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DES

ACTIONS JUDICIAIRES

DES COMMUNES

ET DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS

(COMMENTAIRE DE LA LOI DU 8 JANVIER 1905)

(SUITE 1.)

ART. 124

Actions à intenter contre la commune.

LOI DU 5 AVRIL 1884 MODIFIÉE
PAR LA LOI DU 8 JANVIER 1905

Aucune action judiciaire autre que les actions possessoires ne peut, à peine de nullité, être intentée contre une commune qu'autant que le demandeur a préalablement adressé au préfet ou au sous-préfet un mémoire exposant l'objet et les motifs de sa réclamation. Il lui en est donné récépissé.

L'action ne peut être portée devant les tribunaux qu'un mois après la date du récépissé, sans préjudice des actes conservatoires.

La présentation du mémoire in

1. Voir la livraison d'aoùt, p. 385.

Mémoire préalable

ANCIEN TEXTE DE LA LOI

DU 5 AVRIL 1884

Aucune action judiciaire autre que les actions possessoires ne peut, à peine de nullité, être intentée contre une commune qu'autant que le demandeur a préalablement adressé au préfet ou au sous-préfet un mémoire exposant l'objet et les motifs de sa réclamation. Il lui en est donné récépissé.

L'action ne peut être portée devant les tribunaux que deux mois après la date du récépissé, sans préjudice des actes conservatoires.

La présentation du mémoire in

146342

terrompt toute prescription ou déchéance, si elle est suivie d'une de mande en justice dans le délai de trois mois.

terrompt toute prescription ou déchéance, si elle est suivie d'une demande en justice dans le délai de

trois mois.

1413. Cet article est la reproduction textuelle (sauf une différence que nous signalerons plus loin dans le délai de deux mois) de l'article correspondant de la loi de 1884, dont M. Bienvenu Martin proposait dans son projet primitif l'abrogation pure et simple.

Mais la commission de la Chambre des députés a pensé que l'obligation imposée à tous ceux qui veulent actionner une commune ou section de commune, d'adresser au préfet un mémoire préalable, exposant les motifs de leurs réclamations, et d'attendre un certain délai avant d'engager l'action, devait être maintenue dans l'intérêt des communes.

« Sans doute, en fait, cette formalité a rarement pour effet d'éviter les procès, et elle a l'inconvénient de paralyser temporairement le droit d'action de l'adversaire de la commune, mais elle n'est pas sans utilité, puisqu'elle donne au conseil municipal le temps de se réunir et de délibérer, de consulter le préfet ou un avocat, s'il y a lieu, de proposer, le cas échéant, un arrangement ou de concerter ses moyens de défense.

<< Mais nous avons pensé que le délai de deux mois durant lequel l'action est ajournée était trop long et qu'il pouvait sans inconvénient être réduit à un mois, conformément à l'opinion émise par la commission extra-parlementaire de décentralisation. » (Rapport à la Chambre des députés, annexes 1333, séance du 30 novembre 1903.)

1414. Il existait autrefois une corrélation intime entre la remise préalable du mémoire et l'obligation imposée à la commune de se munir d'une autorisation pour intenter ou soutenir une action. Le dépôt du mémoire avait pour effet d'éclairer l'administration, tutrice des intérêts municipaux, sur le parti le plus convenable à prendre; il paraissait contraire à l'esprit de la loi d'exiger la production du mémoire dans les cas où le législateur avait dispensé la commune de l'autorisation.

Nous pensons qu'aujourd'hui encore il faut, pour l'interprétation de l'article 124, dont le texte n'a pas varié, suivre les mêmes règles.

1415.

Ainsi le mémoire préalable sera exigé pour toute action introductive d'instance, sauf pour les actions possessoires et administratives. Seront soumises à cette obligation:

1o Les actions principales, qu'elles soient réelles ou personnelles, mobilières ou immobilières ;

2o Les demandes en intervention (D. en Cons. d'Ét. du 4 mars 1885, Cours-de-Pile, Dordogne);

3o Les demandes reconventionnelles, quand la reconvention a pour cause une obligation en dehors du procès;

4o Les demandes en garantie (Ord. en Cons. d'Ét. du 21 janvier 1842, com. de la Guillotière; Trib. de Nevers, 25 juin 1882, ville de Nevers);

5o La tierce opposition;

6o L'action civile intentée devant les juridictions correctionnelle ou criminelle ou de simple police (Cass. 22 mars 1894, Blida), en réparation de dommages causés par des délits ou des crimes, et poursuivie accessoirement à l'action publique (Ord. en Cons. d'Ét. du 16 mai 1839, com. de Brénod; voir no 1214);

7° Les demandes en interprétation formées devant l'autorité judiciaire d'une décision du jury d'expropriation (Avis Cons. d'Ét. 13 juin 1882, Saint-Savin, Notes de jurisprudence);

8 Les actions, autres que les actions possessoires, de la compétence du juge de paix. (D. en Cons. d'Ét. 3 septembre 1902, Vincreuf.)

1416. Mais l'autorisation n'étant exigée autrefois que pour les actions introductives d'instance, il ne sera pas nécessaire de déposer un mémoire préalable:

1o Pour plaider sur les demandes accessoires et sur tous les incidents qui surgissent dans le cours de l'instance principale (Cass. 26 juillet 1876, Saint-Julien-de-Concelles; 7 janvier 1835, Lainsecq; 11 mai 1873, Orchamps);

2o Pour plaider en reprise ou en péremption d'instance;

3° Pour plaider sur les difficultés nées de l'exécution des jugements ou des arrêts obtenus (Cass. 25 juillet 1876, com. de SaintJulien; 16 mai 1882, com. de Bouc-Albertas);

4° Pour former une demande reconventionnelle qui a sa base dans le procès principal.

1417. - Le dépôt préalable du mémoire n'est pas davantage exigé :

Pour intenter contre la commune une action possessoire (art. 124; Cass. 20 novembre 1881, veuve Nattey);

Pour intenter une action de la compétence des tribunaux administratifs (voir n° 1367, 1383 et 1418);

Pour intenter devant le juge de paix une action en restitution des droits d'octroi (Cass. 2 février 1848);

Pour faire opposition aux contraintes décernées contre les contribuables en vertu de l'article 154 de la loi municipale ;

Pour décerner contre une commune une contrainte à fin de recouvrement de droits d'enregistrement relevés à sa charge. (Cass. 7 mars 1883, Bordeaux.) En effet, dans la procédure spéciale de l'enregistrement, la contrainte n'est qu'un simple commandement, une mise en demeure, qui n'engage aucune action et ne constitue pas une instance. Il n'en serait pas de même si la régie voulait assigner directement la commune d'après les règles ordinaires, à fin de recouvrement de droits d'enregistrement: elle devrait, dans ce cas, adresser au préfet le mémoire préalable;

Pour intenter une action en responsabilité d'accidents dont les ouvriers, employés par la commune, seraient victimes, par application de la loi du 9 avril 1898 (L. du 22 mars 1902, art. 18; voir n° 1315).

Enfin, une jurisprudence constante a soustrait à l'autorisation préalable et par conséquent à l'obligation du mémoire préalable les demandes en référé (1) [Gour de Paris, 27 juin 1868, abbé Roy; 10 avril 1872, com. de Gatti ; D. du 20 janvier 1886].

1418. Nous avons dit que la dispense du mémoire préalable s'appliquait aux actions administratives. L'autorisation de plaider n'était pas non plus nécessaire lorsqu'il s'agissait d'une action à intenter ou à soutenir devant la juridiction administrative. Telle était la jurisprudence ancienne, et le rapporteur du Sénat, répon

1. La dispense d'autorisation s'appliquait même aux appels des ordonnances de référé. « La juridiction des référés a été constituée pour tous les cas d'urgence sans distinction, et les communes ne pourraient y recourir si elles devaient au préalable remplir une formalité incompatible avec la célérité que la loi a eu en vue d'assurer aux parties. » (Avis Cons. d'Et. 12 janvier 1886, Breloux, Notes de jurisprudence.)

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