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Inconvénient très-grave qui rend souvent et les débiteurs et les créanciers, victimes des inadvertances ou de la négligence de leurs officiers ministériels (1).

-« C'est TREILHARD!.. voilà bien TREILHARD!.. J'avais en effet >> un sentiment confus que tout cela était trop minutieux, trop » long, trop chargé... Je crois même avoir essayé une fois de » le représenter à Treilhard; mais Treilhard avait de la tena» cité, et j'étais hors d'état de lutter contre lui dans une matière » à moi étrangère, et qu'il avait au contraire approfondie... Croyez-vous qu'on pût facilement y remédier? >>

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-Cela exigerait du temps et des méditations, parce que cette

(1) Dans le projet déjà cité (art. 177) on prononçait la nullité pour l'inobservation de près du tiers des formes prescrites (50 articles sur 184), ce qui est déjà beaucoup trop à notre avis; mais on atténuait les inconvénients de ce système, en permettant aux juges, lorsqu'un acte aurait seulement été tardif, de choisir entre son annulation et une amende contre les officiers ministériels négligents.

Feu M. Demiau, professeur de procédure à l'Ecole de droit de Paris, loin d'adopter ce tempérament, voulait que toutes les formes fussent prescrites sous peine de nullité; il se fondait uniquement sur les égards que méritait la position malheureuse d'un débiteur menacé d'expropriation. Son avis et l'avis opposé de l'auteur du présent mémoire sont transcrits dans leurs ob. servations sur le même projet, adressées au ministre de la justice. Le dernier avis est fondé sur les motifs déjà exposés à Napoléon. Il suffira d'y ajouter deux remarques :

1o Dans la nouvelle édition du Journal des Avoués, ouvrage qui fait tant d'honneur à M. Chauveau, la saisie immobilière occupe à elle seule, un volume (le xx) de 592 pages, imprimé en caractères très-menus, et divisé en sept cent treize articles, tous relatifs à des difficultés différentes, et encore ne contient-il que les décisions antérieures à l'année 1829;

2° La seule question de savoir si la signification du jugement d'adjudication préparatoire était ou non exigée, sous peine de nullité, par le code (elle était supprimée dans le projet, art. 26), a donné lieu à trente ou quarante arrêts contraires les uns aux autres, la Cour de Cassation se décidant pour la nullité, et la plupart des Cours royales repoussant cette décision. (V. même Cours de procédure, 6o édition, p. 655, note 77, n° 2; Journal des Avoués, t. 44, p. 197; t. 45, p. 541, etc.)

Nous le demandons: sont-ce les créanciers, sont ce même les débiteurs qui ont profité d'un tel système ?

matière est étendue et difficile, et se lie d'ailleurs à plusieurs points forts importants du Code civil.

- «Eh bien, passons à la vente du mobilier des mineurs?» Le professeur lui indiqua alors, mais fort en abrégé, ce que je vais avoir l'honneur de vous exposer avec quelques détails. Lorsqu'un individu décède laissant au nombre de ses héritiers, des mineurs, n'y en eût-il qu'un seul, les scellés doivent d'abord être apposés. Première opération souvent précédée d'une réquisition d'un créancier ou d'un parent, et qui exige toujours l'entremise du juge de paix et de son greffier, et souvent aussi l'établissement d'un gardien de scellés salarié (1).

On fait ensuite nommer un tuteur et un subrogé-tuteur au mineur (2).

Le premier soin du tuteur doit être de requérir la levée des scellés et de faire procéder à un inventaire en présence du subrogé-tuteur, et successivement à la vente du mobilier dont le conseil de famille n'a pas ordonné la conservation en nature (3).

Les deux premières opérations qui paraissent tout à fait distinctes sont, au contraire, fort souvent réunies, et quelquefois même les trois opérations, parce que d'après la loi (4) les scellés doivent être levés successivement, au fur et à mesure de l'inventaire, et réapposés à la fin de chaque vacation (5).

(1) Code de procédure, art. 909 à 914.

(2) Gode civil, art.405,406, 422; Code de proc., art. 929. (3) Code civil, art. 451, 452.

(4) Code de proc., art. 937, 933.

(5) Ce mot signifie tout à la fois l'action de prendre des vacances (ou de cesser de rendre des jugements), et celle de se livrer à une opération qui exige une certaine partie de la journée. Nous l'employons ici dans ce dernier sens. Comme autrefois presque tous les Français. faisaient un grand repas au milieu de la journée ou vers midi (le dîner), l'opération judiciaire commencée le matin était forcément interrompue; elle pouvait être reprise à deux heures de relevée, ou à deux heures après-midi. (FERRIÈRE, Dictionnaire, mot l'acation.) Voilà, selon toute apparence, ce qui fit diviser une journée absorbée par une même opération, en deux vacations; on exigea seulement que chacune des vacations fût au moins de trois heures (acte de

Or, ces deux premières opérations exigent le concours simultané, 1o du juge de paix et de son greffier pour faire la levée; 2° d'un ou deux notaires pour faire l'inventaire et présider à la vente; 3o d'un ou deux experts pour faire l'estimation des effets (1).

Bien plus, si quelqu'un des héritiers, ou des donataires ou légataires, ou le conjoint survivant, ou l'exécuteur testamentaire se trouve absent, il faut appeler un notaire pour le représenter dans toutes les opérations (2).

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Si la loi n'entendait, dans ce cas, par absents, que ceux qui ont été déclarés tels par des jugements publiés au Moniteur, on pourrait croire que l'entremise de ce notaire serait fort rarement exigée, parce que les héritiers envoyés en possession exercent les droits de l'absent; mais, d'une part, sous l'Empire et au commencement de la Restauration, elle devait l'être fréquemment, vu que, dans presque toutes les familles pauvres, il avait des individus qui avaient péri à l'armée et dont on n'avait point fait déclarer l'absence pour épargner les frais considérables de cette procédure; et, de l'autre, d'après le Code (3), si tous les individus ayant droit d'assister aux opérations ne sont pas présents, il suffit que l'un d'eux soit domicilié à plus de cinq myriamètres de distance pour qu'il soit considéré comme absent, et qu'ainsi l'entremise d'un notaire soit indispensable... Or, cette circonstance se présente souvent dans les mêmes familles; un ouvrier, un artisan, un domestique ne veulent ou ne peuvent pas se déplacer pour assister à des procédures dont

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notoriété de 1692, cité par Ferrière, ib.) pour qué les officiers judiciaires ou ministériels eussent droit à une certaine taxe, parce que beaucoup de taxes étaient fixées à raison de cette portion de temps. On verra plus loin, que les vacations actuelles sont aussi de trois heures; mais depuis que le dîner à été reculé jusque vers cinq ou six heures, et le souper supprimé, au grand désespoir de M. G. D. L. R., il est facile à présent de faire, par journée, trois vacations au lieu de deux.

(1) Code de proć., art. 928, 936, etc.

(2) Code de proc., art. 928, 932.

(3) Code de proc., art. 928 et 942.

le résultat ne leur présente pas des avantages un peu considérables (1).

Ce n'est pas tout: si quelques créanciers, soit par crainte, soit à l'instigation de conseils intéressés et qui ont l'espoir d'être employés par eux dans ces procédures, ont formé des oppositions, il faut joindre un nouveau fonctionnaire aux précédents, car les opposants ont le droit d'être représentés par un mandataire commun (2).

Voilà donc cinq et souvent six officiers rétribués appelés à chaque vacation de l'inventaire (sans parler du gardien des scellés qu'on peut être forcé de conserver).

La durée de chaque vacation est fixée à trois heures (3), de sorte que, pour peu qu'un de ces fonctionnaires manque d'exactitude (et ce défaut n'est assurément pas rare), il est bien difficile qu'à chaque première vacation d'une journée on fasse beaucoup d'ouvrage; et pour peu aussi que l'un d'eux soit interrompu par quelque affaire imprévue ou urgente, la vacation pendant laquelle elle surviendra en devra également beaucoup

souffrir.

Il suffit de ce simple coup d'œil pour pressentir qu'avec ce système de procédure imaginé pour protéger les mineurs, on absorbera une grande partie de leur fortune, si elle ne consiste qu'en meubles, et surtout en meubles de peu de valeur.

Telle est précisément la position d'un nombre immense de familles appartenant aux classes pauvres, ou même peu aisées. Quelle est leur fortune? pour l'ordinaire un mobilier, et trop souvent un chétif mobilier.

En temps de paix, où, les absents étant moins nombreux, on est souvent dispensé d'avoir recours au notaire qu'on appelle si inutilement pour les représenter, les inconvénients de ce

(1) Et qui les exposent d'ailleurs à faire des dépenses dont ils ne peuvent pas espérer le remboursement, telles que celles des voyages, des consultations, etc., etc.

(2) Code de proc., art. gỗ2.

(3) Tarif des dépens on décret du 16 février 1807, art. 94 et 168, A l'égard de ce qu'on entend par vacation, voir page 396, note 5.

système sont sans doute un peu moins graves, mais ils le sont encore beaucoup trop.

Je dis qu'on appelle inutilement un notaire pour représenter les absents; c'est que, dans la pratique, ce notaire ne paraît presque jamais, et n'en est pas moins rétribué; et c'est ici le cas d'observer que ce système de procédure, déjà si vicieux dans sa théorie, l'est encore plus dans la pratique, à moins que les hommes appelés à ces opérations ne soient tous des hommes généreux et désintéressés, ce qui peut se rencontrer quelquefois, mais ce que l'on ne doit pas toujours espérer (1).

C'est ce que je vais prouver par deux exemples. J'insisterai peu sur le premier, parce que, bien que je le tienne d'un magistrat grave (un procureur général), je n'ai pas vérifié les faits moi-même sur les actes.

Il s'agissait de l'inventaire d'un ancien directeur d'hôpitaux d'armées, qui avait une manie, assez fréquente chez les gens de cabinet, celle de conserver ce qu'on nomme des papiers. Il avait emporté non-seulement les registres relatifs à sa comptabilité, mais encore tous les billets d'entrée et de sortie de ses hôpitaux.... ou peut-être avait-il eu le projet de vendre au poids ces billets que les registres rendaient complétement inutiles, d'autant mieux que son service remontait à plusieurs années (2)........ L'inventaire, c'est-à-dire la description de ses registres et leurs cotes et pagination exigèrent à peine deux ou trois vacations. Le notaire ne se borna point là: il inventoria

(1) Voyez une des notes suivantes (1, p. 403).

(2) ◄ Les billets d'entrée et de sortie ne servent pas à autre chose qu'à justifier les journées de traitement. Après la liquidation de la comptabilité, ils restent deux ans dans les archives des Intendants (autrefois les Ordonnateurs), après quoi ils sont détruits. Les registres d'entrée et de sortie sont visés chaque mois et arrêtés chaque trimestre, par les sous-inten dants... Si ce directeur avait gardé les premières de ces pièces, c'est parce que dans ce temps-là il y avait peu d'ordre dans la vérification et la liquidation des dépenses; mais il est évident que ces pièces étaient absolument inutiles.» Lettre de M. H. Berriat, maire de Grenoble, ancien sous-intendant militaire, auteur de la Législation militaire (8 vol. in-8°, Paris, ches Ancelin).

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