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La répartition faite par les experts ou dispacheurs est rendue exécutoire par l'homologation du tribunal de commerce. Dans les ports étrangers, la répartition est rendue exécutoire par le consul de la République, ou à son défaut, par tout tribunal compétent sur les lieux.

5. Délaissement et cas dans lesquels il peut avoir lieu. Le délaissement est l'abandon des objets compris dans l'assurance, que l'assuré fait à l'assureur, après un sinistre. Le délaissement est fait lorsqu'il y a perte totale ou presque totale; il comporte l'abandon de ce qui reste des choses assurées et de tous les droits qui se rattachent à ces choses, à charge par l'assureur de payer, dans le délai convenu, la somme entière, portée dans la police d'assurance.

Le délaissement peut avoir lieu pour la perte des trois quarts; il peut être fait, aux termes de l'art. 369 du Code de commerce, en cas de prise, de naufrage, d'échouement avec bris, d'innavigabilité par fortune de mer, en cas d'arrêt d'une puissance étrangère, en cas de perte ou détérioration des objets assurés, si la détérioration ou la perte va au moins aux trois quarts; il peut être fait, en cas d'arrêt de la part du gouvernement, après le voyage commencé.

A ces cas de délaissement il faut ajouter le défaut de nouvelles. Tous autres dommages, porte l'art. 371 du Code de commerce, sont réputés avaries. Toutefois, la police d'assurance peut, soit étendre le délaissement à des cas non prévus par la loi, soit stipuler que le délaissement n'aura pas lieu dans certains cas où la loi l'autorise. La jurisprudence admet cette réserve que, même si l'on stipule certains cas de délaissement, il faut toujours qu'il soit justifié d'une perte totale ou au moins des trois quarts. Ainsi on ne pourrait, par la convention, étendre le délaissement à de simples avaries.

Le délaissement ne peut être fait avant le voyage commencé, c'est-à-dire avant que la chose ait été mise en risque (V. Assurances maritimes); il doit être total et fait sans conditions.

Le délaissement par suite du défaut de nouvelles s'exerce dans le cas indiqué par l'art. 375 du Code de commerce: Si après six mois expirés, à compter du jour du départ du navire, ou du jour auquel se rapportent les dernières nouvelles reçues, pour les voyages ordinaires; après un an, pour les voyages de long cours, l'assuré déclare n'avoir reçu aucune nouvelle de son navire, il peut faire le délaissement à l'assureur et demander le paiement de l'assurance, sans qu'il soit besoin d'attestation de

la perte. Après l'expiration de six mois ou un an, l'assuré a, pour agir, les délais établis par l'art. 373 dont nous donnons le texte plus bas.

Le délaissement du navire comporte celui du fret, qu'il ait été payé d'avance ou qu'il reste dû.

6. Délais et formes du délaissement. Aux termes de l'art. 373 du Code de commerce, le délaissement doit être fait aux assureurs dans le terme de six mois, à partir du jour de la réception de la nouvelle de la perte arrivée aux ports ou côtes de l'Europe, ou sur celles d'Asie ou d'Afrique, dans la Méditerranée, ou bien, en cas de prise, de la réception de celle de la conduite du navire dans l'un des ports ou lieux situés aux côtes ci-dessus mentionnées. Dans le délai d'un an, après la réception de la nouvelle ou de la perte, ou de la prise conduite en Afrique, en deça du cap de Bonne-Espérance ou en Amérique, en deça du cap Horn. Dans le délai de dix-huit mois, après la nouvelle des pertes arrivées ou des prises conduites dans toutes les autres parties du monde. Et ces délais passés, les assurés ne sont plus recevables à faire le délaissement.

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L'art 376 ajoute: Dans le cas d'une assurance pour temps limité, après l'expiration des délais établis, comme ci-dessus, pour les voyages ordinaires, et pour ceux de long cours, la perte du navire est présumée arrivée dans le temps de l'assurance.

Sont réputés voyages au long cours ceux qui se font au delà des limites ci-après déterminées au sud, le 30° degré de latitude Nord; à l'ouest, le 15° degré de longitude du méridien de Paris; à l'est, le 44° degré de longitude du méridien de Paris.

Les délais d'ouverture du délaissement, en cas d'arrêt de prince, sont ainsi fixés par l'art. 387: En cas d'arrêt de la part d'une puissance, l'assuré est tenu de faire la signification à l'assureur, dans les trois jours de la réception de la nouvelle. Le délaissement des objets arrêtés ne peut être fait qu'après un délai de six mois de la signification, si l'arrêt a eu lieu dans les mers d'Europe, dans la Méditerranée ou dans la Baltique; qu'après le délai d'un an, si l'arrêt a eu lieu en pays plus éloigné. Ces délais ne courent que du jour de la signification de l'arrêt. Dans le cas où les marchandises arrêtées seraient périssables, les délais ci-dessus mentionnés sont réduits à un mois et demi pour le premier cas, et à trois mois pour le second cas.

Pendant les délais portés par l'article précédent, ajoute l'art. 388, les assurés sont tenus de faire toutes diligences qui peu

vent dépendre d'eux, à l'effet d'obtenir la mainlevée des effets arrêtés. Pourront, de leur côté, les assureurs, ou de concert avec les assurés, ou séparément, faire toutes démarches à même fin.

Les délais de l'art. 387 sont applicables au cas d'innavigabilité.

L'obligation d'intenter l'action en délaissement dans les délais précités, s'entend d'une action en justice et non d'une simple déclaration par acte judiciaire.

Dans le cas d'innavigabilité, le délai court, non du jour de la nouvelle du sinistre, mais du jour où le jugement déclarant l'innavigabilité a été connu de l'assuré.

En cas de perte ou détérioration des trois quarts, le délai court du jour de la clôture du procès-verbal d'expertise, et non du jour de la réception de la nouvelle.

Le délaissément de marchandises pour perte des trois quarts, même dans les délais légaux, pourrait être déclaré non recevable, si l'assuré était présumé avoir renoncé à ce droit, en recevant les marchandises avariées, sans faire la protestation prescrite par la loi (V. ci-dessus). Mais la protestation résulterait, par exemple, d'une requête afin de nomination d'expert.

L'assureur qui a fait réassurer le risque, est soumis, pour le délaissement, aux délais imposés à l'assureur primitif,

Dans le cas où le délaissement peut être fait, et dans le cas de tous autres accidents aux risques des assureurs, l'assuré est tenu de signifier à l'assureur les avis qu'il a reçus. La signification doit être faite dans les trois jours de la réception de l'avis.

L'assuré peut, par la signification, ou faire le délaissement, avec sommation à l'assureur de payer la somme assurée dans le délai fixé par le contrat, ou se réserver de faire le délaisscment dans les délais de la loi. La signification est suivie d'un action judiciaire en délaissement, dans les délais indiqués cidessus.

Les actes justificatifs du chargement et de la perte sont signifiés à l'assureur, avant qu'il puisse être poursuivi pour le paiement des sommes assurées. Cependant la signification des actes justificatifs avant les poursuites n'est pas exigée à peine de nullité; elle peut être faite au cours de l'instance.

L'assuré est encore tenu, en faisant le délaissement, de déclarer toutes les assurances qu'il a faites ou fait faire, même celles qu'il a ordonnées et l'argent qu'il a emprunté à la grosse,

soit sur le navire, soit sur les marchandises; faute de quoi, le délai du paiement, qui doit commencer à courir du jour du délaissement, sera suspendu jusqu'au jour où il fera notifier la déclaration, sans qu'il en résulte aucune prorogation du délai établi pour former l'action en délaissement.

En cas de déclaration frauduleuse, l'assuré est privé des effets de l'assurance; il est tenu de payer les sommes empruntées, nonobstant la perte ou la prise du navire.

Si le navire a été déclaré innavigable, l'assuré sur le chargement est tenu d'en faire la notification à l'assureur, dans les trois jours de la réception de la nouvelle.

Après la signification du délaissement par l'assuré et avant que l'assureur l'ait accepté ou qu'il ait été ordonné judiciairement, il peut s'écouler un certain temps pendant lequel le navire est mis en état de séquestre judiciaire. Dès lors, l'assureur qui ordonnerait les réparations nécessaires serait présumé avoir accepté le délaissement; mais il peut, par requête au juge, faire ordonner toutes mesures conservatoires.

Si l'époque du paiement n'est pas fixée par le contrat, l'assureur est tenu de payer l'assurance trois mois après la signification du délaissement. Le paiement est fait au porteur de la police d'assurance, déduction faite de la prime qui peut être due.

La procédure à laquelle peut donner lieu la vérification du sinistre est souvent longue. Aussi cette procédure ne suspend-elle pas le droit de l'assuré de demander contre l'assureur le paiement d'une provision, à charge de fournir caution.

Par suite du délaissement accepté ou jugé valable, les effets assurés appartiennent à l'assureur à partir de l'époque du délaissement. L'assureur ne pourrait même, sous prétexte de retour du navire, se dispenser de payer la somme assurée.

Le délaissement a encore pour effet de subroger l'assureur dans tous les droits de l'assuré sur les choses délaissées, et cette subrogation a lieu de plein droit.

7.- Prescriptions en matière d'avaries et de délaissement. Nous avons vu plus haut les délais dans lesquels l'assuré doit faire toutes protestations, toutes notifications et intenter l'action en délaissement, à peine de déchéance.

L'action d'avarie se prescrit par cinq ans.

En dehors de ces recours qui s'exercent de l'assuré à l'assureur, ou du destinataire des marchandises avariées au capitaine qui en fait la délivrance, le destinataire peut être en droit

d'exercer contre le capitaine l'action en délivrance, dont le caractère est tout différent. Cette action se prescrit par un an, aux termes de l'art. 433 du Code de commerce. Ainsi, un an après l'arrivée des marchandises, l'armateur, le capitaine et les gens de l'équipage sont déchargés de toute responsabilité, en ce qui concerne la délivrance des marchandises.

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8. Compétence en matière d'avaries et de délaissement. La constatation et le réglement des avaries entre les propriétaires du navire ayant le capitaine pour mandataire, et les propriétaires du chargement, sont de la compétence des juges du lieu de débarquement, dit aussi lieu de destination ou de reste. L'attribution de compétence au lieu de débarquement s'explique par cette considération que l'action d'avarie est une action réelle (V. Action). Le destinataire agit comme propriétaire de la chose, et non comme cessionnaire des droits du chargeur.

L'état des pertes et dommages, dispose l'art. 414 du Code de commerce, est fait dans le lieu du déchargement du navire, à la diligence du capitaine et par experts. Les experts sont nommés par le tribunal de commerce, si le déchargement se fait dans un port français. Dans les lieux où il n'y a pas de tribunal de commerce, les experts sont nommés par le juge de paix. Ils sont nommés par le consul de la République, et à defaut, par le magistrat du lieu, si la décharge se fait dans un port étranger.

Il suit de là que le réglement des avaries ne pourrait se faire au port de relâche. Cependant la disposition de l'art. 414 n'est pas tellement rigoureuse que le capitaine ne puisse porter le réglement d'avaries devant les juges du départ, lorsqu'il justifie d'une impossibilité résultant de la force majeure de faire ce règlement au port de destination. Il en est de même dans le cas où le destinataire refuse de prendre livraison; car le motif qui faisait attribuer la compétence aux juges du lieu de destination n'existe plus; il en est de même, enfin, si, d'après la législation en vigueur au lieu de destination, l'action d'avarie n'est pas recevable dans les mêmes termes qu'en droit français.

Les règles que nous venons de poser ne s'appliquent pas au recours de l'assuré contre l'assureur; l'action d'avarie, dirigée contre ce dernier est purement personnelle, et doit ainsi être portée, suivant le droit commun, devant les juges du domicile du défendeur (V. Action, Compétence en matière commerciale).

Cependant le règlement d'avaries communes, fait au port

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