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tant, dans des termes trop forts, ses torts envers l'Angleterre, finit par déclarer qu'on consentoit à ce que la paix avec le Danemark fût absolument l'ouvrage de l'empereur, qu'elle fût rédigée dans son cabinet, arrêtée sous sa direction, et conclue sous sa garantie.

26 octobre

Le ministre de la Grande-Bretagne ne reçut pas de réponse à cette note: mais, le 1808, la Russie publia la déclaration suivante :

7 novembre

Plus l'empereur attachoit de prix à l'amitié de S. M. Britannique, plus il a dû voir avec regret que ce monarque s'en éloignât tout-à-fait.

Deux fois l'empereur a pris les armes dans une cause où l'intérêt le plus direct étoit celui de l'Angleterre; il a sollicité en vain qu'elle coopérât au gré de son propre intérêt ; il ne lui demandoit pas de joindre ses troupes aux siennes, il désiroit qu'elle fit une diversion; il s'étonnoit de ce que, dans sa propre cause, elle n'agissoit pas de son côté. Mais, froide spectatrice du sanglant théâtre de la guerre qui s'étoit allumée à son gré, elle envoyoit des troupes attaquer Buenos-Ayres. Une partie de ses armées qui paroissoit destinée à faire une diversion en Italie, quitta finalement la Sicile, où elle s'étoit assemblée. On avoit lieu de croire que c'étoit pour se porter sur les côtes de Naples; l'on apprit qu'elle étoit occupée à essayer de s'approprier l'Égypte.

Mais ce qui toucha sensiblement le cœur de S. M. 1., c'étoit de voir que, contre la foi et la parole expresse et précise des traités, l'Angleterre tourmentoit sur mer le commerce de ses sujets; et à quelle

'Nous parlerons plus bas de cette expédition.

époque? lorsque le sang des Russes se versoit dans des combats glorieux, qui retenoient et fixoient contre les armées de S. M. I. toutes les forces militaires de S. M. l'empereur des François, avec qui l'Angleterre étoit et est encore en guerre!

Lorsque les deux empereurs firent la paix, S. M., malgré ses justes griefs contre l'Angleterre, ne renonça pas encore à lui rendre service: elle stipula dans le traité même, qu'elle se constitueroit médiatrice entre elle et la France; ensuite elle fit l'offre de sa médiation au roi de la Grande-Bretagne; elle le prévint que c'étoit afin de lui obtenir des conditions honorables. Mais le ministère britannique, apparemment fidèle à ce plan qui devoit relâcher et rompre les liens de la Russie et de l'Angleterre, rejeta la médiation.

La paix de la Russie avec la France devoit préparer la paix générale; alors l'Angleterre quitta subitement cette léthargie apparente à laquelle elle s'étoit livrée; mais ce fut pour jeter dans le nord de l'Europe de nouveaux brandons qui devoient rallu→ mer et alimenter les feux de la guerre qu'elle ne désiroit pas voir s'éteindre.

Ses flottes, ses troupes parurent sur les côtes du Danemark pour y exécuter un acte de violence dont l'histoire, si fertile en exemples, n'en offre pas un seul de pareil.

Une puissance tranquille et modérée qui, par une longue et inaltérable sagesse, avoit obtenu, dans le cercle des monarchies, une dignité morale, se voit saisie, traitée comme si elle tramoit sourdement des complots, comme si elle méditoit la ruine

de l'Angleterre; le tout pour justifier sa totale et prompte spoliation.

L'empereur, blessé en sa dignité, dans l'intérêt de ses peuples, dans ses engagemens avec les cours du nord, par cet acte de violence commis dans la mer Baltique, qui est une mer fermée, dont la tranquillité avoit été depuis long-temps, et au su du cabinet de Saint-James, réciproquement garantie par les puissances riveraines, ne dissimula pas son ressentiment à l'Angleterre, et la fit avertir qu'il n'y resteroit pas insensible.

S. M. ne prévit pas que lorsque l'Angleterre, ayant usé de ses forces avec succès, touchoit au moment d'enlever sa proie, elle feroit un nouvel outrage au Danemark, et que S. M. devoit le partager.

De nouvelles propositions furent faites, les unes plus insidieuses que les autres, qui devoient rattacher à la puissance britannique le Danemark soumis, dégradé, et comme applaudissant à ce qui venoit de lui arriver.

L'empereur prévit encore moins qu'on lui feroit l'offre de garantir cette soumission, et de répondre que cette violence n'auroit aucune suite fâcheuse pour l'Angleterre. Son ambassadeur crut qu'il étoit possible de proposer au ministère de l'empereur que S. M. I. se chargeât de se faire l'apologiste et le soutien de ce qu'elle avoit si hautement blâmé.

L'empereur ne donna à cette démarche du cabinet de Saint-James d'autre attention que celle qu'elle méritoit, et jugea qu'il étoit temps de mettre des bornes à sa modération.

Le prince royal de Danemark, doué d'un caractère plein d'énergie et de noblesse, et ayant reçu de la Providence une dignité d'ame analogue à la dignité de son rang, avoit fait avertir l'empereur que, justement outré contre ce qui venoit de se passer à Copenhague, il n'en avoit pas ratifié la convention, et la regardoit comme non avenue.

Maintenant il vient de faire instruire S. M. I. des nouvelles propositions qu'on lui a faites, et qui irritoient sa résistance au lieu de la calmer, parce qu'elles tendoient à imprimer sur ses actions le cachet de l'avilissement dont elles ne porteront jamais l'empreinte.

L'empereur, touché de la confiance que le prince royal plaçoit en lui, ayant considéré ses propres griefs contre l'Angleterre, ayant mûrement examiné les engagemens qu'il avoit avec les puissances du nord, engagemens pris par l'impératrice Catherine et par feu S. M. l'empereur, tous deux de glorieuse mémoire, s'est décidé à les remplir.

S. M. I. rompt toute communication avec l'Angleterre elle rappelle toute la légation qu'elle y avoit, et ne veut pas conserver près d'elle celle de S. M. Britannique. Il n'y aura dorénavant entre les deux pays aucun rapport.

L'empereur déclare qu'il annulle et pour toujours tout acte conclu précédemment entre la GrandeBretagne et la Russie, et nommément la convention faite en 1801, le du mois de juin.

Il proclame de nouveau les principes de la neutralité armée, ce monument de la sagesse de l'impératrice Catherine, et s'engage à ne jamais déroger à ce système.

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Manifeste de la Grande-Bretagne,

Il demande à l'Angleterre de satisfaire complétement ses sujets sur toutes leurs justes réclamations de vaisseaux et de marchandises, saisies ou retenues contre la teneur expresse des traités conclus sous son propre règne,

L'empereur prévient que rien ne sera rétabli entre la Russie et l'Angleterre, que celle-ci n'ait satisfait le Danemark.

L'empereur s'attend à ce que S. M. Britannique, au lieu de permettre à ses ministres, comme elle vient de le faire, de répandre de nouveau les germes de la guerre, n'écoutant que sa propre sensibilité, se prêtera à conclure la paix avec S. M. l'empereur des François ; ce qui étendroit, pour ainsi dire, à toute la terre, les bienfaits inappréciables de la paix.

Lorsque l'empereur sera satisfait sur tous les points qui précèdent, et nommément sur celui de la paix entre la France et l'Angleterre, sans laquelle aucune partie de l'Europe ne peut se promettre une véritable tranquillité, S. M. I. reprendra alors volontiers avec la Grande-Bretagne des relations d'amitié que, dans l'état de juste mécontentement où l'empereur devoit être, il a peut-être conservé trop long-temps.

Fait à St.-Pétersbourg, l'an 1807, le 26 octobre. La réponse du gouvernement britannique à * du 18 décembre cette déclaration parut le 18 décembre 1808. Nous allons également la placer ici1.

1808.

La déclaration publiée à Saint-Pétersbourg par S. M. l'empereur de toutes les Russies, a causé à

'Le Moniteur du 7 janvier 1808 renferme des notes sur ce manifeste, qui paroissent être sorties du cabine

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