Page images
PDF
EPUB

dont il vient d'être question, ainsi que les constructions dont il est parlé dans les articles 153 et 154 précités, ne tomberaient pas sous le coup des prohibitions qui frappent la première et la troisième zone, c'est-à-dire celle de cinq cents et celle de deux mille mètres. Ce cas est prévu par l'article 156 du Code forestier. «Sont exceptées, y est-il dit, des dispositions des trois articles précédents les maisons et usines qui font partie des villes, villages ou hameaux, formant une population agglomérée, bien qu'elles se trouvent dans les distances cidessus fixées des bois et forêts. >>

En cas de contestation sur le point de savoir si l'établissement nouvellement formé fait ou non partie d'une agglomération qualifiée de ville, village ou hameau, il y a là une question préjudicielle dont la connaissance appartient aux juges saisis de la poursuite1.

606. Le premier soin de celui qui, n'étant dans aucun des cas d'exception susindiqués, veut former, à la proximité d'un bois soumis au régime forestier, un des établissements compris dans les prohibitions des articles 151, 154, 155, doit être de calculer la distance qui existe entre ce bois et l'emplacement choisi pour l'exécution de son projet. Ce n'est qu'ainsi, en effet, qu'il saura s'il peut former son établissement librement, ou s'il doit, au préalable, solliciter l'agrément de l'autorité publique. Or, il ne s'agit pas ici d'une distance que la loi subordonne à quelque circonstance variable; elle est, au contraire, réelle, effective. On ne serait pas admis à la calculer, par exemple, en prenant pour base les détours d'un chemin qui, de l'établissement projeté, se dirigerait vers le bois. L'évaluation n'en est exacte, naturelle et conforme au vœu de la loi, qu'autant qu'elle a lieu à vol d'oiseau, à partir de l'extrême limite du bois la plus rapprochée de la construction qu'on

1 Duvergier, Collect. des lois, vol. de 1827, p. 236. 2 Cass., 23 juin 1848 (Voillaume).

veut affecter à l'industrie, jusqu'au pied même de cette con

struction.

607. Naguère encore la permission de former des établissements dans les zones forestières ne pouvait être sollicitée que du chef du gouvernement et ne devait être accordée que par lui. Telle était la disposition de l'article 177 de l'ordonnance royale du 1er août 1827 « pour l'exécution du Code forestier.» Mais ce cas, comme plusieurs autres semblables, a subi les innovations du décret du 22 mars 1852 « sur la décentralisation administrative. » Il y est dit, art. 3: « Les préfets sta→ tueront, en Conseil de préfecture, sans l'autorisation du ministre des finances, mais sur l'avis et la proposition du chef de service en matières domaniales et forestières, sur les objets déterminés par le tableau C ci-annexé. » Et au tableau C, on voit «... 8° Demandes en autorisation, concernant les établissements et constructions mentionnés dans les articles 151, 152, 153, 154 et 155 du Code forestier. >>

Aujourd'hui, c'est donc au préfet du département, et sous forme de pétition, que doivent s'adresser ceux qui veulent former un de ces établissements. La demande doit indiquer les nom, prénoms, qualité et domicile du pétitionnaire, la nature de l'industrie à laquelle il veut se livrer à la proximité du sol soumis au régime forestier; la désignation précise de l'emplacement où les constructions seront érigées, ainsi que de la distance qui, d'après l'estime du pétitionnaire, existera entre le sol forestier et ses constructions. Après avoir communiqué cette demande au conservateur des eaux et forèts, qui donne son avis et formule ses propositions, le préfet statue, en Conseil de préfecture, sous forme d'arrêté.

Si la décision est défavorable, le pétitionnaire peut toujours en appeler devant le ministre des finances, chef hiérarchique du préfet pour tout ce qui concerne la conservation et la protection du domaine de l'Etat.

Dans les cas où, la question de distance se trouvant indécise, des propriétaires se seraient, par pure précaution, adressés au préfet, puis au ministre, pour en obtenir une autorisation, et où ils auraient subi un refus, il semble que le recours au Conseil d'Etat serait recevable. Il ne s'agirait plus ici, en effet, de l'appréciation intrinsèque de la demande et de l'opportunité de l'autorisation ou du refus, mais bien du point de savoir si l'emplacement de l'établissement projeté se trouve frappé ou non de la servitude légale non ædificandi. Or, évidemment, c'est là une question contentieuse', puisque la loi en a fixé les éléments d'une manière expresse.

608. Lorsque des usines soumises à la nécessité de l'autorisation, par suite de leur situation à la proximité du sol forestier, viennent à tomber en ruine, elles ne peuvent être reconstruites que moyennant une permission nouvelle 2; c'est là, en matière d'établissements industriels, une règle constante pour tous les ateliers dont l'existence légale est subordonnée à l'agrément administratif.

609. Voici une seconde règle qui n'est pas moins constante · en pareille matière.

L'autorisation d'établir, dans les zones prohibées, des fours à chaux ou à plâtre, des briqueteries et des tuileries, etc., est toute spéciale et ne dépasse pas l'objet qu'on y a en vue. Elle ne dispenserait pas ceux qui, parmi ces établissements, sont classés, des obligations que leur imposeraient, d'autre part, le décret du 15 octobre 1810 et l'ordonnance du 14 janvier 1815 sur les établissements insalubres et incommodes. C'est ce qu'exprime l'article 177 de l'ordonnance du 1er août 1827, pour l'exécution du Code forestier. On y lit, au paragraphe 2: « Lorsqu'il s'agira de fours à chaux ou à plâtre, des

Dufour, n. 175.

Cass., 5 février 1841 (Panisset).

■ V. n. 59.

briqueteries et des tuileries dont il est fait mention en l'article 151 du Code forestier, il sera d'abord statué sur la demande d'autorisation, sans préjudice des droits des tiers et des oppositions qui pourraient s'élever. Il sera ensuite procédé suivant les formes prescrites par le décret du 15 octobre 1810 et l'ordonnance du 14 janvier 1815. »

Les scieries qui sont mues par un cours d'eau devraient être autorisées comme usines hydrauliques; elles ne seraient pas dispensées de cette nécessité par l'autorisation qui aurait pour unique objet leur établissement dans les zones forestières 1.

610. En général, les agents et les gardes forestiers qui voudraient suivre et saisir les instruments et les objets d'un délit dans des maisons, bâtiments, cours adjacentes et enclos, ne peuvent s'y introduire sans être assistés, soit du juge de paix ou de son suppléant, soit du commissaire de police. Mais, s'il s'agit de perquisitions à faire dans « les usines ou autres établissements autorisés en vertu des articles 151, 152, 154 et 155 du Code forestier, » ils peuvent y procéder « sans l'assistance d'un officier public, pourvu qu'ils se présentent au nombre de deux au moins, ou que l'agent ou garde forestier soit accompagné de deux témoins domiciliés dans la commune. >> Telles sont les dispositions des articles 157 et 161 du Code forestier.

Les perquisitions, là où elles sont ainsi permises, peuvent être faites à toutes heures de jour et même de nuit, la loi ne faisant aucune distinction entre les unes et les autres 2.

Aux termes de l'article 158, « aucun arbre, bille ou tronce ne pourra être reçu dans les scieries dont il est fait mention à l'article 155, sans avoir été préalablement reconnu par le garde forestier du canton et marqué de son marteau; ce qui

1 V. u. 324, p. 394.

Cass., 7 mai 1841 (Terrier).

devra avoir lieu dans les cinq jours de la déclaration qui en aura été faite, sous peine, contre les exploitants desdites scieries, d'une amende de cinquante à trois cents francs. En cas de récidive, l'amende sera double, et la suppression de l'usine pourra être ordonnée par le tribunal. »

Cette disposition, ainsi que la précédente relative aux perquisitions qu'il serait permis aux agents forestiers de faire sans l'assistance d'un officier public, ne s'applique qu'aux établissements isolés et autorisés. Elle ne concerne pas les ateliers et, notamment, les scieries, dont la formation peut avoir lieu sans autorisation dans le voisinage des forêts, soit parce qu'ils sont situés hors des zones frappées de la servitude publique, soit parce qu'ils font partie de villes, villages ou hameaux se composant d'une population agglomérée 1.

Autrement, les prescriptions de l'article 158 sont applicables même aux scieries établies antérieurement à la promulgation du Code forestier 2.

Enfin, il faut regarder les chantiers d'une scierie comme ne faisant qu'un avec l'établissement, de telle sorte que les billes trouvées sur ce chantier et qui n'auraient pas été déclarées et reconnues par le garde forestier devraient être envisagées, sous le rapport de la contravention, comme si elles avaient été transportées dans la scierie même 3.

611. Ici se termine ce que nous avions à dire des établis sements situés à la proximité du sol forestier; mais il nous reste encore à passer en revue ce qui concerne les usines qu'on projette de construire, soit dans la ligne des douanes, soit dans le voisinage des places de guerre ou des voies publiques. C'est dans cet ordre que nous allons en parler d'une manière rapide.

1 Cass., 22 février 1834 (Jacquay). 2 Cass., 20 octobre 1835 (Charrier). Cass., 13 mars 1829 (Derbez).

« PreviousContinue »