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hérétiques toutes les foudres de l'excommunication, elle ne fait que confirmer par une sentence légale, un fait proclamé d'avance par les hérétiques eux-mêmes. Elle doit mettre tout en œuvre pour préserver ses membres de la contagion des doctrines hérétiques. Aussi a-t-elle interdit, à l'exemple de l'apôtre, aux chrétiens purs et fidèles, d'avoir commerce avec ceux qui sont tombés dans quelque hérésie. (Can. Clericus 35; can. Cum quibus, 36, c. 24, qu. 3; cap. Sicut ait8.) Toutefois, aux termes de la bulle Advitanda, de Martin V, cette défense ne concerne que les hérétiques personnellement et nominativement excommuniés à cause de leur opiniâtreté, comme nous le disons sous le mot EXCOMMUNICATION. Dans le mème but, l'Église prohibe rigoureusement la lecture des livres hérétiques (voyez LIVRES), au nombre desquels elle compte ceux mêmes dont l'auteur n'a péché que par ignorance, et les condamne à périr dans les flammes. (Cap. Damnamus, 2; cap. Vas electionis 2, de Hæret. Extrav. comm.)

L'hérésie ne fait pas perdre le pouvoir d'administrer les sacrements, car le caractère du sacerdoce ne s'efface pas plus que celui du baptême; seulement les hérétiques pèchent en exerçant ce pouvoir hors de la communion de l'Église. (De Consecrat., dist. 4, c. 10.) Ainsi, comme le baptême, administré par un hérétique est valable, aussi bien que celui qui est administré par un ivrogne ou un impudique, ainsi, les prêtres ordonnés par un évêque hérétique sont prêtres, pourvu que l'évêque eût été ordonné lui-même validement. Car ceux que des laïques ou de simples prêtres auraient prétendu établir évêques ou pasteurs, sous quelque nom que ce soit, ne seraient jamais que des laïques.

§ II. Absolution du crime d'HÉRÉSIE.

Les canonistes diffèrent de sentiment sur la question de savoir si les évêques peuvent absoudre du crime d'hérésie. Nous n'entrerons pas dans cette difficulté; nous nous contenterons de dire que, d'après l'ancienne discipline de l'Église de France, les évêques absolvaient de l'excommunication pour cause d'hérésie, et qu'ils donnaient même cette faculté aux prêtres de leur diocèse, quand ils jugaient prudent de le faire. Suivant le concile de Trente, l'évêque est le seul qui puisse absoudre du crime d'hérésie; il ne peut commettre personne pour cet effet, pas même un de ses grands vicaires. (Sess. XXIV, ch. 6, de Reform.) La bulle In cœnd Domini réserve ce droit au pape. Benoît XIV cite à cet égard deux conciles tenus en France, l'un à Rouen en 1581, et l'autre à Tours, en 1595, qui avaient demandé au pape la faculté d'absoudre du crime d'hérésie. Il est donc conforme aux règles de demander un indult au Saint-Siége, car quelqu'ait pu être autrefois la possession des évêques de France, il n'en est pas moins certain que toutes les anciennes coutumes, quelque légitimes qu'elles aient pu être, ont été abrogées en France par les bulles de publication du concordat de 1801. Aussi conformément à ces principes, la plupart des évêques de France deman

dent, comme ils le doivent, des indults pour absoudre de l'hérésie et ont soin de les faire renouveler.

L'Église a toujours exigé que les hérétiques rétractassent leurs erreurs pour rentrer dans son sein. (Voyez ABJURATION.) Les évêques français reconnaissent que ceux qui font profession d'une secte hérétique, notoirement signalée dans l'Église, ne peuvent être absous qu'après en avoir fait l'abjuration comme l'Église le prescrit, et s'être soumis à la discipline du for extérieur à l'égard de l'excommunication, dont ils ont besoin d'être relevés.

Après ces formalités, l'évêque peut, ou par lui-même, ou par tout autre prêtre député par lui, réconcilier dans le tribunal de la pénitence le nouvel enfant de l'Église. C'est la doctrine formellement énoncée par Benoît XIV. (De Synodo diœcesaná, lib. IX, cap. 4.)

On est aussi très-partagé de sentiment sur l'absolution de l'hérésie occulte. Il est donc fort à regretter que Benoît XIV qui parle de cette hérésie au chapitre suivant du livre déjà cité, ne l'ait pas caractérisée et signalée. Son langage si clair et si précis aurait levé toute espèce d'incertitude, terminé les discussions sur ce point. Mais qu'est-ce que cette hérésie occulte dont il parle? Est-ce l'hérésie de ceux, par exemple, qui, nés de parents hérétiques, viennent dans une paroisse catholique, sans être connus comme hérétiques, et qui demandent à être réconciliés à l'Église, sans éclat extérieur? Est-ce l'hérésie de ceux qui ont déclaré secrètement aux hérétiques qu'ils adoptaient leurs sentiments et leur doctrine, étant néanmoins toujours regardés comme catholiques, parce qu'ils demeuraient extérieurement unis aux catholiques? Est-ce enfin l'état de ceux qui, tout en se disant encore catholiques, profèrent, dans l'occasion, des propositions tout à fait hérétiques, comme il arrive si souvent dans ce siècle d'incrédulité? Quoi de plus commun, par exemple, que d'entendre proférer des propositions comme celles-ci : « Quand un homme est mort, tout est mort; il n'y a pas d'enfer éternel; la mère de Jésus-Christ n'a pas toujours été vierge. » Nous sommes porté à croire que c'est dans ce dernier sens qu'il faut entendre l'hérésie occulte dont parle Benoît XIV.

§ III. Mariage des HÉRÉTIQUES avec les catholiques.
(Voyez EMPÊCHEMENT, § IV, n. VI et MARIAGES MIXTES.)
§ IV. Livres HÉRÉTIQUES.
(Voyez LIVRES.)
HÉRÉTICITÉ.

L'héréticité est une sorte d'hérésie imprimée à une proposition par la censure de l'Église.

HÉRITIERS.

(Voyez LEGS, SUCCESSION.)
HERMAPHRODITE.

L'hermaphrodite est une personne qui participe de la nature des

deux sexes. On demande si un hermaphrodite peut se marier, et s'il peut aussi recevoir les ordres. Le droit romain décide, sur la première question, que l'hermaphrodite peut se marier avec une personne d'un sexe différent de celui qui prévaut en lui: Eligendum sexum qui in iis prævalet (L. ff. de Stat. hominum); ce qui serait suivi dans l'usage. (Glos. in can. Si testes 4, qu. 2.)

Collet (1) s'exprime ainsi relativement au mariage des hermaphrodites: Un curé ne doit jamais les marier priusquàm ecclesiastica judex, ex expertorum inspectione, dijudicaverit quis sexus prævaleat; et declarationem juramento firmatam exegerit, quâ spondeant androgyni se nunquàm usuros altero sexu, etiamsi æqualiter utriusque compotes essent, quod rarò aut nunquàm contingere docent peritiores medici. Quin hodiè censent recentiores plerique androgynos nullos esse; et hermaphroditi nomen perperàm inditum fuisse mulieribus alio penès hanc partem modo constitutis, quam esse consueverint, uti videris in dictionario Trevoltiensi. Verùm præterquàm oculos habuit antiquitas, quis in re obvia credi possit; si natura iisdem humeris duplex aliquandò caput superponat, quidni et errando, utrumque in eâdem personâ sexum ingeminet?

Quant à la seconde question, les canonistes répondent (2): Hermaphroditus, sivirilis in eo sexus prævaleat, ordinari validè potest, sed non sine scelere; est enim etiam tùm irregularis ut pote quædam species monstri. Si, quod rarissimum, sexum utrumque pari gradu participet, ne validè quidem ordinabitur, cùm femina sit æquè ac vir.

Bien qu'il puisse y avoir capacité radicale pour la réception des ⚫ ordres dans ces sortes de personnes, les lois de l'Église néanmoins lui en interdisent absolument l'accès. Illitteratos aut aliquâ parte corporis vitiatos, vel imminutos, nullus præsumat ad clericatús ordinem promovere. ( Cap. 1, dist. 36.)

HEURES CANONIALES.

On appelle heures canoniales les heures du bréviaire, qui sont matines et laudes, prime, tierce, sexte et none, vêpres et complies. Ce qui vient de ce qu'on a appelé autrefois canon l'office ecclésiastique, ou parce que ces heures ont été prescrites par les anciens canons. (Voyez OFFICE DIVIN. )

HIERARCHIE.

Ce nom est formé de deux mots qui signifient une sainte principauté. On l'a appliqué à propos, dans l'Église, à cette sainte principauté instituée par Jésus-Christ. Elle consiste dans un ordre de personnes consacrées à Dieu, qui, toutes dans divers degrés de rang et de pouvoir, concourent à l'observance de la loi de Dieu, et à la

(1) Traité des dispenses, liv. 11. ch. 14, n. 230.

(2) Collet, Ibid., lie. 5, ch. 2, n. 2, 138, in fin.; Barbosa, de Officio et potest. episc., part. 11, alleg. 2, n. 29; Schmalzgrueber, Jus eccles., n. 23.

T. IV.

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plus grande gloire de son nom. Suivant la définition de Devoti(1), la hiérarchie est un pouvoir que Jésus-Christ a accordé à ses apôtres et à leurs légitimes successeurs, pour gouverner l'Église, y célébrer et y distribuer les divins mystères de la religion.

La hiérarchie ecclésiastique, considérée comme une principauté, comprend le pouvoir de la juridiction et de l'ordre; considérée comme un ordre, elle représente une suite merveilleuse de ministres qui, par leurs différentes fonctions, forment cette belle Église que l'Écriture compare à une armée rangée en bataille. (Cantiq. V, 1. Corinth. XII: Eph., III; Conc. de Trente, sess. XXIII, ch. 4.) On voit d'un côté la subordination des ministres entre eux, et la variété de leurs fonctions; d'où naît une concorde et une union qui fait le vrai caractère distinctif de l'Église de Dieu. Voici comment s'expriment deux canons du décret sur ces deux objets :

Singula ecclesiastici juris officia, singulis quibusque personis singulatim committi jubemus. Sicut enim in uno corpore multa membra habemus, omnia autem membra non eumdem actum habent; ità in Ecclesiæ corpore, secundùm veridicam Pauli sententiam, in uno eodemque spiritu, alii conferendum est hoc officium, alii committendum est illud: neque uni, quantùmlibet exercitatæ persona, uno tempore duarum rerum officia committenda sunt; quia si totum corpus est oculus, ubi auditus? Sicut enim varietas membrorum per diversa officia et robur corporis servat, et pulchritudinem repræsentat: ità varietas personarum per diversa nihilominus officia distributa, et fortitudinem et venustatem sanctæ Dei Ecclesiæ manifestat. Et sicut indecorum est, ut in corpore humano alterum membrum alterius fungatur officio, ità nimirùm noxium, simulque turpissimum, si singula rerum ministeria personis totidem non fuerint distributa. (C. 1, dist. 89.)

Ad hoc dispensationis divinæ provisio, gradus diversos et ordines constituit esse distinctos, ut dùm reverentiam minores potioribus exhiberent et potiores minoribus dilectionem impenderent, vera concordia fieret, et ex diversitate contextio et rectè officiorum gereretur administratio singulorum. Neque enim universitas alia poterat ratione subsistere, nisi hujusmodi magnus eam differentiæ ordo servaret. Quia verò quæque creatura in unâ eâdemque qualitate gubernari, vel vivere non potest: cœlestium militiarum exemplar nos instruit; quia dùm sunt angeli, et archangeli, liquet quia non sunt æquales, sed in potestate et ordine ( sicut nostis ) differt alter ab altero. (C. ult., eâd. dist.)

« Si quelqu'un dit que dans l'Église catholique il n'y a point de hiérarchie établie par l'ordre de Dieu, laquelle est composée d'évêques, de prêtres et de ministres, qu'il soit anathème. » (Concile de Trente, Sesion XXIII, can. 6.)

(1)Instit. canonic.

Comme il y a dans l'Église deux puissances, l'une de l'ordre et 'autre de la juridiction, il y a aussi deux hiérarchies, l'une de l'ordre et l'autre de la juridiction.

La hiérarchie de l'ordre est celle qui a été établie pour former le corps de Jésus-Christ, en commémoration de sa dernière cène, à l'effet de sanctifier les fidèles intérieurement par la participation du sacrement de l'eucharistie. Cette hiérarchie est composée des clercs quisont dans les ordres mineurs, et de ceux qui sont dans les ordres sacrés. Cette dernière hiérarchie est d'institution divine.

La hiérarchie de la juridiction est celle qui a été établie pour le gouvernement et la conduite de ces mêmes fidèles, et pour leur procurer une espèce de sanctification extérieure; et cette hiérarchie est composée du pape, des patriarches, des primats, des métropolitains ou archevêques, des évêques et des autres prélats de l'Église; elle est d'institution ecclésiastique.

La hiérarchie de l'ordre diffère de celle de la juridiction : 1° en ce que la première tend à sanctifier et à élever les fidèles dans une vie spirituelle, par la prédication de l'Évangile et par l'administration des sacrements, au lieu que la hiérarchie de la juridiction tend àles sanctifier par le gouvernement ecclésiastique. 2o La hiérarchie de l'ordre n'attribue point la juridiction, mais seulement le pouvoir de faire les fonctions ecclésiastiques et d'administrer les sacrements, au lieu que l'autre hiérarchie attribue juridiction, et conséquemment le droit de faire des réglements concernant la foi et la discipline ecclésiastique, et de châtier les rebelles par des peines convenables en son pouvoir. En effet, la principale fonction des ministres de l'Église étant de conduire les hommes à la connaissance et au culte de Dieu, l'Église ne pouvant y parvenir sans quelque juridiction, elle a besoin de règles et de lois, de ministres qui aient le pouvoir de les faire exécuter, et de ramener, par des peines légitimes, ceux qui s'écartent de la véritable voie. 3° La hiérarchie de l'ordre appartient à tous les prêtres et à tous les clercs, chacun dans l'étendue de son pouvoir, au lieu que la hiérarchie de la juridiction. qui est proprement la hiérarchie, n'appartient qu'aux évêques et aux autres prélats; ainsi la hiérarchie de l'ordre subsiste souvent sans la hiérarchie de la juridiction, au lieu que celle-ci ne peut amais subsister sans l'autre : car elle la suppose, et en est comme le fondement. 4o Dans la hiérarchie de l'ordre, on a égard au caractère sacerdotal, au lieu que dans la hiérarchie de la juridiction, on a égard aux degrés: sur quoi il faut observer que, quoique les mots ordre et degré se prennent souvent dans la même signification, néanmoins à les prendre dans le vrai sens, l'ordre se dit de l'office ecclésiastique qui est annexé à chaque clerc, suivant l'ordre de cléricature qui lui a été conféré, au lieu que, par le mot degré, on entend le rang de la juridiction qui est annexée aux prélatures de l'Église.

Ainsi l'évêque, quant au caractère, est absolument l'égal de l'ar

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