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C'est de cette dernière sorte d'irrégularité, qui comprend toujours l'irrégularité ex defectu, dont il s'agit. (Tot. dist. 55.)

Par mutilation, on entend le retranchement ou l'altération d'un membre qui a quelque opération particulière: mutilatio membrorum, diminutio, detruncatio. (C. 6. De Corpore vitiatis.) On se règle, en fait de mutilation par les mêmes principes qui ont été exposés sous le mot HOMICIDE. Gibert donne ces deux règles: 1o que la mutilation qu'on fait sur soi ne diffère de celle qu'on fait sur un autre, qu'en ce que, pour devenir irrégulier par la première, il ne faut pas que la partie coupée soit si considérable qu'il faudrait qu'elle le fût pour devenir irrégulier par la seconde (C. 6, 55 dist.); 2o qu'en fait d'irrégularité qui vient du crime de mutilation qu'on commet sur soi-même, se faire mutiler ou s'exposer criminellement à un danger évident d'ètre mutilé, c'est dans le droit, mutilatione secutâ, une même chose que de se mutiler soi-même. (C. 4, de Corpore vitiatis.) Mais si l'on donne le nom de mutilation au retranchement des parties qui ne sont pas membres, il y a des mutilations qui rendent le mutilé irrégulier, ex defectu corporis, qui ne font pas que le mutilant soit irrégulier ex delicto mutilationis.

L'évêque peut dispenser de toutes les irrégularités provenant des péchés occultes, à l'exception de l'homicide volontaire. Le décret du concile de Trente, à ce sujet, est conçu en ces termes : « Pourront les évêques donner dispenses de toutes sortes d'irrégularités et de suspensions encourues pour des crimes cachés, excepté dans le cas de l'homicide volontaire, ou quand les instances seront déjà pendantes en quelque tribunal de juridiction contentieuse.» (Sess. XXIV, ch. 6, de Reform.) Il faut remarquer ici que la mutilation n'est pas comprise dans l'exception que fait le concile de l'homicide volontaire, à l'égard duquel le pape seul peut dispenser et ne dispense même jamais, au rapport de Fagnan, sur le chapitre Henricus, de Cleric. pugnant. in duell.., n. 32. Mais la pénitencerie en donne quelquefois, sous une dure pénitence, à des prètres qui ont eu le malheur de commettre ce crime, quand ils ne peuvent s'abstenir de leurs fonctions, sans qu'on les en soupçonne.

Quand le pape accorde une dispense pour homicide, il en adresse toujours la commission à l'évêque, en ces termes : Et committatur ordinario qui veris existentibus prænarratis, oratorem imposita ei aliquá pœnitentiâ salutari, et attentâ pace, ut præfatur, habitá, absolvat, secumque dummodo ad id experiatur idoneus, vilæque ac morum probilas, ac alia virtutum merita, sibi aliàs suffragentur, nec aliud canonicum ei obsistat, ad beneficia, simplicia, nullumque sacrum ordinem annexum habentia, ac quatuor minores tantùm dispenset pro suo abitrio, et parito priùs judicato.

II. Réitération du baptême. Le sacrement de baptême imprime sur ceux qui l'ont reçu un caractère indélébile, et il n'est pas permis de le réitérer, à moins que l'on ne doute s'il a été conféré, ou si, en le conférant, on a suivi la forme prescrite par l'Église. Hors

de ces cas, si le baptême est réitéré, il rend irrégulier celui qui l'a reçu une seconde fois, même sans savoir qu'il avait déjà été baptisé. (Can. Qui bis, de Consecrat., dist. 4.) Celui qui le confère une seconde fois, n'ayant point sujet de douter qu'on eût observé tout ce qui est nécessaire pour la validité d'un premier baptême qui lui est connu, encourt l'irrégularité, de même que les clercs qui l'assistent dans cette cérémonie. (Cap. Ex litterarum.) La réitération du baptême est un crime si énorme, qu'il est appelé, dans le droit, res nefanda, immanissimum scelus. (C. 106, 117, 218, de Consecrat., dist. 4.) Ces canons apprennent que ceux qui, avec connaissance de cause, reçoivent deux fois le baptème, crucifient de nouveau JésusChrist. Il ne faut donc pas être surpris si un tel crime produit l'irrégularité, mais il est aujourd'hui moins fréquent qu'il n'était autrefois pendant le feu de l'hérésie des donatistes. Il ne peut regarder que trois sortes de personnes : le baptisant, le clerc qui le sert et le baptisé. On a remarqué que le droit canon ne dit rien du baptisant, que ce n'est que par une extension juste et nécessaire qu'on. lui a appliqué ce que le droit dit du clerc. On peut voir sous le mot BAPTÊME, les cas où l'on peut légitimement réitérer le baptême.

Quand la réitération du baptême est publique, le pape seul peut dispenser de l'irrégularité qu'elle produit: mais l'évêque le peut, si elle est occulte, par une conséquence nécessaire du chapitre 6, de la session XXIV, du concile de Trente, rapporté ci-dessus (1).

Au reste, on n'est pas irrégulier pour recevoir deux fois la confirmation ou l'ordre, ou pour consacrer de nouveau une hostie qui l'aurait déjà été, parce que ces cas ne sont nulle part exprimés dans le droit; mais on serait irrégulier, si, sans nécessité, on se faisait baptiser par un hérétique déclaré. (C. 18, caus. 1, qu. 1, in fin.) III. Irrégularité qui naît de la réception non canonique des ordres. Nous ne saurions mieux remplir la matière de cet article, qu'en indiquant avec Gibert les cas où il est certain que l'irrégularité est encourue par la réception non canonique des ordres, ceux où il n'est pas certain que l'irrégularité soit encourue par la même voie, et les cas où l'on ne peut douter que l'irrégularité ne soit pas

encourue.

Il est certain qu'on devient irrégulier: 1° Si l'évêque ayant défendu sous peine d'anathème de se présenter à l'ordinaire sans y avoir été auparavant admis, il arrive qu'un diacre reçoive la prétrise, sans avoir été auparavant examiné et approuvé pour cet ordre. (Cap. 1, de Eo qui furtivè ordinem suscepit.)

20 Un clerc qui, ayant reçu les ordres mineurs, prend encore le même jour le sous-diaconat, sans avoir été auparavant approuvé pour cet ordre. (Cap. de Eo qui furtivè, etc.)

30 Si un évêque ayant prohibé, sous peine d'excommunication, de recevoir deux ordres dans la même ordination, des clercs consti

(1) Corradus, de Dispens,, lib. 11, c. 9.

tués dans les ordres moindres, y reçoivent le sous-diaconat et le diaconat. (Cap. 3, eod.)

4° Tout homme marié qui, pendant un mariage soit consommé, soit non consommé, reçoit un ordre sacré sans le consentement de sa femme et les autres conditions prescrites par les canons. (Cap. 4, caus. 9, q. 1; Extravag. de Vot. vel. vot. redempt.)

5° Quiconque reçoit les ordres d'un évêque catholique qu'il sait être excommunié. (Cap. 4, caus. 5, qu. 4; cap. 1, de Ordinatis ab episcopo.)

Il est certain qu'on ne devient pas irrégulier, 1° en recevant les ordres avant l'âge prescrit par les canons; on encourt seulement la suspense de ces ordres jusqu'à ce qu'on ait atteint l'àge qui manque. (Cap. 44, de Temp. ordin.; c. 2, de Etate et qualitate.)

2° Tout homme qui reçoit les ordres d'un autre évêque que du sien, sans le consentement de ce dernier, est suspens des ordres ainsi reçus, tant qu'il plaît à son évêque. (Cap. 1, 3, dist. 71; cap. 1, 6, caus. 9, qu. 2; sess. XIV, cap. 8 concil. Trid.) (Voyez DIMISSOIRES.)

3o Selon Urbain III, quand on reçoit les ordres hors du temps prescrit, on est suspens des ordres reçus jusqu'au bon plaisir du pape. Selon Alexandre III, on devrait être déposé, c'est-à-dire être privé du rang comme de l'usage de ces ordres. Selon Grégoire IX, l'absolution de la suspense est permise à l'évêque, à condition qu'il ne la donnera qu'après que la faute sera expiée par une pénitence convenable. (C. 8, de Temp. ordin., c. 16, eod.)

4° Celui qui reçoit deux ordres sacrés en un jour en est suspens jusqu'au bon plaisir du pape. Que si, par les chapitres 2, 3, de Eo qui furtive ord. suscepit, il ne peut exercer les ordres reçus, ni monter aux autres, c'est que ce crime y est joint à un autre qui rend irrégulier. (C. 15, de Temp. ordin.)

50 Selon l'ancien droit, quand, sachant qu'un évêque est simoniaque, on reçoit de lui des ordres, on est privé pour toujours de l'exercice de ces ordres et du rang qu'ils donnent, et conséquemment cette faute est aussi sévèrement punie que la simonie par laquelle on reçoit les ordres on en peut juger par les canons cités ci-après. Selon le nouveau droit, celui qui reçoit les ordres par simonie, est seulement suspens des ordres reçus (Extravag., de Simon.), ainsi à majori ceux dont la faute est moindre, ne doivent être que suspens. (C. 13, de Temp. ordin.; c. 107, 108, 109, caus. A, qu. 11.)

6° Quand un clere constitué dans les ordres abandonne la foi catholique pour embrasser l'hérésie, et reçoit d'un évèque hérétique les ordres qu'il a déjà, ou d'autres, il n'est admis qu'à la communion laïque à son retour à l'Église. (C. 6, de Apostat.)

7° Un religieux qui, ayant quitté l'habit de religion, reçoit en cet état quelque ordre sacré, ne peut l'exercer sans dispense du pape. (C. 13, 14, dist. 23.)

8. Si l'on reçoit, ou le diaconat, ou la prêtrise d'un évêque qui impose seulement les mains et fait dire les prières à un prêtre, on ne jouit pas de ce qu'on a mal reçu. (C. 1, 2, dist. 70.)

Il n'est pas certain qu'on devienne irrégulier: 1° quand on est lié de censures (c. 32, de Sentent. excom.); 2° quand sachant, ou pouvant savoir qu'un évèque a renoncé à la dignité épiscopale, on reçoit de lui les ordres sacrés (cap. 1, de Ordinatis ab episcopo, etc.); 3o en recevant les ordres sacrés avant d'avoir reçu les ordres mineurs; les textes qui punissent la promotion per saltum, ne parlent que de celle qui regarde les ordres sacrés (c. 1, dist. 59; c. 1, de Promot. per saltum promot.); 4o en recevant par négligence l'ordre supérieur avant l'ordre inférieur, même parmi ceux qui sont sacres. (C. A, dist. 52; c. i, de Cler. per saltum, etc.)

IV. Irrégularité procédant de l'exercice illicite des ordres. On exerce illicitement les ordres, quand on exerce ceux qu'on n'a pas, et quand on exerce dans les liens des censures ceux que l'on a recus.

1o Le chapitre 1, de Cler. non ordin. min. est précis sur la première partie de cette proposition: Si quis baptizaverit, aut aliquod divinum officium exercuerit non ordinatus, propter temeritatem abjiciatur de Ecclesià, et nunquàm ordinetur. Par les mots Si quis, on doit entendre ici toutes sortes de personnes, à l'égard du baptême dont la collation n'est pas une fonction propre de quelque ordre, puisque chacun peut le conférer dans un cas de nécessité, il faut entendre ici la décrétale dans le sens de celui qui baptise solennellement avec les habits et les cérémonies prescrites par les canons. (Voyez BAPTÊME.)

Le chapitre 2 du titre cité parle d'un diacre qui a célébré la messe, qu'il déclare irrégulier pour la prêtrise, suspens pour le diaconat et pour les bénéfices qu'il avait.

2o Quant au violement des censures, il n'y a nul doute qu'on devient irrégulier en violant par l'exercice des ordres l'excommunication majeure, la suspense et l'interdit, soit que la censure soit publique ou occulte. Mais on ne devient pas irrégulier en violant l'excommunication mineure; il y a même sujet de croire, dit Gibert, qu'il n'y a que le violement des censures, par l'exercice des ordres sacrés, qui rend irrégulier.

Les textes sur lesquels on fonde l'irrégularité du violement de l'excommunication, sont les can. 6, caus. 4, qu. 3, les chapitres 3, 4, 5, 6, 7, § Quæsivistis; c. 10, de Cler. excom. vel depos.; voyez à l'égard de la suspense, c. 9, de Cler. excom.; c. 1, de Sent. et re jud. in 6o; c. 1, de Sent. excom. in 6'; quant à l'interdit., c. 1, de Postul.; c. 18, 20, de Sent. excom. in 6o. (Voyez INTERDIT, SUSPENSE, EXCOMMUNICATION.) Nul ne devient irrégulier en faisant violer les censures par les autres.

L'évêque dispense de l'irrégularité du violement des censures, lorsqu'elle est occulte, et le pape en dispense lorsqu'elle est publi

que, suivant la règle ordinaire, ainsi que la réception non canonique des ordres.

V. Irrégularité qui vient de l'hérésie. On est irrégulier à raison de l'hérésie, par quatre voies : 1o par un péché qui fait perdre la foi, comme l'hérésie, l'apostasie, le schisme accompagné d'hérésie. (C. 32, dist. 30; c. 13, de Hær. in 6°; c. 30, 32, caus. 24, qu 3.)

2o En favorisant ceux qui pèchent de cette façon, soit en les recevant dans sa maison, dans ses terres, ou en les protégeant autrement. (C de Hæret.; c. 2, § Hæretici, eod. in 6°; c. 13, eod.)

3o En naissant de quelqu'un de ceux qui sont morts dans cette irrégularité. Si c'est la mère qui était hérétique, il n'y a que les enfants au premier degré qui soient irréguliers; si c'est le père, l'irrégularité s'étendra jusqu'au petit-fils, mais non au-delà. (C. 2, de Hæret. in 6°.) L'enfant même d'un juif, d'un païen, n'est pas irrégulier, parce que le droit n'en parle pas, non plus que l'enfant de l'hérétique qui se serait converti avant sa mort.

4o En acquérant des bénéfices à la recommandation des hérétiques. Si l'on ignore l'hérésie de ceux que l'on emploie pour se procurer des bénéfices, on n'est que privé des bénéfices ipso facto; mais. si on la connaît, on est inhabile pour en obtenir d'autres. (C. 2, 15, de Hæret., in 6o.)

SV. Par quelles voies finit l'IRRÉGULARITÉ.

L'irrégularité finit par deux voies générales: 1° par la dispense; 2o par la cessation du défaut. L'irrégularité ex delicto ne finit que par la dispense. L'irrégularité ex defectu finit aussi quelquefois par la profession religieuse.

Il est certain qu'il y a des irrégularités qui finissent par la cessation du défaut d'où elles naissent; la cause cessant, l'effet doit cesser. Ainsi, l'ignorant qui acquiert la science requise, l'esclave qui recouvre la liberté, les comptables qui ont rendu leurs comptes, les néophytes qui ont été éprouvés, les trop jeunes qui ont atteint l'âge prescrit, l'infàme qui a fait une pénitence convenable, les lépreux, les épileptiques, les fous qui sont guéris et éprouvés, le bàtard qui est légitimé ou qui se fait religieux, cessent d'être irréguliers. (C. 11, de Nunc; c. 1, de Servit.; c. 1, de Oblig. ad rat.; c. 6, dist. 61; c. 14, de Temp. ; c. 2, de Etat. et qual.; c. 18 et seq. dist. 50; c. 1, caus. 7, qu. 2; c. 6, Qui filii, etc.)

Le pape, le légat, l'évêque et l'abbé sont ceux qui peuvent accorder des dispenses pour l'irrégularité. Le pape peut dispenser de l'irrégularité, en tout cas dispensable; il n'y a que lui qui ait un tel pouvoir. Secundùm plenitudinem potestatis de jure possumus suprù jus dispensare. (C. 4, de Concess. præb.)

Le légat peut dispenser de l'irrégularité, dans tous les cas non réservés au pape, aussi bien que l'évêque. (C. 2, de Officio leg. in 6.) L'abbé peut, sans privilége particulier, dispenser de l'irrégularité, hors des cas expressément permis par le droit, par exemple.

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