L'origine de ces peuplements, d'autre part, n'est pas contestable : créés à l'époque où, surtout en Basse-Bretagne, on ne connaissait que le pin de Riga, ils ne pouvaient avoir d'autre origine que baltique.

Or, dans les pins que j'ai vus en Alsace, tout, absolument tout, m'a rappelé de façon frappante les pins du Morbihan, m'apportant une fois de plus la preuve de l'analogie des provenances septentrionales et montagnardes.

Mais il est aisé de constater qu'à côté de ces peuplements d'élite il en est, en Alsace, d'autres qui sont loin de présenter les mêmes qualités. On trouve, en effet, çà et là, des peuplements médiocres, ou franchement mauvais, dont les longues aiguilles bleutées décèlent suffisamment l'origine.. Ce sont des pins de Haguenau, ou des pins d'origine allemande, avec toutes leurs tares.

J'ai, en 1919, visité la forêt de Haguenau, et je dois déclarer sans ambages que ses pins, dans l'ensemble, sont de qualité plus que médiocre 1. On peut discuter la question de l'indigénat du pin sylvestre à Haguenau, Personnellement je serais disposé à la contester, d'autant plus que son introduction artificielle dans la forêt de Bienwald, plus au Nord, est, parait-il, certaine. Peu importe d'ailleurs: autochtone ou non, le pin de Haguenau appartient nettement au type des basses altitudes de l'aire moyenne du pin sylvestre et en a, à un haut degré, tous les défauts.

Et cependant, jusqu'en 1870, la forêt de Haguenau a eu le monopole de la fourniture de la graine de pin sylvestre à l'Administration des Forêts. Puis ce fut, pendant de longues années, le monopole de la graine allemande. Et dans les Vosges alsaciennes, comme sur tant d'autres points en France, en plaine comme en montagne même en Auvergne! la race inférieure a pris la place que seule la race noble aurait dû occuper. Une erreur dans la provenance des semences de céréales, par exemple, se répare l'année suivante Mais en matière d'arbres! C'est pour un siècle et plus que l'avenir est engagé.

Allons-nous, maintenant que la Forêt sainte est redevenue française, répéter l'erreur d'antan? Ce serait une lourde faute. Viendrait-il jamais

1.- Je ne puis résister à la tentation de mettre sous les yeux du lecteur les lignes suivantes extraites de la Sylviculture de Bagneris (2a edit., 1878): « Le pin sylvestre « est une essence envahissante, et, notamment dans la forêt de Haguenau, il s'est subs<< titué aux feuillus à l'aide des anciennes exploitations à blanc étoc. Dans ces sols, « trop riches pour lui, sa régénération est rendue difficile par suite d'une végéta<«<tion herbacée abondante. Il y a lieu d'y ramener progressivement le chêne. Il y « donne, en effet, des produits de première qualité, tandis que le pin, qui est là à la « limite extrême de sa station en plaine, ne fournit que du bois de qualité médiocre. >

à un forestier des Vosges ou du Jura l'idée de s'approvisionner de graines de sapin en Normandie où cependant cette essence, indigène, n'est séparée de ses congénères de l'Est que par des différences bien moindres que celles qui distinguent le pin des Vosges de celui de Haguenau?

A vous donc, camarades d'Alsace, à veiller que dans les Vosges on ne sème pas une graine qui ne provienne de semenciers vosgiens authentiques.

R. HICKEL

LE MARCHE DES BOIS EN ALLEMAGNE

Nous publions ci-après trois notes qui nous ont été envoyées successivement par M. Demorlaine, Inspecteur principal des Eaux et forêts, chef de la Mission de contrôle de réception des bois à livrer par l'Allemagne à la France. Elles rendent compte de la situation du Marché des bois en Allemagne aux dates indiquées et permettent de faire d'intéressantes comparaisons avec les cours pratiqués en France aux dernières ventes et dont nous avons donné le tableau dans le dernier numéro de la Revue.

Wiesbaden, le 25 novembre 1921.

A l'occasion de la discussion du budget, dans un récent discours au Landstag bavarois, reproduit par les Neueste Münchener Nachrichten, le ministre des Finances de Bavière, le Docteur Krausneck, s'exprimait ainsi sur la situation du marché du bois.

« Il n'est pas encore possible de prévoir complètement, dès maintenant, la marche du cours des bois pendant la campagne 1921-1922; mais il est à présumer que le marché va se montrer plus animé. Les demandes de bois affluent de toutes parts; les dernières ventes se sont faites à des prix rémunérateurs ; ce résultat est dû, en grande partie, à la dépréciation du mark, qui provoque une hausse dans le prix des marchandises.

L'administration forestière bavaroise doit s'efforcer d'obtenir des prix raisonnables, sans cependant chercher par spéculation des prix qui nuiraient, non seulement à l'industrie et au commerce des bois, mais jetteraient, en dernière analyse, un discrédit sur l'administration. »

Le ministre s'explique, en outre, sur le rôle de l'administration forestière, qui doit s'efforcer de maintenir, en Bavière, l'activité des bois, qui a pu résister victorieusement à la crise de l'an dernier.

Cette déclaration était nécessaire, ajoute le journal, en raison de l'importance particulière du bois dans la vie économique, en général, et une des principales ressources, en particulier, des finances bavaroises.

Qu'on nous permette d'ajouter une observation qui nous est suggérée par la lecture de cet article, par comparaison avec ce qui se passe dans notre pays.

Le gouvernement se préoccupe d'une façon toute spéciale de la question forestière, et invite l'administration forestière à s'intéresser le plus possible au marché et au commerce des bois, qu'elle est chargée de produire. Nous aurions peut-être, nous aussi, en France intérêt à profiter de ce conseil.

Les cours actuels pratiqués en Allemagne peuvent se résumer de la façon suivante:

Ils varient légèrement suivant les régions, Bavière, Thuringe, Prusse, Saxe, Pays de Bade, Wurtemberg.

Les prix en Bavière, pour les bois en grume, sont actuellement un peu plus élevés que dans les autres régions forestières de l'Allemagne. Là, en général, la surenchère n'a pas de limite.

Cette situation aura prochainement comme résultat de procurer un bénéfice insuffisant aux négociants en débités, ce qui occasionnera l'année prochaine des pertes sérieuses aux acquéreurs de bois en grume. On oublie trop de tenir compte de la diminution du pouvoir d'achat, en général, et, l'on pense trop peu à l'amélioration possible du cours du Mark dans l'avenir, qui entraînera une diminution de l'exportation. Aux dernières adjudications en Bavière les billes de pin ou de sapins se sont vendues à des prix dépassant 75 ou 100 % les estimations 1.

Pour l'intelligence de ces prix et leur conversion en francs, le mark peut être évalué au cours de 0,06

Le hêtre commun a été payé jusqu'à 145 % au dessus des estimations

Hêtre pour traverses de chemins de fer, très demandé aux prix de :

N. B. — Les classements indiqués se rapportent aux dimensions différentes des billes au petit bout.

Le metre cube de rondins s'est vendu 85 marks.

Le bois de pin pour caisses a atteint jusqu'à 180 marks le mètre cube.
Les bois << lancés » ont atteint au stère les prix suivants]:

Ces prix ne sont que des prix exceptionnels résultant d'une véritable spéculation, car, en général, ils correspondent aux prix payés par les fabriques de papier pour les bois livrés en seconde main rendus franco à la fabrique.

Dans ces régions les tronces équarries prises en forêt se sont vendues aux prix suivants :

Les traverses de chemins de fer ont atteint les prix suivants :

Dans le pays de Bade, dans les forêts de l'Etat, les ventes n'ont porté, pendant tout le mois de septembre dernier, que sur 18.500 mètres cubes en chiffres ronds, ne comprenant pour ainsi dire que du matériel de fraîche coupe. Les prix moyens ont été les suivants :