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de ceux qui forment de vrais bénéfices avec administration spirituelle et perpétuelle par des ecclésiastiques titulaires, d'avec les hôpitaux qui, n'étant pas régis par des ecclésiastiques ni fondés par les évêques, forment un établissement purement laïcal où l'évêque n'a aucun droit de visite, comme s'agissant d'une œuvre pie.

Les lois du code romain nous apprennent, sous des noms grecs, les différentes sortes d'hôpitaux autrefois en usage dans l'Orient. La maison où l'on recevait les pèlerins ou étrangers s'appelait Xenodochium; il en est parlé sous la même dénomination en plusieurs endroits du droit canon. (C. Qualibet, § Sancimus, 23, qu. 8, J. G.; C. Xenodochiis, de Relig. dom.; Clem. Quia contingit, eod.) La loi Sancimus, § Sed Deo nobis, de Episc. et cler., appelle l'endroit où l'on prend soin des malades Noscomium ou Nosconium. Les administrateurs de cette sorte d'hôpital sont appelés en droit parabolani. Le lieu où l'on nourrissait les petits enfants, comme aujourd'hui la n.aison des enfants trouvés, était appelé Brephotrophium. (L. Illud. 29, cod. de Sacro eccles.) Procotrophium était le lieu destiné à l'entretien des pauvres et des mendiants. Orphanotrophium était l'hôpital des orphelins. (L. 3, cod. de Episcopis et cleric.) Gerentozomium, c'était l'hôpital des pauvres vieillards et des estropiés. (L. Illud. L. Sancimus, cod. de Sacr. sanct.) Grotophonium était le lieu ubi feminæ debilium sententatrices habitabant. Il y avait encore les léproseries, espèces d'hôpitaux affectés aux lépreux. Toutes ces différentes maisons, et d'autres noms, mais dans le même genre de fondation, sont comprises aujourd'hui sous le nom générique d'hôpital: Et denique alia hujusmodi sunt pia loca que, sicut et suprà relata generali nomine hospitalia appellantur, licet diversisnominibus secundùm diversos religionum mores soleant nuncupari. (Glos., verb. Eleemosynariis; Clem. Quia contingit, de Relig. domib.) Bientôt il y eut de ces maisons de charité dans toutes les grandes villes. Les évêques, dit saint Epiphane (hæres. 75, n. 1), par charité pour les étrangers, ont coutume d'établir ces sortes de maisons, a dans lesquelles ils placent les estropiés et les malades, et leur four<< nissent la subsistance autant qu'ils le peuvent. » Ordinairement c'était un prêtre qui en avait l'intendance. Il y avait de riches particuliers qui entretenaient des hôpitaux à leurs dépens, et qui y servaient eux-mêmes les pauvres.

« De tous les hôpitaux de l'Europe, dit Bergier, l'hôtel-Dieu de Paris est le plus célèbre par son antiquité, par ses richesses, par son gouvernement, par le nombre des malades. Tout ce que les historiens les plus exacts ont pu recueillir s'est borné à prouver que cette maison de charité existait avant Charlemagne, par conséquent avant l'an 814. Le huitième concile de Paris, tenu l'an 829, ordonna que la dime de toutes les terres cédées aux chanoines de Paris par Jonade serait donnée à l'hôpital de saint Christophe, dans lequel les chanoines exerçaient la charité envers les pauvres. L'an 1002, l'évêque de Paris céda aux chanoines tous ses droits sur cet hôpital,

et cette cession fut confirmée par une bulle du pape Jean XVII

en 1007.

§ II. HOPITAUX, administration.

On a vu ci-dessus que tous les hôpitaux n'ont pas une même nature de titre et de fondation, quoique tous aient pour fondement l'exercice de la charité envers les pauvres. Parmi ceux qui, n'étant pas purement laïcaux, sont de fondation ecclésiastique ou confiés à des ecclésiastiques, il y en a qui sont en titre de bénéfice avec administration perpétuelle; ceux-là sont de vrais bénéfices sujets aux charges attachées à la nature des bénéfices perpétuels: Si rector in perpetuum vel ad ejus vitam in titulum conferatur, non verò in administrationem, certum est beneficium esse ecclesiasticum. (Clem. Quia contingit, § Ut autem, de Relig. domib.) C'est-à-dire que si le recteur ou autre ecclésiastique n'avait que la simple administration de l'hôpital, il ne serait pas censé alors posséder un bénéfice; et régulièrement, un hôpital ne doit être conféré à titre de bénéfice, si le titre de la fondation ne le porte. C'est la disposition d'une bulle du pape Urbain V, qui déclara nulles toutes les collations qui avaient été faites des hôpitaux, à titre perpétuel, depuis le pape Clément V. En sorte que, dans le doute, on présume toujours que l'hôpital est une œuvre pie, sujette seulement à une administration qui doit être entièrement conforme à la charité et aux intentions des fondateurs, suivant le réglement du concile de Trente, qui est trop important pour ne pas trouver ici place.

« Le saint concile avertit tous ceux qui possèdent des bénéfices ecclésiastiques, séculiers ou réguliers, de s'accoutumer, autant que leur revenu le pourra permettre, d'exercer avec zèle et donner l'hospitalité qui a été si souvent recommandée par les saints Pères, se ressouvenant que ceux qui s'affectionnent à la pratique de cette vertu reçoivent Jésus-Christ même dans la personne de leurs hôtes. Mais à l'égard de ceux qui tiennent en commende, en régie, ou sous quelque autre titre que ce soit, des hôpitaux, ainsi qu'on les appelle communément, ou d'autres lieux de dévotion établis particulièrement pour l'usage des pèlerins, ou malades, ou vieillards, ou pauvres, encore que lesdits lieux fussent unis à leurs églises paroissiales se trouveraient unies à des hôpitaux, ainsi qu'on les appelle communément, ou d'autres lieux de dévotion établis particulièrement pour l'usage des pélerins, ou malades, ou vieillards, ou pauvres, encore que lesdits lieux fussent unis à leurs églises paroissiales se trouveraient unies à des hôpitaux ou érigées en hôpitaux, et accordées à ceux qui en seraient patrons, pour en avoir l'administration, le saint concile leur demande à tous absolument de s'acquitter des obligations et des charges qui y sont imposées, et d'employer actuellement, à la manière d'hospitalité et de charité à laquelle ils sont tenus, les revenus qui y sont destinés, suivant la constitution du concile de Vienne déjà renouvelée dans ce même concile sous

Paul III, d'heureuse mémoire, laquelle commence par ces mots: Quia contingit.

« Que si lesdits hôpitaux ont été fondés pour y recevoir une certaine sorte de pélerins, ou malades, ou autres personnes d'une certaine qualité, et que dans le lieu où sont lesdits hôpitaux, il ne se trouve pas de telles personnes, ou qu'il n'y en ait qu'un fort petit nombre, il ordonne encore que les revenus en soient convertis en quelque autre pieux usage qui approche le plus qu'il se pourra du dessein de la fondation, et qui soit le plus utile selon le temps et le lieu, suivant que l'ordinaire, avec deux du chapitre, expérimentés en ces matières, et qui seront choisis par lui, le trouvera le plus à propos, si ce n'est peut-être que dans la fondation même ou établissement il ait été autrement pourvu à ces cas; car alors l'évêque aura soin que ce qui aura été ordonné soit observé, ou si cela même ne se peut encore, il y donnera ordre, comme dessus, le mieux qu'il lui sera possible.

« Si donc aucun de tous les susdits, en général ou en particulier, de quelque ordre et religion et de quelque dignité qu'ils soient, quand ce serait même des laïques qui auraient l'administration desdits hôpitaux (pourvu qu'ils ne soient pas soumis à des réguliers, où l'observance régulière serait en vigueur), après avoir été avertis par l'ordinaire, manquent à exercer effectivement l'hospitalité avec toutes les conditions requises et nécessaires auxquelles ils sont obligés, non-seulement ils pourront y être contraints par censures ecclésiastiques et par autres voies de droit, mais même être privés à perpétuité de la conduite et de l'administration desdits hôpitaux, pour en être mis et substitué d'autres en leur place par ceux à qui il appartiendra. Seront encore cependant les susdits tenus en conscience à la restitution des fruits dont ils auront joui et usé contre l'institution desdits hôpitaux, sans qu'aucune grâce, remise ni composition leur puisse être accordée à cet égard; et ne sera commise à l'avenir l'administration ou conduite desdits lieux à la même personne au-delà de trois ans, s'il ne se trouve que dans la fondation il en ait été autrement ordonné, nonobstant, à l'égard de tout ce que dessus, toute union, exemption et coutume contraire, même de temps immémorial, tous priviléges ou indults que ce puisse être. » (Session XXV, chapitre 8, de Reform.)

Il est bon de savoir, après la lecture de ce règlement, que presque tous les hôpitaux étaient autrefois entre les mains des religieux que pour cela on a appelés hospitaliers. Ces religieux, dit Fleury, suivaient tous la règle de saint Augustin, parce que tous les hôpitaux étaient gouvernés par des clercs.

Depuis plus de quatre cents ans, on a plusieurs fois travaillé à la réformation des hôpitaux. Dans le relâchement de la discipline, la plupart des clercs quien avaient l'administration l'avaient tournée en titre de bénéfice, dont ils ne rendaient point de compte. Ainsi plusieurs appliquaient à leur profit la plus grande partie du revenu, laissaien

périr les bâtiments et dissiper les biens; en sorte que les intentions des fondateurs étaient frustrées. C'est pour ce motif que le concile de Vienne défendit, de ne plus donner les hôpitaux en titre de bénéfices à des clercs séculiers, et ordonna que l'administration en fût donnée à des laïques, gens de bien, capables et solvables, qui prêteraient serment comme des tuteurs, feraient inventaire, et rendraient compte tous les ans par-devant les ordinaires. Ce décret a eu son exécution, et a été confirmé par le concile de Trente, qui donne aux ordinaires toute inspection sur les hôpitaux, et leur permet de convertir en autres œuvres pies, les fonds destinés à certains genres de pauvres qu'on ne voit plus, c'est-à-dire aux pèlerins et aux lépreux.

Ainsi, ce que le concile de Vienne et le concile de Trente défendent, c'est uniquement la transformation des hôpitaux en bénéfices. Posséder et administrer, sont deux choses fort différentes, et sans doute la plupart des écrivains et des historiens qui ont parlé de l'exclusion prononcée au XIVe siècle par un concile contre les cleres, n'ont pas lu les actes de ce concile, car on ne peut voir dans les qualités demandées aux administrateurs des hospices, providos, idoneos et boni testimonii, des causes d'incompatibilité pour les ecclésiastiques. Le concile de Vienne n'exclut donc point les clercs de l'administration des hôpitaux. Le concile de Trente recommande aux ordinaires de veiller à ce qu'ils soient gouvernés fidèlement et diligemment par leurs administrateurs. Les ordinaires sont les évêques; comment en conclure que les ecclésiastiques sont exclus de l'administration des hôpitaux? Cette exclusion est venue en premier lieu d'une ordonnance royale de 1576, et elle a été enfin consommée par nos lois révolutionnaires.

Si les évêques ont ainsi, par le droit et le concile de Trente, l'inspection sur les biens et l'administration des hôpitaux, ils ont à plus forte raison droit, en faisant la visite de leurs diocèses, de visiter des lieux pieux, de voir si les revenus sont fidèlement employés aux usages auxquels ils sont destinés, si les biens ne dépérissent pas par la négligence ou par la fraude des administrateurs, d'examiner si les malades y sont bien servis selon les fondations, si les chapelains, les religieux ou les religieuses qui les desservent et administrent, s'acquittent fidèlement de leurs devoirs et mènent une vie régulière; toutes ces décisions sont conformes aux décrets du concile de Trente, session XXII, chapitre 8, de Reform.: session VII, chap. 15, de Reform., et à ceux des conciles provinciaux de Reims en 4585, de Bourges en 1584, d'Aix en 1583, de Toulouse en 1590, et de Narbonne en 1609.

Il faut remarquer, avec l'auteur des Mémoires du clergé, qu'on peut distinguer deux sortes d'hôpitaux par rapport au gouvernement spirituel, que l'état des lieux ou le titre de la fondation y rendent nécessaire; les uns sont pour l'administration des sacrements, et les autres fonctions de pasteurs, sous la conduite des

curés des paroisses dans lesquelles ils sont situés. Les chapelains qui y sont établis, quoiqu'ils soient titulaires, n'y font les fonctions. que sous l'autorité des curés, ils en sont comme les vicaires dans l'hôpital.

D'autres hôpitaux sont administrés par leurs chapelains sous l'autorité de l'évêque, et n'ont point de subordination aux curés des lieux, pour le gouvernement spirituel. On prétend que cette dernière forme de gouvernement est plus convenable au bon ordre (1). Au reste les droits et les pouvoirs des chapelains sont déterminés par l'évêque, suivant sa prudence. (Voyez AUMÔNIER.)

Quant à l'administration temporelle, on l'a plus particulièrement confiée en France à des laïques. Elle est actuellement purement séculière. Nous ne rapporterons pas ici les lois du 7 octobre 1796, 2 juillet 1799, etc., ni l'ordonnance du 6 juin 1830, qui y sont relatives, nous nous contenterons de renvoyer à notre Cours de législation civile ecclésiastique.

§ III. HÔPITAUX, faveur, priviléges.

Les hôpitaux sont, de tous les établissements pieux, ceux qui paraissent mériter le plus de faveur; aussi leur en a-t-on accordé. dans tous les temps:

1o Les hôpitaux qui ne sont pas érigés et possédés en titre de bénéfice sont exempts de toute charge et contributions, même de celle qui est imposée pour l'érection des séminaires (2).

2o Les hôpitaux jouissent des priviléges des églises : Hospitale gaudet omnibus privilegiis concessis. (L. Omnia privilegia; L. Sancimus, cod. de Episc. et cler.; Archid. in c. Si ex laïcis 10, qu. 1; Abbas in c. Ecclesiæ, de Immunit, eccles.) Les causes des hôpitaux sont donc du nombre de celles qu'on appelle causes pies: Si loca pauperum dicuntur pia, et fruuntur immunitatibus favore et causá pauperum, à fortiori, et ipsi pauperes pii appellari et immunitatibus potiri debent, ut major sit causa quàm causatum.

3o Le concile de Trente a excepté les hôpitaux du réglement qu'il a fait touchant les juges conservateurs.

4o On peut voir au surplus les différents priviléges que les papes Clément III, Pie III et Pie V, ont accordés aux hôpitaux par différentes bulles; la plus célèbre est celle de saint Pie V, commençant par Sacrosanctum.

HOSPICE.

Les religieux appellent de ce nom la maison qui leur sert d'asile dans les villes où ils n'ont point d'autres établissements. Comme ces lieux sont contraires à l'esprit et aux règles de l'Église, sur la forme des monastères, la congrégation des évêques et des réguliers

(1) Mémoires du clergé, tom. XI, pag. 909.

(2) Barbosa, De jure ecclesiastico, lib, 11, cap. 12, n. 31,

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