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Somme (Tourbières communales de la), ordonnance royale du 17 août 1825.

562. Aux termes de l'article 86 de la loi de 1810: « Les propriétaires exploitants, soit particuliers, soit communauté d'habitants, soit établissements publics, sont tenus de se conformer aux règlements, soit général, s'il y a lieu, soit particulier, qui peuvent concerner spécialement leur exploitation, à peine d'être contraints à cesser leurs travaux. »

Les infractions à ces règlements et aux conditions de l'autorisation pourraient, en sus de la suspension des travaux, entraîner la répression édictée par l'article 471, 15o, du Code pénal1.

563. Depuis le Code Napoléon qui, en fait d'usages locaux, n'a maintenu que ceux auxquels il se réfère, il est arrivé que des propriétaires de tourbières, se prévalant de coutumes anciennes, ont réclamé le droit d'étendre leur tourbe, pour la faire sécher, sur les fonds de leur voisin, alors que leurs propres fonds se trouvaient trop exigus pour suffire à cette opération. Mais c'est avec raison que cette prétention a été repoussée, le Code susindiqué, non plus que la loi du 26 octobre 1791, auquel son article 652 renvoie, n'en ayant pas autorisé l'exercice.

TROISIÈME SECTION.

DES CARRIÈRES.

564. Énumération des substances que la loi qualifie de carrières ;

texte.

565. De l'application à cette matière du principe qui attribue au maître du sol la propriété du dessous; droit exclusif qu'a le propriétaire d'un héritage d'y extraire les substances qualifiées de

V. cet article au numéro 95.
Cass., 21 avril 1813 (Gaudichart).

carrières; de la cession temporelle ou perpétuelle de ce droit ét de ses suites.

566. Le principe subit une exception au profit des entreprises de travaux publics qui ont la voirie pour objet ; en vue de ces travaux, les agents de l'administration sont autorisés à extraire des matériaux dans les propriétés privées.

567. Mais il faut que ces propriétés, pour être assujetties à cette servitude, soient au préalable l'objet d'une désignation expresse dans le devis des travaux ou dans un arrêté spécial du préfet.

568. Il faut, de plus, que ces propriétés ne soient pas fermées de murs ou autres clôtures équivalentes.

569. Suite; un héritage, après qu'il a été désigné pour l'exercice de la servitude de carrière, peut-il encore en être exonéré par l'effet de la clôture?

570. L'exercice de la servitude de carrière donne lieu à une indemnité; il ne faut comprendre dans l'indemnité la valeur des matériaux qu'autant qu'ils sont tirés d'une carrière déjà en exploitation.

571. Règlement de l'indemnité en cas de contestation; expertise; compétence.

572. Transition.

573. Les carrières exploitées par leurs propriétaires sont, quant à leur réglementation légale, divisées en deux classes.

574. Des carrières exploitées à ciel ouvert.

575. Des carrières souterraines exploitées par cavage à bouches ou par puits.

576. Énumération des divers règlements locaux relatifs à l'exploitation des carrières.

576 bis. Prohibition d'établir des carrières trop près des voies publiques de terre et de navigation; renvoi.

577. Police judiciaire des carrières; poursuite des contraventions; pénalités; compétence; de la valeur obligatoire des dispositions par lesquelles certains règlements locaux ont interverti, en cette matière, l'ordre des juridictions et des pénalités.

578. Des servitudes établies au profit des exploitants de carrières sur les héritages limitrophes; elles se trouvent abolies par suite de leur incompatibilité avec les principes du droit moderne sur la propriété foncière.

564. D'après l'article 4 de la loi du 21 avril 1810, « les carrières renferment les ardoises, les grès, pierres à bâtir et autres, les marbres, granits, pierres à chaux, pierres à plâtre, les pouzzolanes, le trass, les basaltes, les laves, les marnes, craies, sables, pierres à fusil, argiles, kaolin, terres à foulon, terres à poterie, les substances terreuses et les cailloux de toute nature, les terres pyriteuses regardées comme engrais 1, le tout exploité à ciel ouvert ou avec des galeries souterraines. »

565. Plus que les minières encore, les carrières comportent l'application du principe de l'article 552 du Code Napoléon, suivant lequel la propriété du dessous du sol résulte naturellement de la propriété de ce sol. Aux termes de cet article, « le propriétaire peut donc faire au-dessous toutes les fouilles qu'il jugera à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements. »

Hors les cas expressément prévus, le propriétaire d'un héritage est donc le seul qui puisse en extraire les substances rangées par la loi dans la classe des carrières. Ce n'est qu'autant qu'il le permet, ou qu'il fait cession de son droit, que tiers peuvent s'y livrer à des extractions de cette sorté.

les

Lorsque la cession est temporaire et à prix d'argent, on s'est demandé s'il y avait là un bail de carrière ou un contrat de vente d'objets mobiliers. Plus loin, nous parlerons de cette question et en donnerons la solution 2.

Rien n'empêche encore que, par l'effet d'une vente, d'un legs, d'une donation, la cession ne soit perpétuelle. Mais alors le droit qui en résulte au profit du cessionnaire diffère de nature, selon l'intention des parties.

1 Le mot engrais est impropre; c'est amendements qu'il eût fallu dire. V., au sujet de ces terres, numéros 537, 558.

2 V. n. 758.

Supposons que le propriétaire n'ait entendu vendre, léguer ou donner que le droit indéfini d'extraction. Dans ce cas, il y a bien là, selon les circonstances, une servitude foncière ou un droit personnel, un droit d'usage, ou même une vente d'objets mobiliers, mais il n'en résulte aucune séparation entre la surface et le tréfonds de l'héritage. Le droit du cessionnaire suit le sort et les vicissitudes de cet héritage, sauf l'obligation où est le propriétaire de le respecter et de le garantir, dans les limites que la loi a marquées pour les différentes circonstances, contre les atteintes des tiers.

Admettons maintenant que la cession ait été plus loin, qu'elle ait eu en vue les parties souterraines mêmes d'un héritage, avec pouvoir d'y effectuer tous travaux nécessaires à l'exploitation de ces parties; il se forme immédiatement ici, par l'effet du contrat, une propriété distincte de la surface, semblable à celle qui, en matière de mines, est virtuellement créée par l'effet de la loi. Dans son article 553, le Code Napoléon reconnaît à la convention le pouvoir d'arriver à ce résultat; il le reconnaît même à la prescription. Nous disons que ces deux propriétés souterraines se ressemblent; l'une comme l'autre est donc immeuble dans le sens de l'article 8 de la loi du 21 avril 18101; car, pour les carrières, vendues dans les termes susindiqués, les substances à extraire ne sont plus considérées que comme l'accessoire de la vente du dessous.

Ces carrières sont, comme les mines, susceptibles d'hypothèques, et les atteintes permanentes que leur feraient subir des travaux publics, constituant dès lors une véritable expropriation, appelleraient l'application de la loi du 3 mai 1841 sur cette matière.

Ce dernier point a été décidé par le Conseil d'Etat dans l'espèce suivante :

Un sieur Desbordes, propriétaire de tréfonds qu'il avait

1 V. cet article au numéro 483.

achetés pour en extraire de la pierre, et où il avait déjà ouvert une galerie, avait vu la Compagnie du chemin de fer de Lyon à Genève entreprendre, sans expropriation préalable, sans offre d'indemnité, de percer un tunnel dans sa propriété souterraine. Il assigna en conséquence la Compagnie devant le tribunal civil de Nantua, pour, entre autres choses, la faire condamner dès à présent à lui payer une somme de soixante-quatre mille francs à titre d'indemnité, si mieux elle n'aimait faire estimer cette indemnité par un jury d'expropriation, conformément à la loi du 3 mai 1841. La Compagnie répondit par des conclusions où elle demandait au tribunal de se déclarer incompétent pour connaître de la demande du sieur Desbordes et de la renvoyer devant le Conseil de préfecture du département de l'Ain; elle fut, d'ailleurs, secondée par le préfet, qui éleva le conflit et revendiqua la connaissance du débat pour la juridiction administrative. La Compagnie et le préfet se fondaient sur ce que l'établissement d'un tunnel sous le sol d'une propriété constitue une servitude, un dommage et non une dépossession. Ils se refusaient, on le voit, à tenir compte de la séparation que l'acquisition faite par le sieur Desbordes avait opérée entre le tréfonds et la surface des héritages sous lesquels passait le tunnel du chemin de fer. Mais le Conseil d'Etat, à la date du 15 avril 1857, annula le conflit par le motif que : « l'appréciation des indemnités qui sont dues au sieur Desbordes pour la prise de possession de sa propriété par la Compagnie du chemin de fer ne peut être revendiquée pour l'autorité administrative, en vertu des lois du 28 pluviôse an VIII et du 16 septembre 1807, comme s'il s'agissait de dommages; que cette appréciation appartient aux autorités que la loi du 3 mai 1841 a chargées du règlement des indemnités en cas d'expropriation d'immeubles pour cause d'utilité publique; que, dès lors, c'est à tort que le conflit d'attribution a été élevé... »

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