Page images
PDF
EPUB

Etude d'un nouveau matériel pour l'artillerie suisse.

La commission d'artillerie avait, en 1892, préparé un programme pour des essais avec de nouvelles pièces de campagne et de montagne. Ce programme avait, à dessein, été rédigé sur des bases très larges et peu définies, une grande liberté devant être laissée aux constructeurs. Ceux-ci répondirent en petit nombre par la soumission de projets auxquels manquaients urtout les qualités pratiques; c'étaient des travaux d'ingénieurs non d'artilleurs. Le colonel Schumacher, chef de l'arme de l'artillerie, demanda alors l'autorisation de s'adjoindre un officier pour l'étude spéciale d'un nouveau matériel; M. le lieutenant colonel Pagan, instructeur de Ire classe, fut choisi pour cette tâche; c'est lui qui, sous la direction de son chef, a rédigé les deux travaux dont nous allons rendre compte.

[ocr errors]

Le premier, intitulé: Etude d'un matériel de campagne pour l'artillerie suisse, a paru en manuscrit en 1895; le second publié en juillet 1896, contient l'Etude d'un matériel de montagne et des Considérations d'ensemble d'un haut intérêt1.

Le but de ces lignes n'est point de donner une critique de cet important travail, critique pour laquelle nous ne nous reconnaissons pas la compétence nécessaire, mais nous voudrions en donner aux lecteurs de la Revue une analyse aussi complète que possible, en laissant cependant de côté la partie plus spécialement technique du sujet, la partie preuve et démonstration, pour nous en tenir surtout aux conclusions qui sont de nature à intéresser les officiers de toutes armes. Ceux qui voudront pousser l'étude plus loin et pénétrer dans les domaines de la balistique, de la métallurgie ou des constructions mécaniques trouveront ample moisson dans le travail original.

I. ARTILLERIE DE CAMPAGNE

Programme. A la suite des perfectionnements apportés depuis quelques années aux armes à feu portatives, l'artillerie traverse en ce moment une période d'effervescence; les divers

1 Ce travail a déjà été l'objet d'analyses très complètes dans la presse militaire française. Voir Revue d'artillerie, sept. 1896, 1er article; Revue militaire de l'étranger, août 1896.

pays hésitent à introduire, au prix de grands sacrifices, un nouveau matériel dont d'autres, profitant de l'expérience acquise, pourront éviter les défauts et développer les progrès. Il faut cependant étudier les transformations à opérer, sous peine d'être pris au dépourvu au moment où cette transformation viendra à s'imposer définitivement. L'unité de conception qui doit faire la valeur du matériel nouveau doit être amenée au moyen d'une, étude théorique faite, tant au point de vue tactique, qu'au point de vue technique; l'artilleur doit indiquer d'une manière précise au constructeur l'arme qu'il veut qu'on lui livre, mais il ne doit lui demander que ce qui, dans l'état actuel de la technique, est pratiquement réalisable. Puissance et mobilité. -Les conditions de puissance et » de mobilité ne peuvent être précisées d'une manière ab» solue. Veut-on une grande puissance, on est obligé d'a>> lourdir le matériel; demande-t-on au contraire le maximum » de mobilité, on doit se résigner à diminuer la puissance. » Les progrès de l'industrie ont bien permis d'améliorer à la >> fois la puissance et la mobilité, mais ces deux qualités n'en >> sont pas moins en opposition. »

Pour apprécier le degré de mobilité qu'on doit rechercher, il faut tenir compte, et de la nature du terrain, et des conditions tactiques dans lesquelles notre artillerie serait appelée à manoeuvrer. Le poids de nos voitures d'artillerie tel qu'il est, avec le matériel actuel, doit être diminué; il est mal aisé, après avoir mis en batterie derrière une crête, d'amener les pièces à bras au travers des cultures à leur position de tir, comme cela sera nécessaire maintenant en face de la puissance du feu de l'infanterie.

Ce poids de la bouche à feu une fois déterminé, il faut l'utiliser en lui faisant rendre l'effet maximum, soit l'effet maximum avec le minimum de munitions, soit l'effet maximum dans le minimum de temps.

Un projectile lourd produit isolément plus d'effet qu'un projectile léger, mais on tirera plus vite avec un projectile léger, et on dépensera moins de poids de munition et moins de temps pour arriver à régler son tir; de là, dans une certaine limite, une supériorité du projectile léger.

D'autre part, on doit se demander si l'efficacité dans le tir réglé n'est pas proportionnelle au poids du projectile; l'expérience et la théorie démontrent toutes deux que, dans les mêmes

conditions de vitesse restante, d'ouverture dans la gerbe des balles et de précision, un même poids de munition produira plus d'effet avec un plus grand nombre de projectiles légers qu'avec un moins grand nombre de projectiles lourds. Mais, aux longues portées, les conditions ne sont plus identiques, la supériorité du projectile léger tend à se perdre.

Le canon que nous devons rechercher est un canon plus mobile que l'actuel, mais possédant au moins une puissance supérieure et capable, grâce à l'efficacité de son projectile, à la rapidité de son tir et au grand nombre de ses munitions, de soutenir la lutte contre des canons plus lourds. Nos voitures-pièces pèsent 1950 kg. sans servants; elles devraient pouvoir être ramenées à 1200 kg. Ce poids inférieur permettrait de rétablir la traction à quatre chevaux; de là, traction plus facile, plus régulière, diminution de la longueur des colonnes et de la vulnérabilité de la batterie et enfin faculté de mieux utiliser le terrain. L'approvisionnement en munitions pourrait d'autre part être augmenté en même temps que le nombre des caissons.

Dépendance mutuelle des éléments du matériel de campagne. Ce chapitre examine successivement les divers éléments d'un système d'artillerie: force vive à la bouche du canon et son rendement, force vive restante, poids du projectile, calibre, densité transversale et densité sphérique, rendement du projectile dans le tir, pressions dans l'arme, poudre, force vive du recul de la bouche à feu et résistance de l'affût, force vive du recul de la pièce en batterie. De cet examen, les auteurs du travail déduisent divers éléments pour la constructions des bouches à feu et des affùts, dans le détail desquels il nous est difficile d'entrer; notons cependant qu'ils admettent que la rapidité du tir dépend plus de l'amélioration du pointage, liée à la suppression du recul, que des perfectionnenements aux mécanismes de culasse et à la munition, mais que, jusqu'ici, le problème de la suppression complète du recul n'a pas été résolu.

[ocr errors]

Calculs et déterminations. Ce chapitre examine les questions relatives à la densité du projectile, à la vitesse et à la force vive initiale, aux relations de poids entre la pièce et l'affût, à l'approvisionnement en munitions de la batterie, qui devrait être de 200 coups par pièce.

Détails de construction.

La seconde partie du travail, intitulée détails de construction, passe en revue successivement la bouche à feu, la munition et l'affût et indique quelles sont les solutions à adopter aux nombreuses questions que se posera le constructeur.

Bouche à feu. La pièce devra être d'un métal ayant au moins les qualités de l'acier au nickel, elle sera frettée à fils sur la plus grande longueur de la bouche à feu, la prépondérance de culasse sera de 25 kg. environ, la longueur de la pièce sera de 2m20, soit de 29 calibres, les rayures au nombre de 24, avec une inclinaison progressive de 2 à 6 degrés. Le mécanisme de culasse plutôt choisi dans les systèmes à vis, à filets interrompus ou à vis excentriques.

Munitions. C'est le shrapnel qui continuera à être le projectile normal; à côté de lui, on aurait dans chaque batterie un faible approvisionnement d'obus-torpilles, ces projectiles pourraient même n'être transportés que par le parc du corps d'armée.

Les balles du shrapnel doivent être nombreuses, ce qui oblige à ne pas les faire trop grosses; d'autre part. si elles sont trop légères, elles perdent trop tôt de leur vitesse. La construction du shrapnel doit être telle que son poids total soit le plus fort possible relativement au poids du projectile, c'est-à-dire qu'il faut rendre maximum le rendement des balles du shrapnel.

Il faut, pour élever ce rendement, choisir pour le corps du shrapnel et le diaphragme le métal le plus résistant et adopter les plus faibles épaisseurs admissibles. La charge devra être aussi faible que possible tout en fournissant un nuage convenable pour l'observation du tir et une augmentation de vitesse suffisante pour les balles.

Voici quels seraient les éléments du tir du canon de 75 mm. avec un projectile pesant 5,8 kg. et 6,8 kg. construit dans ces conditions:

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

Le coefficient balistique a été choisi peu avantageux.

La fusée du shrapnel serait à double effet, à cadran, à longue durée, à serrage permanent et à appareil fusant bien, protégé contre l'humidité. La fusée dite mécanique, trop déli cate, devrait être écartée.

L'importante question de l'adoption de la cartouche complète, est examinée avec le plus grand soin; elle est finalement

« PreviousContinue »