important dans leur construction; les épaulements étaient généralement de force à résister à un feu d'artillerie plus puissant que celui qu'entretenait ordinairement la place. L'ensemble n'offrait aucun but dominant ni considérable, mais seulement des amas confus, dont les vagues contours, perdus au milieu des terrassements de toute espèce, n'avaient rien de saillant ni par leurs embrasures ni par leurs pièces. Grâce aux affûts de fer à grande hauteur et aux pièces avec chargement par la culasse, on put employer des coins d'arrêt qui, non-seulement diminuent sans inconvénient le recul mais permettent en même temps à la pièce de rouler d'elle-même vers l'épaulement. Dans toutes les batteries étaient inscrits sur des tableaux en bois fichés en terre le numéro de l'armement de la batterie, les buts à battre et leurs distances, ainsi que les numéros des batteries voisines qui avaient à tirer également sur les mêmes points en outre, de nombreux poteaux indicateurs per

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