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CINQUIÈME CONFÉRENCE.

CINQUIÈME CONFÉRENCE.

JEUDI 20 OCTOBRE 1881.

PRÉSIDENCE DE M. TIRARD,

MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DU COMMERCE.

La séance est ouverte à deux heures, sous la présidence de M. LE MINISTRE de l'Agriculture et du Commerce.

Étaient présents MM. les Membres de la Commission qui assistaient à la précédente réunion.

La Commission des Royaumes-Unis était, en outre, assistée de M. DE REUTERSKIÖLD, Secrétaire de la Légation de Suède et de Norvège en France, qui remplissait auprès d'elle les fonctions de Secrétaire.

Le procès-verbal de la séance du 14 octobre est lu et adopté.

M. LE PRÉSIDENT rappelle que la Commission française avait exprimé le désir de voir le régime des eaux-de-vie françaises, en Suède et en Norvège, non pas aggravé, comme on le proposait, mais amélioré ou tout au moins maintenu dans les conditions actuelles. La Commission des Royaumes-Unis a-t-elle reçu les instructions qu'elle devait solliciter à cet égard?

M. LE MINISTRE DE Suède et de NORVÈGE déclare que, malgré les délais très courts dans lesquels il lui a fallu les demander à Stockholm, les instructions qu'il a dû solliciter ont pu arriver à temps à la Légation du Roi à Paris.

CONF. FRANCO-SUÉDOISE ET NORVÉGIENNE.

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Avant d'en donner connaissance, M. SIBBERN désirerait savoir s'il peut considérer comme acquis les deux points suivants qui ont été posés à la première Conférence et qui, depuis, n'ont donné lieu à aucune remarque de la part de MM. les Commissaires français : les tarifs ne porteront-ils, de part et d'autre, que sur un nombre restreint d'articles? La marine marchande suédoise et norvégienne continuera-t-elle à jouir en France des mêmes avantages que par le passé ?

M. LE PRÉSIDENT fait remarquer qu'en tenant compte de l'importance respective des relations commerciales entre la France et les Royaumes-Unis, il lui semblerait que l'État le plus favorisé dans son commerce dût le premier offrir des concessions en échange des conditions libérales qui lui sont faites. Or, tandis que la France ouvre librement son marché à la plupart des produits suédois et norvégiens, tandis qu'elle n'hésite pas à donner satisfaction aux demandes qui lui sont présentées en faveur des bois et des fers, le régime du seul article qui l'intéresse est aggravé dans les Royaumes-Unis; et, si une concession légitime est réclamée, on la subordonne à l'obtention de nouvelles faveurs.

M.Le Ministre de Suède et de Norvège répond que le propre de négociations comme celles-ci consiste à s'offrir ou à se refuser des avantages réciproques. La réponse sur les spiritueux va être donnée. Mais ne convient-il pas non plus d'indiquer, pour les régler, deux questions qui ont une grande importance? Les tarifs nouveaux contiendront-ils un nombre considérable d'articles, ainsi que cela eut lieu en 1865 dans le but de modifier le régime qui existait alors? Une telle disposition aurait l'inconvénient de lier la liberté des pouvoirs publics dans les Royaumes-Unis sur un grand nombre de produits qui intéressent peu la France et dont la Suède et la Norvège pourraient avoir intérêt à retrouver la libre disposition en ce qui concerne les tarifications douanières.

M. LE PRÉSIDENT constate qu'au point de vue sous lequel M. le Ministre de Suède et de Norvège la présente, la question mérite une sérieuse attention. La France, en effet, par suite des nombreux traités qu'elle va signer, se trouvera liée pour la presque intégralité des articles de son tarif. Les Royaumes-Unis au contraire, en ne contractant qu'un ou deux traités limités à un très petit nombre de produits, resteraient maîtres de taxer tout autre article, à l'importation duquel le commerce français peut se trouver intéressé. Ainsi, en échange du tarif conventionnel français très complet, les Royaumes-Unis offrent un tarif conventionnel des plus restreints. Sans vouloir introduire dans ce dernier tarif des stipulations inutiles ou gênantes, la Commission française croit

être en droit de demander l'inscription d'articles qui auraient de l'intérêt pour les exportations françaises, et pour éviter que le régime de ces articles ne soit un jour modifié dans un sens défavorable.

M. LE MINISTRE DE SUÈDE ET DE NORVÈGE répond que la limitation des articles à inscrire au tarif conventionnel n'est demandée qu'à charge de réciprocité et en vue de répondre au désir de la France qui, elle-même, tient à rester maîtresse d'une partie de ses tarifications. D'ailleurs, il n'est pas dans les tendances des pouvoirs parlementaires des Royaumes-Unis de majorer les tarifs; y aurait plutôt à s'attendre à des diminutions. Néanmoins, il est utile que les Diètes puissent n'être pas privées de toute action sur certains articles tarifés.

il

M. BROCH ajoute qu'en Norvège, pays de libre-échange, les tarifications douanières ont un caractère purement fiscal. Or, il peut arriver qu'en raison de modifications qu'il conviendrait d'apporter dans le système technique du tarif et des taxes intérieures, le régime douanier doive, de son côté, subir des changements. De là, le désir très naturel qu'ont les Diètes de ne pas aliéner complètement leur liberté.

Quant à l'importance des relations commerciales des Royaumes-Unis avec la France, M. BROCH tient à faire remarquer qu'elle est, en ce qui concerne la Norvège, proportionnellement plus favorable au commerce français qu'au commerce norvégien. En effet, la Norvège achète, au delà de ses frontières,

environ pour 119 francs par habitant sur ces 119 francs les produits venus de France figurent pour 5 fr. 43 cent., soit 4,60 p. o/o. La France, elle, importe par habitant pour 135 francs de marchandises étrangères : les produits norvégiens n'entrent dans ce chiffre que pour o fr. 70 cent., soit seulement 0,50 p. 0/0.

Donc, proportionnellement, le Norvégien achète beaucoup plus en France que le Français n'achète en Norvège : encore faut-il remarquer que la différence de richesse entre les deux pays justifierait une proportion inverse.

M. LE PRÉSIDENT pense qu'il faut se garder de tirer des conclusions de calculs de ce genre. Les chiffres pourraient être facilement renversés, et on pourrait dire avec autant d'exactitude que les Royaumes-Unis vendent, par habitant, sur le marché français pour 20 francs environ, tandis que la France ne peut, par habitant, placer que pour o fr. 50 cent. de ses produits sur le marché des Royaumes-Unis.

En résumé, des considérations qui précèdent, il résulte que le marché suédois et norvégien cherche encore à se restreindre, au lieu de s'ouvrir largement pour permettre le rétablissement de l'équilibre entre 1 18 millions d'exportation d'un côté et 18 millions seulement d'envois de l'autre. Non seulement

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