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d'expirer; aux malades, ou à ceux qui ont des empêchements légitimes; à ceux qui n'ont point commis de crimes; à ceux qui n'en ont commis que de secrets, et à ceux qui pratiquent les œuvres de la plus haute perfection;

« 23° Les excommunications ne sont que des peines extérieures, qui ne privent pas l'homme de la participation aux prières spirituelles et publiques de l'Église ;

« 24° Il faut enseigner aux chrétiens à plus aimer les excommunications qu'à les craindre;

<< 25° Le Pontife romain successeur de saint Pierre, n'a pas été établi par Jésus-Christ son vicaire sur toutes les églises dans la personne de saint Pierre;

«26° Cette parole du Christ à Pierre: Tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, s'étend seulement à ce qui a été lié par Pierre même ;

<< 27° Il est certain qu'il n'est pas au pouvoir de l'Église ou du Pape d'établir des articles de foi, ni même des lois touchant les mœurs et les bonnes œuvres ;

28° Si le Pape, avec une grande partie de l'Église, avait décidé telle et telle chose, et que sa décision fût véritable, il n'y aurait ni péché ni hérésie de penser le contraire, principalement dans une chose non nécessaire au salut, jusqu'à ce que le concile général eût approuvé un sentiment et condamné l'autre ;

« 29° Nous avons une voix pour expliquer l'autorité des conciles, et contredire librement leurs actes, et juger dans leurs décrets, et avouer avec confiance tout ce qui semble véritable, qu'un concile l'ait approuvé ou rejeté ;

«<30° Quelques articles de Jean Huss, condamnés dans le concile de Constance, sont très-orthodoxes, très-vrais et

tout à fait évangéliques, et l'Église universelle ne pouvait les censurer;

31° Le juste pèche dans toutes les bonnes œuvres ;

32° Une bonne œuvre, même très-bien faite, est un péché véniel;

« 33° Que les hérétiques soient brûlés, c'est contre la volonté de l'esprit ;

« 34° Combattre contre les Turcs, c'est résister à Dieu qui visite par eux nos iniquités.

« 35° Personne n'est certain qu'il ne pèche pas toujours mortellement, à cause du vice très-caché de l'orgueil;

« 36° Le libre arbitre, depuis le péché, n'est plus qu'un vain titre; et lors même qu'il fait ce qui est en lui, il pèche mortellement;

« 37° On ne peut prouver le purgatoire par aucun livre canonique de l'Écriture sainte;

« 38° Les âmes qui sont en purgatoire ne sont point assurées de leur salut, du moins toutes; et l'on n'a pu prouver par aucune raison, ni par l'Écriture, qu'elles y soient hors d'état de mériter et de croître en grâce et en charité;

« 39° Les âmes en purgatoire pèchent sans interruption tant qu'elles cherchent le repos et qu'elles ont horreur des peines;

« 40° Les âmes délivrées du purgatoire par les suffrages des vivants ne jouissent pas d'un bonheur aussi parfait que si elles satisfaisaient par elles-mêmes à la justice divine;

« 41° Les prélats ecclésiastiques et les princes séculiers ne feraient point mal s'ils abolissaient toutes les besaces des mendiants.

« Nous donc, ajoute le Pape, après de longs, de mûrs, de soigneux examens, discussions et délibérations avec nos frères les cardinaux, des princes ou généraux d'ordres, des professeurs ou docteurs en théologie, ainsi que dans l'un et l'autre droit, nous avons trouvé lesdites propositions hérétiques ou scandaleuses, etc., ou non catholiques, mais contraires à la doctrine et à la tradition de l'Église, à l'interprétation vraie et commune des divines Écritures, dont l'autorité mérite à tel point notre acquiescement, suivant saint Augustin, que lui-même dit : qu'il n'aurait pas cru à l'Évangile si l'autorité de l'Église catholique n'était intervenue. Car, de ces mêmes erreurs, ou de quelques-unes, il s'ensuit que la même Église qui est régie par l'EspritSaint, erre et a toujours erré. Ce qui est contraire à la promesse que le Christ a faite à ses disciples en son ascension: Voici que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles; contraire encore aux déterminations des saints Pères, aux ordonnances expresses ou canons des conciles et des souverains Pontifes, à qui ne pas obéir a été toujours, au témoignage de saint Cyprien, le foyer et la cause de toutes les hérésies et de tous les schismes. >>

En conséquence, de l'avis et de l'assentiment des cardinaux, après mûre délibération sur chacun desdits articles, par l'autorité du Dieu tout-puissant, ainsi que des bienheureux apôtres Pierre et Paul, et par la sienne, le pape Léon X condamne ces propositions comme respectivement hérétiques ou scandaleuses, ou fausses, ou choquant les oreilles pieuses, ou capables de séduire l'esprit des simples, et contraires à la vérité catholique; fait défense, sous les peines d'excommunication et de privation de toutes dignités qui seront encourues par le seul fait de croire ces propositions,

de les soutenir, de les défendre, et même de les favoriser, de les prêcher, et de souffrir que d'autres les enseignent directement ou indirectement, tacitement ou en terme exprès, en public ou en particulier : ordonnant aux ordinaires et autres de faire une exacte perquisition des écrits qui contiennent ces propositions, et de les faire brûler solennellement en présence du clergé et devant tout le peuple, sous les mêmes peines. »

Le Pape expose ensuite tout ce qu'il a fait pour ramener Luther et lui faire quitter ses erreurs; il l'a cité à Rome, voulant le traiter avec beaucoup de douceur; il l'a exhorté par ses légats et par ses lettres à rentrer en lui-même; il lui a offert un sauf-conduit et de l'argent pour les frais du voyage, en lui promettant toute sûreté, persuadé que s'il eût fait cette démarche, il aurait reconnu sincèrement ses erreurs, et ne se serait pas si furieusement emporté contre la cour de Rome, qu'il a déchirée par les plus insignes calomnies. Mais, au mépris de tout cela, il a dédaigné de venir, est demeuré contumax plus d'un année sous les censures, et ajoutant le mal au mal, a témérairement appelé au futur concile, contrairement aux constitutions de Pie II et de Jules II, qui ont déclaré ces appels punissables des peines imposées aux hérétiques: appellation d'ailleurs illusoire, puisqu'il professe publiquement ne pas croire au concile. Le Pape pourrait donc dès à présent le condamner comme notoirement suspect sur la foi, ou plutôt vraiment hérétique.

<< Toutefois, de l'avis de nos frères, dit-il, imitant la clémence du Seigneur, qui ne veut point la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive; oubliant tous les outrages faits à nous et au Siége apostolique, nous avons

résolu d'user de toute la bonté possible, et de faire tout ce qui est en nous pour que, par la voie de miséricorde que nous lui proposons, il revienne à lui-même et qu'il s'éloigne de ses erreurs, afin que nous le recevions avec bienveillance comme l'enfant prodigue revenant au sein de l'Église. C'est pourquoi, et Martin lui-même, et tous ses adhérents protecteurs et fauteurs, nous les conjurons par les entrailles de la miséricorde de notre Dieu et par le sang de NotreSeigneur Jésus-Christ, en qui et par qui ont été faites la rédemption du genre humain et l'édification de la sainte Église notre mère; nous les exhortons et les conjurons de tout notre cœur de cesser de troubler la paix, l'unité et la vérité de l'Église, pour laquelle le Sauveur lui-même a prié si instamment son Père, et de s'abstenir entièrement desdites erreurs si pernicieuses; assurés de trouver auprès de nous, s'ils obéissent réellement et nous donnent des preuves légitimes de leur obéissance, les sentiments de la charité paternelle et la fontaine ouverte de la mansuétude et de la clémence. »

Après ces voies miséricordieuses du père, Léon X passe aux voies sévères du juge. Il interdit provisoirement la prédication à Luther. Et si les précédents moyens de douceur ne le ramènent pas à pénitence, il lui fixe, à lui et à ses adhérents, trois termes de vingt jours, soixante en tout, pour rétracter ses erreurs et brûler les livres qui les contiennent. Que si, ce qu'à Dieu ne plaise! Luther et ses partisans s'obstinaient, le Pape, suivant le précepte de l'Apôtre d'éviter l'homme hérétique, après une première et une seconde sommation, les déclare hérétiques notoires et opiniâtres; condamne tous les écrits de Luther, avec défense de les imprimer, vendre ou lire; soumet Luther et ses adhé

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