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gard duquel le terme fatal devrait expirer pendant le temps des vacances, serait par-là même obligé de terminer sa poursuite en expropriation dans le délai de trois ou quatre mois, ce qui serait souvent impossible, ou bien il se verrait exposé au grave inconvénient de la recommencer, de renouveler le commandemeut, et de faire apposer de nouvelles affiches. Ne serait-ce pas multiplier gratuitement les difficultés, les embarras, les frais? Ne serait-ce pas tout à la fois empêcher la libération du créancier, et rendre plus certaine la ruine du débiteur? Il suffit de calculer les conséquences qu'entraînerait le système consacré par la Cour d'appel, pour se convaincre qu'il répugne au texte et à l'esprit de la loi.

Me Mailhe, pour le défendeur, reproduisait les mêmes moyens que ceux de l'arrêt attaqué.

Du 16 floréal an 13, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. de Malleville président, M. Coffinhal rappor teur, par lequel :

« LA COUR, — De l'avis de M. Thuriot, avocat-général; Vu le n° 8 de l'art. 4 de la loi du 11 brumaire an 7, concernant les expropriations forcées, portant: « Si le créan« cier a laissé écouler le délai de six mois depuis la date du « commandement, il ne peut faire procéder à l'affiche qu'a« près un nouveau commandement en la forme, et dans les « délais prescrits par les art. 1 et 2. » ; — Vu la dernière partie de l'art. 28, ainsi conçue : « En cas d'appel, il sera statué <«< comme en matière provisoire, et sans tour de rôle. » ; Considérant que ces dispositions de la loi du 11 brumaire. an 7 placent nécessairement la poursuite des expropriations dans la classe des matières qui requièrent célérité; que, dans le système du jugement attaqué, toutes les adjudications à l'égard desquelles le délai de six mois écherrait dans les deux mois de vacations seraient incertaines, et deviendraient un sujet d'inquiétude pour le poursuivant, et que la sollicitude du législateur s'est appliquée à prévenir ces inconvéniens par la disposition relative à l'appel, et en n'insérant dans la loi aucune disposition d'où l'on pût induire une semblable con

séquence; d'où l'on doit conclure que la loi sur les vacances, arrêter les pour

antérieure de près de trois ans, ne peut pas suites d'expropriation, et ne pouvait pas le faire sans de graves inconvéniens; - CASSE, etc. »

Nota. La Cour de cassation avait déjà jugé la même question dans le même sens, par arrêt du 18 prairial an 11. (V. t. 3 de ce recueil, p. 515.)

COUR D'APPEL DE ROUEN.

La femme est-elle suffisamment autorisée à poursuivre l'interdiction de son mari et à ester en jugement, par l'ordonnance du tribunal qui lui permet de convoquer le conseil de famille, conformément à l'art. 494 du Code civil? (Rés. aff.) (Cod. civ., art. 215, 218 et 222.)

D'HÉRICY, C. SA FEMME.

Le sieur d'Héricy ayant dissipé, en folles dépenses et au jeu, presque toute sa fortune, son épouse, déjà séparée de biens, présente, au tribunal civil d'Yvetot, une requête à fin d'être autorisée à convoquer un conseil de famille pour délibérer sur la conduite et l'état de son mari, et sur le point de savoir s'il convenait de lui faire nommer un conseil judiciaire.

Le 13 fructidor an 11, le tribunal, sur les conclusions du ministère public, accorde à la dame d'Héricy mandement pour la convocation des parens.

Lorsque toutes les formalités sont remplies, un jugement définitif, d'après la délibération de la famille, nomme un conseil judiciaire au mari.

Sur l'appel, le sieur d'Héricy soutient que le jugement et toute la procédure sont nuls, faute, par son épouse, d'avoir reçu de lui ou de la justice une habilitation expresse à ester en jugement; le mandement relatif à la convocation du conscil de famille n'équivaut pas, suivant lui, à une autorisa

tion, qui ne saurait être valable si elle n'est formelle et en termes positifs. Ce n'est point, ajoutait-il, une forme vaine qui puisse se présumer facilement, ou dont l'omission soit susceptible d'être couverte par une approbation tacite, par des actes postérieurs: tout én est absolu, tout en est de rigueur, jusqu'à l'expression même, regardée comme sacramentelle, et que nulle autre ne remplace. Ainsi, de même qu'un simple consentement du mari, signataire du contrat fait par son épouse, n'équivaut point à une autorisation, de même l'accueil fait par un tribunal à la demande de la femme ne supplée point cette aptitude expresse qu'elle devait obtenir pour valider son action, qui pèche par le plus grand de tous les vices, le défaut de capacité.

Par les conclusions de sa requête, a-t-on répondu pour la dame d'Héricy, elle demandait une autorisation pour l'action qu'elle formait contre son mari, et la convocation du conseil, qui en était le préliminaire. Il est clair que le jugement du 13 fructidor, qui lui accorde mandement, sur les conclusions du ministère public, pour assembler les parens, renferme en soi cette autorisation: autrement il serait illusoire. Quoique, en général, l'habilitation de la femme pour les actes civils doive être expresse, néanmoins il est certain actes de la puissance judiciaire qui renferment, sans expression, l'autorisation nécessaire pour tout ce qui en est l'exécution et la conséquence naturelle. Par exemple, dans le cas de la séparation de biens, la femme, par le fait même de cette séparation, est suffisamment habilitée à tous les actes d'une administration générale.

« Lorsque la femme, dit Pothier, Traité de la Puissance • du mari, no 26, est créée curatrice, par le juge, à la per<< sonne et aux biens de son mari, sa nomination à cette cu« ratelle renferme nécessairement une autorisation pour ad• ministrer tant les biens de son mari que les siens. La fem

me n'a donc besoin d'aucune autre autorisation.» Ne peut-on pas dire également que le mandement du 13 fructidor an 11, pour convoquer la famille, à l'effet de délibérer

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sur la conduite du sieur d'Héricy, a été, pour son épouse, une autorisation suffisante à poursuivre l'espèce d'interdiction dont il méritait d'être frappé? - Cette conséquence est forcée, quand on réfléchit que la dame d'Héricy demandait autorisation ; qu'elle ne lui a point été contestée; qu'on n'a pu supposer que la justice ait voulu se jouer d'elle; qu'ainsi, en lui accordant la permission de faire les actes proposés, elle a entendu lui donner l'aptitude pour les faire valablement.

Au reste, la forme de l'autorisation maritale, pour les actes judiciaires et extrajudiciaires, n'est point la même: dans ceux-ci, la déclaration expresse et concomitanté ou antécédente du mari, avec les termes sacramentels, est indispensable; dans les autres, sa présence seule, la conjonction de son nom et de celui de son épouse, sont une autorisation suffisante. Serait-on plus rigoureux dans l'émission de l'autorisation supplétive et représentative de celle du mari, donnée par le juge? Pourquoi ne l'induirait-on pas de ce qu'il accueille sur le fond les demandes de la femme, qui la sollicitait comme un préalable? Ne fait-il pas plus que le mari, lorsque celui-ci assiste simplement à l'instance où les intérêts de son épouse, ses droits, sont discutés?

Du 16 floréal an 13, ARRÊT de la Cour d'appel de Rouen, MM. Daviel et Gady avocats, par lequel :

« LA COUR, — Considérant que la dame d'Héricy a demandé l'autorisation du juge, aux fins de procéder et de faire nommer un conseil judiciaire à son mari; Considérant que cette autorisation a été donnée, d'après les conclusions du ministère public, par l'ordonnance qui a accordé mandement aux fins de la convocation des parens;

« Sans s'arrêter à la nullité proposée comme moyen d'appel, Dir qu'il a été valablement et régulièrement jugé, etc.»

COUR D'APPEL DE ROUEN.

En matière criminelle, le pourvoi en cassation, suspensif

pour la peine, l'est-il également pour les autres condamnations? (Rés. aff.)

FAURESSE, C. LA RÉGIE.

Le nommé Fauresse, condamné par arrêt de la Cour de justice criminelle de Rouen, du 30 pluviôse an 13, comme coupable de meurtre sur la personne d'un curé dont il avait acheté les biens à rente viagère, s'était pourvu en cassation.

Sans attendre que la Cour suprême eût prononcé sur la requête, le directeur de la Régie de l'enregistrement, pour sûreté des dépens adjugés au trésor public, a fait apposer les scellés au domicile de Fauresse sur ses meubles.

La levée en a été ordonnée par un jugement du tribunal civil de Rouen.

Sur l'appel, la Régie alléguait, en fait, que Fauresse ne possédait d'autres immeubles que celui qui était la cause de son crime, et qui, vraisemblablement, devait échapper et à lui et à ses héritiers; que son mobilier, seul passible des frais de justice, pouvait être soustrait d'un moment à l'autre aux poursuites du domaine national.

Elle soutenait, en droit, que, si le pour voi suspendait l'application de la peine, les condamnations pécuniaires n'en demeuraient pas moins exécutoires; que le motif de la suspension, quant à la peine, était l'impuissance de réparer le mal qu'une exécution précipitée pouvait entraîner; qu'il n'en était pas de même des autres dispositions relatives à l'intérêt; qu'elles rentraient dans la classe des condamnations purement civiles, dont elles devaient partager les effets; elle fortifiait cette distinction de l'art. 445 du Code des délits et des peines.

C'est uniqueinent dans ce sens, ajoutait-elle, que la loi du 18 germinal an 7, qui a mis les frais de justice à la charge des condamnés, est susceptible d'être entendue. Son esprit et son vœu sont déterminés par plusieurs lettres ministérielles de l'an 8, qui autorisent, en cas de pourvoi de la part des condamnés, les préposés de la Régie de l'enregistrement à

Tome VI.

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