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raisons de droit eussent seules milité en faveur du défendeur, et si de hautes raisons d'économie politique n'étaient pas venues leur prêter appui. Il est incontestable en effet qu'à une époque où les sociétés commerciales, et surtout les sociétés actions, anonymes ou en commandite, prennent un si grand développement, il y aurait de nombreux inconvénients à subordonner la stabilité des statuts sociaux aux variations journalières qui peuvent survenir dans l'état et dans la capacité des porteurs d'actions. Les prévisions des actes constitutifs des sociétés qui n'ont rien stipulé sans dessein, et qui sont présumés avoir été rédigés dans l'intérêt, sinon de tous, du moins du plus grand nombre, seraient à chaque instant trompées, et il résulterait de là que les sociétés par actions, ne méritant plus la même confiance, ne jouiraient plus de la faveur qui leur est né

cessaire.

En droit, la difficulté consistait surtout à savoir si la cause qui porte renonciation à l'appel est un compromis. Si l'affirmative eût été prouvée, il est clair que l'art. 1013 C. P. C. aurait tranché la question. Mais on a soutenu, contrairement à cette question, que la renonciation à l'appel du jugement d'une juridiction imposée par la loi (et tels sont les arbitres forcés en matière de société) ne constitue pas un compromis; et, d'un autre côté, que la disposition de l'art. 52 C. Comm., qui autorise la renonciation à l'appel, en matière d'arbitrage forcé, étant rendue commune aux veuves et héritiers sans distinction par l'art. 62, il n'y avait pas lieu de considérer cette renonciation comme un compromis qui dût prendre fin par le décès de l'un des associés, bien qu'il laissât des enfants mineurs.

Ce système, qui est celui de l'arrêt, est assurément fort contestable, car il est difficile de ne pas considérer la renonciation à l'appel comme un compromis, si l'on fait attention que le compromis n'est pas seulement l'acte par lequel des parties choisissent d'autres juges que ceux qui leur sont donnés par la loi, mais encore l'acte par lequel les parties confèrent aux juges des pouvoirs plus étendus que ceux que la loi a tracés et définis. Quant au Code de commerce, l'art. 52, tout en autorisant la renonciation à l'appel, ne dit pas que cette renonciation ne constitue pas un compromis; et l'art. 62, qui soumet les veuves et héritiers aux effets de cette renonciation, ne dit pas (ce qui avait peut-être besoin d'être dit en présence de l'art. 1013 C. P. C.) que les mineurs seront obligés de subir cette. renonciation.

La question est donc au moins fort douteuse, et une consultation de M. Pardessus, délibérée dans le sens du pourvoi, en fait sentir toute l'importance.

Au surplus, s'il y a doute, on ne peut blâmer la Cour de Cassation d'avoir adopté le système qui se trouve le plus en

harmonie avec les intérêts de l'industrie et de l'esprit d'association qui est devenu un des plus puissants moyens de perfectionnement de notre époque.

Succession.

COUR ROYALE DE BOURGES.

Partage.

Créancier opposant. Réserves générales. Lorsqu'un créancier qui a déclaré s'opposer au partage d'une succession, dans le cas prévu par l'art. 882 C. C., s'est horné, en comparaissant en l'étude du notaire liquidateur, à faire des protestations el réserves générales sans attaquer les bases de la liquidation, il n'est plus recevable à la critiquer, après qu'elle est consommée.

(Bergerioux C. veuve et héritiers Jouffin.) ARRÊT.

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LA COUR; Considérant que la veuve et les héritiers Jouffin, étant tous majeurs et présents, avaient bien le droit de faire un partage et une liquidation amiables; qu'à la vérité, l'appelant étant créancier de l'un des copartageants, avait aussi le droit d'intervenir au partage, mais qu'il a été mis en demeure de se trouver en l'étude du notaire liquidateur, et qu'il n'a dépendu que de lui de faire sur l'opération les diverses observations qu'il était autorisé à faire dans son intérêt ; qu'au lieu d'en agir ainsi et de contester les bases de la liquidation ou de demander un délai pour les examiner, il s'est borné à des protestations et réserves générales, sans pré. ciser aucune erreur ou aucun grief; qu'une semblable opposition ne suffirait pas pour remplir le vœu de la loi, et qu'il n'est plus à temps pour faire la critique d'une opération à laquelle il avait été requis de prendre part ; Considérant que l'appel a prorogé le délai pendant lequel les fonds provenant de la vente des immeubles et déposés chez le notaire, sont restés improductifs et que les partageants ont par suite fait une perte réelle;

Dit bien jugé, mal appelé; ordonne l'exécution du jugement de première instance; faisant droit sur les conclusions incidentes des intimés, condamne Bergerioux envers eux à des dommages-intérêts à porter par

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1o L'enquête ordonnée pour faire preuve d'une prescription trentenaire peut servir à faire preuve d'une prescription de dix et vingt

ans..

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20 Les juges ne sont pas liés par un interlocutoire, encore qu'il ait été confirmé sur l'appel (1).

(1) V. Dict. gén. DE PR., vo Jugement, p. 382 bis, no 164.

LA COUR;

(Lautour C. Duquesnel.) ARRÊT.

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Sur le premier moyen, fondé sur la violation de l'art. 2265 C. C., et des art. 252, 255 et 256 C. P. C. : Attendu que le jugement interlocutoire du 2 févrir 1830 avait ordonné le transport d'un juge de paix sur les lieux, à l'effet de constater si le terrain litigieux était séparé de la propriété du sieur Lautour, ou s'il n'avait accès que du côté du moulin Gottard, et avait autorisé le juge-commissaire à entendre des témoins sur les faits de possession articulés par Duquesnel et ses enfants; - Attendu que le jugement, confirmé par l'arrêt attaqué, constate que, des opérations du juge, il est résulté que le terrain dont il s'agit est séparé du parc du sieur Lautour par un mur à deux égouts, construit par Charles Duquesnel en 1793; que ce mur empêche qu'on puisse accéder au parc; qu'il est, au contraire, ouvert et accessible du côté du moulin Cottard, et qu'il a toujours subsisté dans cet état depuis la construction du mur; Attendu que le tribunal de première instance et la Cour royale n'ont fait qu'une juste application de ces faits, en déclarant que le terrain dont il s'agit avait été compris comme dépendance du moulin Cottard, dans la vente faite par Charles Duquesnel à Jean-Pierre-Germain Duquesnel et sa femme, par le contrat du 5 juillet 1803, et que ces derniers étaient en possession dudit terrain, depuis plus de vingt ans, à l'époque de la demande en revendication formée par Lautour; Attendu enfin que, soit du point de fait, soit des questions posées dans l'arrêt attaqué, il ne résulte pas que Lautour ait contesté la bonne foi de cette possession;

-

Sur le deuxième moyen, fondé sur la violation des art. 1350 et 1351 C. C.: Attendu que le jugement du 2 février 1830 ne contient, dans son dispositif, que des dispositions interlocutoires, qui n'ont pu lier ni le tribunal de première instance, ni la Cour royale ;

REJETTE.

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COUR ROYALE DE POITIERS.

Désistement. Conclusions modifiées. - Forme. - Dernier ressort.

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1o Lorsque le demandeur, modifiant ses conclusions premières, déclare par acte d'avoué à avoué qu'il renonce à un chef de sa demande introductive d'instance, ces conclusions nouvelles ne sont pas assujetties aux formalités prescrites par les art. 402 et 403 relatifs au désistement.

2o Le taux du dernier ressort se détermine, non par la demande originaire, mais par les dernières conclusions.

(Héritiers Bouthet-Durivault C. Arnault.) ·

Le 7 mars 1836 les héritiers Bouthet-Durivault ont assigné, sans préliminaire de conciliation, le sieur Arnault, devant le Tribunal civil de Poitiers, pour le faire condamner 1o au paieinent de sept années d'arrérages d'une rente foncière de 40 fr.; 2o et au fournissement d'un titre nouvel de ladite rente.

Le sieur Arnault comparaît et soutient que cette demande ne peut être reçue, attendu qu'elle n'avait pas été précédée du préliminaire de la conciliation.

En cet état de choses, les héritiers Bouthet-Durivault signifient un acte d'avoué à avoué, non signé d'eux, par lequel ils déclarent se désister du second chef de leur demande.

Le sieur Arnault n'accepte pas le désistement,

L'affaire portée à l'audience, les héritiers Bouthet-Durivault concluent à avoir acte de leur désistement, pour s'en tenir au paiement des arrérages réclamés.

Le sieur Arnault, de son côté, conclut à ce qu'il plaise au tribunal déclarer l'action des héritiers Bouthet-Durivault nulle ou du moins non recevable, et les condamner aux dépens.

Jugement du 5 décembre 1826, par lequel le tribunal, sans s'arrêter ni avoir égard aux moyens présentés par le sieur Arnault, ordonne que les parties plaideront au fond. Appel.

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ARRÊT.

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LA COOR; Considérant que, dans l'espèce, il n'y a eu en première instance, de la part des héritiers Bouthet-Durivault, que modifications dans les conclusions prises par l'exploit introductif de l'instance; que cette modification, autorisée par l'art. 33 du décret d'administration publique du 30 mars 1808, n'était pas assujettie aux formalités prescrites par les art. 402 et 403 C. P. C., relatifs au désistement d'une demande ou action Considérant que, par cette modification, le litige s'est trouvé réduit à une somme de 280 fr.;

Que ce sont les conclusions, réduites et prises à l'audience, qui donnent au jugement le caractère de premier ou derniér ressort;

Que le jugement du 5 décembre 1826, dont est appel, se trouve, d'après cela, rendu en dernier ressort, et que l'appel n'en est pas recevable; d'où il suit que la Cour ne peut s'occuper des fins de non-recevoir que le sieur Arnault a proposées contre la demande des héritiers Bouthet-Durivault; ➡ Déclare l'appel non recevable.

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G

Arrestation provisoire. →→ Com

C'est devant le tribunal par voie d'action principale, et non par voie d'appel devant la Cour royale, que doit être portée la demande en nullité de l'arrestation provisoire autorisée contre un étranger par ordonnance du président du tribunal (1).

(1) V. en sens contraire, J. A., t. 39, p. 365.

(Orenze C. Durou et autres.)

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Voici en quels termes la Cour royale de Bordeaux avait statué sur cette question par arrêt du 6 décembre 1833 : « Attendu que l'arrestation provisoire du débiteur étranger dans les cas prévus par la loi, est une garantie extraordinaire accordée au créancier français; Que cette mesure ne peut avoir d'effet qu'autant qu'elle est prise et exécutée avec secret et célérité; qu'elle fut considérée comme mesure de police par l'orateur du gouvernement chargé d'exposer les motifs de la loi du 10 septembre 1807, lequel fit encore observer qu'il ne fallait pas y faire intervenir tout l'appareil judiciaire; - Attendu que la loi attribue spécialement au président du tribunal civil le pouvoir de statuer sur la demande du créancier, d'en juger les motifs, et d'ordonner l'arrestation provisoire de l'étranger; que, par conséquent, la décision de cette question n'est point soumise au tribunal, mais seulement au magistrat qui le préside; qu'il faut en conclure que dans cette circonstance le tribunal civil n'est point appelé à connaître de l'ordonnance rendue par son président; qu'il est incompétent pour la réformer, et que la voie de l'appel est la seule régulière; faisant droit de l'appel interjeté par Vasquez et Cie du jugement rendu par le tribunal de Bordeaux le 21 mai 1832, annule ledit jugement comme incompétemment rendu. »

-

ARRÊT.

LA COUR; Vu la loi du 1er mai 1790, l'art. a de la loi du 10 septembre 1807, et l'art. 443 C. P. C.; Attendu que l'ordonnance pour l'arrestation provisoire d'un étranger, énoncée en l'art. 2 de la loi du 10 septembre 1807, n'est qu'une mesure facultative abandonnée à la prudence des présidents des tribunaux civils, qui examinent si la créance du Français sur l'étranger est échue ou exigible, et s'il y a des motifs suffisants pour ordonner l'arrestation; que cette ordonnance est accordée aux risques et périls du Français qui la réclame, et sans que l'étranger soit entendu et appelé; qu'elle n'est pas rendue avec l'accomplissement des formalités prescrites pour les jugements et n'en offre pas les garanties, et qu'elle est dès lors dépourvue des éléments constitutifs d'un jugement en première instance; que si, par des considérations d'intérêt national, la loi du 10 septembre 1807 s'est écartée des principes tutélaires du droit commun, à l'égard des étrangers débiteurs envers des Français, les dispositions de cette loi, loin d'être étendues, doivent être rigoureusement restreintes au cas qu'elle a prévu; - Qu'il suit de là, qu'une fois l'arrestation provisoire opérée, ou la caution offerte acceptée, l'étranger peut réclamer par les voies de justice ordinaires, et en jouissant comme le Français du double degré de juridiction, contre les effets de la mesure préventive dont il a été l'objet, et demander, en conséquence, ou sa mise en liberté, ou la décharge de la cantion qu'il a fournie, ou des dommages-intérêts; que sa réclamation constitue

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