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Un

peu de concurrence est toujours à désirer; elle est l'élément le plus actif du progrès. Partout où on a bien voulu abandonner la vieille doctrine protectionniste et où les marchés ont été ouverts, tant soit peu, à la concurrence étrangère, la fabrication du pays, excitée par l'aiguillon de cette concurrence, s'est développée de plus en plus par l'amélioration de l'outillage, par le perfectionnement des procédés, et enfin par l'accroissement de la consommation.

Dans le cas actuel, après un laps de temps considérable, pendant lequel la consommation a beaucoup augmenté, les raboteries françaises se sont développées elles deviennent plus nombreuses tous les ans. On veut, par une taxe tout à fait prohibitive, arrêter ces progrès.

Dans nos pays, nous avons été vivement attaqués à cause du droit de 40 centimes que, dans la 5 séance, nous nous sommes résigné à proposer. Nous avons reçu l'ordre, comme S. E. notre Ministre vient de vous le dire, de demander la continuation de la franchise. On a trouvé chez nous que même un droit de protection de 40 centimes, soit 50 p. 0/0 sur le travail du rabotage en France, plus de 60 p. o/o sur le travail en Suède et en Norvège, ne permettrait pas aux aux raboteries scandinaves de faire concurrence aux raboteries fran

çaises.

Moi, j'espère que cette industrie pourra encore, à force d'économie sur le travail et en faisant usage des déchets des scieries et des raboteries, continuer la concurrence, quoique certainement presque sans profit.

On m'a opposé ici les droits de douane qui existent à l'entrée en Belgique. Mais là, il n'y a pas du tout de droits protecteurs sur le rabotage. Les bois sciés et les bois rabotés payent exactement les mêmes droits. Or, les droits sur les bois sciés, bien que déplorables et lourds pour la consommation, ne sont, en définitive, que fiscaux. En effet, l'expérience a prouvé qu'on ne peut pas, même avec les droits belges sur les bois sciés, importer du bois brut pour le faire scier dans les pays d'importation. Le fret du transport des bois bruts, beaucoup plus considérable que celui des bois sciés qu'on en peut tirer, s'y oppose. C'est donc, en Belgique, le consommateur qui, en réalité, paye le droit sur les bois sciés, ainsi que sur les bois rabotés. Certainement, il est déplorable d'imposer de tels droits sur un objet de première nécessité pour la Belgique, mais ce n'est pas de la protection.

Depuis des années, la Norvège est entrée dans la voie du libre-échange; elle a, depuis le traité de 1865 avec la France, comme vous avez bien pu vous en convaincre, abaissé considérablement un grand nombre de droits dont ce traité nous permettait encore de grever les marchandises françaises. Elle n'a pas fait de difficultés pour fixer, par un traité nouveau, ces abaissements. Elle est bien décidée à marcher encore dans cette voie libérale tant que ses ressources le lui permettront.

C'est

pour lui créer la possibilité de faire ces abaissements que nous cherchons, par des traités équitables, à développer notre commerce d'exportation. Ce n'est qu'en développant l'exportation des produits, auxquels la situation géographique de la Norvège nous restreint, et l'industrie qu'elle nous permet, que nous pouvons payer les produits, dont nous avons besoin ou dont nous désirons jouir, des pays plus heureusement situés et plus riches que le nôtre.

Or, le commerce de bois de construction et l'industrie qui s'y rattache est précisément une des industries que la situation géographique nous impose. Par le rabotage des bois nous pouvons utiliser les déchets des scieries qui, sans ce travail, n'auraient qu'une valeur beaucoup plus petite. C'est donc une nécessité pour nous de chercher à faciliter autant que possible les débouchés des bois rabotés.

peu

Notre commerce avec la France s'est bien développé pendant les derniers vingt ans; car c'est déjà depuis 1860 que notre régime libéral de commerce a commencé à agir. Si vous trouvez que ce commerce est de chose pour vous, c'est que la population de la Norvège ne monte qu'à 1,900,000 habitants, population plus petite que celle de Paris, et que notre pays, proportionnellement, n'est pas, à beaucoup près, aussi riche que le vôtre. La différence, à cet égard, est immense.

Ce n'est qu'en donnant un débouché à nos produits que vous pouvez augmenter en même temps vos exportations en Norvège. Nous ne demandons pas mieux que de consommer plus de vos admirables produits, mais il faut nous faciliter l'échange des produits avec lesquels nous devons les acheter.

Le commerce des bois rabotés est presque exclusivement réduit aux pays du nord de l'Europe. C'est un des articles sur lesquels vous pouvez le plus facilement nous faire une concession qui ne profiterait pas aux autres nations avec lesquelles vous traitez.

Si je suis bien informé, vous avez reçu, à ce sujet, de nombreuses pétitions des importateurs français de bois du Nord; des représentants de vos raboteries ont eux-mêmes, si je suis bien renseigné, reconnu qu'un droit de douane bien moins élevé que 75 centimes suffirait largement à les protéger.

J'espère donc que le droit de 75 centimes ne sera pas votre dernier mot, et qu'au point où nous sommes enfin arrivés dans nos négociations, vous saurez, par un acte de conciliation, aplanir pour nous les difficultés de notre mission.

Si, avec mes collègues, je dois insister encore une dernière fois sur cette demande, c'est que nous avons, dans cette question des bois rabotés, à défendre un intérêt de première importance pour nos pays

J'espère donc que je n'aurai pas vainement fait appel à votre esprit de conciliation.

M. LE PRÉSIDENT, désireux de donner une nouvelle preuve de la bonne

volonté de la Commission française, consentirait à ramener à 60 centimes la taxe de 75 centimes qui grève ce dernier article à son entrée en France.

M. BROCH déclare que le droit sur les frises fixé même à 60 centimes serait une taxe prohibitive, puisqu'elle représente de 60 à 70 p. 0/0 de la valeur du travail qu'on entend protéger en France.

M. MARIE ne pense pas que, dans l'évaluation du prix d'un article, on puisse négliger le prix de la matière première et ne tenir compte que du prix de la main-d'œuvre. Ce n'est pas, du reste, d'après cette base qu'avaient été établies les taxes ad valorem inscrites dans les anciens tarifs et converties aujourd'hui en droits spécifiques. La tarification primitive de 1 franc à laquelle les frises devaient être soumises représentait exactement 10 p. o/o; au taux de 60 centimes, le droit ne représenterait plus que 6 p. o/o et n'aurait plus qu'un caractère fiscal.

M. BROCH dit que les frises à parquet exportées de Norvège sont d'une qualité très ordinaire et n'ont pas la même valeur que les produits similaires fabriqués en France. Rendus dans un port français, les 100 kilogrammes de frises reviennent à 6 francs. Une taxation même de 60 centimes ne permettrait pas aux produits norvégiens de concourir sur le marché français. A 50 centimes, peut-être la concurrence pourrait-elle se maintenir.

M. le Ministre de Suède et de NoRVÈGE appuie cette demande en se fondant sur les réclamations auxquelles il a fait tout à l'heure allusion.

M LE PRÉSIDENT fait remarquer qu'à ces réclamations on pourrait en opposer d'autres, plus nombreuses, formulées par la raboterie française.

M. MARIE rappelle ce qu'il a déjà dit précédemment, que c'est par suite d'une erreur que les frises se sont trouvées pendant longtemps admises au bénéfice de la franchise douanière.

Après un débat prolongé, M. LE PRÉSIDENT, pour donner un dernier témoignage du bon vouloir des Commissaires français et en raison de l'intérêt considérable que le Gouvernement des Royaumes-Unis attache à cette question, consent à réduire à 50 centimes le droit de 75 centimes qui est établi sur les frises à parquet.

M. LE MINISTRE DE SUÈDE ET DE NORVÈGE demande une nouvelle réduction du droit de 5 francs qui grèveles Ouvrages en bois tendre. Ramené à 3 fr. 50 cent, ce droit serait encore suffisamment protecteur.

M. ÅKERMAN établit que les ouvrages en bois, portes et fenêtres, moulures, bâtons de rideaux, qui payent, au tarif actuel, 10 p. o/o de la valeur, auront à subir, en vertu du droit de 5 francs, une aggravation de 25, 20 et 300 p. 0/0.

LA COMMISSION FRANÇAISE regrette de ne pouvoir accorder une nouvelle concession sur la tarification des ouvrages en bois, qui, selon le vœu de la Commission des Royaumes-Unis, a déjà été l'objet d'un dédoublement avantageux.

M. le Ministre de Suède et de NoRVÈGE renouvelle ses demandes au sujet de la création au tarif conventionnel français d'une classe spéciale au profit des Massiaux. D'après le libellé actuel du tarif, les massiaux de Suède, qui ne contiennent pas 4 p. o/o de scories, ne pourront bénéficier du droit de 4 fr.50 cent. qui se trouvera applicable aux massiaux de tous les autres pays. Pourquoi le produit suédois se trouverait-il seul exclu de cette tarification favorable?

M. MARIE rappelle les explications qu'il a plusieurs fois données sur cette question. Le tarif français ne s'occupe pas de la forme donnée au produit; il ne vise que la qualité et, par suite, la valeur du métal. Même étiré en barre, le fer brut ne payera que 4 fr. 50 cent. s'il contient plus de 4 p. 0/0 de scories; dans le cas contraire, le fer en massiaux ou en barres devra acquitter un droit de 5 francs.

M. ÅKERMAN demande à quel droit seront soumis les massiaux qui auront toutes les apparences de fer brut.

M. RAMOND répond que ces massiaux payeront d'après leur degré de pureté.

M. LE MINISTRE DE SUÈDE ET DE NORVÈGE dit qu'il ne lui reste plus qu'à compter sur toute la tolérance de la douane.

M. SIBBERN demande ensuite quelle concession peut être faite sur la taxe du Goudron végétal.

M. LE PRÉSIDENT répond qu'après examen sérieux de la question, la Commission française s'est reconnue dans l'impossibilité de rien accorder sur un article qui intéresse toute une région en France.

Les diverses demandes que la Commission des Royaumes-Unis s'était réservé de présenter étant ainsi épuisées, la Commission française demande des concessions nouvelles qu'elle limite, après une discussion approfondie, aux Tissus de soie en Norvège, et aux Tissus de lin en Suède, faute par la Commission suédoise de pouvoir rien accorder de nouveau au profit des soieries.

M. ÅKERMAN rappelle qu'en raison même de leur classification nouvelle, les tissus de lin comportent de notables réductions dont la France est appelée à bénéficier et qui ont été justement établies pour faciliter la conclusion des négociations.

M. MARIE et M. RAMOND limitent leur demande de réduction aux taxations de la classe des 35 à 50 fils et de la classe de plus de 50 fils. Les droits de 1 couronne et de 1 couronne 60 seraient respectivement ramenés à 90 öre et à couronne 44.

Après un long débat, M. BROCH concède les taxations suivantes demandées au profit des tissus de soie: tous les tissus de soie, mélangée ou non, seront soumis, au tarif norvégien, à une taxe unique de 230 couronnes; les Dentelles formeront un article spécial taxé à 250 couronnes.

M. ÅKERMAN consent à la réduction proposée pour les tissus de lin: les deux nouveaux droits seraient de o. 90 öre sur les tissus de plus de 35 fils jusqu'à 50 fils, et de 1 couronne 50, et non de 1 couronne 44, sur les tissus de plus de 50 fils.

L'ordre du jour appelle l'examen de la date à fixer pour l'entrée en vigueur des nouveaux traités.

M. le Ministre dE SUÈDE ET DE NORVÈGE signale les difficultés que présente f'insertion de la date du 9 février. Il ne paraît pas possible, en effet, que d'ici là les pouvoirs parlementaires des Royaumes-Unis aient eu le temps d'examiner et d'approuver les nouveaux traités. En fixant une date aussi rapprochée, il y aurait lieu de craindre de paraître vouloir exercer une pression sur les Diètes. Ne semble-t-il pas préférable, pour demeurer dans la vérité des faits, de fixer au 1er avril la date de l'entrée en vigueur du nouveau régime conventionnel?

M. LE PRÉSIDENT rappelle que les difficultés signalées par M. le Ministre de Suède et de Norvège existent également en France. Il ne pense pas que, pour n'avoir pas été ratifiés avant le 9 février, les traités nouveaux doivent devenir caducs. Renvoyer au 1er avril ou à telle autre date plus ou moins éloignée le point de départ du nouvel ordre de choses, c'est s'exposer à tomber sous le coup du tarif général durant la période intermédiaire entre cette date et le 8 février, jour de l'échéance du traité de 1865. Par suite des engagements qu'il a pris devant le Parlement français, M. LE MINISTRE DU COMMERCE ne saurait accepter une autre date celle du 9 février prochain. Mais il s'en

que

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