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Le commettant fixe quelquefois le prix du transport; dans ce cas, le commissionnaire qui traite de l'expédition ne peut excéder ce prix, à charge de tenir compte de la différence.

Si le commissionnaire possède des marchandises correspondant à l'objet de la demande, il peut les appliquer à l'exécution d'un ordre d'achat; mais il doit informer préalablement son commettant de cette application; sinon, les marchandises peuvent lui être laissées pour compte.

Il a été jugé que le commissionnaire n'est pas en droit, même lorsqu'il a fait l'achat en son nom personnel, de poursuivre contre le vendeur l'exécution du marché par la livraison, si son commettant ne réclame aucunement cette exécution. Le commettant seul peut, par son action contre le commissionnaire, justifier l'action en dommages-intérêts de celui-ci contre le vendeur.

Du jour où le commissionnaire aux achats a pris livraison, la commission est exécutée; dès lors, la marchandise est aux risques du commettant, et la perte est pour son compte. Cependant, si le transport exigeait des précautions toutes particulières à la nature de la marchandise, et qu'ainsi le mandat du commissionnaire n'eût pas pris fin, la perte ou les avaries seraient supportées par le commissionnaire.

Si le marché comporte certaines avances, le commettant doit en couvrir le commissionnaire par un envoi de fonds ou des remises de valeurs. Le commettant ne pourrait exiger du commissionnaire qu'il se couvrit par des traites tirées sur lui et acceptées; car le protêt, faute de paiement, peut l'exposer à un recours et même à des poursuites.

7. Obligations du commissionnaire envers les tiers. - Le commissionnaire, lorsqu'il s'oblige personnellement, soit comme acheteur, soit comme vendeur, est toujours censé, vis-àvis des tiers, avoir fait l'opération pour son propre compte, de telle sorte qu'il peut opposer à un tiers la compensation d'une dette contractée envers lui pour le compte de son commettant, avec une autre dette qui lui est absolument personnelle; réciproquement, il ne peut refuser la compensation d'une créance qui lui est personnelle avec une dette qu'il a souscrite pour le compte d'un commettant.

8. Droit de commission, ducroire et remboursement des frais, pertes et avaries. Le commettant est tenu de payer au commissionnaire les droits de commission, y compris le ducroire, s'il a été stipulé, de le rembourser de tous

ses frais et avances, et même de l'indemniser des pertes que l'accomplissement de son mandat a pu lui causer, toutes les fois qu'aucune imprudence n'est imputable au commissionnaire.

Le commissionnaire, de son côté, est en droit d'exiger de son commettant, même avant l'entier accomplissement de la commission, des sûretés qui le couvrent de ses frais et déboursés,ou qui le garantissent de ses engagements. Le commettant remplit son obligation, à cet égard, en fournissant caution, en donnant hypothèque, ou en constituant un dépôt de marchandises dont le prix serait affecté à la garantie. Si le commettant préfère opérer le versement en espèces, il déduit l'escompte.

Le commettant ne peut s'affranchir de ses obligations vis-àvis du commissionnaire, en lui opposant l'insuccès de l'opération.

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Le commissionnaire qui s'oblige personnellement peut subir certaines pertes qui résultent de l'exécution même de son mandat. Tel est le cas où, avisé par le commettant du chargement de marchandises, il en opère la vente, et où le départ du navire ayant subi un retard, la livraison n'a pu être faite à l'époque convenue. Dans ce cas, le commettant doit garantir le commissionnaire des dommages-intérêts auxquels il peut être condamné.

Le commettant tenu du remboursement des frais et avances, en doit aussi les intérêts à 6 pour 100, à dater du jour des avances. Le commissionnaire a, pour ce recouvrement, un privilège et un droit de rétention, comme nous le verrons ciaprès.

Ou discute le point de savoir si le commissionnaire est toujours autorisé à se couvrir de ses frais et avances, en faisant traite sur le commettant. Si les relations habituelles entre le commissionnaire et le commettant autorisent ce mode de remboursement, la question ne peut faire doute. En cas contraire, les obligations résultant de la lettre de change sont de telle nature qu'on refuse assez généralement au commissionnaire le droit de se rembourser par ce moyen, à défaut de convention particulière.

Le commissionnaire peut être autorisé, pour se couvrir, à emprunter sur les marchandises qui sont entre ses mains.

Le montant du droit de commission est fixé par l'usage du lieu ou le mandat s'exécute; il est ordinairement de 2 pour 100 sur la valeur des achats, des ventes et autres opérations confiées

au commissionnaire. Cependant, le droit de commission peut être plus ou moins élevé, d'après les conventions particulières. Dans la fixation du droit de commission, on considère la valeur brute, en y ajoutant les frais de vente.

Outre le droit simple, il peut être stipulé un double droit, appelé ducroire, qui est une sorte de prime d'assurance contre l'insolvabilité des tiers que le commissionnaire prend à sa charge. Le ducroire doit toujours être stipulé; néanmoins, l'acceptation peut être présumée en raison des rapports habituels du commissionnaire et du commettant, ou en raison de l'usage des lieux.

La commission et le ducroire sont dus par le commettant, même au cas où il a donné contre-ordre, pourvu que le mandat ait reçu un commencement d'exécution. Le contre-ordre qui oblige le commissionnaire à faire de nouvelles opérations, peut donner lieu à une nouvelle commission, qui est généralement d'un demi-droit, en sus du droit entier.

Si la commission n'a pu être exécutée que partiellement, sans qu'il y ait faute de la part du commissionnaire, il n'est dû qu'une partie du droit de commission, laquelle est arbitrée par le juge, si elle n'est établie par l'usage des lieux.

Le droit et le double droit sont dus au commissionnaire à la vente, même si les marchandises sont retirées avant que la commission ait pu être remplie; car le commissionnaire peut invoquer les démarches qu'il a faites pour trouver acheteur, et les soins qu'il a donnés à la marchandise.

La stipulation d'un ducroire offre ce caractère particulier que le commissionnaire qui le perçoit est tenu d'assurer le paiement au terme convenu, sans pouvoir exiger la discussion préalable des biens du débiteur. Après avoir payé, il se trouve subrogé aux droits de son commettant, comme le serait un

assureur.

Lorsque l'intermédiaire d'un courtier a dû être employé et l'a été utilement par le commissionnaire, les frais de courtage s'ajoutent aux droits des commissions pour être remboursés au commissionnaire.

9. Privilège du commissionnaire et droit de rétention. Le commissionnaire a le droit, pour assurer le recouvrement de ses frais et déboursés, de ses droits de commission, et pour la sûreté des obligations qu'il a prises dans l'intérêt de son commettant, d'exercer un droit de rétention sur les mar

chandises ou sur les valeurs qu'il peut avoir entre les mains, à titre de dépôt, pour le compte du commettant.

Le droit de rétention du commissionnaire participe des caractères du droit de rétention du créancier-gagiste (V. Gage commercial). Cependant, le privilège du commissionnaire est plus étendu. Ainsi le privilège du commissionnaire prime les privilèges généraux mentionnés dans l'art. 2101 du Code civil, à savoir les frais de justice, les frais funéraires, ceux de dernière maladie, les salaires des gens de service et les fournitures de subsistances; et il n'est primé, quand il s'exerce sur le navire effectué au transport, que par les privilèges énumérés dans l'art. 191 du Code de commerce (V. Navire).

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Il faut remarquer que le droit de rétention s'exerce uniquement sur les marchandises ou les valeurs que le commissionnaire tient en dépôt pour le compte du commettant, et de son consentement. Ainsi il ne s'exercerait pas sur des marchandises que le commissionnaire aurait entre ses mains, à tout autre titre que pour l'exécution d'une commission, sans le consentement de leur propriétaire. Tel est le cas où il reçoit des marchandises en transit, pour les réexpédier, et celui où il accepte le mandat de vendre des marchandises pour en remettre le prix à uD tiers.

Toutefois, le commissionnaire, consignataire de marchandises, qui a reçu une traite pour se couvrir de ses avances, mais qui n'a entendu considérer cette traite que comme une garantie n'impliquant pas la renonciation à son droit de rétention, continue de l'exercer sur les marchandises dont il est nanti.

Il n'est pas permis au commissionnaire qui exerce le droit de rétention, de procéder à la vente des marchandises qu'il détient, sans y être autorisé par une ordonnance du juge, rendue sur simple requête.

Les conditions dans lesquelles le commissionnaire peut faire valoir son privilège, sont déterminées comme il suit par l'art. 95 du Code de commerce: Tout commissionnaire a privilège sur la valeur des marchandises à lui expédiées, déposées ou consignées, par le seul fait de l'expédition, du dépôt ou de la consignation, pour tous les prêts, avances ou paiements faits par lui soit avant la réception des marchandises, soit pendant le temps qu'elles sont en sa possession. Si les marchandises ont été vendues et livrées pour le compte du commettant, le commissionnaire se rembourse sur le produit de la vente du montant de sa créance, par préférence aux créanciers du commettant.

L'art. 92 du Code de commerce ajoute : Dans tous les cas le privilège ne subsiste sur le gage qu'autant que ce gage a été mis et est resté en la possession du créancier ou d'un tiers convenu entre les parties. Le créancier est réputé avoir les marchandises en sa possession, lorsqu'elles sont à sa disposition dans ses magasins ou navires, à la douane ou dans un dépôt public, où si, avant qu'elles soient arrivées, il en est saisi par un connaissement ou par une lettre de voiture.

L'endossement du connaissement ou de la lettre de voiture opère la transmission au commissionnaire, pendant que les marchandises sont en cours de voyage, et bien qu'au moment du départ, le commissionnaire n'ait pas été désigné comme destinataire. (V. Connaissement, Lettre de voiture).

Le commissionnaire qui transmet à son tour le connaissement ou la lettre de voiture par un endossement régulier, exprimant la valeur fournie, transfère son privilège au porteur.

Bien que la loi ne parle que de l'endosssment du connaissement ou de la lettre de voiture, il est incontestable que la cession au commissionnaire d'un bulletin de chargement ou d'un récépissé délivré par la gare de chargement, produit les mêmes effets, lorsque ces bulletin ou récépissé contiennent les mentions essentielles, exigées par la validité de la lettre de voiture.

Un pouvoir de retirer des marchandises d'un entrepôt, suffit pour opérer la transmission de ces marchandises au commissionnaire.

Il a même été jugé qu'une simple facture énonçant, au profit du commissionnaire, la consignation de marchandises en cours de voyage dans des mers éloignées, suffit pour la régularité de la détention.

Le privilège du commissionnaire ne s'applique pas seulement aux marchandises qui font l'objet de la commission à raison de laquelle il est créancier ; il s'étend même aux autres marchandises que le commissionnaire peut détenir pour le compte du commettant. Toutefois,il importe, comme nous l'avons vu plus haut, que cette détention ait lieu au su du commettant, et que l'affectation des marchandises n'ait rien d'incertain.

Le commissionnaire peut opposer son privilège à tous créanciers du commettant, même au vendeur des marchandises restées impayées. Ce vendeur ne peut exercer la revendication au mépris des droits du commissionnaire.

10. Compétence en matière de commission. Le contrat de commission, qui a pour objet l'achat ou la vente de

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