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pièces d'héritage et la nature des fruits qui y sont pendants, ainsi que la personne du commissaire qu'il y établit (1).

Le procès-verbal doit, au surplus, être revêtu de toutes les formalités expliquées ci-dessus pour les autres saisies, et il en doit être donné copie, tant au commissaire qu'à la partie saisie, avec assignation à cette partie pour voir ordonner l'adjudication en justice des fruits saisis.

Cette assignation est particulière à la saisie des fruits pendants par les racines; dans la saisie des simples meubles, il n'y a point de pareille assignation, l'huissier pouvant vendre, après la huitaine, sur une ordonnance du juge, les effets saisis, s'il n'y a point d'opposition de la part du débiteur.

Quelquefois on ne procède pas à l'adjudication des fruits, et le commissaire en fait la récolte, ce qui arrive quand il n'y a pas un temps suffisant depuis la saisie jusqu'à la récolte pour faire l'adjudication (2); il est évident qu'en ce cas il ne faut point d'assignation.

Au reste, l'usage est de ne point faire les saisies de fruits pour les blés avant la Saint-Barnabé, et pour les vignes avant la Madelaine (3).

ART. V.

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· Des gardiens et dépositaires des choses saisies.

§ Ier. Ce que c'est que gardien et dépositaire, et leur différence.

460. Le gardien est celui qui est préposé par l'huissier, de la part du saisissant, à la garde des choses saisies.

On peut en établir un, ou plusieurs, lorsqu'un seul ne serait pas suffisant pour cette garde.

Lorsqu'on établit plusieurs gardiens, on les appelle garnison.

Le depositaire des effets saisis est celui qui est présenté par le saisi, et qui pour lui faire plaisir et éviter les frais, se charge volontairement et gratuitement de la garde des effets saisis (*).

(1) V. art. 626, 627 et 628, C. proc. Art. 626: « La saisie-brandon ne « pourra être faite que dans les six se<<maines qui précéderont l'époque or« dinaire de la maturité des fruits : « elle sera précédée d'un commande«ment, avec un jour d'intervalle. »

Art. 627 « Le procès-verbal de «< saisie contiendra l'indication de cha« que pièce, sa contenance et sa situa«<tion, et deux au moins de ses te«nants et aboutissants, et la nature « des fruits. >>

Art. 628 : « Le garde champêtre << sera établi gardien, à moins qu'il ne soit compris dans l'exclusion portée « par l'art. 598 (V. ci-après, p. 212, << note 2); s'il n'est présent, la sai-« « sie lui sera signifiée : il sera aussi << laissé copie au maire de la commune » de la situation, et l'original sera visé ▾ par lui. Si les communes sur lesquelles les biens sont situés sont contigues ou voisines, il sera établi un * seul gardien, autre néanmoins qu'un

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garde-champêtre ; le visa sera donné « par le maire de la commune du chef« lieu de l'exploitation; et s'il n'y en « a pas, par le maire de la commune « où est située la majeure partie des « biens. >>

(2) Ce cas particulier n'a pas été prévu par le Code de procédure; mais le gardien peut se faire autoriser par ordonnance à faire cueillir les fruits, qui seront vendus suivant les formalités prescrites au titre des Saisiesexécutions, dont les règles sont d'ailleurs déclarées applicables à la saisiebrandon par l'art. 634, C. proc.

Art. 634 « Seront, au surplus, observées (dans la saisie-brandon) les formalités prescrites au titre des « Saisies-exécutions. »

(3) « Dans les six semaines qui précéderont l'époque ordinaire de la ma turité des fruits, » porte l'art. 626, C. proc., ci-dessus, note 1.

(*) V. art. 596 et 597 C. proc.
Art. 596 « Si la partie saisie offre

461. Il suit de ces définitions qu'il y a trois principales différences entre un gardien et un dépositaire.

La première est que l'office du dépositaire est un office d'amitié et gratuit (1); au lieu que l'office de gardien est un office nécessaire, pour lequel il est dû au gardien un salaire qu'il se fait taxer par chacun jour qu'il a vaqué à la garde; cette somme est laissée à la discrétion du juge (*).

il se

Le juge écrit cette taxe au bas de l'acte de commission du gardien. La seconde est que l'office de dépositaire est un office volontaire, charge volontairement; au contraire, l'office de gardien est une espèce de fonction publique ; c'est pourquoi, si la personne que l'huissier veut établir gardien refuse de l'accepter, l'huissier doit l'assigner devant le juge qui la condamnera à se charger de la garde (3), si elle n'a quelque cause d'excuse qui l'en exempte.

Ces excuses sont fondées, ou sur la qualité des personnes, ou sur l'état, ou sur l'âge et les infirmités.

Un ecclésiastique, un gentilhomme, un officier de judicature, un avocat ne peuvent être contraints d'être gardiens: l'âge de soixante-dix ans accomplis, et les infirmités du corps sont aussi une excuse. Argument tiré de la loi 2, § 1, ff. de Vacat. et Excus. munerum, et de la loi dernière, Cod. qui ætate vel profess. se excus.

Il a été jugé, par un arrêt du 13 décembre 1614, rapporté par Tronçon en son Traité du Droit français, tit. 16, art. 350, vo Commissaires, que le nombre de cinq enfants n'exemptait pas de cette charge, parce que cette fonction n'est que passagère.

La troisième différence entre le gardien et le dépositaire, est que le gardien est préposé par l'huissier, de la part du saisissant, au lieu que le dépositaire est offert par le saisi.

462. De là il suit: 1° que suivant le principe de droit, suivant lequel chacun est responsable des faits de son préposé, dans ce qui concerne l'affaire pour laquelle il a été préposé, l'huissier qui a préposé le gardien est responsable envers le saisi des faits de ce gardien, au cas que par sa faute il ne représentât pas les effets saisis. Coquille, question 313.

<< un gardien solvable, et qui se charge <«< volontairement et sur-le-champ, il « sera établi par l'huissier. »

a

Art. 597: « Si le saisi ne présente gardien solvable et de la qualité re« quise, il en sera établi un par l'huis« sier.» (V. note suivante.) (1) V. art. 1917, C. civ.

Art. 1917 « Le dépôt proprement << dit est un contrat essentiellement « gratuit. »

Mais il est à remarquer que l'art. 596, C. proc. (V. note précédente), a retranché le mot gratuitement, en sorte que le dépositaire offert par le saisi, constitue aujourd'hui un véritable gardien.

(3) Cette taxe n'est plus laissée à la discrétion du juge, elle est réglée par l'art. 34 du Tarif civil du 16 septembre

1807.

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(3) Il est fort douteux qu'un gardien puisse être constitué sans son consentement, c'est à l'huissier ou au créan cier de trouver un gardien qui veuille se charger de l'office: nous ne croyons même pas qu'un séquestre qui cependant est directement commis par justice, puisse être contraint à l'acceptation. V. ci-dessus, p. 137, n. 1. Cette règle de l'ancien droit ne doit done pas être suivie.

2° Que le saisissant en doit être responsable envers le saisi, car c'est de sa part qu'il a été préposé; il est censé l'avoir préposé lui-même, par le ministère de son huissier. C'est par cette raison que, par arrêt du 4 septembre 1766, rapporté par Denizart, vo Gardien, il a été jugé que le saisissant était responsable du gardien pendant trente ans, de manière que la partie saisie pouvait s'adresser au saisissant, sans que ce dernier pût la renvoyer au gardien.

Au contraire, le dépositaire étant offert et choisi par le saisi, celui-ci n'est pas recevable à vouloir rendre responsable l'huissier, ni le saisissant, des faits du dépositaire; parce que ce n'est point par leur choix, mais par celui du saisi, que la garde lui a été confiée (1).

A ces différences près, les charges du dépositaire et du gardien sont semblables, et leurs obligations sont les mêmes.

SII. Quelles personnes peuvent ou ne peuvent pas être gardiens et dépositaires

463. L'ordonnance, tit. 19, art. 13, défend aux huissiers d'établir pour gardiens aux saisies (2):

1o Le saisi, sa femme, ses enfants, ou petits-enfants; car la saisie consistant à ôter les choses saisies des mains du saisi, pour les faire passer dans celles de la justice, il est contre la nature de la saisie de les laisser entre les mains du saisi, ou des personnes qui sont comme d'autres lui-même.

La peine de l'huissier pour la contravention à cette disposition est qu'il soit tenu des dommages et intérêts du saisissant (3). Ibid

2o Par la même raison, les domestiques du saisi ne doivent pas être établis pour gardiens, car ce serait les laisser entre les mains du saisi, que de les laisser à la garde des personnes sur lesquelles il a le droit de commander ('). Chenu rapporte un arrêt du 8 février 1590, qui l'a jugé ainsi.

L'ordonnance de Blois va mêine plus loin, car, en l'art. 106, elle défend d'établir pour commissaire, aux biens du seigneur, son laboureur, quoique le saisi ait moins d'autorité sur son laboureur que sur son domestique; cette disposition est limitée dans l'usage, au cas auquel le seigneur saisi réside sur le lieu où sont les biens saisis et le laboureur.

Il y a une seconde raison pour laquelle la femme, les enfants et les gens qui sont au service du saisi ne doivent pas être établis gardiens, qui se tire de l'intérêt qu'ont ces personnes à n'être pas chargées d'une fonction que leur proximité avec le saisi les met hors d'état de remplir, en ne leur donnant pas la liberté de s'opposer aux détournements qu'il voudrait faire.

3o Par une raison semblable à la dernière que nous venons de rapporter, les frères, neveux et oncles du saisi ne peuvent être établis gardiens (5) (ibid., art. 14); mais comme cette différence n'est fondée que sur les propres intérêts, et que volenti non fit injuria, ils peuvent être établis gardiens, s'ils y consentent expressément par le procès-verbal de saisie, qu'ils l'aient signé, ou dé claré ne pouvoir signer; cette restriction est exprimée dans le même article que je viens de citer (6).

(1) Cette distinction, justifiée par la « ront être établis gardiens, de leur nature même des choses, doit être ad-«< consentement et de celui du saisismise. « sant. >>

(2) V. art. 598, C. proc.

Art. 598 « Ne pourront être éta«blis gardiens, le saisissant, son con<< joint, ses parents et alliés jusqu'au degré de cousin issu de germain in«clusivement, et ses domestiques; << mais le saisi, son conjoint, ses pa

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(3) La peine est la nullité de la saisie, sauf les dommages-intérêts s'il y a lieu. V. ci-dessus, p. 209, note 4. (4) V. même art. 598, C. proc., dessus.

ci

(5) V. même article.
(6) V. même article, in fine, qui

« rents, alliés et domestiques, pour-ajoute aux parents, le saisi lui-même,

Il y a donc cette différence entre les parents et les personnes mentionnées ci-dessus, que celles-ci ne peuvent être gardiens quand même ils y consentiraient, au lieu que ces autres le peuvent être s'ils y consentent expressément.

4o Il est défendu aux huissiers d'établir pour gardiens aucuns de leurs parents, ou alliés (') (ibid., art. 13); à plus forte raison l'huissier ne peut s'établir lui-même gardien; cela est défendu par une ordonnance de Philippe de Valois, de l'année 1338, et une autre de Charles VI, de 1408, qu'on trouve dans le Style du Parlement, partie III.

Il ne peut pas non plus établir pour gardien, son domestique, c'est comme s'il s'établissait lui-même ; cela a été ainsi ordonné pour empêcher les fraudes qui pourraient se commettre (2).

Denizart, vo Gardiens, no 7, rapporte un arrêt du 17 septembre 1729, en vacations, qui a fait défenses aux procureurs de se rendre gardiens des choses saisies sur les parties adverses de leurs clients, lorsqu'ils auront occupé dans la cause (3). Argument de l'art. 132 de l'ordonnance de Blois.

Mais rien n'empêche que l'huissier ne puisse établir pour gardien son recors dans une saisie mobilière, parce que ce recors n'est pas partie nécessaire dans cet exploit depuis l'édit du contrôle du mois d'août 1669, que nous avons déjà cité.

5o Le saisissant ne peut pas être établi pour gardien (); car ce serait en quelque façon se faire justice par soi-même; mais rien n'empêche que les parents ou alliés du saisis ant ne puissent être établis gardiens; quoiqu'un créancier opposant à la saisie soit en quelque façon saisissant, néanmoins rien n'empêche qu'il ne puisse être établi gardien.

6 On ne peut établir pour gardiens que des personnes en état de répondre des effets commis à leur garde, et qui puissent y être facilement contraintes par les voies usitées en pareil cas (5), d'où il suit qu'on ne peut établir pour gardiens: 1o des personnes insolvables;

2o Des non-domiciliés sur le lieu; car il serait trop difficile de les contraindre ;

3o Des mineurs ; car ils ne peuvent s'obliger;

4 Des ecclésiastiques, car ils ne sont pas sujets à la contrainte par corps (*), qui a lieu pour contraindre les gardiens à la représentation des effets saisis; 5° Enfin, des femmes (7), par la même raison, et parce que c'est officium civile, dont elles sont incapables.

Observez que, si un huissier avait établi pour gardien une personne prohibée par l'ordonnance, ou de l'une des qualités dont je viens de parler, ignorant de bonne foi la qualité de cette personne; V. G. si cette personne avait déclaré à l'huissier n'être parent, allié, ni domestique du saisi, alors il y a lieu de croire que cet huissier ne serait tenu d'aucuns dommages et intérêts envers le saisissant; ce qui doit dépendre au surplus des circonstances.

son conjoint, ses alliés et domesti- | ni ses parents et alliés jusqu'au degré ques; il n'exclut que le saisissant, son de cousin issu de germain inclusiveconjoint, ses parents et alliés jusqu'au ment, ni ses domestiques. Art. 598, degré de cousin issu de germain inclu-C. proc., ci-dessus, p. 212, note 2. sivement, et ses domestiques.

(1) Cette défense ne subsiste plus. Toutefois, l'huissier ne pourrait pas luimême s'établir gardien même du consentement de toutes les parties. (*) Même observation.

(3) Même observation.

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(5) La contrainte par corps.

(6) Les ecclésiastiques ne sont plus aujourd'hui dispensés de la contrainte par corps, mais ils ne doivent pas être constitués gardiens, honestatis causâ.

(") Les femmes n'étant pas sujettes. à la contrainte par corps, ne peuvent

(*) Ni le saisissant, ni son conjoint, I être constituées gardiennes sur saisje.

§ III. De l'acte d'établissement des gardiens.

464. L'huissier établit le gardien par un acte par lequel il déclare qu'il a commis un tel à la garde des effets saisis, par exploit de cejourd'hui.

Cet acte est signé par cet huissier et par le gardien, ou bien il est fait mention que le gardien ne sait signer (1).

L'huissier ayant établi le gardien à la saisie doit le mettre en possession des effets saisis, s'il le requiert (tit. 19, art. 15), et même les déplacer à cet effet, et les faire conduire en la maison du gardien, s'ils ne peuvent pas se garder sûrement sans cela, ou bien le gardien doit demeurer dans la maison du saisi pour les garder, et on doit lui remettre à cet effet les clefs des coffres et armoires où sont toutes les choses saisies.

Celui qui par violence empêcherait l'établissement du gardien, ou enleverait les effets saisis, doit être condamné en cent livres d'amende envers le roi, et au double de la valeur des effets envers la partie, sans préjudice des poursuites extraordinaires (2). Ibid., art. 17.

§ IV. Des obligations des gardiens.

465. Les gardiens sont obligés à garder exactement les effets commis à leur garde, à les représenter, soit au saisissant, soit à son huissier, lorsqu'il voudra procéder à la vente, soit au saisi, s'il a obtenu mainlevée de la saisie s'il en a perdu quelques-uns, ou qu'ils aient été détournés par sa faute, il est responsable du dommage, soit envers les créanciers saisissants et opposants, soit envers le saisi.

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Si les effets ont été détournés par le saisi, ou, c'est par la faute du gardien qui n'a pas vaqué à la garde, et il en est responsable envers les créanciers, sauf son recours contre le saisi; ou le saisi les a enlevés par violence, et alors il n'en est pas responsable, il doit seulement en faire dresser procès-verbal (3). Il est très expressément défendu aux gardiens de se servir des choses saisies pour leur usage particulier, ou de les louer à d'autres, à peine de privation de leurs frais de garde, et des dommages et intérêts des parties (*), tit. 33, art. 9.

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(1) Il n'est pas besoin de dresser un « de deux ans au plus, amende et acte particulier de l'établissement du dommages-intérêts. Il sera puni gardien, c'est dans le procès-ver-« des peines portées en l'art. 401, si la bal même de saisie que cette déclara-« garde des objets saisis et par lui détion doit être insérée; c'est pour cela que le gardien est tenu de signer ce procès-verbal. V. art. 599, C. proc., ci-dessus, p. 209, note 1.

(2) V. art. 600, C. proc. Art. 600: « Ceux qui, par voies de « fait, empêcheraient l'établissement « du gardien, ou qui enlèveraient et << détourneraient des effets saisis, se«ront poursuivis conformément au « Code d'instruction criminelle. »

« truits ou détournés avait été confiée « à un tiers (peines du vol, emprison«nement d'un an au moins, et de cinq « ans au plus, amende, interdiction «facultative de certains droits civils, « civiques et de famille, mise en sur«veillance de la haute police faculta« tive). Celui qui aura recélé « sciemment les objets détournés, le «< conjoint, les ascendants et des«cendants du saisi qui l'auront aidé (3) V. art. 400, C. pén., §§ 2, 3 et 4. << dans la destruction ou le détourneArt. 400: « Le saisi qui aura détruit«ment de ces objets, seront punis << détourné ou tenté de détourner des « d'une peine égale à celle qu'il aura <«< objets saisis sur lui et confiés à sa « encourue. »> « garde, sera puni des peines portées << en l'art. 406 (abus de confiance, em. prisonnement de deux mois au moins,

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() V. art. 603, C. proc.

Art. 603 « Le gardien ne peut se << servir des choses saisies, les louer

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