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la vérification par experts, au moins est-il incontestable que la loi n'a, dans tous les cas, laissé aux parties que l'initiative de recourir à l'une ou à l'autre, et que, le choix une fois fait, il n'est pas permís de revenir au moyen qu'on a négligé.

La raison seule détermine cette conséquence nécessaire. Comment, en effet, pourrait-on admettre concurremment les deux preuves? Très-souvent elles seraient opposées l'une à l'autre, et s'entre-détruiraient. Or, dans une pareille hypothèse, quel serait le moyen de connaître la vérité? à laquelle des deux preuves contraires devrait-on ajouter foi ? à laquelle donnerait-on la préférence? Il est évident que ce concours, loin de servir à jeter plus de lumière dans la cause, ne produirait qu'une fausse lueur qui tendrait à augmenter l'incertitude et l'obscurité. Dans l'espèce, l'appelant, ayant été le premier à conclure à la vérification par experts, n'est donc plus recevable à provoquer la preuve par témoins. Sa demande d'ailleurs est nouvelle; ses conclusions n'avaient rien précisé, à cet égard, en première instance, et il n'a pu les changer ni les augmenter devant les nouveaux juges.

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Du 6 frimaire an 14, ARRÊT de la Cour d'appel de Rouen, deuxième chambre, par lequel :

« LA COUR, -Vu l'article 7 du titre 12 de l'ordonnance de 1667; -Considérant que, d'après l'article précité, . comme aussi d'après l'article 12, titre 3, de l'ordonnance de 1737, conforme à la novelle 73, la vérification d'une pièce contestée peut se faire tant par experts que par témoins; — Que, dans le fait particulier, l'appelant, lors du procès verbal des experts, s'est réservé la voie de la preuve testimoniale, et que d'ailleurs il existe des circonstances d'après lesquelles il est possible que lesdits experts aient erré dans leur rapport; Sans avoir égard aux fins de non recevoir, ApPOINTE à faire preuve, etc. »>

Nota. Voir les art. 195 et suivans, et 252 et suivans, du Code de procédure civile.

COUR DE CASSATION.

L'acquéreur qui depuis son entrée en possession est troublé par le fermier qui demande à jouir de l'effet de son bail peut-il exercer contre lui l'action possessoire? (Rés. aff.)

POURVOI DU SIEUR FOURNIER.

Le 6 floréal an 11, les sieurs Bonneren et Gailleton se rendent adjudicataires d'une portion d'héritage appartenante į des mineurs, et qu'un sieur Fournier tenait à ferme, à l condition expresse qu'en cas de vente, le bail demeurerait résilié de plein droit.

Le 2 nivôse an 12, les acquéreurs font transcrire leur contrat, et immédiatement après s'être mis en possession, ils ordonnent des travaux pour convertir en jardin la portion de terre par eux acquise. Fournier s'oppose à leur continuation, et fait lui-même de nouveaux ouvrages sur ceux déjà

exécutés.

Bonneren et Gailleton le traduisent alors devant le juge de paix, et concluent à ce qu'il lui soit ordonné de cesser son trouble, et à ce qu'il soit condamné à 9 f. de dommages et intérêts.

Fournier s'est contenté d'opposer son bail à cette de

mande.

Le 16 ventôse an 12, jugement du juge de paix, qui, attendu que Bonneren et Gailleton n'avaient point été chargés d'entretenir ce bail, les déclare recevables et fondés dans leur action en complainte, et condamne Fournier en dommages et intérêts. Pourvoi en cassation pour incompétence et excès de pou

voir.

5 f. de

Le demandeur a soutenu que la question soumise au juge de paix était celle de savoir si des acquéreurs pouvaient, sans notification préalable de leur titre d'acquisition, expu!ser un fermier qui prétendait avoir droit de jouir de l'effet

de son bail, et que cette question sortait évidemment de la compétence du juge de paix.

Du 6 frimaire an 14, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. de Malleville président, M. Gandon rappo teur, par lequel : « LA COUR, Contre l'avis de M. Jourde, substitut du procureur-général; - Considérant que la possession du vendeur se continue dans l'acquéreur, et qu'ainsi Bonneren et Gailleton avaient qualité pour former l'action possessoire ;

Que l'action par eux intentée tendait à faire cesser le trouble qu'ils éprouvaient, et était une action possessoire, et que par sa nature et la qualité de sa demande elle était de la compétence du juge de paix en dernier ressort; — REJETTE, etc. »

COUR DE CASSATION.

Celui qui remplit une mission légale, quoique passagère, un expert, par exemple, imprime-t-il une date certaine aux actes qu'il est chargé de faire? (Rés. aff.)

MAKLOT, C. La Régie de L'ENREGISTREMENT.

tac

Par acte public du 2 brumaire an 12, le sieur Maklot acquiert un immeuble moyennant la somme de 35,000 fr. Cet acte ayant été présenté à l'enregistrement, le receveur prétend que le prix apparent de la vente est au-dessous de la valeur vénale de l'immeuble aliéné: en conséquence il demande, conformément à la loi du 22 frimaire an 7, que cette valeur soit fixée par experts.

Deux experts sont respectivement nommés. Ils se trouvent divisés dans le résultat de leur vérification. Le sieur Remy est désigné pour tiers expert par le juge de paix, en exécution de l'art. 18 de la même loi. Le tiers expert, après avoir prêté serment, fait son travail. Le procès verbal est arrêté, clos, et signé des trois experts, le 25 messidor an 12.

Le

29,

la Régie propose une récusation contre le sieur Remy. Maklot la soutient tardive comme faite plus de trois

jours après la clôture; cependant elle est admise par le tribunal de Verdun, sur le fondement que les actes sous signature privée n'ont de date certaine que du jour de leur enregistrement; que, le procès verbal des experts n'ayant été enregistré que le 18 thermidor, c'est à cette époque seule que se rapporte son existence légale, et que par conséquent l'acte de récusation, quoique postérieur en apparence à ce procès verbal, doit être considéré comme lui étant de beaucoup antérieur.

Le sieur Maklot se pourvoit en cassation pour violation de l'art. 18 de la loi du 22 frimaire an 7 et pour excès de pouvoir.

Du 6 frimaire an 14, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. de Malleville président, M. Dutocq rapporteur, M. Jourde avocat-général, M. Darieux avocat, par lequel:

« LA COUR, —Vu les art. 18 et 22 de la loi du 22 frimaire an 7 ; — Attendu que les experts ont été nommés en conformité de la loi; que le tiers expert a été nommé par le juge de paix, d'après l'art. 18 de la loi du 22 frimaire an "; qu'il a dressé et signé son procès verbal conjointement avec les deux premiers experts avant la récusation, par la Régie, du dit tiers expert; que le procès verbal ne peut être assimilé aux actes dont parle l'art. 22 de ladite loi du 22 frimaire › qui n'ont de date certaine que du jour de leur enregistrement, par la raison que ce tiers expert avait une mission légale, et que par-là son procès verbal faisait foi par lui-même; d'où il suit que la récusation de la Régie a été tardive, et que le tribunal de première instance de Verdun a fait une fausse application de cet article;-CASSE, etc. »>

COUR DE CASSATION.

L'arrêt de compétence qu'une Cour spéciale a rendu à l'égard d'un contumax est-il anéanti par arrestation? (Rés. aff.)

le fait de son

POURVOI DE MEIZONNET.

Quoique cette question fût affirmativement résolue par vis du conseil d'Etat, du 26 ventôse an 11, la Cour spéale du Puy l'avait néanmoins décidée dans un sens conaire, en déclarant qu'il n'était pas besoin d'un nouvel rrêt de compétence pour soumettre à sa juridiction le ommé Meizonnet, accusé de faux, contre lequel elle avait récédemment rendu par contumace un arrêt de cette nare, et que celui-ci soutenait anéanti par le fait de son arestation; mais, sur le pourvoi de l'accusé, cette décision a bi la juste censure de la Cour suprême.

Du 9 frimaire an 14, ARRÊT de la section criminelle, 1. Vieillart président, M. Babille rapporteur, par lequel: « LA COUR, Vu les art. 23 et 24 de la loi du 18 pluiôse an 9; -Et attendu que de ces articles il résulte que 'interrogatoire et les réponses de l'accusé, quand ils peuvent voir lieu, sont les élémens nécessaires des arrêts de compéence; - Que l'arrestation de l'accusé doit donc anéantir 'arrêt de compétence rendu par contumace, et que cette conséquence des art. 23 et 24 de la loi ci-dessus citée a été déclarée par l'avis du conseil d'Etat, du 26 ventôse an 11;

Et attendu que les arrêts définitifs et même interlocutoires sur le fond des Cours de justice spéciale ne peuvent avoir de caractère légal, s'ils n'ont pour base un arrêt de compétence préalable; que néanmoins la Cour de justice criminelle et spéciale du département de la Haute-Loire a rendu, les 20 et 21 fructidor derniers, un arrêt par lequel elle a déclaré d'abord son arrêt de compétence, rendu par contumace, toujours subsistant, nonobstant l'arrestation de Meizonnet; et ensuite elle a ordonné, avant faire droit sur le fond, une vérification par experts de pièces arguées de faux; d'où il suit que cette Cour a violé la disposition des articles ci-dessus, en refusant de régler de nouveau sa compétence ; CASSE, etc. >>

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