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l'application de ces pénalités aux Conseils de préfecture. Nous citerons notamment, comme disposant ainsi, les décrets impériaux des 22 mars et 4 juillet 1813, concernant les carrières des départements de la Seine et de Seine-et-Oise, l'ordonnance royale du 30 juillet 1838, relative à celles de la Charente, etc. Or, on s'est demandé ce qu'il fallait penser d'une pareille interversion dans l'ordre des pénalités et des juridictions et ce qu'il pouvait y avoir d'obligatoire dans des dispositions de cette sorte?

Il est certain qu'il y a là quelque chose d'éminemment contraire à la règle de la séparation des pouvoirs, proclamée, au moment de la révolution de 1789, comme l'un des principes du régime nouveau. L'établissement des pénalités et des juridictions n'appartient qu'au pouvoir législatif, et lorsque le pouvoir exécutif y touche, il ne le fait pas sans empiéter sur un domaine qui lui est interdit, comme n'étant pas le sien. C'est par cette raison qu'à diverses reprises des juges correctionnels, auxquels avaient été déférées des infractions contre les décrets et l'ordonnance susmentionnés, ont refusé d'obtempérer aux règles sur les pénalités et la compétence contenues dans ces actes du pouvoir exécutif, et, par conséquent, de se dessaisir de la cause pour la renvoyer au Conseil de préfecture; ils ont, au contraire, affirmé leur compétence et, selon les cas, ont fait l'application, aux faits qui leur étaient dénoncés, soit des articles 93 et suivants de la loi du 21 avril 1810, soit de l'article 471, § 15, du Code pénal'.

Cette solution, toutefois, quelque conforme aux principes qu'elle soit, semble ne devoir pas être admise d'une manière absolue; nous croyons notamment qu'il faut distinguer, parmi les règlements qui nous occupent, ceux qui sont intervenus sous le premier empire de ceux qui sont postérieurs.

' Paris, 1er décembre 1842 (Beaufils); id., 14 février 1843 (Gauthier); Cass., 29 août 1851 (Roy, dit Belleville).

La jurisprudence, en effet, a admis, et cela par application de la constitution du 22 frimaire an VIII et du sénatus-consulte du 28 floréal an XII, que les décrets du gouvernement impérial, alors même qu'ils étaient rendus en dehors des attri butions conférées à l'empereur, ont obtenu force de loi, lorsqu'après avoir été promulgués en la forme ordinaire, ils n'ont pas été, soit dénoncés par les corps politiques de l'Etat chargés de concourir à la confection des lois, soit annulés par le sénat conservateur, dont la mission était de veiller au maintien de celles qui fixaient les limites des pouvoirs constitutionnels '.

578. Quelques usages anciens avaient établi, au profit des exploitants de carrières et sur les héritages limitrophes, certaines servitudes complétement incompatibles avec les principes du droit moderne sur la propriété foncière; on ne serait plus admis aujourd'hui à s'en prévaloir.

C'est ainsi qu'on prétendrait en vain avoir le droit de suivre les couches d'une carrière jusque sous le fonds d'autrui, sauf à payer indemnité; le principe de l'article 552 du Code Napoléon s'y oppose. Sous l'ancien régime déjà, une déclaration du roi du 17 mars 1780 condamnait cette prétention. « Vou lant, y est-il dit, assurer pour l'avenir aux propriétaires voisins des carrières la propriété absolue de leurs terrains, tant en fonds qu'en superficie, il est fait très-expresses inhibitions et défenses aux propriétaires et locataires desdites carrières de continuer à fouiller sous le fonds d'autrui, à peine de cinq cents francs d'amende et de tous dommages-intérêts. » On doit considérer cette disposition comme étant encore aujour d'hui en vigueur 2.

Il en est autrement de deux arrêts du Conseil du roi des 25 octobre 1740 et 18 mai 1786, qui, dans le but de favoriser l'exploitation des ardoisières situées aux environs d'Angers,

⚫ Cass., 6 juillet 1827 (Jacques Pelicat); id., 25 mai 1829 (Roucairol). * Dalloz, n. 794.

dont les produits étaient alors indispensables à l'approvisionnement de la ville de Paris, avaient accordé aux exploitants le droit d'exiger des propriétaires voisins la vente ou la cession des terrains nécessaires à l'exploitation de leurs carrières. Ces arrêts sont abrogés comme incompatibles avec les principes de la législation actuelle, qui n'a établi l'expropriation que pour les cas d'utilité publique 1.

Nous en dirons autant de l'usage ancien en vertu duquel un exploitant prétendrait établir un chemin de service sur le terrain d'autrui, sans titre ou sans le consentement des propriétaires 2.

QUATRIÈME SECTION.

DE L'ÉTABLISSEMENT DES FOURNEAUX, FORGES ET AUTRES USINES

MÉTALLURGIQUES.

579. Certains établissements affectés au traitement des matières minérales extraites ne peuvent être mis en activité qu'après permission: texte.

580. L'énumération que la loi fait de ces établissements est limitative.

581. Fourneaux à fondre le minerai et autres substances métalliques.

582. Forges et martinets.

583. Patouillets et bocards.

584. Usines destinées au traitement des substances salines et pyri

teuses.

585. But de la permission exigée; elle ne dispense pas les établissements dont il s'agit des autorisations dont ils auraient encore besoin à un tout autre point de vue ; nomenclature des établissements régis soit par la loi sur les mines, soit par les règlements sur les établissements classés, soit à la fois par cette loi et par ces règlements; indication des autorisations dont, d'autre part, ces établissements auraient besoin à raison de leurs moteurs. 586. Demande de la permission; instruction administrative.

'Angers, 25 janvier 1856 (Bigot et autres).

Bordeaux, 23 mai 1835 (Estève).

587. De l'acte portant permission.

588. Ce qui y est contenu; conditions.

589. Le permissionnaire supporte une taxe une fois payée. 590. Usage et durée de la permission.

591. Elle s'applique strictement aux établissements qui y sont désignés.

592. Toutes innovations dans l'établissement nécessitent une permission nouvelle.

593. Contraventions, poursuites, pénalités applicables.

594. Du droit attribué aux permissionnaires de faire des fouilles de minerais de fer, de terres pyriteuses et alumineuses, sur les propriétés d'autrui; rappel.

595. Du droit qu'ils ont également d'établir sur ces propriétés des patouillets, lavoirs et chemins de charroi.

596. Des établissements métallurgiques qui existaient au moment où la loi de 1810 a été portée; règlement de leur situation légale.

579. Le législateur qui venait de réglementer les mines, les minières et leurs produits, ne pouvait négliger les usines destinées à opérer le traitement et la transformation des matières extraites; il y allait, nous l'avons dit, de l'aménagement de ces matières mêmes et de celui des combustibles minéraux et végétaux.

En conséquence, l'article 73 de la loi du 21 avril 1810 dispose en ces termes : « Les fourneaux à fondre les minerais de fer et autres substances métalliques, les forges et martinets pour ouvrer le fer et le cuivre, les usines servant de patouillets et bocards, celles pour le traitement des substances salines et pyriteuses, dans lesquelles on consomme des combustibles, ne pourront être établis que sur permission accordée par un règlement d'administration publique. »

580. Ainsi les usines minéralurgiques, pour l'établissement desquelles cet article exige l'autorisation préalable, sont comprises sous quatre dénominations différentes. Faut-il voir là

une énumération limitative? Cela n'est pas douteux en présence du principe de la liberté d'industrie. Mais sur cette limitation même il faut s'entendre. Si l'obligation de l'autorisation s'applique exclusivement aux établissements désignés par la loi, il est également certain que la désignation légale est large, et comprend tous les établissements qui, quelles que soient leur forme, leur apparence extérieure, ou leur dénomination vulgaire, se ressemblent par la destination et l'objet. C'est ce qu'explique fort bien une circulaire ministérielle du 19 juin 1845.

581. « On doit évidemment, y est-il dit, ranger dans la première des classifications faites par l'article 73 de la loi du 21 avril 1810 toutes les usines dans lesquelles on retire les métaux de leurs minerais à l'état de métal proprement dit, ou à l'état de combinaison avec une autre substance: telles sont les usines qui renferment les hauts-fourneaux et les forges où l'on traite directement les minerais de fer pour en obtenir la fonte, le fer et l'acier, ainsi que les usines renfermant les fours, fourneaux et appareils au moyen desquels on retire de leurs minerais le cuivre, le plomb, le zinc, l'antimoine, l'arsenic, le cobalt et le nickel, à l'état de métal, d'oxyde ou de sulfure; mais on irait au delà des intentions de la loi si l'on plaçait dans cette classe les fours et fourneaux dans lesquels on fait subir une seconde fusion aux métaux ou aux substances métalliques provenant du traitement des minerais pour les allier ensemble, ou pour leur donner, par le moulage, les formes que réclament les besoins du commerce, cette nouvelle fusion étant une opération secondaire qui ne change pas la nature des produits. On ne doit pas, non plus, y comprendre les usines où l'on fabrique le laiton, en fondant ensemble le cuivre et un minerai de zinc, attendu que le résultat de l'opération est un alliage que l'on obtient également par la seconde fusion du cuivre ou du zinc à l'état métallique. »>

TOME 11.

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